Interview DEATH DECLINE

Interview Death Decline. Entretien avec Fab (guitare) le 25 octobre 2024

Nous allons parler de votre nouvel album, Patterns of an imminent collapse. Mais d’abord, commençons avec ceci pour les observateurs : il s’agit de votre quatrième album – sortis en 2015, 2018, 2021 et cette année. Un album tous les 3 ans donc. C’est un rythme que vous vous êtes donné ?

Ouais, exactement (rires) ! Non, pas du tout, c’est surtout lié au rythme auquel on parvient à produire les albums, le temps qu’il nous faut pour composer assez de titres. C’est le rythme qu’on arrive à assurer plutôt qu’un « plan ». Toujours est-il qu’on essaye d’être régulièrement présent et d’avoir toujours quelque chose à proposer, de ne pas se faire oublier trop longtemps de manière à rester dans la tête des gens…

Trois ans, même si c’est un peu long, ça reste un rythme qui permet aux gens de savoir quand attendre de la nouveauté…

Après, comme tu le dis, nos quatre albums sont sortis avec ce délai, mais ce n’est pas quelque chose à quoi on tient particulièrement. Peut-être que vous aurez des surprises à l’avenir…

Que peux-tu nous dire au sujet de ce nouvel album pour nous convaincre d’aller l’acheter ?

Si tu aimes le thrash moderne avec une pointe de death metal, avec un son bien catchy et puissant… Eh bien, écoutes : cet album peut te plaire… Ça décrit un peu cet album.

C’est vrai que vous êtes dans une veine thrash très costaud, plus proche même du death. Tu aurais d’autres termes à utiliser pour décrire votre musique à quelqu’un qui ne vous connait pas ? Quand j’écoute cet album, ce n’est pas que du « bourrinage », il y a des aspects un peu plus… « mélodiques » …

Tu peux le dire, on a toujours incorporé dans nos albums des éléments qui peuvent être taxés de « mélodiques ». En soit, ce n’est pas une insulte. On tient toujours à amener ce côté, ça fait partie du son de Death Decline d’apporter des riffs mélodiques et des passages plus cools. Le but, ça n’a jamais été de proposer des albums qui bourrinent du début à la fin… Ce ne sera jamais dans l’optique du groupe, et comme tu le dis, il y a encore sur cet album pas mal de passages mélodiques qui alimentent des moments plus durs, pour les mettre aux standards de Death Decline.

Comment analyses-tu l’évolution de Death Decline entre A silent path, votre album précédent, et Patterns of an imminent collapse ?

Entre les deux, je pense que nous avons une évolution assez constante et logique. On ne force pas les choses, ça se passe assez inconsciemment. On a du mal à analyser les choses de manière plus techniques, on compose comme on le sent, pas en pensant à un moule ou un style musical en particulier. A partir du moment où on aime bien un riff, on compose un morceau à partir de ce riff. Ça amène des palettes vocales différentes, en fonction des morceaux et des sujets qu’on traite. C’est quelque chose d’assez naturel… Au niveau sonore, aussi, on a encore évolué un peu. C’est vrai que l’album peut paraitre plus direct et en même temps plus mélodique… En tout cas, on est totalement satisfait de l’évolution du groupe et de ce nouvel album.

Il y a un certain équilibre puisque le groupe n’a pas changé de line up ces trois dernières années. En revanche, The silent path est sorti en pleine crise sanitaire qui peut avoir eu un impact. Cette dernière a-t-elle eu un impact sur votre façon de faire ?

Je ne pense pas, pas dans les titres qu’on compose… Je pense plus dans notre méthode de travail et de composition : on avait dû s’adapter à l’époque et on a conserver certaines façons de faire. On s’est rendu compte qu’il y avait des choses qu’on avait mises en place pour The silent path qui fonctionnait plutôt pas mal – entre autres le fait de travailler les préproductions chez nous, bien avant l’album, chose qu’on ne faisait pas sur les deux premiers albums. On s’est un peu formés sur le sujet, on a investi dans du matériel pour faire des préprods chez nous et ça nous apporte quelque chose qu’on n’avait pas avant : une idée plus précise de comment el morceau va sonner avant d’entrer en studio.

Quels sont les sujets dont vous traitez ? Un titre comme celui de cet album (Les signes d’une chute imminente) c’est très positif, très enthousiasmant comme notion…

(Rires) Ben, écoute, j’ai envie de te dire qu’on ne fait pas du funk non plus (rires) ! Les sujets qu’on abordent ? Globalement les comportements humains, dans leurs mauvais côtés… Ça peut être au niveau social, écologique, des sentiments… On brosse un portrait qui peut paraitre pessimiste, nous, on a plutôt l’impression qu’il est réaliste. Comme je sais qu’Alexis, au chant, a tendance à écrire des paroles pour quelles soient libres d’interprétation pour l’auditeur. Il va composer se paroles d’une manière ouverte à l’interprétation.

Y a-t-il des thèmes qui selon toi, selon le groupe, n’ont absolument pas leur place dans Death Decline ?

Je pense que pour traiter d’un sujet il faut déjà qu’on soit tous à peu près raccord pour le traiter. On est plutôt ouverts à parler de tout, il n’y a pas de tabou. Je n’ai pas un sujet en tête qu’on n’évoquerait pas… On n’évoquera pas frontalement la politique. On n’est pas apolitique mais on ne donnera pas notre avis, ce n’est pas la vocation du groupe. Ce n’est pas le propos du groupe de partager des opinions politiques.

On parle de la pochette un peu ?

Oui…

Je pense que personne n’a dû vous le dire, mais elle m’évoque un peu celle de Quadra de Sepultura, surtout le verso qui représente un crane. Il y avait une volonté de faire un clin d’œil à Sepultura ?

Alors, vu que Sepultura a annoncé sa fin de carrière après ce dernier album, c’était purement volontaire pour prendre leur place sur la scène internationale (rires) !

L’ambition est là, claire et précise !

Tu parles au futur Andreas Kisser (rires !) Non, non, pas du tout ! On a déjà dit à Alexis, notre chanteur, qu’il ressemble à Max Cavalera, ça reste raccord ! Plus sérieusement, on reste clients et fans de Sepultura mais on n’a pas pensé à cet album au moment de faire faire l’artwork par Stan W. Decker, qui s’occupe de nos pochettes depuis le premier album. L’idée, c’était d’avoir quelque chose de thématique, une sorte d’écusson, une plaque de marbre… Quelque chose de frontal, un emblème… On n’avait pas, au départ, évoqué la pièce de monnaie mais ça rentrait dans les codes. Quand Stan nous a proposé cet artwork, on l’a trouvé tellement efficace qu’on est resté dessus, on n’a pas changé. On se doutait bien que le rapport avec Sepultura se ferait mais il n’y avait pas une volonté de s’influencer d’eux…

Surtout que le personnage que l’on voit de profil est identique à celui de The silent path – j en’ai pas les autres pochettes sous les yeux. C’est une sorte de mascotte ce personnage cornu ?

