HEAVY WEEK END: report du dimanche 8 juin 2025

@Heavy Week End 2025

Par sa programmation, cette troisième journée s’annonce quelque peu plus brutale que les deux précédentes. Mais la météo reste quelque peu incertaine… La matinée est d’ailleurs assez pluvieuse gâchant, malheureusement, les visites locales que nous avions prévues (le château d’Haroué et la reconstitution historique dans le village de Tantonville), mais pour le coup, on a prévu ce qu’il fallait: des épaisseurs à rajouter si la chaleur estivale décide de rester absente!

Nous n’avons pas besoin d’arriver sur le site pour comprendre que le public a répondu présent en ce dimanche. Une longue file de voitures s’étend bien avant d’arriver au Zénith, avançant tranquillement et dans le calme jusqu’à être orientée par les bénévoles présents. Une fois garés, nous voyons une autre longue file, de spectateurs cette fois, s’étirer en arc de cercle sur la totalité du parking PMR/médias alors qu’il n’est encore que 16h. Le public arrive par grappes entières, prenant place dans ce serpent qui louvoie joyeusement. Félicitons ici l’organisation car la foule avance rapidement et n’attend guère – une vingtaine de minutes tout au plus, contrôles de sécurités inclus – avant de pouvoir entrer sur le site.

La fosse et les gradins sont plus que bien fournis – on parle là de plus de 16.000 préventes pour ce dimanche – spectateurs qui, dans un esprit bon enfant, vont et viennent tout au long de la soirée, navigant de la scène aux bars dans un joyeux désordre paradoxalement très organisé. Une marée humaine joyeuse et joviale, déguisée pour nombre de festivaliers à l’image de la tête d’affiche du jour. On ne peut s’y méprendre, Slipknot est dans la place… Sur ce seul nom, le Heavy Week End a réussi son pari, car avant le premier groupe, on retrouve cette ambiance festive de gens heureux de vivre typique d’un festival. Oui, la journée promet d’être belle, d’autant plus que les nuages décident enfin de céder la place au soleil. Pas à la chaleur, mais au soleil. c’est déjà ça!

Du côté médias, on sent aussi une plus grande affluence, notamment du côté des photographes dont le nombre a augmenté d’un bon quart, passant de 30 les deux premiers jours à une bonne quarantaine. Si certains espéraient pouvoir simplement shooter Slipknot – et passer outre le reste du festival – il en seront pour leur frais, la tête d’affiche ayant fait le choix de strictement limiter le nombre de photographes témoins de sa prestation. Ce ne seront finalement qu’une petite demi-douzaine de médias qui seront sélectionnés. Tant pis, nous profiterons ainsi de la totalité du concert en famille.

Nothing More @Heavy Week End 2025

Une intro country résonne, annonçant l’arrivée des Texans de Nothing More. Quand bien même le groupe formé en 2003 a-t-il une bonne demi douzaine d’albums à son compteur, je n’ai rien entendu ou lu d’autre que le nom du groupe. C’est donc une découverte pour moi, et, même si le neo metal/metal n’est pas mon truc, on ne peut que saluer l’énergie développée par le chanteur Jonny Hawkins, torse nu, pectoraux et abdos seulement voilés par le maquillage noir et or qui orne partiellement son corps. Son chant est varié, se faisant aussi brutal et rageur qu’il peut être modulé, doux ou encore haut perché.

Nothing More @Heavy Week End 2025

La foule en prend plein les yeux et commence à slammer. La sécu est à pied d’oeuvre et le sait, l’un des agents me glissant à l’oreille que « ça y est, c’est parti… on va bosser aujourd’hui! » Si une bonne partie du public n’a d’yeux que pour le chanteur, les autres musiciens – bien couverts, quant à eux – grimpent sur les plateformes, allant chercher le public autant que possible. Pas un centimètre carré de la scène n’est laissé sans piétinement, et face à une foule au moins aussi importante que la veille, un parterre et des gradins plus que correctement remplis, Nothing More marque ici nombre d’esprits.

