HEAVY WEEK END: report du samedi 7 juin

@Heavy Week End 2025

Après une première journée artistiquement plus que réussie, retour au Zénith de Nancy pour une seconde plus hard rock/prog metal/heavy metal. Une programmation qui, après coup, ressemble à un patchwork de styles qui peut dérouter. Seule ombre au tableau de ce samedi, la pluie capricieuse qui joue les trouble-fête intermittents tout au long de la journée, humide et presque froide… On fera avec.

Wings Of Steel @Heavy Week End 2025

J’ai beaucoup entendu parler des Américains de Wings of Steel ces derniers temps mais n’ai pas eu l’occasion d’écouter ce qu’ils font. Le jeune combo a déjà publié un Ep et un album ainsi qu’un live enregistré lors de son concert lillois en 2024 et lance aujourd’hui sa tournée 2025. Musicalement, la formation propose un heavy metal typé 80’s. Leo Unnermark, le chanteur d’origine suédoise, est aujourd’hui très en voix, quelque part entre Michael Kiske et Geoff Tate tandis que son compère, le guitariste Peter Halub, avec qui il a fondé le groupe, sait prendre la pose comme il le faut.

Wings Of Steel @Heavy Week End 2025

Clairement, ça joue, tant des instruments qu’avec le public. La jeune formation sait parfaitement quoi faire pour séduire le public et propose une variété de morceaux entrainants et séduisants, alternant entre puissance de feu (Fall in line, Cry of the damned, Wings of steel) et douceur à mi parcours avec She cries, ballade entrecoupée d’un grain de folie.

Wings Of Steel @Heavy Week End 2025

Wings Of Steel nous offre ainsi une jolie mise en bouche pour démarrer la journée. Si le groupe n’invente rien, il se donne avec coeur et passion et le public présent le lui rend bien.

Wings Of Steel @Heavy Week End 2025
Vanden Plas @Heavy Week End 2025

Place ensuite à un groupe plus que trentenaire. Les Allemands de Vanden Plas, en showcase à Paris lors de la conférence de presse donnée par GDP pour le HWE, reviennent armés de cette envie de renouer avec leur succès d’antan. Leurs dernières prestations en France remontant au festival de Raismes en 2017, le groupe a eut tout le temps d’être quelque peu oublié. Alors ce soir, les petits plats sont mis dans les grands;

Vanden Pas @Heavy Week End 2025

Andi Kuntz, très en voix et tout sourire, n’hésite jamais à faire participer le public pendant l’heure qui est allouée au groupe. En démarrant son set avec deux titres heavy, Push et Holes in the sky, Vanden Plas interpelle les moins connaisseurs mais, malgré des moments plus doux, continue son set avec des composition plus progressives qui peuvent dérouter les amateurs de rock direct qui se dirigent vers les bars et la restauration. Dommage, car Postcard to God, qui clôt les set a de quoi réunir tout le monde, mais le public reste quand même assez important.

Vanden Plas @Heavy Week End 2025
Europe @Heavy Week End 2025

Avec Europe, on change clairement de catégorie. Les amateurs de hard rock léché sont de sortie et Joey Tempest, très en forme, sait parfaitement comment caresser son public comme il faut. De manière aussi sensuelle qu’il le fait avec son pied de micro!

Europe @Heavy Week End 2025

Le groupe démarre son set avec deux classiques, On broken wings et Rock the night, qui enflamment le public avant de proposer le plus récent Walk the earth (issu de l’album du même nom datant de 2017). déjà le chanteur commence à s’amuser avec des « Merde » et des Putains » qu’il répète autant qu’un pur Français, pour le plus grand plaisir du public.

Europe @Heavy Week End 2025

Si John Leven (basse) semble tout aussi concentré qu’il prend du plaisir, tous les regards se portent également sur John Norum, très en forme ce soir. La pyro réchauffe d’ailleurs les Suédois et le public alors que la pluie commence à se faire dense. Les parapluies et poncho font une apparition remarquée tandis que le froid s’installe aussi.

Europe @Heavy Week End 2025

Fort heureusement, cet épisode ne dure qu’un gros quart d’heure et le public reste bien présent. Europe nous offre alors Hold your head up, un titre soit disant « enregistré récemment » datant cependant de 2023. Europe propose ensuite une sélection de titres couvrant toutes les époques du groupe. De Carrie à Superstitious, en passant par le superbe War of kings ou open your heart qui voit Joey s’emparer d’une guitare acoustique ou Last look at Eden où il empoigne une électrique et se la joue crooner, c’est un véritable Best of que Europe offre au public, chaud comme la braise.

Europe @Heavy Week End 2025

Puis Cherokee, avec un light show splendide, vient relancer les affaires sérieuses, celles annonciatrices d’un concert qui touche à sa fin. Sa fin? Non, bien sûr, et le public le sait. Dès les premières mesures, The final countdown voit une nuée de téléphones s’éclairer et la foule se lever et hurler sa joie (note personnelle: je comprend de plus en plus ces artistes bannissant le portable…) Peu importe le froid, c’est près de 8.000 personnes qui sont à l’unisson, accompagnant Europe jusqu’au dernières mesures de ce concert de très haute volée. Si la suite est à la hauteur de cette prestation…

Europe @Heavy Week End 2025
Dream Theater @Heavy Week End 2025

Le retour de Mike Portnoy (batterie) au sein de Dream Theater a fait couler, positivement, beaucoup d’encre. Le public amateur se masse devant la scène où un technicien vient retirer le voile cachant l’imposant kit du batteur. Puis chacun arrive tranquillement, prenant place pour attaquer avec le bien nommé Night terror. Rapidement, pourtant, on sent, on voit John Muyng concentré sur sa basse et la tablette à ses pieds, prompteur musical l’empêchant de sourire.

Dream Theater @Heavy Week End 2025

De son côté, John Petrucci, tout aussi concentré, se libère et retrouve ses poses de barbu bourru mais impressionne par son aisance guitaristique. Jordan Rudess, quant à lui, joue de ses claviers dont la façade change au gré des ambiance de ce premier long titre, affichant parfois des notes de musique, à d’autres moments un décor léopard, clavier mobile qui se penche (laissant ainsi voir les touches sur lesquelles il joue) et se déplaçant afin que chaque membre du public en profite.

@Heavy Week End 2025

Mais celui qui attire tous les regards reste le batteur, dont le set impressionne et le cache partiellement. Portnoy, pourtant, sait aller chercher le public, se levant pour haranguer la foule qui… diminue. Non seulement, bien que ce soit la fin du printemps, il fait froid, mais la musique, trop technique et destinée à un public connaisseur, ne séduit pas une partie de la foule que l’on voit quitter les lieux en formation régulière et en famille.

Dream Theater @Heavy Week End 2025

Une question se pose alors: Dream Theater est-il vraiment le meilleur choix de tête d’affiche? Sans doute eut-il été préférable d’inverser les places et de laisser Europe clore cette journée. Dommage, mais c’est ainsi. Demain est un autre jour dont l’affiche pré-visage d’un (tout petit) peu plus d’énergie.

Dream Theater @Heavy Week End 2025

HEAVY WEEK END: report du vendredi 6 juin

Quel énorme week end que cette seconde édition du Heavy Week End ! Malgré quelques couacs au lancement de cette seconde édition, notamment dans l’arrivée plus que tardive des annonces et de l’affiche complète, le bilan de ce premier week end du mois de juin au Zénith de Nancy, dans sa version open air, est plus que positif malgré une météo capricieuse et un démarrage quelque peu difficile. Mais ne nous emballons pas, commençons par le commencement.

Si on a pu quelque peu s’inquiéter quant à la fréquentation de cette seconde édition – Gérard Drouot Productions balançant sur les réseaux de très nombreux posts chaque jour qui ont pu ressembler à un appel au secours, annonçant tardivement une affiche a priori pas au niveau de la première édition (exceptionnelle, rappelons-le) entrainant nombre de commentaires peu enthousiastes – l’arrivée sur le site tend à confirmer cette inquiétude. Ce vendredi est loin, très loin d’afficher complet – à peine 6.000 personnes ont fait le déplacement – mais, d’une part, le public est bien présent dès l’ouverture des portes et, d’autre part, on constate rapidement deux grosses améliorations par rapport à l’an dernier: tout d’abord, un espace assez vaste est réservé aux lieux de soulagement individuels (les WC, donc). Mais surtout, c’est affiché en très grand à l’entrée du site, le placement est libre. A moins d’avoir un pass VIP ou Carré or, le public peut, « à l’ancienne », se positionner dans la fosse ou s’installer dans les gradins, au choix. Résultat: bien que démarrant plus tôt que l’an dernier – un groupe a été rajouté – j’ai l’impression que le public est, en ce début de festival, à peu près équivalent à celui de 2024. Pas génial, mais encourageant, et nous ne sommes que vendredi, certaines personnes travaillent encore.

Adrian VANDENBERG @Heavy Week End 2025

Adrian Vandenberg, qui inaugure cette édition, investit la scène à 17h30 devant un parterre bien fourni… Quel plaisir de pouvoir enfin revoir le guitariste sur scène. Et en forme! Le géant hollandais (1,98m des pieds à la tignasse) a fait le choix de proposer un set 100% axé sur sa période avec Whitesnake, soit la période 1987 et Slip of the tongue. S’il n’a particpé qu’à la tournée célébrant le premier, il n’a composé aucun des titres de 1987, contrairement à son successeur dont on retrouve ici deux extraits (Fool for your lovin’ qui remonte en réalité à Ready an’ willing, en 1980, et Judgement day). Les 5 autres titres sont des incontournables du légendaire 1987 (Bad boys, Give me all your love, Cryin’ in the rain*, Still of the night et Here I go again* – deux titres (*) remontant quant à eux à l’album Saint and sinners de 1982)

Adrian VANDENBERG @Heavy Week End 2025

Le groupe dans son ensemble est en forme. On apprécie la tessiture de la voix de Mats Lévin, que l’on connait déjà pour ses participation avec Yngwie J. Malmsteen ou Treat, parmi d’autres. Le vocaliste n’est peut-être pas au niveau d’un Coverdale des grands jours mais son timbre et la personnalité qu’il met dans chacun de ces morceaux rendent plus qu’hommage au Serpent blanc.

Adrian VANDENBERG @Heavy Week End 2025

Si déjà la paire Vandeberg et Levens chauffe le public, la section rythmique en rajoute une jolie couche également. En quarante minutes, le géant blond démontre être parfaitement en forme (il avait été victime de la maladie de Lyme, qui l’a empêché de revenir comme il l’eût souhaité sur le devant de la scène) et à sa place. Si on aurait volontiers apprécié quelques extraits autres que Whitesnake (de Vandenberg, ancienne ou nouvelle mouture, ou Vandenberg Moonkings), on ne peut que savourer ce qui nous a été offert. Le public le sait et a, au passage, posé les jalons de l’ambiance à venir.

Adrian VANDENBERG @Heavy Week End 2025
BATTLE BEAST @Heavy Week End 2025

Après le hard rock, on passe au power metal finlandais. Non, pas Lordi… Si j’avais été peu sensible à Battle Beast lors du dernier passage du groupe au Hellfest, les conditions du jour me permettent de découvrir le groupe sous un autre angle. Force est de reconnaitre que les cinq se donnent à fond, la voix de Noora Louhimo faisant toujours office d’arme (plus vraiment) secrète.

BATTLE BEAST @Heavy Week End 2025

On sent les musiciens concentrés et quelque peu statiques, malgré l’envie de Eero Sipilä (basse) d’haranguer le public. Mais tous les regards sont portés sur la chanteuse au casque corné. Au gré des titres, l’ensemble du groupe va chercher la foule qui répond là encore plus que positivement d’autant plus que Noora, visiblement heureuse d’être là communique avec le public aussi chaleureusement que les flammes qui viennent réchauffer l’atmosphère.

BATTLE BEAST @Heavy Week End 2025

Battle Beast nous a offert une très belle prestation, celle qui ressemble à une jolie mise en bouche pour accueillir la tête d’affiche.

BATTLE BEAST @Heavy Week End 2025
SAXON @Heavy Week End 2025

Mais avant, place à un monstre sacré du heavy metal. Saxon, du haut d’une carrière longue d’un demi siècle, est toujours bien présent. Les Anglais s’apprêtent à sortir leur nouveau live, Eagles over Hellfest, et se lancent ce soir dans leur nouvelle tournée européenne qui, rappelons-le, les verra revenir pour trois dates en France les 11, 12 et 13 septembre aux Zénith de Paris, Nantes et Toulouse (avec, exclusivité de ces dates, le show Castles and eagles. Nous y reviendrons.)

SAXON @Heavy Week End 2025

Bien qu’on sache à quoi s’attendre, on a toujours plaisir à retrouver Biff et sa bande qui jamais ne déçoivent. Les anciens se massent devant la scène et dès les premières mesures de Hell, fire and damnation, le ton est donné. Les bouches à feu crachent leurs flammes tandis que le public scande le refrain de ce futur classique avec entrain. Et Biff, majestueux observe avec sérieux et attention la foule devant lui.

SAXON @Heavy Week End 2025

Si Saxon a composé certains hymnes incontournables que l’on retrouve ce soir (besoin de les citer? Alors, en vrac, Motorcycle man, Strong arm of the law, Wheels of steel, Heavy metal thunder, Dallas 1pm, 747 (strangers in the night)…) le groupe nous dégaine quelques raretés qui font du bien.

