GOTTHARD: Silver

GOTTHARD_Silver 2017Hard rock, Suisse (G records, 2017)

Comme nous l’explique Leo Leoni, guitariste fondateur du plus célèbre groupe suisse, dans l’interview qu’il nous a accordée, Silver était déjà prêt et enregistré lorsque le groupe s’est rendu compte que 2017 verrait Gotthard célébrer son 25 anniversaire. Bien, un quart de siècle, effectivement, ça se fête. Bien sûr, c’est un défi, mais il en existe un autre: Silver est le second troisième album de Gotthard. Le troisième avec Nic Mader au chant. Un étape cruciale donc pour confirmer la position du chanteur et son acceptation définitive par le public. Gotthard connait la chanson et met tout son savoir faire au seins des 15 titres de Silver (13 et 2 bonus, en réalité). Le tunnel pourrait être franchi dès le triptyque d’ouverture qui englobe au mieux l’esprit du quintette: des riffs et des mélodies imparables, des refrains immédiatement mémorisables, une énergie et une bonne humeur contagieuses… Du blues, du rock, des tripes. Essayez donc de ne pas fredonner les refrains de Silver river ou Electrified! Bien sûr, Gotthard c’est aussi son lot de ballades et de clins d’œil. Ainsi, Beautiful a des airs de Spectacular (The Answer)  ou Miss me semble inspiré par la guitare de Van Halen sur le Beat it de Michael Jackson ou par Bon Jovi (également évoqué sur Only love is real)… Gotthard célèbre ses noces d’argent avec tout le faste qu’exige un tel événement, en grandes pompes avec ses lumières et… quelques recettes qu’on aurait pu éviter. Reste que Silver fait partie de ces albums à écouter sans modération, un alliage savant, lourd et brillant!

Note: 8/10

Sortie le 13 janvier 2017

Interview: GOTTHARD

Entretien avec Leo Leoni (guitare). Propos recueillis à Paris le 15 décembre 2016

 

Leo Leoni est Suisse. Le pays aux trois langues officielles dont les citoyens sont naturellement (mais pas systématiquement) portés à être polyglottes, ce qui peut rendre un entretien quelque peu intéressant, le sympathique guitariste mélangeant parfois les langues, cherchant ses mots en anglais pour mieux répondre en français. Et pour la dernière entrevue de l’année, Metal-Eyes a été gâté tant le gaillard est simple et sympathique malgré 25 ans de carrière.

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Metal-Eyes : Leo, tu es à Paris pour la promotion de Silver, le nouvel album de Gotthard qui sort le 13 janvier prochain. Tout d’abord, Silver est un album qui célèbre les 25 ans de Gotthard…

Leo Leoni : Accidentellement! (rires)

Metal-Eyes : Pourquoi “accidentellement”?

Leo Leoni : Parce qu’on était en train de travailler sur l’album et on a pensé “ouh! Il va sortir l’année prochaine », on a commencé à calculer, et ça fait 25 ans… C’est un accident, mais c’est arrivé !

Metal-Eyes : C’est ce qui a induit le nom de Silver ?

Leo Leoni : A la fin, oui. Quand on a réalisé que ça fera 25 ans qu’on a commencé, on a pensé aux noces d’argent…

Metal-Eyes : Quand vous vous en êtes rendus compte, comment vous êtes-vous mis à travailler pour cet album pour fêter dignement ce 25ème anniversaire ?

Leo Leoni : En fait, quand on a réalisé ça, l’album était déjà fini, on terminait le mixage. Donc il n’y avait pas beaucoup à faire. La seule chose qu’il y avait encore à travailler, c’était la pochette de l’album.

Metal-Eyes : Il s’agit du 12ème album studio de Gotthard, et, aussi, du 3ème album avec Nic Mader, qui a remplacé Steve Lee, malheureusement et accidentellement décédé aux Etats Unis en 2010. Comment décrirais-tu l’évolution de Gotthard depuis l’arrivée de Nic, et surtout depuis Bang !, votre précédent album ?