Nothing More @Heavy Week End 2025

Le groupe termine son set, principalement axé sur son dernier album, Carnal, de 2024, en descendant dans la fosse. Jonny s’empare de 2 toms de batterie que les premiers rangs portent tandis qu’ils frappe les peaux entourées de mains levées. Un premier set simplement explosif et prometteur.

Nothing More @Heavy Week End 2025
Rise Of The North Star @Heavy Week End 2025

La scène est installée, avec un gigantesque backdrop et un kit de batterie ornée d’un cerisier du Japon. Le public s’impatiente et… doit patienter encore un peu, un problème technique faisant craquer et crisser les amplis. Le temps de trouver le problème, de le réparer, voici les mangaka de Rise Of The North Star qui déboulent tranquillement pour prendre aussi rapidement que possible le public à la gorge.

Rise Of The North Star @Heavy Week End 2025

Qui a déjà vu ROTHS live le sait: Vithia, son chanteur, casquette vissée sur la tête, et ses deux compères guitaristes (Air One Menez et Evangelion B Gauthier) ne laissent aucune place au répit. Qu’on aime ou pas le style du groupe, une fusion brutalement furieuse de metal rugueux et de hip-hop énervé, on ne peut que reconnaitre que ça tabasse sévèrement.

Rise Of The North Star @Heavy Week End 2025

Le public se fait entendre et joue le rôle de sixième membre du groupe tant il soutient, s’agite et slame à l’envi. Quelle ambiance de feu! Vithia harangue la foule sans relâche, sa gestuelle rapée et sa rage vocale faisant mouche, d’autant plus lorsqu’il fait au public ce petit cadeau toujours apprécié, en l’occurrence Neo Paris, morceau titre du nouvel album éponyme, interprété ici pour la première fois en live. Une bonne dizaine de morceaux auront en une petite heure fait monter la température corporelle d’un bon cran. Une prestation explosive, ni plus ni moins.

Rise Of The North Star @Heavy Week End 2025
Mass Hysteria @Heavy Week End 2025

Un M et un H de chaque côté de la batterie, une foule qui se masse dans la fosse, un appel lancé dans la sono demandant si « les furieux, les furieuses, êtes-vous prêts pour Mass Hysteria? », et la folie s’empare du public. L’orga a prévenu es photographes, il va y avoir encore de la pyro, « alors restez bien derrière cette ligne sur le troisième titre, la sécu vous le rappellera ». Oui, mais la sécu, justement, en rajoute une petite couche (« approchez vous de la scène, on va vraiment avoir besoin de place« ). Tout se passera de manière finalement, naturellement organisée.

Mass Hysteria @Heavy Week End 2025

La fureur de Mass veritas, premier extrait de son dernier album en date (si l’on considère les deux parties de Tenace comme un seul album) voit, déjà, une nuée de slammers surfer sur cette foule immense. Mouss annonce rapidement l’incontournable Positif à bloc et l’on sent déjà l’ensemble des musiciens, Yann, Fred, Jamie et Rapha, très chauds et très en forme. La frappe de Rapha est magistrale et impressionnante, et, désormais parfaitement intégré à Mass Hysteria, Jamie ne rate pas une occasion de s’adresser à la foule, l’incitant à s’exprimer comme elle le souhaite.

Mass Hysteria @Heavy Week End 2025

Mouss annonce que le groupe fête cette année son trentième anniversaire. Il n’en faut pas plus pour que les premiers rangs entonnent un « joyeux anniversaire » repris en chœur par toute la fosse et va même jusqu’à impressionner les musiciens, émus, Jamie s’emparant de sa caméra pour immortaliser l’instant. Puis arrive Chien de la casse, et le public se voit incité par le vocaliste à se lancer dans des circles pits et répétant ses « Tournez, tournez en rond » (il faudra un jour que Mouss apprenne que « tourner », c’est forcément en rond…).