SAXON @Heavy Week End 2025

On a ainsi droit à Power and the glory et Dogs of war, nouvellement réintroduit dans la set list ainsi que 1066, un des trois extraits du dernier album. Les connaisseurs le savent, ils sont en train de vivre un de ces grands moments, un de ces concerts francs et directs, sans chichi. Et même si Biff, qui referme régulièrement son manteau, semble avoir froid, le public lui mange dans la main. Le concert se termine magnifiquement avec Princess of the night, toujours aussi imparable.

SAXON @Heavy Week End 2025

Si Saxon ne surprend pas les fidèles, le groupe impressionne toujours par sa puissance et ses prestations toujours aussi solides. Désormais parfaitement intégré, Brian Tatler confirme être le meilleur choix possible pour remplacer Paul Quinn. On remarque aussi que, de son côté, Nibbs Carter est beaucoup plus calme qu’il y a quelques années, headbangant avec plus de raison. Reste que la machine de guerre est de sortie (malheureusement pas le Fuckin’ pigeon… mais ça, ce sera pour le mois de septembre !)

SAXON @Heavy Week End 2025
POWERWOLF @Heavy Week End 2025

Elles sont là, elles sont de sortie les meutes de loups-garou, impatientes de répondre à l’appel d’Attila Dorn et de Falk Maria Schlegel. Qu’on aime ou pas sa musique, un concert de Powerwolf est toujours prometteur de bons moments. Au pluriel. Car plus que le show, c’est le partage, la communion entre le groupe et le public. Un grand voile cache la scène, et dès que ce dernier tombe, le public se libère.

POWERWOLF @Heavy Week End 2025

Bless ’em with the blade lance les hostilités – Powerwolf débute également sa nouvelle tournée ce soir, le public du HWE a donc droit à l’exclusivité du show! – et, très vite, très tôt, Attila s’adresse au public. Toujours en français, délivrant son éternel message « heavy metal is religion ». Forcément, ceux qui découvrent ce soir Powerwolf ne peuvent qu’être séduits tant par cette communion que par l’excellence du show proposé. Pas une seconde ne se passe sans un clin d’œil, un sourire, une complicité tant entre les musiciens qu’avec, surtout, le public.

POWERWOLF @Heavy Week End 2025

Les frères Greywolf monopolisent la scène lorsque Falk se retrouve coincé derrière ses claviers. Il est naturellement bien souvent présent en avant scène, accompagnant Attila, très en voix, dans cette grand-messe célébrant le heavy metal et son armée (Army of the night).

POWERWOLF @Heavy Week End 2025

« On va faire bouger nos hanches« , annonce Attila. « Qui veut danser avec moi? Avec Falk? » Le teasing lancé, tous deux font deux pas de danse annonciateurs de Dancing with the dead et, crachés ses premières banderoles qui retombent légèrement sur le public.

POWERWOLF @Heavy Week End 2025

Attila invite ensuite le public à chanter quelques mesures avec lui, le préparant ainsi à l’accompagner sur Armata strigoi. Chacun chante aux ordres d’Attila: tout le monde, puis les femmes puis les hommes (quelque peu plus nombreux) et même… « maintenant, la sécurité privée, allez, chantez avec nous la sécurité privée!« , rappelant que « je suis le maestro de cérémonie » lorsque le public s’élance avant son ordre. Communication, communion même, et humour font ce soir très bon ménage.

POWERWOLF @Heavy Week End 2025

Un loup garou sur fond bleu blanc rouge accompagne La bête du Gévaudan, titre chanté en français pour le plus grand bonheur de tous, suivi par le classique Demons are a girl’s best friend. Jamais Powerwolf ne laisse retomber la pression, que ce soit avec la pyro et les confettis – encore – sur Fire and forgive ou en faisant – toujours – participer le public, qui ne se fait pas prier.

POWERWOLF @Heavy Week End 2025

Le combat des « Uh » (coté Falk) et « Ah » (côté Attila) fait toujours son effet, et fonctionne à merveille, plus encore, une fois le « concours » terminé, lorsque 6.000 gorges reprennent le gimmick tout au long de Werwolves of Armenia, suivi de Heretic hunters.

POWERWOLF @Heavy Week End 2025

Les festivités continuent jusqu’à la conclusion habituelle, l’incontournable We drink your blood. Clairement, ce soir, Powerwolf a brillamment lancé sa nouvelle tournée. Le public repart ravi, la bave de la meute s’étant transformée en sourires marquant des visages simplement heureux d’avoir vécu ce moment. Un grand, très grand concert qui, malgré le froid, vient clore une première journée plus que prometteuse d’un week end de très belle fête. On sera de retour demain, promis!

POWERWOLF @Heavy Week End 2025

Interview : TRANK

Interview TRANK. Entretien le 30 mai 2025 avec Michel André Jouveaux (chant)

Après une première rencontre avec le quatuor au complet pour parler de la sortie de The ropes, le premier album de Trank, puis un entretien avec Johann, leur batteur, fin 2021pour échanger au sujet de la version deluxe dudit album, c’est aujourd’hui avec Michel, l’intarrissable chanteur, que nous parlons (entres autres sujets) du second album, The maze, et de sa sortie en version vinyle. Il en a des choses à raconter!

The ropes remonte à fin 2020. Depuis, The maze est sorti fin 2024 ; quels retours en avez-vous eus ?

Les chroniques ont été très flatteuses jusqu’ici, toutes… Après, j’imagine qu’il y a des gens qui ont écouté cet album, l’ont trouvé tellement nul qu’ils n’ont pas voulu écrire à son sujet, mais on a eu des chroniques extraordinaires, et les chansons de l’album passent très bien sur scène, ce qui est un bon test pour nous. On passe beaucoup de temps à les peaufiner en studio – on est légèrement maniaques du son, de la production, on veut sortir des chansons dont on pense qu’elles sont les meilleures possible. Mais le but, c’est de les jouer sur scène. Les chroniques et l’accueil des chansons sur scène sont incroyablement positifs.

Si on se parle aujourd’hui, c’est parce que vous sortez maintenant une version vinyle de cet album. Déjà, pour The ropes, vous aviez sorti quelques mois plus tard, une version double de l’album avec un second CD de vos titres réarrangés par d’autres. Y a-t-il, avec cet album, des choses particulières ou doit-on arrêter maintenant cette interview ?

(Il explose de rire) C’est un vrai rêve de gosses pour nous ! Deux d’entre-nous sommes très fans du format vinyle… On aurait déjà voulu le faire pour The ropes, mais c’était un peu compliqué pour plein de raisons, pour la supervision… The ropes, c’est un album de 52’, qui est une durée batarde. Si on met plus de 44, 45’ sur un vinyle, la qualité du son s’en ressent vraiment. Au-delà de 50’, la dynamique est bâclée, le volume général est assez bas…

Et c’est trop court pour faire un double…

Voilà, et faire un double, ça coute deux fois plus cher. Ou alors, il fallait qu’on retire une chanson ou deux mais c’est comme te demander lequel de tes enfants tu veux mettre sur EBay ! A l’époque, on avait discuté et la sortie du vinyle n’était pas une priorité. Il y a beaucoup d’artistes, d’ingé sons… qui sont venus nous voir en nous disant qu’ils voudraient bien remixer tel ou tel morceau, en faire autre chose, de l’électro, de l’indus. On a priorisé ça et on a laissé tomber le vinyle, ce qui pour moi était un crève-cœur, mais il faut faire des choix. Du coup, quand on a attaqué ce nouvel album, je leur ai dit : « Ok, les mecs, mais on fait 44’ maximum ! Comme ça, on pourra faire le vinyle ! » (rires) Ça a entrainé un processus de sélection d’autant plus brutal pour savoir quels titres se retrouveraient sur l’album mais ça nous a permis de le sortir en vinyle. On en est très contents, d’autant plus qu’on a été très bien entourés pour la sortie de cet album, en particulier par Andy Van deck qui a fait le mastering. Il travaille à New York, il est très réputé en matière de mastering – il s’occupait notamment de celui de Porcupine Tree avant que ce soit Steven Wilson qu’i s’en occupe lui-même. Il est aussi réputé pour la qualité de ses mastering pour des albums vinyles, et quand il a masterisé l’album, il l’a fait en plusieurs versions : une version CD, une version plus haut débit pour le numérique, et une version pour le vinyle. La raison pour laquelle le vinyle sort un peu plus tard que le CD, c’est qu’on voulait aussi qu’il soit pressé dans une usine où on avait une garantie de qualité sur le résultat final. Les usines capables de très bien presser, il n’y en a que deux en Europe. Elles ont des listes d’attente assez longues, mais on espère que quand les gens vont écouter l’album, ils se diront que ça valait vraiment le coup d’attendre.

Encore faut-il avoir le matériel pour écouter le vinyle dans de bonnes conditions…              

C’est vrai, il vaut mieux avoir une bonne platine… L’intérêt du vinyle, il est là, sans passer par une numérisation du son qui ruine tout. Brancher un vinyle sur une enceinte connectée, non, ça marche pas, c’est un peu comme mettre un moteur de deux chevaux dans une Ferrari…

On n’avait pas eu l’occasion de discuter à la sortie de The maze, alors comment décrirais-tu la musique de Trank à quelqu’un qui ne vous connais pas encore ?

Oh, c’est la question la plus difficile… On a déjà du mal à la décrire nous-mêmes…

Je me rappelle que dans votre communiqué de presse de The ropes, vous aviez mentionné le fait que Deep Purple disait que s’ils se formait aujourd’hui, ils sonneraient comme Trank…

C’est vrai, ils avaient dit ça, c’est extraordinairement flatteur. Après… Je ne suis pas trop certain de savoir ce qu’ils voulaient dire par là (rires), mais ça nous a fait très plaisir. Du coup, ça nous a aussi mis la pression parce que dans le même communiqué, ils disaient à leur public de venir à l’heure, « on les a choisis, ils sont bien ». Donc, on s’est pointés, et là où d’habitude, en tant que première partie, tu commence à jouer avec une salle à moitié vide qui se remplit quand tu joues, on est monté sur scène à la Riga Arena, et la salle était blindée avec 16.000 personnes ! Des gens qui étaient là, les bras croisés, genre « vas-y, montre-moi ce que tu fais, on est venus pour ça… » Heureusement, ça s’est bien passé mais ils nous avaient bien mis la pression quand même (rires).

Revenons à ma question : comment tu décrirais la musique de Trank ?

La plaisanterie qu’on faisait au début, c’est de dire que c’est un peu comme si Soundgarden et Depeche Mode faisaient un bébé. Mais c’est un peu ça, il y a une base hard rock assez typée 90’s qu’on trouve dans la plupart des morceaux, avec une colonne vertébrale axée sur un gros riff, et des choses plus proche du rock alternatif, façon Muse des grandes années. Il y a cette base qui se mélange avec une influence post punk. Je suis le plus grand fan de Depeche Mode parmi les gens que je connais, et, forcément, ça s’entend, dans la façon d’utiliser l’électronique, par exemple. Là où les deux références se retrouvent, c’est dans ce qu’on trouve intéressant chez eux, cette capacité à composer de la musique avec une certaine noirceur et un côté très accrocheur et entrainant qui fait que tu rentre dedans immédiatement. Et ça, ça nous parle. A l’époque de The ropes, un chroniqueur avait commencé sa chronique en écrivant « gros son et émotions fortes », et ça nous va complètement. On ne fait pas de la musique extrême, avec du bruit non stop et des hurlements continus, on aime l’idée de susciter de l’émotion chez les gens. Le travail sur le son aussi est important. Mélanger des parties de guitares qui alternent entre une forme de puissance et une richesse de textures, d’ampleur d’atmosphère, avec de l’électronique va amplifier le côté « cinématographique » de la musique. Le fait d’avoir une rythmique basse batterie apporte aussi cette puissance et ces nuances. Johann, notre batteur, c’est le fan ultime de Toto, et a priori, tu ne va pas trouver cette référence chez la plupart des batteurs de metal ou de hard rock, souvent plus dans un style « tape-dur ». Cette étiquette de « gros son émotions fortes », ça nous va bien. Quand tu lis les chroniques de l’album, on cite un nombre de références incroyable. Certains ont parlé de A Perfect Circle, Nine Inch Nails, Disturbed, dont on avait aussi fait la première partie… Tout un tas de noms très flatteur, et ce que tous ces noms ont en commun, c’est une certaine façon de combiner une énergie intense avec une mélodie tout de suite accrocheuse. L’identité de Trank, c’est un peu ça.

On est d’accord que Trank ne se contente pas d’un style et puise dans de nombreuses références (il acquiesce). Si tu devais ne retenir qu’un seul titre de The maze pour définir ce que Trank est aujourd’hui, ce serait lequel ?

C’est une très bonne question ! Comme ça, au débotté, je te dirais Miracle cure qui est une chanson qui résume pas mal la personnalité du groupe. Pour moi, c’est peut-être celle qui nous résume le mieux, d’abord parce qu’elle a ce côté accrocheur et sombre, elle est sur un mid tempo assez lourd et elle mélange des moments de très forte intensité au niveau guitare et voix – on se rapproche du metal, souvent – avec des moments qui relèvent beaucoup plus d’une forme d’électro planante. Et puis, il y a un passage inattendu, qui marche très bien sur scène, c’est quasiment du rap. C’est plus de la parole rythmée que du chant. Le résultat donne quelque chose de très cohérent et qui, pour nous, sonne comme un mini film de 4 ou 5’. Il résume assez bien tous les contraste qu’on peut trouver dans notre musique.

