France, Metal (M&O, 2023)
Avec sa pochette très SF, son logo, bref, son visuel très attirant, pas étonnant que je glisse ce Blindsight de Stormhaven dans mon lecteur CD (eh, oui… Il y en a encore…) Mais dès les premiers hurlements enragés de Fracture, le morceau qui introduit cet album (car il s’agit bien d’un album malgré ses seulement 6 titres), je fais demi tour. Cependant, quelque chose me retient… Et rapidement, Stormahaven me surprend. Par la diversité des instrumentations qui composent ce premier titre, par la variété des styles musicaux explorés, aussi. Le death ou le black ne sont jamais loin, certes, mais le groupe démontre rapidement naviguer avec bonheur non pas en eaux troubles mais d’univers en univers variés (certains passages m’évoquent même Rush!) Le brutal frôle souvent le power metal, voire le progressif – ah, tiens, je viens d’en citer un des maitres…). Le prog n’est pas du tout une évidence avec le premier titre, Fracture, remarque qui fait rire Zach (guitare et chant): « en effet, oui! Il faut s’accrocher! Ce que je voulais pour cet album, c’est quelque chose qu’on n’avait pas fait avant: pas d’intro, une explosion et c’est direct dans la gueule. On voulait mélanger ça avec quelque chose de plus énervé que ce qu’on avait fait jusque là, avec des morceaux plus longs, développer des histoires avec le chant tout au long de l’album. L’album précédent, Liquid imagery, je l’avais plus pensé comme un long morceau d’une heure. Là, même si j’ai voulu une cohérence dans l’ordre des titres, chacun peut être pris séparément et tient la route seul« . Le groupe toulousain formé en 2010 pourrait franchir un pas supplémentaire avec ce quatrième album varié et entrainant. Jamais avare de démonstration (dans le bon sens du terme, svp), ce disque est empli de ces petites trouvailles qui font la différence. La période de crise sanitaire a-t-elle d’ailleurs eu un impact sur le groupe qui n’a pu correctement défendre Liquid imagery, sorti en 2019? « Pas vraiment, je n’attends pas de défendre un album sur scène pour continuer de composer. Blindsight était prêt assez rapidement après Liquid imagery. Mais on ne savait pas trop si on attendait ou pas pour le sortir. Personne ne savait ce qui allait se passer. On a décidé d’avancer, de passer à autre chose. On avance et on vise un peu plus haut en matière de production, de com et de promotion. » Le titre de l’album, Blindsight (aveuglement) fait-il référence à ce manque de vision que nous a offert la crise sanitaire ou est-ce autre chose? « Il se trouve qu’on peut faire pas mal de parallèles, mais ce n’était pas pensé ainsi. L’idée c’est qu’on suit un personnage qui a subi un accident, un évènement marquant assez violent – d’où le premier titre, Fracture. Ensuite, il perd la vue et il développe des pouvoirs un peu plus mystique de clairvoyance et autres. On ne sait pas trop s’il voyage mentalement ou physiquement, il rencontre des personnes… On suit ce voyage tout au long de ‘album« . Bref, une approche conceptuelle qui se rapproche de l’esprit prog. Quand on lui demande comment le groupe a évolué entre ses deux derniers albums, Zach répond d’un « Ouh la!… je dirai que j’assume sans doute plus mon approche rock prog, qui est, pour moi, l’influence majeure que je revendique et que je ne mettais pas autant en avant que je l’aurai voulu. Et d’un point de vue humain, il y a eu un changement de line-up avec l’arrivée d’un nouveau batteur et d’un nouveau claviers, donc un changement d’équilibre, une organisation différente à trouver. Comme je le disais, on se concentre plus sur la promo, la communication, alors qu’à la base on est une bande de mecs qui aiment jouer de la musique ». Zach approuve entièrement le terme de professionnalisation que je lui propose en résumé de ses propos. « On s’est posé la question, au bout de 4 albums: on veut faire quoi? On reste comme ça ou on évolue? Si on veut évoluer, il y a plein d’autres choses à côté qu’il faut faire« . Un groupe qui a donc simplement mûri. Tout au long des titres, longs – tous tournent autour des 7’30, exception faite de Dominion qui culmine à 24′! – on trouve les inspirations aussi brutales que progressives du groupe. Je lui cite le nom de Rush… Mais il y a plus que de la brutalité et de la technique dans ce disque, bien plus. Si Zach devait ne choisir qu’un seul titre de Blindsight pour expliquer ce qu’est aujourd’hui Stormhaven, lequel retiendrait-il pour inciter quelqu’un à écouter le reste? « Bonne question… Sur ce nouvel album, je choisirai Hellion, un morceau qui permettrait sans doute de toucher un public plus large. On n’a pas l’effet coup de massue qu’il y a avec Fracture. D’ailleurs, il y a un clip qui sort dans quelque semaines. Hellion a une approche moins death, plus prog avec plus de chant clair, plus de place pour les claviers aussi. » Je lui cite le nom de Rush que certains passages de ce même titre m’évoquent. Ils font partie des inspirations de Stormhaven? « Ah, oui! A 100%! Même si on a l’étiquette de metal prog, mon inspiration vient plus du rock progressif que du metal. Du Rush, Kansas, Deep Purple… le tout mélangé à des touches de death » Sera-ce cependant une approche suffisante pour extraire Stormhaven de la masse? Un groupe de rock, c’est aussi la scène, alors, quoi de prévu? « On a pas mal de dates qui sont prévues, principalement dans le sud, en fin d’année et en 2024 on devrait aller en Espagne et dans le nord de la France, là où on n’a pas encore beaucoup joué. Et on vise aussi les festivals d’été… » C’est sans doute en effet là que le groupe pourra le mieux se faire connaitre, aller au contact de son public et faire connaitre son death prog, alors attendons de voir les dates que Stormahaven affichera bientôt sur son site et ses réseaux sociaux.