Mass Hysteria @Heavy Week End 2025

Il faudra aussi qu’il nous explique sa logique, celle d’avant L’inversion des pôles où il explique au furieux et aux furieuses que « on va parler de complot. Qui dit complot, dit apéro, qui dit apéro dit (…)« . Pas tout compris mais le public ne le rate pas dès qu’il s’empare d’une bière en hurlant « cul sec, cul sec » ce que le chanteur fait rajoutant même « comme ça, maintenant, on boit au travail ?« . Il se re-prêtera à l’exercice un peu plus tard pour le plus grand bonheur de tous.

Mass Hysteria @Heavy Week End 2025

De tous, même d’un Yann qui vient lui chuchoter que c’est sans doute jusque là le meilleur concert de la tournée. Un mouss aussi qui annonce avoir « une érection pileuse » rajoutant « pour les enfants, une érection c’est…ah! demandez à vos parents ». La set list est parfaite, Nerf de boeuf, Se brûler sûrement (« toute la fosse saute! » lance Mouss), Arômes complexes, Reprendre mes esprits, tout y passe, et le public continue de faire monter pression et température. On a même droit ici, comme au Hellfest, à un fauteuil roulant porté par une nuée de bras.

Mass Hysteria @Heavy Week End 2025

Incontournable hymne désormais systématiquement joué à la mémoire des victimes des attaques terroristes de 2015, L’enfer des dieux est repris en chœur par la foule et est, judicieusement, suivi d’un Tenace explicite. Puis après Contradiction, Jamie annonce le dernier morceau et demande un nouveau wall of death. Le public s’exécute avec plaisir et Mass termine de l’achever avec Plus que du metal. Achever? Non, the best is sans doute yet to come… Ce soir, toutefois, Mass Hysteria a donné un de ses concerts les plus explosifs qu’il m’ait été donné de les voir jouer. La journée est montée en puissance et en pression et Mass a brillamment enfoncé le clou. Pas étonnant que MH soit aujourd’hui l’une des formations phares du metal français, toutes catégoreis confondues. Une énergie brute jamais mise en défaut doublée d’une réel et visible plaisir de jouer. Mass Hysteria a tout bonnement retourné le Zénith de Nancy. Superbe concert!

Mass Hysteria @Heavy Week End 2025

Pas de rideau pour cacher la scène, les techniciens de Slipknot s’affairent face au public, installant le décor, sobre, et les deux set de percussion. Le public s’impatiente, attendant ce moment libérateur. Les 16.000 fans présents savent qu’ils vont vivre un moment d’exception. non seulement parce qu’un concert de Slipknot est toujours du grand spectacle, mais aussi parce que cette date en clôture du Heavy Week End est la seule date française de la tournée.

Il est 22h pétantes quand des lumières rouges balayent la scène sur fond de générique de la série K-2000. Une intro un peu longue suivie d’une interminable répétition de « time is generous » avant de voir, enfin, près de 10′ plus tard, les psychopathes masqués débouler sur scène. La guerre est déclarée et les Américains ne feront aucun cadeau au public tout au long des 90′ qui suivent, dotées d’un light show aussi puissant et intense que l’ambiance de ce soir.

Démarrant avec (sic), Slipknot surprend très tôt avec l’incontournable People=shit repris en chœur et avec force par un public déjà déchainé qui saute, hurle et slamme plus fort encore. Corey Taylor est très en voix et il s’adresse souvent et avec bienveillance au public, annonçant que « visiblement, il manque quelqu’un… Clown n’a pas pu être présent, il a dû rester à la maison pour s’occuper de sa famille » Son kit de percussions est en effet vide, utilisé par le petit diable incontrôlable, #3. Mais on ne peut que se poser des questions, Clown étant déjà absent, pour les mêmes raisons à Clisson en 2023…

Il n’empêche, la fureur de Slipknot se traduit par des morceaux ultra efficaces, mélangeant cette brutalité crasse à des passages à chanter en choeur, et le public se fait bien entendre. Psychosocial, The devil in I, un solo de claviers/DJ set qui transforme la fosse en dance floor techno, wall of death… Il y en a pour tout le monde.