Je reviens sur ce mot de « contrastes ». C’est quelque chose qu’on retrouve sur les deux versions de votre premier album (l’original est blanc, la seconde édition rouge et noire) que sur The maze avec ce labyrinthe sombre traversé par ce couloir de lumière.

La notion de contraste et de paradoxe dans la musique et dans l’image est très intéressante pour nous. J’aime beaucoup l’idée d’écrire des chansons qui vont traiter de sujets par définition assez lourds, mais de chercher transformer ce matériau en quelque chose qui permette d’établir une connexion avec les gens. Il y a un côté « alchimie » dans la musique que j’aime beaucoup. Même si on n’est pas tous angoissé au même niveau dans le groupe, àA un moment ou un autre, tu vas forcément plonger au tréfonds de ton estomac, ressortir une espèce de nappe de goudron a=et toutes les saloperies – la peur, la colère, l’angoisse, l’anxiété – et tu en ressors quelque chose de particulier, surtout dans le chant. Je me trouve très privilégié dans la mesure où je peux faire ça. Tu transformes, tu transmutes tes propres angoisses en quelque chose de positif, et c’est quelque chose que les gens ressentent, ce qui crée une connexion entre eux et toi. Ce contraste est au centre de tout. De manière générale, dans le contraste on trouve les nuances. On aurait tous 22 ans, on ferait la musique qui correspond à l’âge, on serait peut-être plus monolithique, monocorde ou monocouche. On est tous passés par là, et on recherche maintenant cette notion de contraste. Oui, elle est au cœur de tout ce qu’on fait.

On sait aujourd’hui qu’un groupe de rock, qui plus est français, ne vit pas, ou très difficilement de sa musique. Quelles sont vos métiers autres ?

On a des métiers très variés : David, qui est un gros costaud, fait de la sécurité privée, Johann fait du marketing dans une grosse société, ce qui était aussi mon cas jusqu’à il y a une dizaine d’’années, maintenant je suis indépendant, consultant en stratégie le jour et musicien la nuit, et j’ai aussi une boite de musique de pubs, ce qui fait que j’ai trois métiers ! Pas toujours facile à gérer… Emma, notre manageuse, travaille pour une concession automobile à Genève. Arnaud est informaticien et Nico est financier. On a tous des métiers, et des familles, et on considère Trank comme un métier… qui nous coûte de l’argent et qui est financé avec nos autres métiers ! On fait Trank par passion. La dernière chose qu’on veut entendre c’est « si voulez que ça se vende, que votre clip soit diffusé, il faut faire ci et ça ». on a la chance de pouvoir faire les choses comme on le veut sans avoir à se demander si ça va se vendre ou pas.

On en a vu des artistes qui se sont fourvoyés parce que leur management ou label leur disait quoi faire et le public n’a pas répondu présent… Trank c’est un groupe de rock. Le rock, c’est aussi la scène. A quoi faut-il s’attendre avec Trank en concert ? Va-t-on pouvoir vous voir un peu partout en France ?

Oui… On aime beaucoup jouer dans les festivals, on vient d’en enchainer trois d’affilée, et il y en a quelques-uns qui arrivent cet été. On y croise des gens qui sont exactement comme nous, des mordus qui font ça par passion, pas pour s’enrichir. On se retrouve à jouer pour des gens très demandeurs de musique. On aime beaucoup jouer dans ce contexte-là aussi parce que les gens qui organisent ces trucs deviennent rapidement des potes. On a le même virus, et ça crée des liens.

Mais en dehors des festivals, vous allez visiter les villes de France ? Il y a des gens qui se déplacent aussi en clubs…

Alors laisse-moi dire ceci : appel aux bookers et aux tourneurs ! Nous, on va là où on nous demande, la seule contrainte, c’est que maintenant, on est 6 sur scène. L’album, on l’a fait à trois, puisqu’on a eu un gros changement de line-up puisque Julien (guitare), avec qui j’avais cofondé le groupe a décidé de se consacrer à sa vie perso, le rythme de Trank n’était plus compatible avec sa vie. Il a participé à trois chansons sur l’album, mais on l’a fini sans lui. Mais maintenant, sur scène, on est six : Emma, notre manageuse, joue des claviers et s’occupe des samples, Arnaud, notre nouveau bassiste qui nous a été recommandé et qui partage à la fois notre éthique de travail, notre niveau d’exigence et notre sens de l’humour de débiles… et on a un second guitariste, Nico, qui était avec moi dans un groupe de reprise. On voulait un son plus étoffé sur scène, ce qui implique d’avoir deux guitares. Lui et David se répartissent les guitares, on n’a pas de lead ou de soliste, chacun joue en fonction de ce qui lui correspond le mieux. Donc on est six, et la logistique est forcément plus compliquée. Et on met un point d’honneur à essayer de répondre positivement à toutes les demandes, mais ce n’est pas toujours possible… Après, à quoi s’attendre ? Sur scène, la formule est proche de ce que tu trouves sur album, l’esprit musical ne change pas. Si sur album l’équilibre entre noirceur et lumière est de 60/40, sur scène, c’est l’inverse, l’intensité est là mais on communique beaucoup avec le public, on fait beaucoup participer les gens.

On parle de contraste, mais il y a aussi un point commun à vos deux albums qui entraine une question sur le prochain : ils commencent par l’article « The » (il rit). Le prochain va aussi commencer ainsi ?

C’est vrai ! Je ne sais pas… J’ai plaisanté l’autre jour en disant que le prochain s’appellera The end, comme ça il y aura « The » dedans et on aura encore une lettre en moins – cinq, quatre puis trois ! En fait, le titre de chaque album est venu du lien thématique qui unit la presque totalité des chansons. Un lien pas intentionnel, à la base. C’est moi qui écris les paroles, et je les écris à la fin. On travail un instrumental ensemble, que je laisse, comme en cuisine, « je réserve », quelques semaines ou jusqu’à 5 ans… A un moment, je ressors le morceau et je cherche dans mon bloc note l’idée qui pourrait coller, sur la rythmique ou autre. A partir de là, le texte et la mélodie vocale s’écrivent autour de ce thème. Pour les deux albums, au bout de cinq ou six chansons écrites, je me suis rendu compte qu’elles étaient liées par un thème commun. Dans The maze, c’est la quête de l’identité. C’est un thème qu’on retrouve partout, il y a une obsession identitaire, tant dans les discours de la gauche que de la droite, d’ailleurs, qui n’a jamais été aussi forte et, paradoxalement, il n’a jamais été aussi difficile de trouver sa propre identité et de l’affirmer. On reçoit tellement d’injonctions contradictoires qu’on ne sait plus où aller… on vit une époque où les gens doivent, ils ne sont pas encourager, ils sont forcés de se définir non pas en fonction de ce qu’ils font ou accomplissent, ce qu’ils créent, mais en fonction de qui ils sont, que ce soit une origine ethnique, réelle ou supposée, une appartenance religieuse, réelle ou supposée, un propos qui suffit à les définir « entièrement » et à les réduire dans l’esprit de gens qui sont les premiers à les juger et les condamner… Tu dois naviguer en permanence dans cette espèce de tir de barrage d’injonctions contradictoires sans vraiment jamais savoir ce qui va passer ou pas dans l’affirmation de ton identité. En plus de la pression naturelle imposée aux enfants et aux ados… The maze, c’est ça, ce labyrinthe intérieur et extérieur dans lequel on se trouve aujourd’hui avant de pouvoir répondre à cette question fondamentale : « qui suis-je ? » Elle est beaucoup plus complexe que cette vision simpliste, manichéenne, binaire – le mot qui tue ! – on met les gens dans des cases d’une manière simpliste, c’est effarant !

Quelle pourrait aujourd’hui être la devise de Trank ?

C’est une question, un exercice que j’aime bien qui m’évoque Depeche Mode qui, à une certaine époque prenait une phrase tirée de son contexte, issue d’une chanson et qui était imprimée en bas de la pochette et qui résumait un peu l’album… une devise pour Trank ? Il y en a plein de possible, celle qui me vient à l’esprit tournerait autour de – allez, je vais faire le vieux con – je vais citer Yoda : « fait ou ne fait pas ». On est très jusqu’au-boutistes dans le groupe, on est très exigeant sur notre façon de faire les choses. Être passionné c’est en soi une bonne chose. On vit dans un monde où il y a une sorte de fénéantise, d’apathie, un monde post téléréalité qui depuis 20 ans te montre que le meilleur truc à faire c’est de reste assis en espérant qu’une équipe de télé débarque pour démontrer à quel point tu es extraordinaire ! Pour nous, nous sommes tous des passionnés, l’idée c’est de faire ce que tu fais à fond.

As-tu quelque chose à rajouter avant de terminer ?

Oui, on parlait de la sortie de l’album en vinyle. S’il y a des gens intéressés, le meilleur moyen de se le procurer, c’est d’aller directement sur le site trankmusic.com. Je crois qu’il reste aussi quelques copies du premier album, plus beaucoup, mais il en reste. On parlait de passion il y a deux minutes, et je crois que, ce qu’i y a de plus gratifiant pour nous, en studio ou sur scène, c’est qu’on rencontre des gens aussi mordus que nous. La musique n’est plus le phénomène de masse culturel que c’était quand on était gosses, et ça fait d’autant plus plaisir de connecter avec des gens qui écoutent notre musique. C’est une des choses les plus incroyables et on a vraiment le privilège de faire ce qu’on fait !

SCORPIONS: 60 années de piquant

Scorpios @Heavy Ween End 2024

Il est bien loin le temps où nos arthropodes teutons préférés nous annonçaient leur départ à la retraite. Depuis 2012, Scorpions n’a de cesse de toujours se faire, nous faire, plaisir avec quelques nouveautés discographiques et, surtout, de nombreuses tournées. Difficile de croire, alors que le groupe repart sur les routes, que Scorpions ait vraiment pu penser à sa retraite. Car le plus gros et plus ancien groupe de rock allemand propose depuis quelques temps des sets qui aident à oublier quelques années de vaches maigres et de manque d’inspiration discographique, redonnant un réel sens à une carrière qui, outre de nombreux envieux, fit et fait encore rêver des millions de personnes à travers la planète. Alors, pendant que Scorpions attaque un nouveau temps de partage avec le public, nous avons souhaité vous offrir un résumé de sa carrière, en attendant de pouvoir revoir une nouvelle fois ce groupe mythique qui a écrit certaines des plus belles et exceptionnelles p(l)ages du rock. Ils sont peu nombreux les groupes Allemands à pouvoir se vanter d’un tel parcours.

Lorsque le guitariste Rudolf Schenker fonde, à Hanovre, Scorpions, c’est au cœur d’une Allemagne à deux visages, qui vit en pleine guerre froide. Nés du « bon » côté, à l’Ouest, donc, les jeunes de 1965 découvrent, grâce (ou à cause) aux troupes américaines les nouveaux codes culturels du monde occidental. Vestimentaires, tout d’abord, avec l’apparition du blue jean et des blousons de cuir, alimentaire également, avec la commercialisation de produits comme le chewing gum ou les sodas, et également musicaux avec l’arrivée du rock’n’roll incarné, entre autres et principalement par Elvis Presley.

Sans être pour autant totalement permissifs, les parents d’alors, qui ont vécu la guerre, cette guerre infamante qui a jeté l’opprobre sur l’Allemagne, sont parfois plus ouverts d’esprits et tolérants avec leur progéniture. C’est le cas des époux Schenker qui encouragent leurs enfants et les poussent dans les voies artistiques nouvelles.

Rudolf Schenker se lance dans l’aventure dès 1965 en fondant le groupe de sa vie : Scorpions. Les années passent, ainsi que les musiciens, le jeune homme forgeant son identité musicale au gré de ses petites expériences. Son frère Michael, également guitariste, le rejoint en 1970. Il vient d’un groupe qui se nomme Copernicus dont il débauche le chanteur Klaus Meine qui devient bientôt indissociable de l’image des Scorpions.

1972 voit les premiers efforts récompensés avec la sortie d’un premier album, Lonesome Crow. Le petit arthropode a choisi d’intituler son premier essai « le corbeau solitaire » … Si le titre peut passer pour original, les chansons, quant à elles, jettent les bases de la musique que développera Scorpions dans les années à venir : les guitares jouent un rôle prédominant, tant dans les mélodies que dans la tenue des riffs, la voix si particulière de Klaus rendant l’ensemble assez facilement identifiable, bien que dans la veine de la musique d’alors. Ce premier essai permet à Scorpions d’assurer la première partie de Rory Gallagher, Uriah Heep ou UFO, ces derniers parvenant à débaucher Michael Schenker. Le blond guitariste quitte ainsi son frère dès 1973 pour rejoindre Pete Way et sa bande.

