URNE: A feast on sorrow

Angleterre, Metal (Candlelight, 2023)

C’est en 2016 que nait le trio anglais Urne qui se fait les armes et propose, en 2021, son premier album Serpents & spirit. Ce dernier a dû marquer Joe Duplantier, guitariste et hurleur en chef de Gojira, qui a décidé de produire le second album des Anglais. Enfin, « produire »… Le gaillard est crédité à la production ainsi que, accompagné de Johann Meyer, à l’enregistrement, au mixage et à l’édition… A l’écoute de A feast on sorrow, on comprend vite ce qui a dû plaire au Français tant la démarche musicale de Urne est lourde, sombre et complexe. Complexe car le trio composé de Joe Nally (chant et basse), Angus Neyra (guitare) et James Cook (batterie) ne se laisse jamais aller à la facilité, que ce soit dans les morceaux les plus courts – hors l’instrumental Peace de 1’12 – qu’il s’agisse de l’oppressant titre d’ouverture The flood came rushing in (6’05 de rage et de fureur des éléments), ou Becoming the ocean, ou encore, surtout, de ces deux pièces à rallonge que sont A stumble of words (11′) et The long goodbye/Where do the memories go qui vient clore cet album en 11’15 de lourde, oppressante et hypnotisante mélancolie. La lecture du livret permet de plus encore comprendre la démarche du groupe, Joe Nally en tête expliquant en avant propos les origines de cet album qui est tout sauf optimiste et qui met en avant la puissance destructrice des océans lorsque ces derniers s’éveillent. Un album exutoire, en somme, qui lui permet de faire le point sur la maladie La production est riche et massive, mettant en avant autant les orchestrations et arrangements subtils – quelle superbe introduction au piano sur le morceau titre ! – que le chant gras, parfois proche d’une colère black metal de Joe Nally. Urne fait partie de ces formations sur lesquelles on parie volontiers qu’elles deviendront des incontournables de demain. A feast on sorrow en est la meilleures des cartes de visites à découvrir d’urgence si ce n’est déjà fait.

IHSHAN: Pharos

Norvège, expérimental (Candlelight, 2020)

Après un Telemark explorant les côtés plus sombres et violents, Ihsahn revient avec son pendant lumineux et calme. Pharos, tout comme Telemark propose 3 titres originaux et 2 reprises. Mais le chanteur prend ici un virage radical par une exploration soft et aérienne de sa musique. Même si le propos est sombre, la douceur d’une gravité presque mélancolique de Loosing altitude et ses touches symphoniques entraînent l’auditeur dans une exploration sonore reposante. Spectre at feast a quant à lui de belles intonations pop – qui expliquent sans doute le choix de reprendre Manhattan, skyline, des voisins suédois de A-ha, reprise teintée de claviers très 80’s qui se fond parfaitement dans l’ensemble. Le morceau titre, Pharos, s’inspire plus d’ambiances jazzy, tout en, comme l’évoque la peinture qui illustre ce disque, montant en puissance dans une lourdeur de plus en plus sombre. Roads, reprise de Portishead, offre une guitare sobre et un mélange orchestral de cordes pour un résultat sensible et écorché. En deux Ep, Ihsahn démontre comme il sait si bien le faire ne jamais être là où on pourrait l’attendre ou le souhaiter. Ombre et lumière, nuit et jour, black metal et soft rock, le Norvégien dévoile encore une fois sa sensibilité. Prenant.

WITCHSORROW: Hexenhammer

Doom, Royaume-Uni (Candlelight/Spinefarm, 2017) – Sortie le 25 mai 2018

Bien que formé en 2005, Hexenhammer n’est que le quatrième album des Anglais de Witchsorrow, le désespoir des sorcières… De désespoir il est bel et bien question tout au long des 7 morceaux de ce nouvel album, aussi lourd qu’une enclume dépressive. Le propos musical est sombre et fait ressortir toute la noirceur de l’âme de ses compositeurs (Demons of the mind) qui, pourtant, ont pris le temps qu’il faut pour penser cet album. Si, quand on parle doom, on pense avant tout à Black Sabbath, c’est principalement Candlemass et Cathedral qui se démarquent ici. Dès Maleficius, le cadre est posé: malaise ambiant, envie de lumière, épaisseur et lourdeur du son… Hexenhammer fait partie de ces albums à déconseiller aux dépressifs mais que les « sains d’esprits » s’approprieront avec bonheur.  Mieux qu’une marche funèbre, un accompagnement vers la nuit éternelle qui suit le bûcher.

WINTERFYLLETH: The hallowing of heirdom

Pagan/Folk, Royaume-Uni (Candlelight, 2018) – sortie le 18 avril 2018

Quelle grosse surprise que ce nouvel album des Anglais de Winterfylleth! A priori, je n’aurai pas chroniqué ce groupe qui nous a jusqu’ici habitués à des album rugueux, black et hurlés comme je n’aime pas… Seulement, comme d’autres, Winterfylleth sait surprendre et se remettre en question et propose aujourd’hui avec The hallowing of heirdom un album acoustique de folk pagan. Une introspection et une visitation de la nature. Pile au moment où je me dis « sortez les guitares et allumez un feu de joie », Embers débute avec ses crépitement de bûches qui se consument. La douceur de l’ensemble, des chants de The sheperd qui évoquent l’heroic fantasy du Seigneur des anneaux à la douceur des guitares de Frithgeard, Elder mother, A gleeman’s volt, jusqu’aux ambiances variées et jamais oppressantes du morceau titre, presque fleuve avec ses plus de 7 minutes, tout ici est une invitation au voyage, à l’introspection et à la communion avec la nature. Winterfylleth ne nous propose ni headbang ni excitation mais nous invite à la contemplation béate et pacifique. Une réussite.

BLACK MOTH: Anatomical Venus

Stoner, Royaume-uni (Candlelight, 2018)

Formé à Leeds en 2010, les Anglais de Black Moth nous proposent un troisième album lourd, envoûtant et sombre. Puisant son inspiration autant chez Black Sabbath dans ses aspects heavy que dans Mastodon pour la puissance de feu de sa section rythmique, Black Moth n’hésite jamais, sur Anatomical Venus, à varier les tempi et les plaisirs en s’offrant même quelques divagations psychédéliques. Ca sent légèrement la fumette… Le chant de Harriet Bevan peut être aussi sec que séduisant, les guitares de Nico Carew et Jim Swainston sont saturées en diable et la section rythmique tenue par Dave Vachon (basse) et Dom McReady (batterie) rappellent les plus furieuses heures d’un Black Sabbath ou, plus récemment, Red Fang. Sisters of the stone, hypnotique, fait mouche dès la première écoute et m’impressionne. M’ensemble, d’ailleurs… Rien n’a ici été laissé au hasard, et chaque morceau fait son petit effet. Inconnu jusqu’àlors à mes oreilles, Black Moth est une des grosses surprises de ce début d’année.