Corey Taylor évoque ses souvenirs, rappelant que « Slipknot est venu pour la première fois en France il y a 26 ans et que depuis, à chaque fois, c’est une expérience qui a changé notre vie« . En faut-il plus pour enflammer encore plus le public ? Non, et Slipknot achève ce dernier avec Spit it out, Surfacing et Scissors au cours d’un rappel énorme. Si Mass Hysteria a retourné le Zénith, Slipknot a tout remis en place ! Un concert exceptionnel qui vient clore une journée simplement dantesque.

GDP l’a bien senti, d’ailleurs, puisque les écrans diffusent les dates de la prochaine édition. Celle-ci se tiendra en ce même Zénith de Nancy le premier week-end de juin, soit du 5 au 7 juin 2026. « Petit » festival deviendra grand. Nous serons là, quelle que soit l’affiche!

Le bilan? Si cette seconde édition a eu du mal à se lancer, si l’affiche a mis du temps, trop de temps, à être dévoilée, si la fréquentation est stable par rapport à 2024 (La Charente Libre annonçait un total de 35.000 personnes sur les trois jours), ce Heavy Week End 2025 fut une totale réussite tant d’un point de vue artistique qu’organisationnel. Si des points WC ont été multipliés, on ne peut que constater un réel manque de cabines le dimanche, soit la journée la plus chargée. Egalement, il sera nécessaire de penser à des points d’eau en nombre car même si ce week end fut frais, voire froid, ce ne sera pas toujours le cas début juin. D’autan plus que Nancy étant dans une cuvette, quand il fait chaud, il n’y a pas de vent! Enfin, sans doute surtout, GDP pourrait, comme on le voit ailleurs, organiser des rondes de bénévoles afin de distribuer aux enfants des bouchons d’oreilles. Combien de gamins ai-je vus sans aucune protection auditives? On ne connait que trop bien les dangers d’une longue exposition au bruit pour ne pas avoir conscience des risques que l’on fait subir aux plus jeunes…

Merci à toute l’équipe de GDP (Matthieu Drouot, Nicolas le Bouedec, Oona Rudowski, Anne-Lyse Rieu), à Olivier Garnier, à la sécurité et à tous les bénévoles d’avoir rendu ce week end possible et plus que mémorable.

HEAVY WEEK END: report du samedi 7 juin

@Heavy Week End 2025

Après une première journée artistiquement plus que réussie, retour au Zénith de Nancy pour une seconde plus hard rock/prog metal/heavy metal. Une programmation qui, après coup, ressemble à un patchwork de styles qui peut dérouter. Seule ombre au tableau de ce samedi, la pluie capricieuse qui joue les trouble-fête intermittents tout au long de la journée, humide et presque froide… On fera avec.

Wings Of Steel @Heavy Week End 2025

J’ai beaucoup entendu parler des Américains de Wings of Steel ces derniers temps mais n’ai pas eu l’occasion d’écouter ce qu’ils font. Le jeune combo a déjà publié un Ep et un album ainsi qu’un live enregistré lors de son concert lillois en 2024 et lance aujourd’hui sa tournée 2025. Musicalement, la formation propose un heavy metal typé 80’s. Leo Unnermark, le chanteur d’origine suédoise, est aujourd’hui très en voix, quelque part entre Michael Kiske et Geoff Tate tandis que son compère, le guitariste Peter Halub, avec qui il a fondé le groupe, sait prendre la pose comme il le faut.

Wings Of Steel @Heavy Week End 2025

Clairement, ça joue, tant des instruments qu’avec le public. La jeune formation sait parfaitement quoi faire pour séduire le public et propose une variété de morceaux entrainants et séduisants, alternant entre puissance de feu (Fall in line, Cry of the damned, Wings of steel) et douceur à mi parcours avec She cries, ballade entrecoupée d’un grain de folie.