Leo Leoni : L’évolution, c’est clair : le premier album qu’on a fait avec Nic, c’était juste après le décès de Steve. Nous on est là et il y a ce mec qui arrive. Malheureusement, dans cette situation, heureusement pour sa situation. Mais c’était quelque chose d’inconnu, si tu vois ce que je veux dire, lui avec nous et nous avec lui… Forcément, c’était nous qui voulions donner le La, comme ont dit. Avec Bang !, on se connaissait plus qu’avant, on avait fait une année de tournée, tu sais ce qui va marcher ou pas, ce qui est bien ou mois bien, on peut faire quelque chose en plus. Maintenant, après Bang !, c’est clair : ça fait 4 ans qu’on est ensemble, on a travaillé sur le nouvel album et il y a plus d’expérience, on se connait mieux. Je pense qu’avec cet album, on peut dire que Nic est là. Ce qui est passé est passé, on ne l’oubliera jamais, mais comme je dis, Firebirth était back to the roots, avec Bang !, on a commencé à adapter un peu pour Nic, et maintenant, on s’est trouvés, si tu veux.

Metal-Eyes : J’imagine que son implication est aujourd’hui plus importante dans le travail du groupe. En quoi a-t-elle permis au son de Gotthard d’évoluer ?

Leo Leoni : Pas plus…Elle était déjà importante… Bon, la première chose c’est qu’il est le plus jeune et c’est clair qu’il écoute sans doute d’autres musiques que celles avec lesquelles on a grandi. Je pense que Nic a une touche un peu plus jeune – je ne dis pas que nous, on est vieux (rires) – et il y a des mélodies qu’on aurait jamais touchées. Ce qui est intéressant, c’est même s’il apporte des mélodies – quand on commence à travailler sur un album, chacun apporte ses idées. Les idées de Nic étaient peut-être un peu différentes, mais quand on travaille dessus, ça sonne comme Gotthard. C’est ce qui est intéressant. Et peut-être que quelqu’un d’autre, lui, moi, les autres, est arrivé avec des idées qui n’étaient pas vraiment ce qu’il fallait pour l’album. Il vient avec quelque chose qui n’est pas vraiment lié à… notre back catalogue… Il est le moins Gotthard, mais c’est comme ça.

Metal-Eyes : Mais il arrive avec sa jeunesse, ses idées…

Leo Leoni : Carrément, et il arrive à être comme Gotthard, finalement. Nous aussi, on s’est peut-être ouverts un peu plus.

Metal-Eyes : Est-ce que ça vous a permis de changer votre façon de travailler ?

Leo Leoni : La façon de travailler n’a pas vraiment changée parce que tout le monde vient avec ses idées. Une partie de l’audition qu’on a faite… on voulait vraiment que ce soit comme ça, on ne cherchait pas seulement un interprète, on cherchait aussi un compositeur, qui puisse composer de la même façon que nous. Il est arrivé et il travaillait comme on a travaillé. On a commencé à travailler sur deux ou trois morceaux, pendant les auditions, qui se sont retrouvés sur Firebirth. Maintenant, c’est la même chose, ça n’a pas vraiment changé.

Metal-Eyes : Vous avez choisi comme premier single la power ballad Stay with me. Pourquoi ce choix en particulier?

Leo Leoni : Ben… Le choix, c’est qu’on voulait un morceau qui nous représente. Il y avait plusieurs sigles potentiels sur cet album. Ce morceau… La Suisse est un pays démocratique, donc Gotthard est aussi démocratique ! On s’est dit voilà les morceau, et chacun donne son avis. Moi, comme producteur, j’ai dit ce que je pensais, et, pour moi, Stay  with me représente le mieux ce qu’est Gotthard maintenant, et l’album Silver. Il y a des ballades, des soft ballads, et il y a aussi le blues, uhne super performance de Nic à la voix, des guitares, une guitare sèche, une guitare solo…. C’est Gotthard aujorud’hui. Sur l’album, il y a tout, des ballades, du rock, des chansons sans solo, aussi… Et là, on a voté et on s’est tous dit que c’est celle-là. Il y a des morceaux on était trois ou quatre, d’autres, deux, mais celle là a fait l’unanimité. La maison de disque n’a pas discuté. Le groupe a dit c’est ça, ils ont suivi.

Metal-Eyes : Tu parles de la variété des styles qu’on peut trouver. Comment, justement décrirais-tu cet album pour…

Leo Leoni : Gotthard ! (rires)

Metal-Eyes : Oui, bien sûr, mais il est un peu moins « hard rock » que ce à quoi on a été habitués…

Leo Leoni : Oh, je ne pense pas… Si tu regardes les 25 ans de carrière de Gotthard tu vois qu’il y a du rock, du heavy, carrément du pop, soft… Je pense qu’il est moins soft que d’autres disques. J’ose même dire que je pense que c’est notre deuxième troisième album. Parce que Nic est là, mais tu paux aussi placer ce disque dans la première partie du groupe, avant Defrosted, avant l’album acoustique. Je pense que c’est du 100% Gotthard en 2017.