C’est alors qu’un phénomène rejoint Scorpions : Uli John Roth brille autant par son jeu que par son mysticisme et son look hippie. Mais plus encore, sans que ce ne soit évident pour l’heure, c’est l’arrivée du discret bassiste Francis Buchholz, un futur pilier du groupe, qui passera plus de quinze ans avec Scorpions, qu’il faut remarquer. La sortie de Fly To The Rainbowsur RCA en 1974 démontre que le choix est le bon. Si l’histoire n’a retenu que le dynamique Speedy’s Coming, l’album reste bourré de ces éléments propres aux Allemands : hard rock et mélodies soignées. La pochette, colorée, dessinée par Wandrey’s, est aussi quelque peu décalée : si le recto nous montre une sorte de scaphandrier du ciel, volant sur des skis à hélices, le verso nous dévoile l’autre face de cet énergumène volant. Un peu comme si le groupe nous disait « kiss my ass » … Et c’est bien là que les noms des musiciens sont inscrits !

L’année suivante, lorsque le temps est venu de préparer un nouvel album, Scorpions démarre une longue et fructueuse collaboration avec le producteur Dieter Dierks. Illustré par une photo pleine d’un érotisme subtil (signée Michael Von Gimbut), In Trance parait en 1975 et se démarque plus encore par la puissance de chansons passées à la postérité : Dark LadyIn TranceRobot Man… Scorpions redéfinit quelque peu sa musique en conservant les ingrédients utilisés précédemment (double voix Klaus/Uli  mélodies efficaces et mémorisables) en écartant subtilement les aspects trop psychédéliques (toujours présents sur Evening Wind ou Sun In My Hand) pour se recentrer sur l’essentiel. In Trance fait alors exploser Scorpions au Japon – et devient même la meilleure vente jamais réalisée par un album RCA au pays du soleil levant. Notons également que l’image des Scorpions s’affine grâce à une signature nouvelle : le logo qui deviendra bientôt indissociable de l’image du groupe. Les Allemands partent sillonner une partie du continent européen en ouverture de Kiss, une opportunité qui ne se refuse pas. Elu par leur concitoyens meilleur groupe live allemand, Scorpions s’attaque alors à sa première tournée anglaise qui vit les cinq musiciens investir le Marquee de Londres.

Si sa carrière internationale est bien lancée, Scorpions doit maintenir la pression musicale et rentre de nouveau en studio au début de l’année 1976, avec un nouveau batteur (le 4ème en 4 albums, mais cette fois, c’est le bon !) en la personne de Herman Rarebell parfait pendant rythmique de Francis Buchholz. Désormais, les Allemands font tout pour qu’on parle d’eux : de la scandaleuse illustration de couverture montrant une adolescente assise nue derrière une vitre où l’on devine le passage d’une balle d’arme à feu au contenu musical, toutes les raisons du monde sont réunies pour que Virgin Killer soit le sujet de conversations du moment. La pochette à elle seule fait jaser dans les derniers salons où l’on cause, bien que l’époque ne soit pas encore à la dénonciation de la pédophilie. Nul doute qu’aujourd’hui, ce type de pochette subirait une censure immédiate (les rééditions ont remplacé l’originale par une photo du groupe datant des sessions de In Trance). Mais qu’on parle d’eux en bien ou en mal, l’important est qu’on parle de Scorpions… Le public va croissant. La puissance de morceaux comme Pictured LifeCatch Your TrainHell Cat ou le morceau titre rentrent dans le lard en allant droit au but : le son concocté par Dieter Dierks est rond et sec, généreux et râpeux tout à la fois, les guitares aiguisées tiennent une place prédominante. Scorpions vient de trouver l’identité de sa musique avec ce line up exceptionnel, proposant des ballades plus que réussies (In Your Park et Yellow Raven). Une seule difficulté reste à noter : il ne peut y avoir qu’un chanteur. On préfèrerait que le plus « hendrixien » des guitaristes allemands (Uli Roth) laisse Klaus Meine maitre des voix sur Polar Nights. Cette faute oubliée, Scorpions continuent de s’imposer et remporte même son premier disque d’or au Japon, est sacré meilleur album de l’année en Allemagne… Tout semble aller pour le mieux et sourire aux Allemands en ces années 70.

Crachant leur venin tant qu’il y en a, Rudolf Schenker et sa troupe décident de confirmer le potentiel et l’importance artistique de Scorpions aussi vite que possible. Toujours accompagné de Dieter Dierks, le groupe s’attèle à la réalisation du sublime Taken By Force. Après le scandale de la pochette précédente, l’album n’est illustré que par une bande sur laquelle figurent la photo et le nom de chacun des musiciens et au centre de la pochette est inscrit le titre. Plus sobre, tu meurs ! Le message sous-entendu est clair : c’est la galette à l’intérieur qui doit nous intéresser. Et là, il n’y a rien à redire : Scorpions a trouvé son équilibre et passe à la vitesse supérieure, se plaçant dans le peloton de tête des formations européennes de cette fin de décennie. Steamrock Fever, et ses guitares hurlantes totalement taillées pour la scène, accompagne les futurs classiques que sont We’ll Burn The Sky (et sa douce introduction qui deviendra la signature des ballades propres au groupe), The Riot Of Your Time, le controversé (il fallait bien quelque chose quand même !) He’s A Woman – She’s A Man – ultra speed et violent (ah ! ces aboiements de Klaus !) – ou le très « hendrixien » The Sails Of Charion qui porte les derniers stigmates de l’ère psychédélique.

Scorpions s’embarque alors pour une nouvelle tournée mondiale qui passera, en avril 1978, par le Japon où sera enregistré le double live Tokyo Tapes, une collection de 18 des meilleures créations des Allemands. Face à un public tout acquis à sa cause, Scorpions se montre explosif de bout en bout, ou presque. Les grands classiques sont foison (Backstage QueenIn TranceWe’ll Burn The SkySteamrock FeverHe’s A Woman – She’s A Man…), ainsi que le passage “obligé” Pictured Life sur lequel chante Roth, pour la dernière fois. Car, à l’issue de cette tournée marathon, le guitariste fils du soleil et de la lune quitte ses compères pour fonder Electric Sun. C’est d’ailleurs ce titre qui sera retiré de la réédition CD quelques années plus tard afin de pouvoir faire tenir ce concert sur un seul disque…

De retour en Allemagne, avant d’avoir trouvé un nouveau guitariste, le groupe entre une nouvelle fois en studio où Michael vient seconder son frère. L’enregistrement de Lovedrive commence alors que les auditions continuent. Le groupe pense intégrer un instrumentiste anglais ou américain, mais finalement, son choix se porte sur un jeune Allemand, Matthias Jabs qui se voit accorder le temps d’apprendre quelques morceaux avant d’entrer en studio. Sacré baptême du feu pour celui qui deviendra l’alter-ego de Rudolf Schenker, et un des piliers du groupe, encore présent aujourd’hui.

Une fois l’enregistrement terminé, le groupe met sur pied une nouvelle tournée. Pourtant, un évènement risque de mettre en péril la bonne santé de Scorpions : Michael demande de réintégrer le groupe. Famille, quand tu nous tiens… Matthias Jabs est mis sur la touche alors que le groupe s’engage dans une vaste tournée mondiale. Mais, alors que Scorpions est bien engagé sur la route, « l’ange blond » s’envole soudain en plein milieu de la tournée, juste avant le concert de Lyon, laissant son frère et ses compagnons dans une mouise sans nom. Enfin, on peut l’imaginer. La seule solution est d’appeler Matthias Jabs à l’aide. Ce dernier revient, apprend en un temps record le répertoire qu’il devra interpréter et sauve ainsi le groupe qu’il ne quittera plus jamais, apportant du sang frais, et sain, à tous.

Fin technicien, doté d’un grand sens de la mélodie et d’un enthousiasme à toute épreuve, ses apports permettent à Scorpions de franchir un nouveau palier. Ce line-up (Klaus Meine, Rudolf Schenker, Matthias Jabs, Francis Buchholz et Herman Rarebell) est celui qui donnera naissance aux plus respectés albums du groupe qui se fixe un nouvel objectif ambitieux, mais réaliste : la conquête en grand format du continent américain. Débute alors une tournée en ouverture, à quelques exceptions près, de Ted Nugent, AC/DC ou Aerosmith.

Lovedrive (n°36 en Angleterre et 55 aux USA) fait un triomphe dès sa sortie en janvier 1979 grâce à la conjonction de plusieurs éléments : Scorpions fait partie des plus importantes formations européennes de cette fin de décennie, certes, mais en plus, au-delà de la pochette à l’humour décalé qui fait encore jaser, Jabs apporte de la fraicheur et une énergie nouvelle au groupe, deux éléments qui se ressentent dans chacune des compositions auxquelles il a participé. Rudolf Schenker étant maintenant maître des compositions (compositeur de sept des huit morceaux, co-compositeur du dernier) joue beaucoup sur l’homogénéité de l’ensemble. Scorpions fait un pas de plus vers l’excellence et voit même ses efforts enfin récompensés : plus de 500.000 exemplaires sont vendus sur le seul territoire américain, faisant de Lovedrive le premier album d’or que reçoivent les Allemands sur le nouveau continent.

La sortie, en 1980, de Animal Magnetism confirme le statut incontournable de Scorpions. L’équilibre entre les musiciens est enfin trouvé. Mieux, il existe entre eux une parfaite symbiose… Les compositions sont carrées, efficaces et, simplement, populaires. L’album est une réussite tant artistique que commerciale (il est disque de platine aux Etats-Unis où il atteint la 52ème position du Billboard, et arrive n°23 des charts UK) et la tournée qui suit confirme la maitrise scénique du groupe qui ose le décor d’un scorpion en guise d’estrade pour la batterie. Partout les foules se font plus denses, et plus exigeantes aussi. Si la tournée est une réussite complète, la voix de Klaus Meine commence, sur la fin, à montrer des signes de faiblesse.

Alors que Scorpions se trouve en studio en 1981 pour préparer son futur album, un évènement vient soudain interrompre les enregistrements. Le chanteur se retrouve sans voix. Plus un son correct ne sort de sa gorge. Des examens médicaux révèlent la présence de polypes sur ses cordes vocales. Klaus Meine est immédiatement hospitalisé à Cologne, avec succès. Cependant, si l’opération a permis de se débarrasser des corps étrangers et indésirables, le chanteur se voit intimer l’ordre formel de demeurer muet quelques mois s’il veut pouvoir simplement espérer rechanter un jour. Dans le cas contraire, son mutisme pourrait être définitif. Pendant sa convalescence, les autres membres du groupe continuent de travailler. Klaus participe également, donnant ses instructions et signifiant ses idées par écrit. Pour travailler de manière réaliste, Scorpions engage un chanteur « intérimaire », un Américain du nom de Don Dokken. Forcément, les rumeurs fusent, d’autant qu’à cette période, de nouveaux phénomènes se font remarquer. Certes, les Def Leppard, Iron Maiden, Saxon ont encore peu d’expérience, mais la fougue dont ils font preuve semble n’avoir pas de limite. Si le monde cède aux coups de boutoirs de la NWOBHM, Scorpions en a vu d’autres…

Tout rentre dans l’ordre lorsqu’un visage bandé, hurlant de douleur, les yeux crevés par des fourchettes, vient orner les devantures et bacs des disquaires. Blackout parait en 1982 et la claque est immédiate : BlackoutNo One Like YouNowDynamiteCan’t Live Without You, rien n’est à jeter. Seul China White semble n’être pas totalement à sa place (qui me rappelle l’esprit de The Zoo, dont on connait le succès), tandis que la sublime ballade When The Smoke Is Going Down clôt cet ensemble extraordinaire. Extraordinaire, comme la voix de Klaus Meine, dure, déterminée, rugueuse, puissante ou douce selon les besoins. Modulable à souhait. A tel point qu’un journaliste affirmera que « les médecins n’ont pas soigné le chanteur, ils lui ont collé LA voix du Heavy Metal ». Les inquiétudes s’envolent bien vite, et la tournée qui suit remporte un succès similaire à celui de l’album (certifié plusieurs fois platine, élu meilleur album de l’année…) Aux Etats Unis, où Blackout atteint le top 10 du Billboard (et arrive 11ème des charts anglais), Scorpions embarque une autre bête pour chauffer le public : Iron Maiden. Puis l’année suivante, c’est la tête d’affiche du US Festival de San Bernardino (Californie) qui est offerte aux Allemands qui jouent devant plus de 325.000 spectateurs ! Le groupe est demandé partout, tout le monde veut voir le phénomène, et les dates s’ajoutent les unes après les autres…

Pourtant, il faut mettre un terme à cette vie de saltimbanque de luxe. Il est grand temps de retourner en studio et d’offrir aux très nombreux fans de Scorpions une nouvelle injection de mélodies fines et dures. Love At First Sting sort au début de l’année 1984 et confirme tout le bien que l’on pense de ce groupe qui jusqu’à présent a réalisé un parcours discographique quasiment sans faute. Bad Boys Running WildRock You Like A Hurricane ou Crossfire deviennent rapidement des hymnes incontournables. Mais c’est la ballade Still Loving You qui propulse le groupe au firmament. LE morceau, LA chanson, LE slow ultime que toutes les radios et télés diffusent à l’envie. Rien qu’en France, il s’écoule près de deux millions d’exemplaire du 45t ! Partout le groupe est plébiscité. Scorpions est même le premier groupe allemand à jouer 3 soirs d’affilée à guichets fermés au légendaire Madison Square Garden de New York, réunissant quelques 60.000 spectateurs chaque soir. Et ce succès se confirme partout à travers le monde, Love At First Sting parvenant à atteindre la 6ème position aux USA, la 17ème en Angleterre et les récompenses pleuvent : double platine aux USA, or en France et dans de nombreux pays européens…

La démesure semble de rigueur. En 1985, Scorpions joue au festival brésilien Rock In Rio devant quelques centaines de milliers de personnes, enregistre plusieurs shows de sa tournée mondiale, dont un premier passage derrière le rideau de fer, à Budapest, en Hongrie, et livre un testament auditif avec un double live, World Wide Live. Sans doute moins percutant que Tokyo Tapes, cet album n’en restitue pas moins fidèlement la folie des fans, dont certains découvrent, lors des concerts, que Scorpions n’est pas un groupe à ballades (le temps a su montrer la parfaite maitrise des Allemands en la matière…) mais bien un groupe de hard rock (le temps a aussi su démontrer la parfaite maitrise des mêmes Allemands en la matière…) Sans surprise, ce témoignage trouve de nouveau le chemin des tops en se classant, belle performance pour un album live, n°14 aux USA et 18 au Royaume Uni.