Oui, si tu regardes les deux premiers albums, tu verras qu’il est également présent, de façon plus humaine, plus… distinct. Sur The silent path, il est plus comme une statue, une divinité qui s’élèverait au-dessus des hommes. C’est un peu une mascotte et c’est une volonté de notre part de conserver ce personnage avec des cornes qui peut apparaitre sous plusieurs formes. C’est quelque chose d’assez classique sur la scène metal que d’avoir un personnage récurent qui apporte une identité visuelle.

Au verso, à la place du cou, il y a une sorte de mappe monde qui est, j’imagine, en lien avec le titre de l’album…

Euh, ouais… alors là, si tu veux… On a donné toute notre confiance à Stan qui a travaillé de concert avec Alexis pour créer toute une identité visuelle qui comme vraiment aux sujets abordés.

Si tu devais ne retenir qu’un titre de ce nouvel album pour expliquer aux gens ce qu’est aujourd’hui Death Decline, ce serait lequel ?

Elle n’est pas facile, ta question, parce que l’album a été composé pour que chaque morceau soit complémentaire, du coup, chaque morceau apporte quelque chose au spectre sonore de Death Decline et de cet album… C’est vrai que ce n’est pas une question facile…

Tu as 5’ pour me convaincre d’écouter le reste de l’album…

(Rires) Alors, sur Towards void and oblivion tu trouves beaucoup d’éléments qu’on aime développer : de la mélodie, des changements de rythmes, d’ambiances, des riffs thrashy bien rentre dedans… C’est un morceau qui est catchy, brutal, en même temps mélodique et incisif. Je pense qu’il représente plutôt bien ce qu’on est capables de faire… Sinon, tu as aussi un morceau comme…

Non, non ! Je n’en ai demandé qu’un ! Ne cherchez pas à négocier, Monsieur, ça ne marche pas ici !

(Rires) Alors Towards fera l’affaire !

Quels sont les 5 albums que tu as le plus « bouffés », usés jusqu’à la corde dans ta vie ?

Il y aura, concrètement, en premier lieu Ride the lightning de Metallica – ça reste mon album fétiche tous groupes confondus – Il y a aussi Bonded by blood d’Exodus…

On est dans les origines du thrash…

Ouais, exactement. Je suis plutôt fan de thrash, on va dire que c’est moi, le « parrain thrash » du groupe… Ensuite, il y a Defenders of the faith de Judas Priest. Après, qu’est-ce qu’il pourrait y avoir ? Le premier Led Zeppelin ? Oui, carrément… Il y a aussi… Leprosy de Death, et sans doute Killers d’Iron Maiden que j’ai énormément écouté étant jeune…

Ça en fait six…

Ouais, ben… tu choisiras (rires) !

Monsieur est dans la négociation aujourd’hui ! On le sait, un groupe de rock en France, d’autant moins de metal et encore moins dans votre style, ne vit pas de sa musique, ou très rarement. Quelles sont vos autres activités dans vos autres vies ?

Moi, je suis électricien du bâtiment, Alexis est chef cuistot, il tient une cave à bières et une taverne rock/metal sur Châlons sur Saône. Alex, à la basse, est mécanicien de formation, Jordan, à la guitare, est informaticien, et Arnaud, notre batteur, est pour l’instant ouvrier viticole.

Vous avez des concerts prévus pour les mois à venir ?

Là, on a pas mal enchainé… On était le week end dernier à Martigues pour une super date, on a fait la Vapeur à Dijon, le Ferrailleur à Nantes pour la release party… On bosse d’arrache-pied pour composer une tournée digne de ce nom pour 2025… Vous allez pouvoir nous voir aux quatre coins de la France en 2025 !

Il n’y a pas que les coins, en France, il y a tout l’intérieur ! Moi, je suis carrément dans le Centre…

Tu veux qu’on joue où, du coup ?

Je suis à Orléans.

Ça fait partie des villes qu’on essaye de faire depuis un moment. Ça devrait se faire…

Pour terminer, si tu devais penser à une devise pour Death Decline, ce serait quoi ?

Je ne sais pas… C’est peut-être classique mais je dirai « Strike hard, strike fast »

Interview: THE DAWN RAZOR

Interview The Dawn Razor. Entretien avec Sylvain Spanu, le 27 septembre 2024

C’est la première fois que nous échangeons, Sylvain, alors peux-tu commencer par me présenter l’histoire de The Dawn Razor ?

Bien sûr : The Dawn Razor, c’est un projet solo que j’ai créé en 2016. La musique est une espèce de death/black avec quelques influences de musique classique. Le premier album, Renaissance, est paru en 2018, et aujourd’hui parait In sublime presence, disponible sur toutes les plates-formes

Pourquoi un projet solo ?

Juste avant, j’étais dans un autre groupe, dans le même style de metal. C’était très bien sauf que les compositions se faisaient à plusieurs et c’est très compliqué de terminer les morceaux en mettant tout le monde d’accord. A la fin, personne n’était content parce que tout le monde avait fait des compromis et personne ne pouvait aller au bout de ses idées. C’était dommage, mais au bout d’un moment, j’ai décidé de partir parce que j’avais les idées claires de ce que je voulais écrire en musique.

En d’autres termes, tu es le dictateur en chef de ton propre projet…

(rires) Ah, oui, là il n’y a pas de problème. Je suis totalement libre de ce que je fais, je dois simplement tout composer et m’occuper de tout. Ça prend simplement plus de temps, mais c’est ce que j’ai choisi.

Dans la bio, il est écrit que tu es « inspiré par les peintures du mouvement sublime de l’époque romantique » (il confirme). Peux-tu nous en dire un peu plus parce que c’est un mouvement qui ne me parle pas du tout…

Déjà, « sublime » n’est pas quelque chose de très beau, ce n’est pas dans ce sens qu’il faut comprendre le terme. Ce qui est sublime, comme les peintres et les poètes l’utilisaient à l’époque, c’est à la fois quelque chose qui fiat peur et qui rend admiratif, des choses que l’humain ne peut pas contrôler, comme les montagnes, la jungle, la traversée de l’océan en solitaire… Ce sont des éléments sur lesquels nous n’avons aucun contrôle. On a du respect et de l’admiration pour eux. Le « sublime » c’est donc à la fois ce sentiment de respect, de peur et d’admiration, le tout mélé.

