2024: Le bilan

Et voilà, c’est fini… 2024 arrive à son terme et avant de définitivement clore ce chapitre, laissons nous tenter par un regard dans le rétro. 2024 fut une année riche en découvertes et, dans une moindre mesure, en concerts. Même si le fait de ne plus travailler sur Paris a limité rencontres et concerts, il y a eu de beaux, très beaux moments. Voici donc un Top (5 ou10, approximativement…) dans diverses catégories. Et en vrac…

Mais avant tout, grâce à chacune et chacun d’entre vous, l’année 2024 a été marquée par une impressionnante croissance du nombre de lecteurs, dépassant régulièrement les 10.000 connexions mensuelles, frôlant même parfois les 15.000 – je me souviens même d’une journée à plus de 3.000 lecteurs! En mars 2025, Metal Eyes, toujours mené en solo, entrera donc dans sa 10ème année avec confiance pour relever de nouveaux défis. Egalement, ce qui aura marqué 2024 est l’intérêt croissant d’agents et de groupes étrangers pour votre webzine. Apprès l’Allemagne, ce sont rien moins que les Pays-Bas, le Luxembourg, l’Italie qui sont spontanément venus au contact de Metal Eyes en envoyant leurs productions. Merci à vous tous pour votre confiance et votre intérêt croissants! Maintenant, le voici ce retour en arrière.

Face au nombre croissant – exponentiel même! – de productions musicales, Metal Eyes a toujours fait le choix de se limiter en ne chroniquant que les albums physiques reçus (ou, moins fréquemment, achetés). 32 interviews ont également été réalisées, majoritairement à distance mais aussi, dès que l’occasion se présente, en face à face. 15 concerts et festivals auront également été couverts, sur l’axe Est/Ouest de la France (de Nancy à Clisson en passant par Orléans et Paris, principalement). Si la majeure partie des concerts se passe – malheureusement – à Paris (Lyon et Lille aussi), la province, trop souvent délaissée, dispose de très nombreuses salles qui mériteraient l’intérêt de certains promoteurs (ne serait-ce qu’Orléans et sa région qui, outre un Zénith et la nouvelle Arena Co’met, proposent une offre de salles allant de 200 à 1500 places, pouvant ainsi accueillir des groupes de toute envergure et de tous horizons musicaux)

TOP Albums

Les géants du genre sont toujours en forme. D’autres viennent confirmer de bonnes impressions ou s’imposer dans le paysage musical. On retrouve ainsi dans mes albums de chevet de l’année :

Judas Priest (Invicible shield), Saxon (Hell, fire and damnation), Trank (The maze), Last Temptation (Heart starter), The Dead Daisies (Light ’em up), Orkhys (Legends), Tagada Jones (Trnt-best of 1993-2023)

Découvertes de l’année

Pandora’s Key (Yet I remain), Hrafngrimr (Nifheilms auga), Nouriture (Barbara vol 1 – pastèque planet), Trigger King (The giant rooster), Witchorious (éponyme), Bone Ripper (World ablaze)

Concerts

Shaka Ponk (mon concert de l’année, Orléans, le Zénith, le 22 février), Judas Priest/Saxon (Paris, Zénith, le 8 avril), Heavy Week End (l’ensemble, Nancy, Zénith, du 21 au 23 juin), Duff Mckagan (Paris, le Trianon, le 20 octobre), Asylum Pyre (Orléans, Dropkick, le 27 septembre), Sortilège (Crickfest 3, Cléry Saint André, 13 avril)

Interviews

Mass Hysteria (Astrolabe, Orléans), Asylum Pyre (Dropkick, Orléans), Bone Ripper (visio), Eight Sins (Hellfest, Clisson), Princesses Leya (Rock In Rebrech, Rebrechien), Charcoal (Hellfest, Clisson)

Livre de l’année

Motörhead (Julien Deléglise, Editions de Layeur)