Wings Of Steel @Heavy Week End 2025

Wings Of Steel nous offre ainsi une jolie mise en bouche pour démarrer la journée. Si le groupe n’invente rien, il se donne avec coeur et passion et le public présent le lui rend bien.

Wings Of Steel @Heavy Week End 2025
Vanden Plas @Heavy Week End 2025

Place ensuite à un groupe plus que trentenaire. Les Allemands de Vanden Plas, en showcase à Paris lors de la conférence de presse donnée par GDP pour le HWE, reviennent armés de cette envie de renouer avec leur succès d’antan. Leurs dernières prestations en France remontant au festival de Raismes en 2017, le groupe a eut tout le temps d’être quelque peu oublié. Alors ce soir, les petits plats sont mis dans les grands;

Vanden Pas @Heavy Week End 2025

Andi Kuntz, très en voix et tout sourire, n’hésite jamais à faire participer le public pendant l’heure qui est allouée au groupe. En démarrant son set avec deux titres heavy, Push et Holes in the sky, Vanden Plas interpelle les moins connaisseurs mais, malgré des moments plus doux, continue son set avec des composition plus progressives qui peuvent dérouter les amateurs de rock direct qui se dirigent vers les bars et la restauration. Dommage, car Postcard to God, qui clôt les set a de quoi réunir tout le monde, mais le public reste quand même assez important.

Vanden Plas @Heavy Week End 2025
Europe @Heavy Week End 2025

Avec Europe, on change clairement de catégorie. Les amateurs de hard rock léché sont de sortie et Joey Tempest, très en forme, sait parfaitement comment caresser son public comme il faut. De manière aussi sensuelle qu’il le fait avec son pied de micro!

Europe @Heavy Week End 2025

Le groupe démarre son set avec deux classiques, On broken wings et Rock the night, qui enflamment le public avant de proposer le plus récent Walk the earth (issu de l’album du même nom datant de 2017). déjà le chanteur commence à s’amuser avec des « Merde » et des Putains » qu’il répète autant qu’un pur Français, pour le plus grand plaisir du public.

Europe @Heavy Week End 2025

Si John Leven (basse) semble tout aussi concentré qu’il prend du plaisir, tous les regards se portent également sur John Norum, très en forme ce soir. La pyro réchauffe d’ailleurs les Suédois et le public alors que la pluie commence à se faire dense. Les parapluies et poncho font une apparition remarquée tandis que le froid s’installe aussi.

Europe @Heavy Week End 2025

Fort heureusement, cet épisode ne dure qu’un gros quart d’heure et le public reste bien présent. Europe nous offre alors Hold your head up, un titre soit disant « enregistré récemment » datant cependant de 2023. Europe propose ensuite une sélection de titres couvrant toutes les époques du groupe. De Carrie à Superstitious, en passant par le superbe War of kings ou open your heart qui voit Joey s’emparer d’une guitare acoustique ou Last look at Eden où il empoigne une électrique et se la joue crooner, c’est un véritable Best of que Europe offre au public, chaud comme la braise.

Europe @Heavy Week End 2025

Puis Cherokee, avec un light show splendide, vient relancer les affaires sérieuses, celles annonciatrices d’un concert qui touche à sa fin. Sa fin? Non, bien sûr, et le public le sait. Dès les premières mesures, The final countdown voit une nuée de téléphones s’éclairer et la foule se lever et hurler sa joie (note personnelle: je comprend de plus en plus ces artistes bannissant le portable…) Peu importe le froid, c’est près de 8.000 personnes qui sont à l’unisson, accompagnant Europe jusqu’au dernières mesures de ce concert de très haute volée. Si la suite est à la hauteur de cette prestation…

Europe @Heavy Week End 2025
Dream Theater @Heavy Week End 2025

Le retour de Mike Portnoy (batterie) au sein de Dream Theater a fait couler, positivement, beaucoup d’encre. Le public amateur se masse devant la scène où un technicien vient retirer le voile cachant l’imposant kit du batteur. Puis chacun arrive tranquillement, prenant place pour attaquer avec le bien nommé Night terror. Rapidement, pourtant, on sent, on voit John Muyng concentré sur sa basse et la tablette à ses pieds, prompteur musical l’empêchant de sourire.