En quoi ça se traduit dans ta musique ?

En fait, que ce soit sur le premier ou le deuxième album, chaque chanson que j’ai écrite, je l’ai considérée comme un tableau qui représente un thème sublime. Je parlais de l’océan, le premier single, Point Nemo, parle de la traversée en solitaire de l’océan par un navigateur qui passe par le point Némo, un endroit au milieu de nulle part, perdu dans le Pacifique sud… On le suit donc à travers les tempêtes, ses remises en question…

Quels sont les autres tableaux qui t’ont inspiré ?

Il y a la renaissance italienne, avec ce morceau Chiraoscuro italiano qui parle de cette période riche artistiquement et en même très troublée puisqu’il y avait beaucoup de guerres en Italie, des assassinats entre princes, des choses pas très reluisantes… C’est une chanson qui met vraiment en contraste ces deux aspects de cette époque.

Comment décrirais-tu ta musique pour quelqu’un qui ne connait pas The Dawn Razor ?

Je dirais qu’il y a des influences death/black – les groupes qui m’ont inspiré comme Dimmu Borgir, Children Of Bodom ou Gojira – et une musique toute en contraste, aussi bien au niveau de la rythmique que du chant ou la guitare. Il y a des parties que je veux rendre très lumineuses en contre partie de passage très sombres et violents.

Le coté black, on le ressent un peu dans le chant, mais ce n’est pas non plus un chant extrême de… comment dire ? de « cochon qu’on égorge ».

(Rires) Je vois ce que tu veux dire !

Il y a une certaine forme de… finesse, presque. Il y a différentes ambiances, puissantes… Qu’as-tu voulu mettre dans ta musique ?

C’est vrai qu’au niveau du chant, par rapport à l’album d’avant, j’ai testé d’autres choses. Il y a un peu plus de variété, avec certains passages où je crie un peu différemment – c’était d’ailleurs très drôle à faire à l’enregistrement – et un peu plus de parties chantées. J’ai testé des effets d’harmonies à la voix, des superpositions, des échos… Histoire de ne pas faire, comme tu dis, que du cri, un peu simple, un peu bête.

On est d’accord, il n’y a que toi qui joue sur les deux albums ?

Oui.

Alors comment analyses-tu ton évolution musicale entre Renaissances de 2018 et ce nouvel album, In sublime presence ?

Au niveau du chant, il y a ces variations dont on vient de parler. Renaissance était sans doute in peu plus brutal que In sublime presence. Il y avait pas mal de passages avec des blasts, des parties bien denses et sombres. In sublime presence est, je dirais, un peu plus aéré, un peu plus respirable. Et j’ai fait attention à ne pas toujours respecter la structure classique des morceaux, couplet/refrain.  J’ai voulu tester d’autres choses, j’ai évité de faire des copier/coller de riffs, de rajouter des variations, des subtilités, que ce soit à la batterie, au chant, à la guitare… C’est ce travail que je pense avoir ajouté en plus.

Et d’un point de vue personnel, elle se traduirait comment, ton évolution ?

Euh… J’essaie de ne pas me répéter, d’explorer d’autres choses. Il y a des riffs que j’ai déjà entendus quelque part, j’essaie de les faire différemment… Je n’ai pas mis de barrière spéciale, me disant que « non, c’est pas dans le style ». J’ai tenté d’autres choses…

Quelle est la signification du nom de ton… Projet ? The Dawn Razor, le « rasoir de l’aube », ça m’évoque Jack l’éventreur. Or, il n’assassinait pas que le matin…

Ah, ah, ah ! Je n’avais pas du tout pensé à ça du tout ! Ça évoque en fait la ligne d’horizon au moment du lever du soleil. Il n’y avait pas d’idée de meurtre du tout. Je trouvais que l’image de cette lumière, qui fait un contraste, collait bien à l’image que je veux avoir dans mes morceaux, le contraste entre parties très sombres et très lumineuse…

D’où le lien avec la pochette de l’album qui représente une montagne au lever du jour.

Tout à fait.

Donc rien à voir avec Jack l’éventreur…

Pas du tout, mais je vais m’y pencher pour voir si on peut creuser cette idée !

Il y a 14 titres sur l’album…

En fait, il y en a 10, le reste, ce sera des bonus.

Et ces bonus, ce sont des covers de Children Of Bodom, de Dimmu Borgir, de Samourai, aussi. Pourquoi avoir retenu ces morceaux – on connait sans doute plus les deux premiers que Samourai, d’ailleurs…

Déjà, je suis très fan des deux premiers qui sont de très grosses influences. Donc c’était un vrai plaisir de les reprendre, et j’espère que ça va donner des indices sur l’univers musical que j’ai créé. Pour Samourai… la musique est celle d’un groupe fictif d’un jeu vidéo, Cyber crime 2677, un jeu dont j’adore les personnages et l’histoire, et j’ai simplement eu envie de faire une cover de cet univers que j’ai adoré.

Parmi les autres titres -ceux-là ne sont pas de toi – si tu devais n’en retenir qu’un seul pour expliquer ce qu’est aujourd’hui The Dawn Razor, ce serait lequel ?

Je parierai sur Chiraoscuro italiano.  Parce que dès le début, on voit tous les contrastes dont j’ai parlé : dès le début, il y a un riff à la fois violent et harmonique qui s’enchaine avec un solo que j’aime beaucoup, sur lequel je me casse encore les doigts, d’ailleurs (rires) ! On enchaine ensuite avec la partie violente et la batterie. En très peu de temps, on a un aspect, une vision de ce que j’aime faire et qui va se développer par la suite.

Un projet rock, qui plus est metal, c’est aussi la scène (il confirme). Tout seul, ça parait un peu compliqué. As-tu pour projet de présenter ton album au public, sur scène ?

Oui, bien sûr. Je suis en train d’organiser ça, justement. J’ai déjà trouvé un bassiste et un batteur. Je suis en train de recruter le guitariste et on va pouvoir préparer des concerts, un pour la fin de cette année, un autre pour le début de l’année prochaine. Je confirmerai tout ça sur les réseaux.

Il y a donc aussi un projet de transformer ton projet en groupe ?