Au delà des lecteurs, je tiens également à remercier ceux qui depuis des années m’ont accordé et m’accordent toujours leur confiance, voire leur amitié: Sabrina Cohen Aiello et Mehdi El Jai (Verygroup), Alexandre Saba (M&O music), Romain Richez et Elodie Sawicz (Agence Singularités), Olivier Garnier (Replica promotion), Chris Acker (PrismA, Crick For Zik/Crickfest) Angie (NRV promo), Arno T-Walden (The Iron Troopers, No Mad Musik/Rock In Rebrech), Mike de Coene (Hard Life promotion), Andrea Tochtenhagen (Bob media), Annelyse Rieu et toute l’équipe de Gérard Drouot Productions, Aude Sabarly et Céline Guignier (AEG France) et Roger Wessier (Where The Promo Is)

Bonne année 2025 à toutes et à tous!

NEXT DEED: The soldier – act 1

Luxembourg, (Heavy) Rock (Autoproduction, 2024

Arrivant tout droit du Luxembourg – le pays (plus connu pour ses banques que pour ses musiciens heavy), pas le jardin parisien (qui abrite le Sénat…) – Next Deed s’est formé en 2021 par la guitariste/choriste Sue Scarano et le batteur Lou Metz qui se sont adjoint les services de Kevin Roy (guitare), Romain Haas (basse) et Alain Hertges (chant). Le groupe a déjà publié un Ep en 2023, New beginnings et revient aux affaires avec The soldier – act 1, un Ep de 5 titres. « Act 1 » car il s’agit du premier de cinq volets consacrés de l’oeuvre de Georg Büchner, Woyzeck datant de 1836. Le groupe veut « explorer la maladie mentale, les relations interpersonnelles et les ressentiments à travers le regard de ses divers personnages ». Next Deed propose un rock heavy et entrainant, plus enjoué que les sujets traités, qui lorgne parfois du côté légèrement progressif du genre. Si le chant manque parfois un peu de rondeurs et de conviction, voire de justesse, la variété des styles approchés rend l’ensemble plaisant sans pour autant révolutionner le genre. Des riffs tranchants et des harmonies léchées sur fond de rythmiques efficaces donnent envie d’aller plus loin. Le format Ep donne la possibilité de proposer des nouveautés régulières, alors une question se pose: à quand l’acte 2?

Séance de rattrapage: ARTEFACTS: The titan chronicles part II: Lucius

Belgique, Metal épique (Anti hero records,2024)

Quelques notes de piano qui se transforment en intro opératique et cinématique… Ainsi débute The titan chronicle part II: Lucius, le premier album des Belges de Artefacts. Dès le Prologue, le ton est donné: Artefacts veut proposer une musique grandiloquente, puissante et enragée. Rapidement le groupe nous plonge dans un univers horrifique qui s’approche du black metal symphonique. Cet album est le premier d’une trilogie qui dépeint un univers mythologique aussi sombre qu’il sait se faire lumineux. Au-delà des simples vocaux typiques du genre, Artefacts nous invite dans un monde cinématographique, fantastique et aventureux. Brillamment illustré, ce premier album entraine l’auditeur dans des aventures sonores variées, brutales et envoutantes à la fois. Impossible de rester de marbre face à ce mur de sons qui sait relâcher la pression quand il le faut. Artefacts nous offre un de ces albums « carte de visite » qui pourrait devenir emblématique du genre. Des chœurs efficaces, des inspirations orientales, cinématographiques et/ou (neo)classiques, tout est réuni pour attirer l’auditeur dans ces mondes à part. A suivre de près…

WIRE EDGE: Salt of the earth

France, progressif (Ep, M&O,2024)