Dream Theater @Heavy Week End 2025

De son côté, John Petrucci, tout aussi concentré, se libère et retrouve ses poses de barbu bourru mais impressionne par son aisance guitaristique. Jordan Rudess, quant à lui, joue de ses claviers dont la façade change au gré des ambiance de ce premier long titre, affichant parfois des notes de musique, à d’autres moments un décor léopard, clavier mobile qui se penche (laissant ainsi voir les touches sur lesquelles il joue) et se déplaçant afin que chaque membre du public en profite.

@Heavy Week End 2025

Mais celui qui attire tous les regards reste le batteur, dont le set impressionne et le cache partiellement. Portnoy, pourtant, sait aller chercher le public, se levant pour haranguer la foule qui… diminue. Non seulement, bien que ce soit la fin du printemps, il fait froid, mais la musique, trop technique et destinée à un public connaisseur, ne séduit pas une partie de la foule que l’on voit quitter les lieux en formation régulière et en famille.

Dream Theater @Heavy Week End 2025

Une question se pose alors: Dream Theater est-il vraiment le meilleur choix de tête d’affiche? Sans doute eut-il été préférable d’inverser les places et de laisser Europe clore cette journée. Dommage, mais c’est ainsi. Demain est un autre jour dont l’affiche pré-visage d’un (tout petit) peu plus d’énergie.

Dream Theater @Heavy Week End 2025

HEAVY WEEK END: report du vendredi 6 juin

Quel énorme week end que cette seconde édition du Heavy Week End ! Malgré quelques couacs au lancement de cette seconde édition, notamment dans l’arrivée plus que tardive des annonces et de l’affiche complète, le bilan de ce premier week end du mois de juin au Zénith de Nancy, dans sa version open air, est plus que positif malgré une météo capricieuse et un démarrage quelque peu difficile. Mais ne nous emballons pas, commençons par le commencement.

Si on a pu quelque peu s’inquiéter quant à la fréquentation de cette seconde édition – Gérard Drouot Productions balançant sur les réseaux de très nombreux posts chaque jour qui ont pu ressembler à un appel au secours, annonçant tardivement une affiche a priori pas au niveau de la première édition (exceptionnelle, rappelons-le) entrainant nombre de commentaires peu enthousiastes – l’arrivée sur le site tend à confirmer cette inquiétude. Ce vendredi est loin, très loin d’afficher complet – à peine 6.000 personnes ont fait le déplacement – mais, d’une part, le public est bien présent dès l’ouverture des portes et, d’autre part, on constate rapidement deux grosses améliorations par rapport à l’an dernier: tout d’abord, un espace assez vaste est réservé aux lieux de soulagement individuels (les WC, donc). Mais surtout, c’est affiché en très grand à l’entrée du site, le placement est libre. A moins d’avoir un pass VIP ou Carré or, le public peut, « à l’ancienne », se positionner dans la fosse ou s’installer dans les gradins, au choix. Résultat: bien que démarrant plus tôt que l’an dernier – un groupe a été rajouté – j’ai l’impression que le public est, en ce début de festival, à peu près équivalent à celui de 2024. Pas génial, mais encourageant, et nous ne sommes que vendredi, certaines personnes travaillent encore.