Oui. Déjà pour Renaissance, on avait tourné en France, en Belgique, en Suisse. Des moments très sympas.

Si tu devais maintenant penser à une devise pour ton projet, ce serait quoi ?

Comme un slogan de campagne politique (rires) ?

Non, c’est d’actualité, mais quelque chose qui représente The Dawn Razor…

Guitare metal en premier. J’aime le reste aussi, mais la raison pour laquelle je fais ça, c’est pour pouvoir faire de belles parties de guitare, en premier.

On sait tous qu’un groupe de rock ce n’est pas ce qui permet de mettre du beurre dans les épinards. As-tu une autre activité professionnelle ?

Bien sûr ! Je travaille dans l’informatique, je crée des applications, des sites web, des programmes.

Quels sont les 5 albums que tu as le plus écoutés dans ta vie ?

Bien sûr, d’ailleurs, je vais faire un article là-dessus sur mon site dans quelques temps. J’en ai fait un sur mes guitaristes préférés, il y en a un sur mes albums préférés bientôt… Je dirai : Dimmu Borgir, Puritanicaleuphoric misanthropia, Children Of Bodom, Hate crew deathroll, ensuite Train of thought de Dream Theater, From Mars to Sirus de Gojira et en cinquième… un live de Hypocrisy, celui qu’ils jouent en Bulgarie, Hell over Sofia.

DEATH DECLINE: Patterns of an imminent collapse

France, Death metal (Autoproduction, 2024)

Pourquoi changer une formule qui marche, hein? La brutalité des Français de Death Decline est toujours de mise sur leur quatrième album, Patterns of an imminent collapse – tout un programme… Alors, OK, ce n’est pas du tout mon style de prédilection mais il nous faut bien reconnaitre une chose: c’est que, tout aussi brutal et direct puisse-t-il être, Death Decline (permettez que nous les nommions affectueusement DD) sait aussi proposer une variété sonore qui donne à sa musique plus de couleurs que la simple violence recherchée. Au contraire, le groupe a bien compris l’importance d’explorer divers horizons, tant dans sa musique qui sait se faire plus… mélodieuse et se rapproche même parfois d’un esprit progressif, notamment sur Towards void and oblivion, sans doute la pièce maitresse de cet album qui, avec ses plus de 8’30, peint plusieurs tableaux dans un seul cadre. Même le « chant » se diversifie et, s’il est majoritairement rageur, puissant et hurlé, on trouve ci et là des passages plus tendres et clairs, parfois aussi graves et profonds. Patterns of an imminent collapse est un album direct et dans ta face, sans concession qui sait interpeller quand il faut. Pas mon genre, certes, mais bigrement efficace!

Séance de rattrapage: POSEYDON- Through the gate of hatred and aversion

Belgique, Thrash/Death (Necktwister, 2023)

Avec Poseydon, le label Necktwister porte parfaitement bien son nom. Formé en Belgique en 1992 par le guitariste Alan De Block, Poseydon connait plusieurs changements de line-up avant de proposer son premier album en 2016. il faudra cependant pas moins de 7 ans à Alan pour donner un successeur à Masterpiece. Aujourd’hui composé du hurleur enragé Tom Lenaerts, d’un second guitariste – Leander Karageorgos – et d’une section rythmique plus que massive – le bassiste Jeroen Bonne et le marteleur furieux Jef Boons – Poseydon délivre un Through the gate of hatred and aversion qui replonge l’auditeur dans les plus brutales heures du thrash qui déboite. Et là, pensez à mettre la sécurité à votre matériel de découpe parce que ça charcute sévère! Après une intro inquiétante – qui pourrait évoquer l’ambiance du film d’épouvante Fog (Carpenter)- Poseydon entre dans le vif du sujet avec un Awakening the gods explosif. Les guitares sont aussi ravageuses que le chant est puissant et enragé. Malin, Poseydon, s’il ne met jamais le pied sur le frein, propose des rythmes variés permettant de ne pas sombrer dans une forme de répétition stérile. Au contraire, le groupe tape fort et explore divers horizons. impossible de ne pas penser à ces riff d’un jeune Metallica furibard, à la puissance d’exécution sans pitié d’un Slayer naissant, à la rage tribale d’un Sepultura qui n’a pas encore conquis le monde… Loin de ne se cantonner qu’au thrash, le groupe explore également le death, évoquant aussi bien Deicide que Death Angel ou même Nuclear Assault. Rien, absolument rien dans ces 10 titres ne laisse indifférent. C’est (très) brutal et construit comme une véritable machine de guerre. Si Through the gate of hatred and aversion n’est pas à mettre entre toutes les oreilles, ça fait mal par où ça passe. Et ça, ben… ça fait un bien fou!

CATALYST: The age of rocketeers

Belgique, Death progressif (Autoproduction, 2023i

Un enfant qui joue sur une terre asséchée une « fusée » douteuse à la main, des cheminées qui fument au loin et des missiles qui décollent… Le cadre d’un constat quelque peu morbide de notre société est posé dès l’illustration de The age of rocketeers, le premier album des Belges de Catalyst. Formé en 2018 par deux ex-membres de Gitaron – les guitaristes Philip Pedraza et Aäron Onghena – Catalyst a complété son line-up avec l’intégration du frère d’Aäron, Benjamin Onghena à la basse et la « découverte » du chanteur Jeroen Van Ranst, issu de Monomad. Ce n’est qu’après l’enregistrement de deux Ep, en 2018 et en 2022, que le groupe intègre Sam Bogaert à la batterie et enregistre The age of rocketeers paru fin 2023. Les 9 titres proposés sont à la fois rugueux et mélodiques. Le chant de Jeroen est varié, passant de la douceur à la rage et la colère, et l’ensemble musical propose une palette de couleurs tout aussi variée. Les riffs concoctés par la paire de bretteurs incitent à se démonter les cervicales tout en réservant des moments de respiration, sorte de lueurs d’espoirs dans ce monde en perpétuelle destruction. Un album puissant et racé, en somme.

Interview: TEMPT FATE

Interview TEMPT FATE. Entretien avec Pierre-Louis le 29 novembre 2023.

Le dernier album de Tempt Fate est sorti il y a déjà quelques temps… Pourquoi n’en assurer la promo que maintenant ?