C’est en 2019 que Wire Edge se forme à Paris avec pour ambition de développer des univers progressifs et rock. Un premier album sort rapidement, en 2020, Workhorse empire, autoproduit. Sans doute la crise sanitaire a-t-elle freiné les ardeurs du quatuor qui revient aujourd’hui avec Salt of the earth, un Ep 4 titres qui montre différentes facettes du groupe. Après Hollow places, une longue intro de 3′ aux sonorités d’outre espace – ces vrombissements graves qui ont naguère fait le succès de certaines bandes son de films de SF – Wire Edge se lance dans des compositions complexes aux nombreux tiroir, parfois cachés… Les amateurs de progressif et de jazz trouveront leur compte tout au long du morceau titre qui, en 8’27, permet d’inclure un peu tout ce que le groupe sait faire, mais ceux qui comme moi préfèrent un rock plus direct peuvent se trouver quelque peu perdus dans ce labyrinthe sonore. Wire Edge est certes composé de musiciens qui maitrisent parfaitement leurs instruments, cependant, avis personnel, le chant manque de profondeur, de gravité – sauf lorsqu’il est double – et l’ensemble parait souvent un peu trop démonstratif. Malgré tout, Wire Edge dépeint des univers et des paysages variés – Cities of none m’évoque par exemple l’Irlande verte et joyeuse. Avec ses 4 titres pour un peu plus de 25′, Salt of the earth souffre de ses faiblesses autant qu’il profite de ses qualités.

UNCUT: Space cowboys

France, Stoner (Autoproduction, 2024)

Uncut s’est formé en 2016 dans la région poitevine et propose rapidement un rock qui se veut déjanté et qui cherche à mélanger le blues US au rock grungy des 90’s. Après avoir tourné avec Klone en 2019, le trio composé de chanteur et guitariste (« baritone guitar ») Alexy Sertillange, du guitariste Enzo Alfano et du batteur Pablo Fathi publie un premier album, Blue , en 2020 et revient aujourd’hui avec un Space cowboys quelque peu allumé. Sur fond de rythmes puissants et parfois oppressant, le groupe s’enfonce dans une forme de stoner rock avec des titres souvent allumés. Des riffs et rythmes inspirés par Black Sabbath côtoient des parties instrumentales plus directes et souvent étranges, des parties qui explorent de nombreuses possibilités. Agressifs et lourds, les morceaux souffrent cependant de ce que je considère comme deux faiblesses: un anglais difficilement compréhensible si on n’a pas le livret sous les yeux et trop de complexité dans les constructions. Et en voulant trop explorer et emprunter des chemins tortueux, Uncut m’a égaré… Le trio est soutenu par la Klonosphère, tant mieux, car le collectif a toujours été de bon conseil. Il faut en profiter. Je retenterai de mon côté plus tard…

TWISTED MIST: Gehenna

France, Pagan (Music records, 2024)

On a beau penser parfois que le pagan a tout dit, le genre parvient à se renouveler tout en restant solidement ancré dans ses traditions. Ainsi, Twisted Mist, un duo composé d’Olivier Dupont et de Nicolas Cesar déjà auteur du remarqué Lacerare en 2022, s’amuse à explorer l’univers torturé que Dante a développé dans sa Divine comédie. Le duo retranscrit cet univers à travers Gehenna, le nouvel album aussi envoûtant que sombre et lourd. Les ambiances nous emmènent au cœur des forêts où se déroulent des rituels interdits avant de nous transporter, en état de transe évidemment, dans des contrées bien plus sombres et inquiétantes. Twisted Mist nous propose donc divers tableaux illustrés par des instruments que le pagan sait réhabiliter, comme la vielle à roue, la flûte (ici diatonique en os – c’est- écrit sur la bio…) en plus des incontournables guitare/basse/batterie. Le chant est tout aussi varié, s’inspirant des douceurs de notre monde autant que du black metal incantatoire. Gehenna se révèle un album riche et varié, aussi surprenant qu’attachant qui s’écoute d’une traite avec plaisir malgré la longueur de certains titres.