Metal-Eyes : Old school 2017, donc.

Leo Leoni : Oui, Back to the roots !

Metal-Eyes : Y a-t-il sur Silver des choses que vous n’aviez jamais tenté avant ?

Leo Leoni : Non, je ne pense pas… Je ne pense pas qu’on n’a pas osé, on a continué de faire ce qu’on voulait. C’est clair que tu changes, tu évolues… Tu ne veux pas répéter ce que tu as déjà fait. Si tu te répètes, ce n’est pas juste, tu dois évoluer… J’ai utilisé la même Les Paul que celle que j’utilisais il y a quelques années, mais ça n’est pas osé… Peut-être mettre des mélodies avec des guitares plus puissantes…

Metal-Eyes : Quleque chose que vous n’aviez jamais fait avant ? Les violons, ce n’est pas nouveau…

Leo Leoni : Oui, il y en avait, il y a eu de l’accordéon… L’année passée, on a fait des shows avec un orchestre aussi… Il n’y a rien de nouveau, non.

Metal-Eyes : Si tu ne devais reten ir qu’un seul titre de Silver pour définir ce qu’est Gotthard aujourd’hui, ce serait lequel ?

Leo Leoni : (sans hésiter) Stay with me. Parce qu’il y a tout dedans, comme je le disait. Il y a ud blues, du soft, des mélodies, des guitares… Il y a une combinaison de tout !

Metal-Eyes : On connait ta passion pour Queen. Que penses-tu du fait, aujourd’hui, de retrouver Queen avec différents chanteurs ? Queen and Paul Rodgers, Queen and…Freddie Mercury est irremplaçable, pourtant ils continuent d’utiliser le nom de Queen…

Leo Leoni : Freddie Mercury est irremplaçable, comme Steve est irremplaçable, ou Bon Scott ou tous ceux qui ont disparu. Je pense que c’est bien qu’ils continuent. Ils ont fait un choix… Le premier choix, c’était Paul Rodgers après le tribute à Freddie Mercury. Tout le monde pensait que c’était George Michael, le chanteur après Mercury, et il y a eu Paul Rodgers et les gens se sont demandé « c’est quoi, ça ? », et maintenant, il y a ce chanteur et tu te souviens exactement de George Michael quand il a fait le tribute ! La dernière version, c’est la même chose… Le mec, il eszt habillé exactement comme George Michael ! La seule différence, c’est Brian May qui a maintenant des cheveux blancs… Mais je trouve que le sens de Queen est encore là, et que ce chanteur fait quelque chose de fantastique, avec un grand respect, comme Paul Rodgers, d’ailleurs. J’aime plus cette version que la précédente, mais je trouve aussi qu’il ne faut pas sous estimer ce Brian May fait, ce qu’il a toujours apporté à ce groupe. Tu le sens, et c’est incroyable. Et puis… respect, ce qu’ils ont fait est incroyable. Je trouve que ce serait bien s’ils sortaient quelque chose avec de nouvelles chansons, mais… Il y a quelque chose qui manque, peut-être qu’ils sont en train d’y travailler, on ne sait pas…

Metal-Eyes : Tu rencontres beaucoup de journalistes et de fans dans ton métier. Est-ce que, lorsque tu rencontres quelqu’un, tu as parfois l’impression de savoir ce dont la personne va vouloir parler avec toi, en dehors de la promo, bien sûr ?

Leo Leoni : (Il réfléchit) Parfois… Non, tu ne peux pas. En fait, tu commences à discuter avec quelqu’un et tu le sens que quelque chose va arriver. Mais pas comme ça.

Metal-Eyes : Qu’est-ce qui te fait ressentir ça?

Leo Leoni : Pzzt… Je ne sais pas, tu sens que ça arrive, là où la discussion va s’orienter. Quelqu’un qui va te demander un autographe, oui, tu le sens, on commence à parler de Gotthard… Quelqu’un qui est habillé avec une veste Harley Davidson, c’est clair qu’on va peut être plus parler de moto que de musique ! Mais autrement, non.