Scorpions a toutes les cartes en mains pour s’atteler avec sérénité à la réalisation de Savage Amusement, qui sera le dernier album produit avec Dieter Dierks. Les tensions, malgré deux années de repos, sont réelles. Cependant, et sans surprise, le public répond massivement, faisant de cette nouvelle galette un succès immédiat, dès sa sortie en 1988. Savage Amusement se classe n°1 dans divers pays européens, arrive n°3 aux USA… Mais pendant que le groupe sillonne une nouvelle fois la planète, le public occidental émet des signes de déception : oui, Savage Amusementest un vrai succès, commercialement parlant mais artistiquement, on a parfois l’impression d’entendre une recette réutilisée. Le pire est pourtant à venir…

C’est sans doute aussi à ce moment que les membres de Scorpions vont connaitre les dures lois de la gravité. Car lorsqu’on est monté aussi haut, on ne peut que redescendre. En cela, le label du groupe va avoir sa part de responsabilités en pariant sur (ou exigeant ?) une promotion basée sur « la » ballade. D’ailleurs, 1988 et 1989 ont vu sortir deux compilations, le Ep Gold Ballads et l’album Best Of Rockers And Ballads. Tout est dit…

De plus, un évènement vient changer les esprits : la guerre froide semble vouloir prendre des congés. Youri Gorbatchev veut détendre les relations entre les deux blocs. Glasnost et Perestroïka sont de rigueur. Ainsi, sans être le premier groupe à jouer derrière le rideau de fer, Scorpions est le premier groupe occidental de rock (décadent, donc, aux yeux de nombre de camarades soviets) à jouer en Union Soviétique. La ville de Leningrad (redevenue depuis Saint Pétersbourg pour les ignorants…) accueille les Allemands dix soirs d’affilée ! Ils retourneront l’année suivante, en 1989, à Moscou dans le cadre du Moscow Music Peace Festival, réunissant rien moins que Ozzy Osbourne, Bon Jovi, Mötley Crüe, Skid Row, Cinderella et les locaux de Gorky Park en plus de Scorpions, qui joue face à 260.000 spectateurs et une sécurité assurée par des militaires souvent plus occupés à profiter de ce qu’il se passe sur scène que dans le public.

Cette expérience moscovite inspirera les bases de ce qui deviendra Wind Of Changes. La chanson au message pacifique sort courant 1990, peu de temps après la chute du mur de Berlin. Wind Of Changes devient immédiatement un hymne international, une ode à la liberté qui trouvera plus de force encore avec la chute du bloc de l’est. Malgré l’enthousiasme et l’extraordinaire ferveur que suscite cette chanson, la sortie de l’album Crazy World semble moins exciter les foules. Malgré, aussi, la présence de chansons comme Tease Me, Please Me ou Kicks After Six qui portent la griffe de Scorpions et qui devraient rassurer le public. Mais la réalité est tout autre. Tout d’abord, l’absence de Dieter Dierks se fait d’autant plus sentir que le groupe a voulu produire cet album lui-même. Ensuite, les grands pontes du marketing ont décidé, depuis une certaine chanson d’amour, d’assurer la promotion des futurs albums de Scorpions avec la ballade, transformant insidieusement et durablement la perception que le public peut avoir de Scorpions qui, de groupe de hard rock devient groupe à ballades. Ainsi, et selon la biographie qui figure sur le site web du groupe, « leurs ballades, telle Still Loving YouHoliday (…) Always Somewhere et When The Smoke Is Going Down sont parvenues à gagner le cœur même de ceux qui détestent le hard rock. » Eh bien, cette réputation, encore d’actualité, a fait fuir un grand nombre de hard rockers dans le monde, qui tous, pour autant qu’ils soient amateurs de Scorpions, savent que les ballades font intégralement partie de l’univers musical des Allemands, mais pas pour occulter le reste. Crazy Worlds’en ressent, faisant preuve de moins d’originalité et de créativité, comme si les musiciens avaient été poussés à composer LA future ballade, celle qui allait tout casser… La tournée qui suit, si elle rencontre un franc succès, bien que moins important que précédemment, se solde par le départ du bassiste Francis Buchholz. L’équilibre en prend de nouveau un coup.

Avec un nouveau membre, le bassiste Ralph Rieckerman, Scorpions s’en retourne en studio, et se fait cette fois aider par un magicien du son : Bruce Fairbairn (qui a travaillé avec, et parmi d’autres, excusez du peu, Loverboy, Bon Jovi, AC/DC, Aerosmith, Van Halen, Kiss…) Tout est mis en œuvre pour redorer l’image du groupe mais à sa sortie, en 1993, la critique s’avoue, une nouvelle fois, déçue par Face The Heat. Les effets et recettes usés jusqu’à la corde lassent le public, et même Alien Nation ou No Pain, No Gain semblent réchauffés… Pire encore : Taxman WomanUnholy Alliance semblent, comme d’autres chansons, être là pour faire du remplissage. Scorpions vit une cruelle phase de manque d’inspiration…

Scorpions est alors sur la mauvaise voie, mais refuse de se rendre à l’évidence. Ou presque, car en engageant un nouveau manager, les choses pourraient changer. Le choix de Rudolf Schenker et sa bande se porte sur Stewart Young, qui s’occupe des affaires d’AC/DC, groupe qui est également passé par une longue période de doute. Mais Pure Instinct (1996) ne redresse pas la barre. Bien au contraire, Scorpions s’est laissé avoir : son album contient bien trop de ballades sirupeuses. Le mal est fait, le public tourne le dos au groupe, les stades se transforment en des salles bien plus petites… La confiance a cédé la place à la méfiance et quelques titres rock ne suffisent pas à inverser la vapeur. D’autant plus que Herman Rarebell, le batteur, décide de jeter l’éponge à son tour. En quelques mois, c’est toute l’ossature rythmique qui s’en est allée. Tout est à refaire. James Kottak, ex-batteur de Kingdom Come et Warrant, intègre Scorpions, assure la tournée et demeure dans le groupe pendant de nombreuses années. La tournée permet à Scorpions d’explorer des territoires qui lui étaient jusque-là inconnus, en Asie, Moyen et Extrême Orient. De nouveaux marchés à conquérir alors qu’en occident, le hard rock et le metal connaissent une crise sans précédent. Alors ces nouvelles contrées, et l’accueil que réserve le public, ont de quoi redonner confiance au groupe qui prépare un nouvel album pour la fin du siècle.

Eye To Eye sort en1999. Sur sa pochette en noir et blanc, étrangement, ne figurent que trois visages, ceux des plus anciens membres du groupe : Rudolf Schenker, Klaus Meine et Matthias Jabs. Cette illustration est pleine de sous-entendus (on évitera la comparaison avec les trois singes, svp), et lorsque le CD est décortiqué… il se fait descendre par une critique et un public qui disent « Stop ! » Les sonorités pop, trop pop, parfois électro ne plaisent pas. Que cherche Scorpions, hier flamboyant, aujourd’hui à peine l’ombre de lui-même ? La seule originalité du disque est qu’il contient une chanson en allemand, Du Bist So Schmutzig… Mais Rammstein fait bien mieux en chantant dans la langue de Goethe, et Doro Pesch (ex- Warlock et actuelle Doro) s’est plus d’une fois fait ce plaisir, donc, question « originalité », on repassera.

Ensuite, un album remporte la majorité des suffrages. C’est un vrai défi qu’ont relevé les hommes en noir de Metallica, accompagnés par Michael Kamen puisque le groupe pourtant boudé – euh, tout est relatif … – au cours des années 90, présente au monde les résultats live de sa collaboration avec un orchestre symphonique. Cela fait bien longtemps que classique et métal font bon ménage, mais cette fois, on accède au niveau supérieur. Alors, après la mode des albums Unplugged, voici celle des live symphoniques ou philarmoniques. Scorpions ne déroge pas à la règle et travaille avec l’orchestre philarmonique de Berlin afin de sortir, en juin 2000, Moment Of Glory qui sera suivi l’année suivante par Acoustica, un autre superbe live, cette fois-ci enregistré au Portugal. Si ces deux albums sont réussis – ce dont personne ne pouvait douter, les chansons de Scorpions étant parfaites pour ce type d’arrangement et d’orchestrations – le public n’y croit vraiment plus et ne suis pas.

Il est alors temps de se recentrer sur l’essentiel, à savoir : le Hard Rock. Il faudra trois ans à Scorpions pour terminer Unbreakable. Incassable, l’idée est séduisante… Car malgré les revers de fortune qu’a pu connaitre le groupe (dont le départ de Ralph Rieckerman, bientôt remplacé par Pawel Macidowa, un bassiste polonais – là encore les blagues se font légions, le groupe n’aurait plus les moyens de s’offrir les services d’un musicien allemand, et bla bla bla…) rien n’en est encore venu à bout. Si le résultat final est moyennement reçu, Unbreakable redonne un certain espoir, laissant deviner que le rock est toujours ancré dans le cœur des Allemands qui tentent de retrouver pêche et niaque. Oui, l’espoir semble en passe de pouvoir renaitre, grâce à des chansons carrées comme Blood Too Hot ou Deep And Dark qui sonnent comme le Scorpions des grands jours. Les deux années qui suivent sont consacrées à tourner. Se donner en spectacle. Lorsque le festival de Wacken invite Scorpions à tenir la tête d’affiche début août 2006, les Allemands offrent un show hors du commun, pendant plus de 2h30. Et les plus de 60.000 spectateurs présents assistent à un moment d’histoire dans la vie du groupe qui invite ses anciens membres sur scène : Uli Roth, Michael Schenker et Herman Rarebell répondent présents.

Renouant avec le succès, retrouvant la confiance des fans, Scorpions s’attèle à la réalisation d’un album ambitieux, un album conceptuel dont la musique se veut un retour musical aux sources. Humanity Hour 1 est bien reçu par les critiques et le public. Les médias voient dans cet album les marques du grand retour de Scorpions (qui, pour la première fois depuis In Trance, modifie son logo…) grâce à la puissance et l’efficacité du rapide et lourd Hour 1 et des hymnes que pourraient devenir You’re Lovin’ Me To Death, la ballade The Future Never Dies (qui rappelle Queen dans sa construction) ou le mid tempo Love Will Keep Us Alive. Oui, enfin, les cinq Scorpions retrouvent du plaisir et varient les ambiances musicales, ne cherchant plus à plaire au label mais à eux-mêmes et au public, à qui ils annoncent fièrement We Will Rise Again. Simplement.

De nouveau, les deux années qui suivent sont consacrées à sillonner le monde et à annoncer…qu’une nouvelle tournée mondiale démarrera en 2010. Elle sera la dernière, le groupe décidant de se retirer après plus de quatre décennies au service du Rock. Un 17ième album studio est enregistré et la claque est grande lorsque sort Sting In The Tail. Le Scorpions des grands jours est de retour, au mieux de sa forme. Que Schenker, Meine et Jabs décident de mettre un terme à l’aventure, soit. Mais il semble hors de question de partir la queue entre les jambes. Non, avec cet album quasiment sans faute – le précédent avait ouvert la voie du retour à l’excellence – Scorpions peut partir la tête haute, fier de son œuvre. Car conclure avec des brûlots comme le morceau titre, Slave MeRock ZoneNo Limit ou la ballade Loreleï, c’est partir en beauté. Seuls certains concerts de cette tournée à rallonge déçoivent, parmi lesquels on compte le Hellfest ou le Grasspop en 2011, où le groupe semble usé, manquant cruellement de ce dynamisme légendaire. Mais on peut espérer que Scorpions réserve à son public de salle, hors festival, quelques surprises… Chaque concert voit naturellement le public répondre « présent », un public qui retrouve un groupe au top de sa forme. Scorpions semble avoir trouvé une fontaine de jouvence car, de retraite, il n’est bientôt plus question.

Scorpions @Orléans 2012

Les cinq annoncent un nouvel album intitulé Comeblack dont la sortie est prévue pour fin 2011. Une compilation qui revisite pour moitié des titres de Scorpions et pour l’autre moitié des standards des années 60 et 70. Et, déjà, de nouvelles dates de tournée sont annoncées dont certaines dans des villes de France que Scorpions a rarement visitées… Retraite joyeuse ? L’heure de dire « Auf Wiedersehen « semble n’avoir pas encore sonné, ce que le groupe a depuis largement prouvé, n’ayant de cesse de sillonner les routes. Cependant, les dix dernières années n’ont pas été toujours très calmes pour les Allemands.