Oui, il est sorti en septembre sur le label Almost Famous. La promo a un peu commencé avant, mais surtout, on a un peu trainé et pris du retard sur l’enregistrement, et le mix et la suite ont été décalé, comme le reste du planning qu’on avait prévu. On a reçu les CD tardivement, fin aout. On avait prévu la release lors du festival Metal on the beach qu’on organise. Ensuite, il a fallu qu’on s’organise avec Roger (Wessier, WTPI) qui a pu distribuer les CD et organiser les interviews. On a quand même eu pas mal de chroniques entre septembre et octobre, et ça continue. Là je suis à Paris pour la promo, où on joue demain, donc on a profité de faire d’une pierre deux coups.

De mon côté, je découvre Tempt Fate avec ce nouvel album, Holy deformity. Je crois savoir qu’un premier album était sorti en 2018, Human trap. Cependant, peux-tu nous raconter l’histoire du groupe ?

Ça va faire 10 ans en 2024 que le groupe existe. On a sorti un Ep en 2014/2015, quelques morceaux, mais entre temps, on a pris d’autres chemins. Ce n’était pas tout à fait la même musique qu’on proposait, c’était du blast mais pas vraiment ce qu’on voulait faire. Il y a eu l’album, puis un autre Ep, Hold on, en 2021. On a sorti quelques singles aussi et Holy deformity en 2023. Le line up a aussi un peu bougé entre 2018 et 2023. Il reste trois membres d’origine : j’ai monté le groupe avec le batteur, Quentin, et Simon, le chanteur.  Le line up actuel existe depuis environ 4 ou 5 ans. Avant le Covid.

Comment décrirais-tu la musique de Tempt Fate pour inciter quelqu’un qui ne vous connait pas à vous écouter ?

Alors… ça dépend : si cette personne est déjà branchée un peu metal, il y a quelques codes qui vont lui parler. Si c’est quelqu’un qui ne connait rien au metal, il y aura un peu plus de travail (rires). Pour quelqu’un d’un peu initié, c’est du death metal avec différentes teintes par morceaux. Ça navigue entre le brutal – dans le sens où il y a des tempos très élevés, ça blaste beaucoup – et les côtés plus mélodiques. On essaie de proposer une recette qui est la nôtre, piochée dans nos influences…

Comment tu la décrirais cette recette, justement ? Mets moi en appétit !

Ah, ah ! Comment je la décrirais ? Que je te mette en appétit ? Alors, je vais venir sur les basiques primordiaux de la vie : tu vois un beau feu de cheminée, un bon verre de rouge – mais, tu n’en bois pas trop quand même parce qu’après tu vas devoir boire de l’eau ! – et à la fin tu ajoutes un peu de sucré pour faire glisser le tout…

Alors, le sucré, je ne l’entends pas trop dans votre musique… Je ne suis pas le plus grand amateur de metal extrême et de death, et c’est vrai que quand j’ai écouté l’album, c’est… « c’est du brutal », comme diraient les Tontons flingueurs…

Ah oui ? Pour moi, le sucré, c’est peut-être mon côté nostalgique, un peu ténébreux qui me fait dire ça… On n’est pas des méchants. Et comme je sais ce qu’on a écrit, je me dis « oui, bon quand même, c’est pas si violent ! » Pour me rassurer, quoi (rires) !

Quelles sont selon toi, en dehors des changements de line-up, les évolutions principales de Tempt Fate entre vos deux albums ?

Tout (rires) ! Tout dans le sens où le premier album, je l’ai majoritairement écrit seul. Il y a des parties qui ont été réarrangées et réécrites, mais à 80/90%, je l’ai écrit seul. Ça entraine pas mal de faiblesses dans la composition, et j’ai appris plein de choses depuis. Cet album, au-delà de la qualité du son, était assez à mon goût. Il y avait un manque de cohérence entre les morceaux, des breaks pas forcément bien amenés…. Ce sont des éléments dont on a tenu compte, même si on aime les choses déstructurées, mais il faut savoir les amener musicalement. On a voulu mettre plus de liant dans le nouvel album qui, selon moi, est beaucoup plus mélodieux, avec plus de riffing et un travail beaucoup plus aboutit en termes d’harmonies. Ça, on le doit clairement à Jean-Philippe qui est arrivé dans le groupe avec un niveau de guitare qui dépasse très largement le mien. Il est arrivé avec beaucoup d’idées, on a appris à travailler ensemble et le résultat est là. Comment structurer tout ça pour aller à l’essentiel. Après, il y a eu tout le travail sur le son pour avoir un album qui se tienne. Qu’on aime ou pas, le son est bon, le produit est fini, on ne se pose pas de questions : ça sonne ! on a enregistré les cordes à la maison – c’est moi qui m’en suis occupé – la batterie a été enregistrée chez Nicolas Constant qui a un studio ici dans le Tarn, et le tout a été mixé et masterisé chez Thibault Bernard qui a fait un super boulot. Il connait bien ce genre de musique et je savais qu’il serait en mesure de nous proposer quelque chose qui marche bien. C’est assez conventionnel, peut-être, il n’y a pas beaucoup de prises de risques sur le son, mais on ne voulait pas se rater sur certains niveaux pour proposer un produit fini, carré et qui soit cohérent, avec un côté un peu plus sérieux.

Il y a donc 2 évolutions principales, l’une dans le travail plus collaboratif, l’autre dans une professionnalisation notamment au niveau du son…

Absolument !

Maintenant, si tu devais ne retenir qu’un seul titre de Holy deformity pour expliquer ce qu’est Tempt Fate aujourd’hui, lequel serait-ce ? Celui qui est le plus représentatif de ce que vous êtes aujourd’hui.

Oh là, c’est chaud ! Pas forcément celui que j’aime le plus, donc… Déjà ça c’est difficile… Le plus représentatif ?

Un titre que tu ferais écouter à quelqu’un pour l’inciter à écouter le reste de l’album, en lui disant : « voilà, ça, c’est notre identité musicale ».

OK… Donne-moi deux secondes… Alors, celui-là est un peu différend des autres mais il nous représente bien : je dirais Filth of life. Il y a une espèce de mosh part, il casse des dents, il est bien structuré et il est assez brutal. Pour autant, je ne pense pas que tout l’album soit à cette image, alors je dirais peut-être plus le morceau du clip, God ends here. Il y a peut-être un peu plus de mélodie, c’est entre le death et ça tire un peu vers le black. Oui, c’est celui-là qui représente plus l’album, c’est pour ça que c’est celui qu’on a choisi pour le clip…

Il y a une forme de logique, en effet… Si tu devais penser à une devise pour Tempt Fate, ce serait quoi ?