Metal-Eyes : Aujourd’hui, nous sommes à Paris, ville dans laquelle tu viens régulièrement. Y a-t-il un endroit à Paris que tu conseillerais à un ami qui y viendrait pour la première fois ?

Leo Leoni : un seul endroit, c’est difficile, parce que Paris, il y a tant de choses à voir, c’est fantastique. J’adore ! Montmartre, la petite île, là…

Metal-Eyes : L’Ile de la Cité ?

Leo Leoni : oui, j’adore, c’est fantastique. Il y a beaucoup d’endroits à visiter, les Champs Elysées…

Metal-Eyes : il y a un endroit où tu aimes particulièrement te rendre, aller dîner à Parais ?

Leo Leoni : Pas vraiment… Je trouve que c’est tellement particulier que tu rentres dans un bistrot, tu dis que tu voudrais un tartare, et un verre de vin… Tu sais exactement ce que tu vas recevoir. Je pense que c’est la meilleure pub que Paris peut recevoir. Montmartre, j’aime beaucoup, les artistes, cette ambiance. Je pense que c’est à voir, oui.

Metal-Eyes : Y a-t-il des sujets qui ne sont habituellement pas abordés avec des journalistes et dont tu voudrais pouvoir un jour parler ?

Leo Leoni : Une des choses dont je suis en train de parler en ce moment avec les journalistes, c’est important pour les artistes, pour la musique mais pas seulement, pour la littérature, aussi, c’est de redonner une valeur à la musique, à l’art. Aujourd’hui, tout le monde télécharge, et c’est ok pour eux, mais c’est rendre le futur pauvre. C’est une choses qui faut que les journaliste et les médias peuvent faire : réapprendre à la nouvelle génération qu’il y a une valeur dans cet art. Si tu penses aux grands musiciens comme Mozart, Beethoven… Ils étaient payés par les rois. Si eux le faisaient déjà, c’était parce qu’ils investissaient dans quelque chose d’important, l’art, la musique. Aujourd’hui, c’est un peu oublié parce que « c’est normal » d’écouter, de charger de la musique gratuitement, un livre, ou des photos… Le travail des autres…

Metal-Eyes : Tu penses qu’on peut faire comment ?

Leo Leoni : Ah… Eduquer. C’est l’éducation. Je ne dis pas à l’école, mais dans les medias. Il faut parler de ça, de la valeur de ce qu’est l’art. Il fallait commencer… hier…

Metal-Eyes : Mais on peut continuer demain.

Leo Leoni : Oui, on doit commencer à un moment

Metal-Eyes : Ceci dit, tous vos albums ont été certifiés or ou platine, les derniers sont entrés directement numéro 1 en Suisse. Ça veut dire que le produit a encore une certaine valeur, quand même…

Leo Leoni : oui, oui, mais je pense en général. Dans le monde entier, il y a beaucoup de musique, et c’est la façon dont la musique est donnée au monde qui n’est pas correcte. « If you want to eat a piece of bread, you have to buy a piece of bread or do it yourself”. C’est la meme chose: si tu veux écouter de la musique, tu dois comprendre que quelqu’un l’a écrite, l’a jouée, s’est investit dedans. Il faut donner une valeur à l’art.

Metal-Eyes : Lors de ton interview précédente, je t’ai entendu parler du Hellfest ; Quels sont vos projets de tournée ? Les festivals, c’est peut-être encore un peu loin…

Leo Leoni : On a notre tournée prévue en Europe, et ce qu’on va faire, c’est la tournée d’argent. On espérait pouvoir jouer au Hellfest cette année, mais les têtes d’affiches étaient déjà bouclées… On fera les festivals en 2018, je pense. On voudrait pouvoir jouer en France, mais c’est difficile : on ne veut pas jouer dans les petites salles, il faut trouver un promoteur prêt à investir, c’est difficile. Ils vont regarder la dernière tournée, il y avait du monde, mais… Il faut trouver une situation juste pour tout le monde : pour les fans qui ont droit à un show, pas seulement quelque chose dans une petite boite où tu ne peux même pas accorder ta guitare… On veut aussi donner quelque chose aux gens qui viennent. Je pense qu’on va beaucoup tourner avec ce Silver tour, en festivals où le programme va changer.

 

Merci à Olivier Garnier pour l’organisation de cette rencontre.