Si James Kottak a depuis longtemps prouvé être totalement à sa place, le batteur se fait plus que trop souvent remarquer. Outre son alcoolisme, il devient incontrôlable, et son comportement outrancier lui attire des ennuis dont Scorpions se serait bien passé. Comme en ce 3 avril 2014 où il se fait arrêter à Dubaï à la suite d’un geste insultant pour l’islam et se voit condamné à un mois de prison alors que le groupe devait jouer à Barhein… Tout le monde peut avoir une nouvelle chance, et Kottak participe ainsi à l’enregistrement d’un nouvel album, Return to forever – un titre fort approprié tant le groupe semble s’éloigner de plus en plus de la retraite ! Le 18ème album voit le jour en février 2015, Scorpions continuant de sillonner les routes, dont un Hellfest en juin de cette même année qui sera immortalisé sur une version Tour edition (2016) contenant 2 DVD live pleins de bonus (un concert aux USA, le Hellfest, des video et reportages…).

2015, pourtant, se termine mal, très mal. Le 13 novembre, la folie islamiste frappe Paris en trois lieux : des attaques terroristes visent le Stade de France, sans pouvoir y accéder, tandis qu’un autre groupe tire à vue sur des clients de bar et de restaurants des « Terrasses ». L’horreur absolue continue lorsqu’un autre groupe envahi le Bataclan en plein concert des Eagles Of Death Metal, tirant sur le public paniqué et, certains membres porteurs de bombes, se faisant exploser. 130 morts, plus de 410 blessés dont une centaine en urgence absolue… Naturellement, tous les évènements publics sont annulés le temps de retrouver un niveau de sécurité conforme aux attentes. Scorpions retrouve Bercy le 24 novembre, un Bercy aux abords plus que sécurisés, certes, mais un Bercy plein comme un œuf pour une communion musicale libératrice, plus encore libératrice lorsque Kottak entame au cours de son solo le rythme de la Marseillaise instantanément chantée par 20.000 gorges qui hurlent que, comme au début de l’année après les attaques de Charlie Hebdo, non, on ne se laissera pas vaincre par la peur du terrorisme aveugle.

Alors que le monde se remet de ses émotions, Scorpions prend finalement, « enfin » serait sans doute approprié, la décision de se séparer de son batteur de plus en plus ingérable et dont la santé décline au rythme de son alcoolisme (James Kottak mourra moins d’une décennie plus tard, le 9 janvier 2024 à l’âge de 61 ans, dans sa ville natale de Louisville, Kentucky). Il ne faut guère de temps pour lui trouver un remplaçant capable de supporter le rythme des tournées et connaissant les affaires musicales. L’heureux élu est rapidement trouvé en la personne du furieux frappeur Mikkey Dee, ex-batteur de Motörhead « libéré » de ses fonctions après la mort de Lemmy, le 29 décembre 2015. Son recrutement est officialisé le 16 septembre 2016 et les tournées continuent, ainsi que les enregistrements, dont Born to touch your feelings, en 2017, compilation de ballades désormais incontournables mais qui ne marque pas outre mesure les esprits.

Cette même année 2017 voit Scorpions entamer une tournée mondiale célébrant son album Crazy World. Célébration qui deviendra bientôt une habitude seulement interrompue – outre la crise sanitaire qui, entre mars 2022 au premier trimestre 2022, a vu toutes les manifestations publiques interdites – par la sortie, en 2022, d’un nouvel album studio, Rock believer, plus que positivement accueilli. Les Allemands repartent sur les routes pendant deux années (tournée au cours de laquelle Scorpions modifie les paroles de Wind of change après les attaques injustifiées de la Russie contre l’Ukraine) mais la route semble désormais sans fin.

Scorpions @Hellfest 2022

2024 est quant à elle l’occasion de célébrer le 40ème anniversaire de Love at first sting. Pour l’occasion, Scorpions offre aux Français trois très belles dates au Théâtre antique de Vienne (le 18 juin), à la première édition du festival Heavy Week end (le 21 juin) où Klaus Meine, vieillissant, a plus que du mal à se déplacer – on apprendra par la suite que le chanteur a récemment subi une opération du dos, les douleurs expliquant sa difficile mobilité – et au Festival de Carcassonne (le 23 juillet).

Scorpions @Heavy Week end 2024

2025 est aussi une nouvelle année de tournée, et, de nouveau, Scorpions honorera la France de sa présence en trois lieux : le 21 juin au Hellfest, le 24 à l’Accor Arena et, un mois plus tard, le 24 juillet, aux arènes de Nîmes. Oui, elle semble vraiment bien loin la retraite, alors continuons tant que faire se peut, de célébrer cet incontournable et, depuis longtemps maintenant, légendaire groupe qui a donné au rock certains de ses plus grands hymnes. Bad boys (are still) running wild !

Scorpions @Heavy Week End 2024

MAINKIND: Fool’s game

Hard rock, France (Autoproduction, 2025)

Ca fait un petit bout de temps qu’ils trainent, Mainkind. Amoureux du bon gros son hard rock vintage, celui toujours mélodique des 80’s avec ces riffs entêtants et ses airs à chanter en voiture, celui simple et, parfois, quelque peu maladroit, le groupe formé par le batteur Tony Treynel et le chanteur Terry Grumiaux est en effet loin d’être néophyte en matière de rock. « Titi » s’était fait remarquer notamment avec Factor Hate et son show digne d’un Alice Cooper débutant, tandis que Tony a donné la mesure à différents projets dont, si je ne me trompe pas, une des dernières incarnations de Dygitals. Pas étonnant, Hervé, le chanteur de ces derniers n’étant autre que le frangin du batteur. On n’est donc pas non plus surpris d’entendre Hervé donner de la voix sur un bon nombre de titres – il est même chanteur lead sur Paradise. Musicalement, on repart quelques décennies en arrière, avec un certain bonheur. Après une intro de casino, on entre dans le vif du sujet avec un Feelin’ free enjoué. On retrouve le son et l’envie des guitares d’alors (ici tenues par Vince Lawry et Bucky Tannen – un clin d’œil à la famille de roublards et molosses de Retour vers le futur?) et de la partie rythmique (la basse de Nicko Kalifornia, bonjour aussi les pseudos !) qui parfois explorent les univers de l’ouest américain (la ballade I am a man) ainsi que l’esprit du rock US qui fait mouche (cette intro à la batterie sur Right here, right now est digne d’un Alex Van Halen). Toujours rock, parfois heavy (Hang on suzy), ou simplement speedé (Take down easy, Hot girl, bad boy). Les thèmes abordés sont classiques – l’amour, la vie, le rock – et sans surprise. Loin d’être nostalgique, Fool’s game nous replonge sans équivoque dans un lointain passé, avec une envie réelle doublé de ces charmantes maladresses (dont un chant joliment éraillé mais parfois un peu poussif, et certainement sous produit). Mainkind ne réinvente rien, bien au contraire, mais, et c’est là le principal, se fait plaisir de bout en bout et, surtout, a tous les atouts pour faire s’agiter les foules en concert, véritable lieu d’expression de ce genre musical.

Interview: STRATAGEME

Interview STRATAGEME. Entretien le 5 avril 2025 avec Butcho (chant) et Gérard (basse)

Stratagème 2025

Butcho, tu es le « petit nouveau du groupe » puisque tu es le dernier arrivé. Qu’est-ce qui t’a amené à intégrer Stratagème ?

B : C’est eux qui m’ont contacté. Je n’avais plus de groupe, et je connaissais Stratagème de nom, mais je n’avais pas vraiment écouté ce qu’ils font. Je me suis un peu penché sur leur discographie et j’ai trouvé ça vraiment super. Je ne comprends pas comment j’ai pu passer à côté… Super solos de guitares, super mélodies… Je me suis dit « waow, je veux faire partie de ce groupe ! »

Stratagème a été formé en 1970, a une courte discographie, seulement trois albums dont le premier est sorti en 2013…

G : C’est ça, mais ce n’est pas tout à fait exact. Le groupe est né en 1970 mais pendant plusieurs années, on avait un chanteur de folk/variété. Au départ, j’étais chanteur de Stratagème, pas bassiste. On était deux chanteurs : il y avait Robert Belmonte, le chanteur d’Océan, et moi. Au bout d’un an, Robert a souhaité faire une autre carrière qu’avec Stratagème. Moi, j’ai rencontré une personne, Patrick Abrial, en 1975…

Un lien avec Thibault ?

G : Voilà. Avec lui, on a fait deux albums : Abrial Stratagème group, chez Sonopress, et un second, au château d’Hérouville, en 1979. Il y a eu un troisième album, avec Thibault Abrial à la guitare avant qu’il ne joue pour Halliday.

Ce n’était donc pas encore tout à fait Stratagème…

G : C’était Abrial Stratagème, pas tout à fait Stratagème, mais il avait une certaine notoriété et c’était normal qu’on mette son nom en avant. Le dernier album date de 1982, chez CBS.

Il y a un très long gap entre 19882 et votre retour au début des années 2010…

G : Oui. J’ai arrêté Stratagème parce que, en 1984/85, on avait de grosses conditions de travail avec CBS derrière nous. Grosse tournée avec tout ce qu’il fallait, mais finalement Patrick a souhaité arrêter. Donc, en 1985, j’ai mis Stratagème au repos, parce qu’il fallait bien gagner sa croûte. J’ai fait un autre métier en parallèle. J’ai repris la musique en 2007/2008. Entre 85 et 2008, il s’est passé pas loin de 25 ans, j’ai passé un brevet d’État de coach sportif. En 2008, l’ancien guitariste de Stratagème est venu me voir, me proposant de refaire Stratagème, « comme ça, pour se marrer ». Le problème, c’est que quand tu remets le doigt là-dedans… Lui n’a pas pu continuer pour des problèmes de santé, alors j’ai pris Philippe Kalfon comme guitariste, et avec lui on a un peu parcouru la France pendant onze années. On a arrêté juste avant le Covid. J’ai eu des problèmes de santé qui nous ont poussés à arrêter…

Butcho, tu es arrivé quand ?

B : Il y a un an et demi.

Comment est-ce que, l’un et l’autre, vous décrirez la musique de Stratagème à quelqu’un qui ne connait pas le groupe ?

B : Je dirai que c’est du hard rock classique, avec des mélodies, des guitares. On n’a rien inventé mais on le fait avec cœur. Je me mets toujours à la place des spectateurs qui viennent en concert : qu’est-ce qu’ils voudraient entendre et que chanter pour les faire chanter ? Le plus important, c’est de faire participer le public, et c’est ce qu’on fait !

G : Je rejoins ce qu’a dit Butcho… Ce qui est intéressant dans ce nouveau Stratagème, avec Butcho mais aussi avec les deux guitaristes qui sont beaucoup plus jeunes, c’est qu’ils amènent ce côté un peu moderne, metal dans une musique traditionnelle « hard rock années 80 ». L’avantage, aussi, c’est d’avoir une personne comme Butcho – je ne le dis pas parce qu’il est là – c’est quelqu’un qui échange beaucoup avec le public, le fait participer, et je trouve que c’est vraiment intéressant.

B : C’est ça, en fait… Quand je vois des groupes qui sont scène en mode stress, derrière leurs instruments ou qui se prennent un peu trop au sérieux, ça me fait rire parce que ce n’est que de la musique, c’est un partage. Je me sens privilégié de faire de la musique parce que la musique, ça appartient à tout le monde. Une fois qu’on a créé les morceaux, ils ne nous appartiennent plus, c’est à tout le monde. C’est pour ça que j’aime communiquer, qu’il y ait un véritable échange, et les gens le ressentent quand je suis sur scène… Je m’éclate vraiment, tout le monde s’éclate, je ne me prends pas au sérieux. Même à l’époque de mon ancien groupe, Watcha, je ne me suis jamais pris au sérieux, je me suis toujours amusé. Je ne me prends jamais au sérieux, ce n’est que de la musique. La musique, c’est de l’amour, du partage…

Ce soir, avec Stratagème sur scène, il faut s’attendre à quoi ?

B : Nous, on a fait des concerts dans des conditions vraiment difficile, avec très peu de gens mais on s’est vraiment amusés. Ça ne fait pas de différence, qu’il y ait une personne ou 10.000, c’est pareil, on se donne à fond, avec cœur, et on s’éclate ! On va pas faire la gueule pour les gens qui ne sont pas venus, on s’en fout, ils ne sont pas là !

G : Ce qui est paradoxal, c’est qu’on a fait en septembre le festival de Mennecy. On est passés en milieu d’après-midi, et Butcho, et Stratagème, s’est mis le public dans la poche, malgré la présence de groupes comme ADX.

ADX connait souvent un regain de jeunesse avec ses changements de line-up…

B : Oui, ils ne sont que deux d’origine, dans ADX, le chanteur et le batteur…

Le public metal peut être très exclusif, mais il est aussi très ouvert.

B : Très ouvert, et tu sais quoi, dans le dernier Ep, on a fait une reprise de Celebration de Kool and the Gang en version metal. On voyait tous ces mecs avec des t-shirts de death metal ou de thrash chanter Celebration avec le sourire en plus !