Une devise ? « Il faut toujours suivre le plan » ! S’il y a un plan, ce n’est pas pour rien, ça évite de s’embrouiller. Que ce soit pour le rangement du camion ou pour le reste… C’est devenu une devise entre nous, si on a un plan, c’est pas pour faire n’importe quoi ! Je peux être obsessionnel, mais j’ai mes limites ! Quand on est 5, avec 5 caractères très différents, au bout d’un moment, il faut qu’on soit raccord sur des trucs, sinon on ne s’en sort pas (rires) !

Vous êtes 5 personnalités complètement différentes… C’est une question que je pose systématiquement maintenant : quels sont vos métiers dans vos autres vies ?

Alors, le batteur est prof de batterie, donc lui vit de la musique. Le bassiste est forgeron, ferronnier d’art. Le chanteur est – il ne faut pas que je me trompe sur son métier… – il est designer d’intérieur d’avions pour des sous-traitants d’Airbus. Jean-Philippe est en train de changer d’orientation, il va voir ce qu’il veut faire, et moi, je suis psychologue.

Quand le psychologue écoute votre musique, il ne se dit pas « il y a de la brutalité dans l’air » ?

Ben, c’est moi qui l’écris la brutalité, c’est moi qui compose et écrit les textes !

Je ne me suis pas plongé dans les textes, quels sont les sujets que vous abordez ?

Human trap parlait déjà de l’humain, on a continué sur Holy deformity mais en abordant plus les thèmes des angoisses. Ça parle de ce qui peut être en lien avec le corps quand ça ne tient plus, qu’est-ce qu’il se passe avec le corps quand ça s’effondre à l’intérieur. On essaie de mettre en lumière ces douleurs, une tranche de vie, pour expliquer ces traversées émotionnelles qui explique ce qu’il se passe, pourquoi ça se barre et comment vivre avec ça et s’en sortir.

C’est directement et intimement lié à ton travail. J’imagine que les patients que tu reçois ont été directement source d’inspiration, de réflexion autour de ces sujets ?

Complètement, oui. Et pour moi, c’était hyper important parce que c’est quelque chose qui me passionne et c’est un moyen d’y loger ma sensibilité, mes émotions, mon empathie. Après, pour l’album, on a pris un personnage en trame de fond, quelqu’un qui serait un peu féminin, qui traverse des choses… Des tranches de vies de personnes que je rencontre au quotidien, qui viennent me parler, et j’essaie de mettre tout ça un peu en forme. Donc, oui, ça peut être brutal.

Y a-t-il des thèmes que tu ne souhaites pas aborder avec Tempt Fate parce que tu penses que ça n’a pas sa place ?

Tu as une idée en tête ?

Il y a des gens qui ne vont pas parler de dragons, d’autres qui ne veulent pas aborder la politique parce qu’ils ne veulent pas s’engager dans cette voie, d’autres qui ne traitent pas de religion…

Ok, je comprends ta question. Je pense que tout peut avoir sa place, tout dépend de comment on aborde les choses. Le projet est avant tout musical. On veut se faire du bien, faire des rencontres, partager et découvrir des techniques musicales… Si les sujets nous parlent, on peut tout faire. Mais nous ne sommes pas un groupe qui a une visée d’engagement politique. Même la religion : le titre y fait référence, mais pour autant, on ne parle pas de religion. Ça convoque simplement la question du « sacré ». La question de l’homme, est-ce une unité ? on essaie d’aborder les sujets différemment même si ça échoue un peu à chaque fois. C’est comme quand tu veux expliquer un rêve, c’est un peu le bordel parce que la personne en face de toi, elle ne l’a pas rêvé…

As-tu quelque chose que tu souhaites ajouter pour terminer ?

Non, on a abordé pas mal de choses, et comme on a dit qu’on suivait le plan, on suit le plan (rires !)

Et le plan c’est de ne pas prendre de retard sur les autres interviews !

Exactement ! en tout cas, merci beaucoup !

Interview: CARCARIASS

Interview CARCARIASS – entretien avec Pascal (guitare) le 28 avril 2023

Retrouvez aussi la chronique d’Afterworld ici

Avant de parler du nouvel album de Carcariass, je voudrais faire un rapide retour en arrière. Planet chaos était sorti fin 2019, j’avais pu en parler avec Raphaël (basse) fin janvier/début février 2020 à Paris et puis, personne ne la vue venir, il y a eu la crise sanitaire. J’imagine que, pile au moment de soutenir un album, ça a dû vous frustrer, ce Covid…

Ça, on peut le dire… C’est arrivé pile au mauvais moment, on avait pas mal de dates de bookées, on était fins prêts pour démarrer les concerts et tout s’est arrêté d’un coup. Maintenant, tous les groupes étaient logés à la même enseigne, bien sûr, mais ça nous a bien frustrés, pas mal démotivés, aussi, surtout que personne ne savait comment ça allait se terminer… Je ne me suis pas découragé, j’ai commencé à travailler sur de nouveaux morceaux, j’ai repris ma gratte, j’ai bossé sur l’ordi… J’ai composé tout Afterworld en quelques mois… C’était assez incroyable, d’autant que je suis vraiment parti d’une page blanche. Autant Planet chaos était plus l’accumulation de plans que j’avais gardés pendant nos 10 ans de break, là c’était la page blanche. Tout est sorti comme ça, c’était incroyable. Comme si j’étais possédé, je ne sais pas ! Quelque chose de magique.

Avant de parler du contenu musical, est-ce que le titre, Afterworld, a quelque chose à voir avec la crise sanitaire ?

Consciemment, je ne sais pas. Inconsciemment, je pense que oui, on a tous vécu la même chose, les mêmes doutes. C’est vrai que le titre et les paroles… Tout a été quelque part influencé par la situation. La musique, aussi, peut-être, pour le côté plus dépressif qu’il y a.

Je n’ai pas vraiment ressenti d’aspect « dépressif ». Tu le traduis par quoi ?

(Il rit) Ok… alors, c’est un échec (rires). C’est un peu lié au feedback que j’ai eu, si tu ne le trouve pas dépressif, tant mieux. C’est plus dans les compositions un peu plus tristes, mélancoliques…

Mélancoliques, peut-être… Mais « dépressif » n’est pas le premier adjectif que j’aurai utilisé.

Chacun a son ressenti. Je le vois un peu dépressif, les autres membres du groupe le verront différemment.

Au-delà de ce terme « dépressif », comment analyserais-tu l’évolution de Carcariass entre vos deux derniers albums ?