OBJECTOR: Slave new world

Belgique, Thrash (Ep, Autoproduction, 2024)

Formé en 2007 du côté d’Antwerp, nos voisin belges d’Objector ont déjà un album à leur actif, Social intolerance paru en 2018. Six ans après (encore des pas pressés de proposer des nouveautés…) et sans doute après quelques modifications du line-up d’origine, les thrashers se rappellent à notre bon souvenir avec un Ep aussi court que brutal. Une fois l’intro passée (qui nous apprend, attention, exclusivité!, que Bock, guitariste et chanteur veut mâcher du bubble gum), Slave new world est une explosion de colère non contenue qui évoque tout au long des 4 titres le thrash le plus vindicatif de la Bay Area. On pense naturellement à Exodus, Death Angel ou encore Slayer – cette batterie explosive à la Dave Lombardo! – mais également à Tankard, compatriotes d’Objector aussi férus de thrash que d’humour potache (et de bière, « occasionnellement ») – on appréciera les chaussettes claquettes au verso du cd… Que du bon goût! Musicalement, cependant, rien à redire: les guitares charcutent à tous les étages autant que la voix hurle sa colère sur fond de rythmiques qui pilonne un champ de bataille. C’est direct, franc du collier, dans ta face et ça décrasse quelque peu les oreilles. Une bonne claque pour se réveiller en douceur…

KAEDERIC: It comes from the inside

France, Metal (Ep, Autoproduction, 2024)

En 4 titres, Kaederic invite l’auditeur dans un voyage sonore et quelque peu introspectif. Le premier Ep du groupe, comme l’évoque son titre – It comes from the inside – autant que sa pochette torturée, propose une sorte de concept traitant de la souffrance mentale et des combats d’un homme pour s’en sortir. Pour cela, Kaederic utilise diverses sonorités allant de la douceur d’un Nemesis qui débute sur des sonorités folk celtiques avant de s’enfoncer dans la noirceur brutale d’un cri intérieur de souffrance personnelle qu’on n’ose avouer en public. Au travers de ses 4 courts morceaux, Kaederic nous invite à voyager au travers de l’inquiétude (The dark side of my mind), de l’apaisement et du délire (Sisyphean dance) et de la brutalité d’un combat salvateur (Spit my fire, à la fois brutal et tribal, électro et hypnotique comme une transe). Jamais répétitif, Kaederic nous offre une carte de visite aussi intrigante qu’attirante. De celles qui donnent envie d’en connaitre plus… Une suite est-elle à venir?

T.E.M.P: Affres de paix

France, Fusion (M&O, 2024)

Originaire du Val d’oise, T.E.M.P. (Tribal Engine for Meta Players) propose un metal fusion direct aux textes engagés. Le groupe crache sa colère à la manière d’un Reuno (Lofofora) ou d’un Nicko Jones (Tagada Jones) avec un groove qui évoque Faith No More. La majeure partie des 12 titres rappelle l’esprit expéditif du punk et du hardcore en ne dépassant que peu souvent les 3’30. Affres de paix est un album rageur et rugueux, et le son, organique, donne un aspect encore plus « dans ta face ». On peut toutefois regretter le manque de finesse ou, au contraire de brutalité franche qui donnerait envie de vraiment se démonter les cervicales, mais ça tabasse sec malgré tout. Cependant, s’ils ne réinventent en rien le genre, les gars de T.E.M.P. se font plaisir et c’est bien là le principal.

FAR AWAY: Solastalgia

France, Metal (M&O, 2024)

Solastalgia est le second essai des Français de Far Away, une bande de potes qui évoquent à travers leur musique leurs inquiétudes écolos. L’état de la planète semblent être devenue leur source s’inspiration principale tout au long des neuf titres de ce nouvel album. Après une intro mélancolique, le groupe s’engage dans une voie beaucoup plus hargneuse. Les guitares rugueuses, la voix rageuse qui hurle rapidement sa colère se mélangent à une alternance de calme retrouvé et de tempête incontrôlée. On se retrouve plongé dans une sorte de metalcore progressif aux élans aussi fulgurants que les retours au calmes peuvent être brutaux. Si Far Away n’invente rien de bien neuf, il exprime assez sainement et directement sa colère et son inquiétude quant à l’état de notre monde actuelle, celui que les générations passées laissent à leur petits enfants, les enfants fainsant ce qu’ils peuvent mais semblant bien souvent peu, très peu, écoutés… Brutal, frontal tout autant que désabusé, Solastalgia saura séduire le public avide de sensations metalcore.