Ça ne marche pas toujours… on se souvient d’un certain Metallica reprenant L’aventurier d’Indochine, le public a chanté mais ce n’était pas ça…

B : Oui, maintenant Indochine n’a rien à prouver. Je voudrais bien avoir leur public, qui est le meilleur public au monde. Je suis allé les voir deux ou trois fois, le public est fidèle, ils sont toujours là, que ça aille bien ou mal, le public est là. Je dis au public d’Indochine : « Respect »… Vraiment. Après on peut critiquer Indochine…

Si on revenait à Stratagème, plutôt ? Parlons de votre discographie : L’avant dernier album est sorti en 2017, c’est ça ?

G : Alors, c’est un peu particulier. Oui… Non… En 2013, il y a eu notre album du retour, en 2018, Memories, comme le Covid est arrivé, il n’y a pas eu de promo sur cet album toujours avec Philippe Kalfon (note de MP : il doit y avoir une confusion sur les dates, la crise sanitaire ayant débuté en 2020…). Un troisième album est sorti, Never stop, avec le batteur d’origine de Stratagème, c’est lui qui avait créé Stratagème, Michel Laplanche, qui fait partie de FTF music et qui s’occupe un peu de Stratagème maintenant. Il m’avait dit que ce serait bien de sortir un dernier album, et avec mon ami Jean-Pierre Paulet, on avait déjà quelques titres de prêts. On lui a dit qu’on avait du matériel, tout ce qu’il faut, qu’on pouvait sortir un album et que ce n’est jamais fini. Moi, je voulais arrêter parce que, bon… Problèmes de santé, je tiens plus debout, je vois plus rien… Il y a des choses qui ne me convenaient pas : le batteur était trop vieux, le guitariste, ça n’allait pas, le chanteur habitait dans les Ardennes… C’était compliqué. Quand j’ai rencontré Pat Cazu, l’actuel batteur, il m’a dit connaitre un guitariste avec qui il avait joué pendant 10 ans, Marc de Lajoncquière. Il nous a présentés, et je suis tombé sur le cul. Il nous en a présenté un second, Sébastien, et pareil…C’est des pointures, un excellent niveau !

Et comment as-tu rencontré Butcho ?

G : Oh, Butcho, je l’ai rencontré plusieurs fois, on se croisait dans les concerts, on en a fait quelques-uns ensemble… Je le connaissais… Pas intimement, mais…

Après, intimement ou pas, ça vous regarde ! (rire général)

G : Ouais… Après, il est rentré dans Last Temptation, avec Farid Medjane – il faut savoir que j’ai joué deux ans avec Farid dans un groupe qui s’appelle TNT. Un jour, alors qu’ils étaient en tournée avec Scorpions, il m’appelle, ils étaient dans le car et il me dit que Butcho est avec lui. Il me l’a passé, on a discuté, et finalement… Je lui avais déjà proposé de rejoindre Stratagème, il ne pouvait pas et un jour, je le rappelle, je lui redemande et il me dit « oui, pourquoi pas, on essaye ». Tout arrive au bon moment.

Comment, en dehors de tous ces changements de line-up, est ce que l’un et l’autre vous analyseriez l’évolution de Stratagème entre ses deux derniers disques ?

B : En travaille sur le mini Lp, je voulais quand même qu’il y ait les racines des deux albums post Abrial. Qu’on garde l’esprit hard rock mais avec une touche moderne – tout le monde veut apporter son petit quelque chose dans les compositions. Chacun met sa patte, ca ne sera jamais comme « l’ancien » Stratagème, mais on en garde l’esprit.

G : On veut garder les racines de Stratagème, mais on a l’apport de ces deux guitaristes. L’un d’eux est fan de Megadeth, et, naturellement, ça change énormément de choses dans la couleur de notre musique. Le second est beaucoup plus bluesy. C’est un grand musicien, il est premier basson dans le plus grand orchestre philarmonique de Paris. Le hard rock, c’est son kiff ! Il amène ce côté très blues, très bizarre !

B : Je dirai qu’il apporte ses influences, très Guns ‘n’Roses, Myles Kennedy, ce genre de chose…

Butcho, toi, je t’ai toujours connu avec plein de projets, que ce soit Showtime, groupe de reprise des années 80, Last Temptation plus récemment et tout à l’heure, tu me parlais de ton groupe tribute à Scorpions. Il s’appelle comment ?

B : Il s’appelle Scorpians, avec un A.

Qu’a-t-il de particulier, ce groupe ?

B : On voulait faire un vrai tribute à l’américaine, avec les mêmes instruments, les mêmes fringues… On s’est vraiment fait cheir à faire les fringues nous-mêmes, mais on voulait vraiment restituer dans le détail la tournée de 1985. D’ailleurs, on reprend les mêmes structures que sur World Wide Live, on reprend jusqu’aux chorégraphies…

Même les pyramides humaines ?

B : Les pyramides et le reste, il y aura tout !

On a des chances de vous voir tourner un peu partout ?

B : Pour l’instant, non, pas partout. On cherche un bon booker, et la première date sera à Mazingarbe, dans le Nord, le 20 juin. Ce sera ne date test, la première de Scorpians. C’est vraiment pour le fun, on fait en sorte de le faire bien.

Comment avez-vous été invités à ce concert,ce soir ?

G : C’est quand FTF a publié la dernière video de Stratagème… Chris Danacker (président de l’asso Crick for Zik et organisateur du Crick Fest) l’a vue, il a appelé FTF et il leur a dit qu’il voulait absolument Stratagème pour cette édition. Tout simplement… J’avais entendu parler du festival, Sortilège, que je connais bien, avait fait salle comble l’année dernière. Je me suis dit que si Sortilège avait joué ici, ça devrait le faire. On a quelques projets avec Chris, j’apprécie beaucoup sa façon de travailler et de penser…

SPLEENBREAKER: Human comedy

France, Rock (M&O, 2025)

Quatre chiens tout de cuir vêtus autour d’une table, une bière à la main, les « shades » rivées sur le nez… Pas de doute, Spleenbreaker est un groupe de rock sans doute énervé. Clairement, leur album Human comedy ne cherche pas à réinventer la machine à courber les bananes tant le groupe semle vouloir se faire plaisir en nous replongeant dans un passé rock et allumé. Pas psyché, simplement allumé. Nombre d’entre vous me connait suffisamment bien aujourd’hui pour comprendre pourquoi je passe sur le chant en anglais… y a du boulot, mais bon… Si les deux premiers titres me laissent froid, le chant à la Jim Morrisson et les ambiances à la The Doors de Mainstream m’interpellent avant que le groupe n’appuie sur l’accélérateur avec un Lust lover pas piqué des hannetons (plus tard, c’est un ton horrifique à la Alice Cooper sur Purge your brain qui me rappellera à l’ordre). Seulement, rapidement s’installe l’impression d’un manque. Si l’envie est là, si la guitare est saccadée et entrainante, si le groupe puise dans le blues et le hard vintage, il me semble manquer ce truc en plus qui ferait passer Human comedy d’album gentiment plaisant à bon disque de rock. Un album à écouter entre potes autour d’un apéro pour passer une bonne soirée.

GHOST: Skeleta

Suède, Rock hard (Loma vista recordings, 2025)

A sa sortie, il y a trois ans, nous avions, chez Metal Eyes, qualifié Imperia d’album « en demi-teinte ». Alors, forcément, c’est avec un mélange de crainte et d’une certaine forme d’excitation que j’appréhende Skeleta, le nouvel album de Ghost. Force est de reconnaitre que le second sentiment l’emporte sur le premier tant Tobias Forge a cette capacité à composer des hymnes qui, sous de faux airs pop, s’affichent résolument entrainants et (gentiment) subversifs. Peacefield introduit ce nouvel album sur fond de chœurs religieux féminins avant de se transformer en un rock quelque plus dur. Tout au long des dix titres de cet opus, il faut tendre l’oreille pour découvrir un fond de noirceur, ces détails qui font que, oui, Ghost, au delà du visuel ouvertement provocateur et de ses textes volontairement subversifs et « scandaleux », fait bien partie de la grande famille hard rock. Un hard léché, souvent proche du FM des années 80, avec des mélodies et des refrains immédiatement mémorisables, ceux du genre à être instantanément repris en chœur par le public en concert. Trois ans après une certaine déception, Ghost revient dans une forme éblouissante. La messe (noire) en est-elle pour autant dite? Rien n’est moins sûr. Ghost est de retour, en pleine forme et en peine possession de ses moyens. Superbe.

CRICK FEST 4: Stratagème et King Crown live (Cléry Saint André, le 5 avril 2024, avec B3nzin et Prisma)

C’est une vraie bonne soirée à laquelle les quelques 200 personnes présentes ont assisté, ce samedi 5 avril à l’Espace Loire de Cléry Saint André. L’association Crick For Zik organisait en effet la quatrième édition du Crick Fest qui avait fait salle comble l’an dernier avec la présence de Sortilège en tête d’affiche. Moins connus bien que largement aussi expérimentés par leurs formations d’avant (Nightmare et Galderia, les (faux) Grenoblois de King Crown, groupe fondé par les frères Jo et David Amore, a été invité à reprendre le flambeau. Si les ventes ont eu un peu de mal à décoller, le public présent a pu et su profiter pleinement de la chaleur des 4 groupes présents ce soir.

Les célébrations commencent cependant backstage puisque KingCrown s’y voit remettre par Mister Khermit himself le Metal Award du meilleur album heavy prog et de la plus belle pochette d’album. Une belle mise en bouche pour le groupe, n’est-il pas?

Remise du Metal Award à KingCrown
B3nzin @Crick Fest 4

Arrivé tôt sur place pour pouvoir interviewer Stratagème et King Cown (entretiens à suivre), je trouve une équipe de bénévoles par monts et par vaux: il n’y a plus d’électricité dans les loges, les prises de courant, réfrigérateurs et chauffe-plats ne fonctionnent plus. Rallonges, recherches de panne (et du téléphone du responsable d’astreinte de la salle…), les équipes en charge vivent un bon moment de stress avant de découvrir, enfin, la cause et de pouvoir tout remettre en fonction.

Les locaux de B3nzin, trio rock bien énervé originaire de Jargeau (on n’y fait pas que des andouillettes!), sont prévus à 19h00 mais accusent un léger retard, la soirée étant introduite par le maitre de cérémonie et organisateur, Christophe Dannacker – par ailleurs guitariste de Prisma, qui nous confirme, déjà, la tenue d’une 5ème édition, le 4 avril 2026, avec, en tête d’affiche, un groupe étranger. Une date déjà enregistrée même sans connaitre les participants qui n’ont, pour l’heure, pas encore signé leur contrat.

B3nzin @Crick Fest 4

B3nzin ne se prend pas la tête et propose avec une plus que chaleureuse simplicité un rock énervé aux guitares qui évoquent AC/DC, aux mélodies bluesy empreintes de Led Zeppelin avec une personnalité propre, pop et rock, qui entraine le public dans son sillage. La bonne humeur est de mise, les gimmicks aussi. Bruno, le chanteur guitariste, grande asperge, joue de sa taille pour prendre des poses et occuper l’espace et la scène autant que possible. Séducteur, ses mots sont clairement destinés à séduire les filles de l’assistance – sans pour autant oublier les amateurs de rock de tous styles.

B3nzin @Crick Fest 4

Ses acolytes suivent clairement le patron, Gigi, le bassiste concentré évoluant sereinement sur les planches armé de son impressionnant instrument soutenu efficacement par le batteur, Clément. Pendant environ 45′, le groupe nous délivre un set carré et précis doublé d’un esprit bon enfant. Une très belle mise en jambes et, sans aucun doute possible, un groupe à revoir.

B3nzin @Crick Fest 4
Prisma @Crick Fest 4

Prisma, c’est l’habitué des lieux… Normal, Chris étant l’organisateur du Crick Fest, il en profite pour faire jouer son groupe. Pendant un peu moins d’une heure, le quintette – qui a vu son ex-claviériste venir à la rescousse pour cette date, le nouveau membre étant indisponible – nous offre un classic hard rock qui séduit et met tout le monde d’accord.

Prisma @Crick Fest 4

Si la setlist se voit écourtée d’un titre (Way of life passe à la trappe sans doute pour rattraper un peu le retard – raté…), Prisma nous offre ce soir deux nouveautés, Stay strong qui ouvre le bal et Masters of game, deux titres nous dévoilant une facette beaucoup plus dure et heavy, une orientation souhaitée par le quintette. On sent, tout au long de leur prestation, les cinq en parfaite harmonie et, comme tout le monde ce soir, heureux d’être là. B3nzin a chauffé la salle, Prisma maintient la température avant de la voir monter d’un autre cran. En attendant, allez les retrouver/découvrir à Paris avec Heartline. Ce sera le samedi 17 mai, au Backstage By The Mill.

Prisma @Crick Fest 4
Stratagème @Crick Fest 4

Les plus anciens d’entre nous se rappellent sans doute de Stratagème, groupe fondé en… 1970 qui a connu plusieurs incarnations avant de disparaitre pour mieux revenir au début des années 2010. Un premier album sous le nom seul de Stratagème (l’histoire complète sera à retrouver sous peu dans l’interview) parait en 2013, et quelques modifications de line-up nous font retrouver le groupe totalement modifié avec un nouvel Ep sous le bras, Endless journey. Et là, papy Gégé (Gérard Motté, bassiste et seul membre fondateur) s’est entouré de fines gâchettes.