Je pense qu’il y a une certaine continuité entre ces deux albums. Sur Planet chaos, la grande nouveauté c’était l’arrivée de Jérôme. Pour celui-ci, on a vraiment exploité ses capacités de chanteur. Quand Jérôme est arrivé pour Planet Chaos, l’album était presque terminé. Ce qui s’est passé, c’est qu’on a fait un test pour un morceau avec lui, et on a été assez enthousiastes par rapport à ce qu’il avait fait et on lui a demandé s’il voulait essayer d’autres morceaux, ce qu’il a accepté. Du coup, on a tout enregistré avec Jérôme, on l’a intégré au groupe. Il ne s’y attendait pas, et ensuite, on a raté plein de concerts, on a travaillé sur cet album et cette fois, j’espère qu’on va pouvoir l’exploiter et le défendre sur scène.

Pour quelqu’un qui ne connaitrait pas Carcariass, comment lui décrirais-tu votre musique pour l’inciter à vous écouter ?

Déjà, il ne faut pas nous coller d’étiquette… On essaie avant tout d’accentuer le côté musical des choses, ce qui passe avant tout. On cherche à faire une musique qui inspire des images aux gens, tout en gardant un certain punch pour que les gens ne s’endorment pas.

On a non seulement ce titre d’album, Afterworld, qui est également la chanson qui clôt l’album, l’illustrations très post apocalyptique, les titres eux-mêmes – No aftermath, Angst, Fallen empire… Quels sont les thèmes principalement abordés par Carcariass dans cet album ?

En règle générale, ça tourne autour de la SF, de la maladie, la drogue, des trucs très joyeux… On n’a rien inventé, on n’essaie pas de faire passer de message particulier.

Dans ce cas, prenons les choses dans le sens inverse ; y a-t-il des thèmes qui n’ont pas leur place au sein de Carcariass ?

Alors, là, oui… Il y a quand même quelques règles : tout ce qui est politique, religieux, qui pourrait être sujet à conflits, on essaie d’éviter. On est là pour faire de la musique, pas pour se prendre la tête. On reste dans un cadre assez neutre, liés à la SF, ce qu’on partage avec tous les membres du groupe. Le sujet est assez vaste…

Est-ce que le fait d’intégrer un nouveau membre a changé votre façon de composer ?

Oui, clairement. Déjà, à l’époque de Planet Chaos j’avais un peu changé mon approche : je composais la musique entièrement et ensuite, avec Raphaël, on posait les lignes de chant. Je cherchais un semblant de structure… Pour le dernier, avec un super chanteur, il fallait vraiment l’impliquer et le mettre en avant. J’ai fait des compos un peu plus « classiques » dans la structure, tout en gardant pas mal de parties mélodiques, et Jérôme a apporté ses lignes. Avant, Raphaël, qui est bassiste, avait une approche plus foncièrement death. Et c’est pas facile de concilier le chant et son instrument. Là, il se concentre sur sa basse et Jérôme se charge du reste, vocalement. De temps en temps, en live, il fait les backing vocals et ça donne un résultat sympathique.

Tu parles de la scène… Quels sont vos projets ?

Pour le moment, on n’a rien de confirmé. La reprise est un peu compliquée, surtout depuis Covid… S’intégrer dans les festivals, c’est difficile, ils sont complètement full… La dernière date qu’on a faite, c’était à Genève en première partie de Samael. C’était très cool, la première fois qu’on présentait Afterworld sur scène et on a eu des retours très positifs du public. Je pense que ça va être encore difficile cette année, peut-être l’année prochaine et pour tous les groupes.

Si tu devais ne retenir qu’un titre de Afterworld pour expliquer à quelqu’un ce qu’est Carcariass aujourd’hui, celui qui est le plus représentatif, ce serait lequel ?

Là c’est difficile… L’album est assez varié ? Lequel serait le plus représentatif ? Je dirais – c’est aussi mon préféré, mais je pense que tu vas aussi me demander quel est mon préféré…

Non, pas du tout, seulement le plus représentatif, c’est tout !

Alors je dirais Identity, parce qu’il a toute la structure des anciens morceaux de Carcariass et tout ce qui fait le Carcariass d’aujourd’hui, avec le chant de Jérôme et des structures actuelles. No aftermath, c’est un titre avec deux plans, ce qu’on n’a jamais fait avant, mais il n’est pas représentatif de l’esprit d’aujourd’hui. Identity est plus adapté. Et c’est celui que je préfère…

Si tu devais penser à une devise pour Carcariass, ce serait quoi ?

« Toujours s’améliorer ». Ça a toujours été le cas, et ça le reste : je travaille toujours mon instrument, je veux que les autres dans le groupe le fasse aussi pour être toujours meilleurs. Toujours faire mieux, et j’espère qu’on ne s’arrêtera pas de si tôt.

 

 

STORMHAVEN: Blindsight

France, Metal (M&O, 2023)