Stratagème @Crick Fest 4

Butcho Vukovic, tout d’abord. Le toujours aussi sympathique chanteur prend toujours son pied sur scène. Il ne déroge pas à la règle, sautant, dansant et emportant le public avec lui, communiquant toujours avec simplicité et bienveillance. Il fait même part de son plaisir, et, ce qui est habituellement perçu comme démago pour séduire le public semble ce soir vrai, dit que c’est le meilleur concert que ce line up a donné jusque là. Le partage, échange et plaisir, une recette qui fonctionne à tous les coups!

Stratagème @Crick Fest 4

Cependant, Stratagème aujourd’hui, c’est aussi une paire de guitaristes parfaitement hors du commun, Sébastien Hérault et Marc de Lajoncquière. Et lorsque le talent se double de complicité, le résultat est explosif. Une petite démonstration met tout le monde d’accord: un Eruption (Van Halen) parfaitement exécuté par Sébastien que Maître Eddie n’aurait pas reniée. Ajoutons à cela quelques reprises qui font mouche (Panama (Van Halen), Rebel yell (Billy Idol) et une autre à venir) et mettent tout le monde d’accord, dont la bande de keupons qui pogotent et s’amusent tout au long de la soirée.

Stratagème @Crick Fest 4

Les titres originaux sont évidemment de la partie et Butcho se montre au top de sa forme, vocale et humaine – ah, ce Butcho qui demande au public s’il y a des amateurs de death metal et incite ses compagnons à tenter le coup! Ah, la réaction timide de Patrick Cazu derrière ses fûts et celle de Gégé qui proteste avec un « non, ça, c’est pas Stratagème! Pas du tout! » après un growl du vocaliste qui rappelle son passé punk avant de découvrir le hard rock avec Bon Jovi et de changer de chapelle.

Stratagème @Crick Fest 4

Le concert se termine aussi chaleureusement qu’il avait commencé avec une reprise de Celebration (Kool and the Gang) dans une version rock et électrisée reprise par un public conquis et aux anges. Oui, la température a quelque peu grimpé et la suite est tout aussi prometteuse.

Stratagème @Crick Fest 4
King Crown @Crick Fest 4

Après une interview quelque peu… remuante suivie d’une rapide session photos en tenue de scène, King Crown se voit introduire par Christophe. Les cinq investissent donc les lieux et, dès Magic stone, prennent le public à la gorge pour ne jamais relâcher la pression.

King Crown @Crick Fest 4

Les frères Amore ont vraiment fait le bon choix en s’entourant d’une équipe tout aussi jeune qu’expérimentée. LE résultat, c’est un concert explosif et jovial (cet échange entre Jo et un membre du public qui l’interpèle avec un « allez, tonton, oui c’est toi, tonton! » qui fait bien marrer le chanteur) de bout en bout.

King Crown @Crick Fest 4

Là encore, la communication avec le public est aisée et, même si l’horaire a poussé ceux venus en famille à aller coucher les petits, chaleureuse. On sent les musiciens parfaitement en phase – les guitaristes sont les meilleurs amis du monde, c’est clair. Pendant une heure trente, King Crown sape et met tout les présents d’accord. Et après le rappel, la fête continue!

King Crown @Crick Fest 4

L’énergie débordante se transforme à la fin du set en une invasion justifiée du stand de merch. Achats, photos, autographes, tout y passe pour mettre un terme à cette superbe soirée. On vous l’a dit? On remet ça l’an prochain, le 4 avril 2026, avec un groupe étranger en tête d’affiche. Qui? On le saura plus tard.

King Crown @Crick Fest 4
King Crown @Crick Fest 4

Merci à Christophe Dannacker et toute l’équipe de l’asso Crick For Zik, aux bénévoles et aux équipes de sécu de rendre ce genre de soirée possible.

Interview: CRICK FEST 4

Interview CRICK FEST4 – Entretien avec Chris Acker (orga). Propos recueillis le1er février 2025

Après avoir reçu Sortilège en 2024 pour une troisième édition plus que sold out, l’association Crick For Zik remet le couvert avec une quatrième édition du Crick Fest qui, cette année, accueillera 4 groupes (peut on imaginer que le CF5 en accueille 5 et ainsi de suite ?) Metal Eyes a tenu cette année encore à faire le point sur l’évolution de ce plus que sympathique mini festival.

La prochaine édition du Crick Fest se tiendra le 5 avril 2025, à Cléry Saint André.

A 18h30, cette année, plus tôt que d’habitude puisque cette année il y aura 4 groupes…

Qu’est-ce qui fait que cette année tu as décidé de passer à 4 groupes ?

Deux raisons : la première, je voulais que ça fasse vraiment « festival ». 3 groupes, c’est un gros concert…  Et puis, depuis l’année dernière, j’ai tellement de demandes que si je ne mets pas plus de groupes, il y aura un Crick Fest 50 ou plus, j’en sais rien !

Pour rappel, l’an dernier, Sortilège était la tête d’affiche, le Crick Fest a très rapidement affiché complet. Ce que tu dis sous entends que tu as eu des retours très positifs de cette troisième édition…

Énormément, oui. Parce que dans le milieu du metal, comme d’autres sans doute, les fans communiquent énormément, notamment par le biais des réseaux sociaux et, grâce aussi au fan club de Sortilège, j’ai eu 2 ou 300 retours disant que c’était un festival au top avec une organisation au top, des bénévoles, tout, tout au top. Et, forcément, quand ça plait, les gens en parlent… Tout le monde a dit « Vivement l’année prochaine ! » J’espère qu’ils ne se sont pas dit que j’allais reprendre Sortilège (rires)!  Ceci dit, ça n’aurait pas été possible vu les problèmes de santé de Bruno Ramos…

Pas de Sortilège cette année, et c’est tant mieux, sinon c’est une affiche qui se répète. Tu as eu énormément de retours positifs. On sait que tu avais depuis longtemps un groupe en tête et on sait aujourd’hui que la tête d’affiche de cette nouvelle édition c’est KingCrown, le groupe des frères Amore, ex-Nightmare. C’est eux qui t’ont contacté ou toi ?

Ni l’un ni l’autre, c’est un intermédiaire. J’avais un nom en tête, mais ce n’était pas KingCrown. J’ai été en contact avec leur manageur, avec le chanteur de ce groupe, on a été pas mal en discussion… A un moment, j’ai douté, je me suis demandé si je parlais avec la bonne personne parce que je n’y croyais pas. C’était trop facile…Je me disais que j’étais en train de me faire avoir. Tout ça m’a fait perdre deux mois… C’était un groupe étranger.

J’étais resté sur un groupe français, mais je n’arrivais pas à identifier lequel…

Rappelle-toi, la vocation de ce festival c’est de faire jouer des groupes de la scène locale qui ne sont pas accueillis ailleurs, et je voulais absolument faire venir un artiste qui est apprécié du grand public et qui attire du monde. Bingo avec Sortilège ! Après, c’est totalement égoïste, mais comme je suis le président de l’asso et le programmateur, ben… Je me fais plaisir ! Quand tu vois ceux qui nous quitte, je me dis que c’est le moment. Mais ce ne sera pas pour tout de suite. Un groupe étranger, ce n’est pas le même budget, entre le cachet, le transport… Tu additionnes tout ça, tu divise par le nombre max de spectateurs et ça te donne le prix de la place, et là… non. Ça grimpe trop et ce n’est plus dans le même esprit. Mais ce n’est pas perdu…

Tu es tombé comment sur KingCrown, alors ?

Prisma fait partie de FTF Music, qui est un label de distribution, diffusion et production. Par son intermédiaire, j’ai pu avoir le contact de Joe Amore. J’ai toujours adoré Nightmare, et là, quand j’ai écouté la production de l’album de KingCrown, j’ai pris une claque et je me suis dit « oui, ça va le faire » !

La production c’est une chose, faire venir un groupe à Cléry Saint André, c’en est une autre. Il y a eu Heartline et surtout Sortilège qui vous a aidé à placer Cléry sur la carte des lieux de concerts possibles (il approuve). Qu’est-ce qui a convaincu Kingcrown de venir ?

Comme pour Sortilège : ma passion pour cette musique, ma passion en tant que fan, que « patron » d’une organisation qui met les petits plats dans les grands pour passer une super soirée.

Kingcrown est la tête d’affiche, mais il y a aussi trois autres groupes : Prisma qui est ton groupe, on ne va pas en parler, il y a du délit d’initié pour que Prisma soit encore à l’affiche (il rit), et aussi Benzin et Stratagème, deux groupes assez différents, ce qui donne une affiche assez variée, plus rock, pas 100% hard/metal comme l’an dernier. Qu’est-ce qui t’a fait porter ton choix notamment sur Benzine, le plus rock des 4 groupes ?

Pour la petite histoire, j’ai joué plus jeune avec Bruno, le leader de Benzin. Je l’avais perdu de vue et grâce aux réseaux, on a repris contact. Je suis allé les voir jouer à un tremplin à Jargeau quand j’ai appris qu’il remontait un groupe et j’ai pris une grosse claque. Son jeu, sa voix, son allure, rien n’a changé. Bruno, c’est Bruno, voilà…

Qu’en est-il de Stratagème ?

Un peu comme pour KingCrown. Ça fait quand même 42 ans qu’ils tournent, et j’ai discuté avec Gégé, le leader, bassiste, et j’ai adoré leur dernier Ep, du hard rock propre, bien joué, moderne. Comme j’étais en mode « 4 groupes », c’est eux que j’ai retenus.

On ne va pas parler de Prisma, votre présence à l’affiche, tu nous l’as expliquée l’an dernier. En revanche, y a-t-il des nouveautés qui nous seront proposées ?

Plus que ça puisque, déjà, on a changé de clavier ! Gilles a voulu se consacrer un peu plus à sa famille. Officiellement, c’est Pascal qui joue maintenant avec nous. Mais, malheureusement, il ne pouvait pas assurer la date du 5 avril donc c’est Gilles qui sera là pour nous dépanner.  En ce qui concerne les nouvelles compos, ça avance, elles se durcissent, on est plus proche du heavy.  Elles se musclent.

Ça fait quelques temps que l’affiche a été dévoilée, que les places sont en vente aussi. Où en êtes-vous aujourd’hui sur les 350 places que peut accueillir la salle ?

Bizarrement, pas terrible du tout… Il reste encore plus d’un mois, on me dit que ce n’est pas trop grave… Toute la campagne de com, les flyers sur Paris, ça commence. Les gros concerts, ceux où on peut toucher du monde ne font que commencer, il y avait Mass Hysteria hier soir, d’autres arrivent. Après, je ne sais pas pourquoi les préventes ne décollent pas…

Il y a une piste à envisager : KingCrown est un nom beaucoup moins connu que Sortilège…

Exact, et ils sont plus loin. Sortilège, ils sont de Paris, et il y a plein de fans parisiens qui sont venus. Là, Grenoble… la fan base hésite plus.

Aujourd’hui, il y a quand même urgence à en parler…

Oui, totalement, il faut en parler par tous les biais. J’ai même été jusqu’à aller en parler auprès de France Info, Radio France, parce que je veux toucher tout le monde, ne pas avoir à regretter de ne pas l’avoir fait. Mais sans payer, non plus, mais je ne peux pas me permettre une demi-page dans un magazine…

Quel est le tarif des places ?

En prévente, elles sont à 18 euros, sur place, elles seront à 23. Pour les moins de 16 ans, elles sont à 15€ et 20€. On peut les prendre directement sur le site de l’asso et tout figure sur la page Facebook de Crick For Zik.

Comme l’an dernier, si des gens viennent de loin, ils ont la possibilité de dormir sur place, version camping ?

Même mieux, puisque cette année, nous avons l’autorisation de planter quelques tentes. On reste sur place, et on peut accueillir quelques personnes. Maintenant, il faut se rappeler qu’on est début avril, les nuits sont fraiches…

Au niveau du catering, ce sera toujours ton chili ?

(rires) J’adore entendre ça ! On va en parler lors de la prochaine réunion, mais il n’est pas impossible qu’on change. J’ai une autre spécialité ! Ce n’est pas impossible car Butcho (chanteur de Stratagème) a appris ça et il s’en régale à l’avance ! Ça fait plaisir à entendre, même Zouille il a parlé de ce chili !

Une dernière chose : si les ventes n’augmentent pas, il y a un risque d’annulation ?

Je l’ai déjà écrit et confirmé : il n’y aura pas d’annulation. Pourquoi ? Parce que j’ai un fonctionnement simple : je sais m’entourer de partenaires financiers ce qui fait que, si les ventes sont faibles, je ne bois pas trop le bouillon. Évidemment, ça nous ferait tous chier – musiciens, orga, bénévoles – si ça ne décolle pas, ce n’est jamais agréable de jouer devant peu de monde, mais quoiqu’il arrive, on maintiendra le Crick Fest.

As-tu quelque chose à rajouter ?

On peut ajouter que pour ceux qui achètent leur billet à l’avance, il y aura un petit cadeau, comme d’habitude, il y aura du merch, peut-être une boutique de CD/vinyles. Du tattoo éphémère et toujours nos bons sandwiches préparés avec du pain et des produits locaux !