Avec sa pochette très SF, son logo, bref, son visuel très attirant, pas étonnant que je glisse ce Blindsight de Stormhaven dans mon lecteur CD (eh, oui… Il y en a encore…) Mais dès les premiers hurlements enragés de Fracture, le morceau qui introduit cet album (car il s’agit bien d’un album malgré ses seulement 6 titres), je fais demi tour. Cependant, quelque chose me retient… Et rapidement, Stormahaven me surprend. Par la diversité des instrumentations qui composent ce premier titre, par la variété des styles musicaux explorés, aussi. Le death ou le black ne sont jamais loin, certes, mais le groupe démontre rapidement naviguer avec bonheur non pas en eaux troubles mais d’univers en univers variés (certains passages m’évoquent même Rush!) Le brutal frôle souvent le power metal, voire le progressif – ah, tiens, je viens d’en citer un des maitres…). Le prog n’est pas du tout une évidence avec le premier titre, Fracture, remarque qui fait rire Zach (guitare et chant): « en effet, oui! Il faut s’accrocher! Ce que je voulais pour cet album, c’est quelque chose qu’on n’avait pas fait avant: pas d’intro, une explosion et c’est direct dans la gueule. On voulait mélanger ça avec quelque chose de plus énervé que ce qu’on avait fait jusque là, avec des morceaux plus longs, développer des histoires avec le chant tout au long de l’album. L’album précédent, Liquid imagery, je l’avais plus pensé comme un long morceau d’une heure. Là, même si j’ai voulu une cohérence dans l’ordre des titres, chacun peut être pris séparément et tient la route seul« . Le groupe toulousain formé en 2010 pourrait franchir un pas supplémentaire avec ce quatrième album varié et entrainant. Jamais avare de démonstration (dans le bon sens du terme, svp), ce disque est empli de ces petites trouvailles qui font la différence. La période de crise sanitaire a-t-elle d’ailleurs eu un impact sur le groupe qui  n’a pu correctement défendre Liquid imagery, sorti en 2019? « Pas vraiment, je n’attends pas de défendre un album sur scène pour continuer de composer. Blindsight était prêt assez rapidement après Liquid imagery. Mais on ne savait pas trop si on attendait ou pas pour le sortir. Personne ne savait ce qui allait se passer. On a décidé d’avancer, de passer à autre chose. On avance et on vise un peu plus haut en matière de production, de com et de promotion. » Le titre de l’album, Blindsight (aveuglement) fait-il référence à ce manque de vision que nous a offert la crise sanitaire ou est-ce autre chose? « Il se trouve qu’on peut faire pas mal de parallèles, mais ce n’était pas pensé ainsi. L’idée c’est qu’on suit un personnage qui a subi un accident, un évènement marquant assez violent – d’où le premier titre, Fracture. Ensuite, il perd la vue et il développe des pouvoirs un peu plus mystique de clairvoyance et autres. On ne sait pas trop s’il voyage mentalement ou physiquement, il rencontre des personnes… On suit ce voyage tout au long de ‘album« . Bref, une approche conceptuelle qui se rapproche de l’esprit prog. Quand on lui demande comment le groupe a évolué entre ses deux derniers albums, Zach répond d’un « Ouh la!… je dirai que j’assume sans doute plus mon approche rock prog, qui est, pour moi, l’influence majeure que je revendique et que je ne mettais pas autant en avant que je l’aurai voulu. Et d’un point de vue humain, il y a eu un changement de line-up avec l’arrivée d’un nouveau batteur et d’un nouveau claviers, donc un changement d’équilibre, une organisation différente à trouver. Comme je le disais, on se concentre plus sur la promo, la communication, alors qu’à la base on est une bande de mecs qui aiment jouer de la musique ». Zach approuve entièrement le terme de professionnalisation que je lui propose en résumé de ses propos. « On s’est posé la question, au bout de 4 albums: on veut faire quoi? On reste comme ça ou on évolue? Si on veut évoluer, il y a plein d’autres choses à côté qu’il faut faire« . Un groupe qui a donc simplement mûri. Tout au long des titres, longs – tous tournent autour des 7’30, exception faite de Dominion qui culmine à 24′! – on trouve les inspirations aussi brutales que progressives du groupe. Je lui cite le nom de Rush…  Mais il y a plus que de la brutalité et de la technique dans ce disque, bien plus. Si Zach devait ne choisir qu’un seul titre de Blindsight pour expliquer ce qu’est aujourd’hui Stormhaven, lequel retiendrait-il pour inciter quelqu’un à écouter le reste? « Bonne question… Sur ce nouvel album, je choisirai Hellion, un morceau qui permettrait sans doute de toucher un public plus large. On n’a pas l’effet coup de massue qu’il y a avec Fracture. D’ailleurs, il y a un clip qui sort dans quelque semaines. Hellion a une approche moins death, plus prog avec plus de chant clair, plus de place pour les claviers aussi. » Je lui cite le nom de Rush que certains passages de ce même titre m’évoquent. Ils font partie des inspirations de Stormhaven? « Ah, oui! A 100%! Même si on a l’étiquette de metal prog, mon inspiration vient plus du rock progressif que du metal. Du Rush, Kansas, Deep Purple… le tout mélangé à des touches de death » Sera-ce cependant une approche suffisante pour extraire Stormhaven de la masse? Un groupe de rock, c’est aussi la scène, alors, quoi de prévu? « On a pas mal de dates qui sont prévues, principalement dans le sud, en fin d’année et en 2024 on devrait aller en Espagne et dans le nord de la France, là où on n’a pas encore beaucoup joué. Et on vise aussi les festivals d’été… » C’est sans doute en effet là que le groupe pourra le mieux se faire connaitre, aller au contact de son public et faire connaitre son death prog, alors attendons de voir les dates que Stormahaven affichera bientôt sur son site et ses réseaux sociaux.

GOROD: The orb

France, Death technique (Autoproduction, 2023)

L’amateur de death brutal passera son chemin, celui de technique jettera volontiers une oreille sur The orb, la nouvelle déflagration des frenchies de Gorod. Loin d’en être à leur premier essai, les Bordelais nous proposent un nouvel album pas seulement brutal ou technique. Oui, Gorod on les connait pour leur virulence et leurs prestations explosives – une valeur sure de la scène hexagonale. Gorod nous propose ici des moments plus introspectifs (le morceau éponyme) qui se lient à d’autres, plus fréquents, aussi brutaux que techniques. Loin des standards du genre, Gorod se distingue par des structures qu’on pourrait parfois rapprocher d’une certaine complexité du jazz (Megadeth a prouvé que les genres sont loin d’être incompatibles), d’un prog brutal en y mêlant quelques touches qui se rapprochent d’une forme de psychédélisme (pas forcément) hypnotique. The orb, après deux titres directs et simplement « dans ta face » varie son propos et, au bout du compte, intrigue, attire et interpelle. Un album puissant et riche même si pas toujours facile d’accès. Qu’on aime ou pas, c’est bien là ce qu’on demande à un groupe, non?

REDSPHERE: Regnum lupus

France, Death/Thrash (EP, M&O music, 2023)

Redsphere n’est pas une nouveauté sur la scène metal française, mais le groupe issu de nouvelle Calédonie doit encore se frayer un chemin en métropole. Déjà auteur de deux albums, Facts en 2017 et Immrotal voids en 2019, le groupe revient avec Regnum lupus, un court Ep de 4 titres forgé dans un death thrash direct et sans concession. Ou presque. Car, mis à part le « chant » typique au genre, hurlé et rageur, Redsphere nous propose 4 titres aux influences variées. Alors, oui, ça tabasse sec, les blast beats et la double grosse caisse sont légion, mais il y a plus. Princes (memento mori) et A new order, premier et dernier titres, sont clairement d’inspiration thrash à la Exodus ou Death Angel, A vicious century défonce tout sur son passage tandis que War and lies a quelques influences presque symphoniques apportant une touche plus légère à l’ensemble. Alors, hormis ce qui pour moi n’est pas du chant, le reste entraine et casse des cervicales comme il faut.