Adrian VANDENBERG @Heavy Week End 2025

Adrian Vandenberg, qui inaugure cette édition, investit la scène à 17h30 devant un parterre bien fourni… Quel plaisir de pouvoir enfin revoir le guitariste sur scène. Et en forme! Le géant hollandais (1,98m des pieds à la tignasse) a fait le choix de proposer un set 100% axé sur sa période avec Whitesnake, soit la période 1987 et Slip of the tongue. S’il n’a particpé qu’à la tournée célébrant le premier, il n’a composé aucun des titres de 1987, contrairement à son successeur dont on retrouve ici deux extraits (Fool for your lovin’ qui remonte en réalité à Ready an’ willing, en 1980, et Judgement day). Les 5 autres titres sont des incontournables du légendaire 1987 (Bad boys, Give me all your love, Cryin’ in the rain*, Still of the night et Here I go again* – deux titres (*) remontant quant à eux à l’album Saint and sinners de 1982)

Adrian VANDENBERG @Heavy Week End 2025

Le groupe dans son ensemble est en forme. On apprécie la tessiture de la voix de Mats Lévin, que l’on connait déjà pour ses participation avec Yngwie J. Malmsteen ou Treat, parmi d’autres. Le vocaliste n’est peut-être pas au niveau d’un Coverdale des grands jours mais son timbre et la personnalité qu’il met dans chacun de ces morceaux rendent plus qu’hommage au Serpent blanc.

Adrian VANDENBERG @Heavy Week End 2025

Si déjà la paire Vandeberg et Levens chauffe le public, la section rythmique en rajoute une jolie couche également. En quarante minutes, le géant blond démontre être parfaitement en forme (il avait été victime de la maladie de Lyme, qui l’a empêché de revenir comme il l’eût souhaité sur le devant de la scène) et à sa place. Si on aurait volontiers apprécié quelques extraits autres que Whitesnake (de Vandenberg, ancienne ou nouvelle mouture, ou Vandenberg Moonkings), on ne peut que savourer ce qui nous a été offert. Le public le sait et a, au passage, posé les jalons de l’ambiance à venir.

Adrian VANDENBERG @Heavy Week End 2025
BATTLE BEAST @Heavy Week End 2025

Après le hard rock, on passe au power metal finlandais. Non, pas Lordi… Si j’avais été peu sensible à Battle Beast lors du dernier passage du groupe au Hellfest, les conditions du jour me permettent de découvrir le groupe sous un autre angle. Force est de reconnaitre que les cinq se donnent à fond, la voix de Noora Louhimo faisant toujours office d’arme (plus vraiment) secrète.

BATTLE BEAST @Heavy Week End 2025

On sent les musiciens concentrés et quelque peu statiques, malgré l’envie de Eero Sipilä (basse) d’haranguer le public. Mais tous les regards sont portés sur la chanteuse au casque corné. Au gré des titres, l’ensemble du groupe va chercher la foule qui répond là encore plus que positivement d’autant plus que Noora, visiblement heureuse d’être là communique avec le public aussi chaleureusement que les flammes qui viennent réchauffer l’atmosphère.

BATTLE BEAST @Heavy Week End 2025

Battle Beast nous a offert une très belle prestation, celle qui ressemble à une jolie mise en bouche pour accueillir la tête d’affiche.

BATTLE BEAST @Heavy Week End 2025
SAXON @Heavy Week End 2025

Mais avant, place à un monstre sacré du heavy metal. Saxon, du haut d’une carrière longue d’un demi siècle, est toujours bien présent. Les Anglais s’apprêtent à sortir leur nouveau live, Eagles over Hellfest, et se lancent ce soir dans leur nouvelle tournée européenne qui, rappelons-le, les verra revenir pour trois dates en France les 11, 12 et 13 septembre aux Zénith de Paris, Nantes et Toulouse (avec, exclusivité de ces dates, le show Castles and eagles. Nous y reviendrons.)

SAXON @Heavy Week End 2025

Bien qu’on sache à quoi s’attendre, on a toujours plaisir à retrouver Biff et sa bande qui jamais ne déçoivent. Les anciens se massent devant la scène et dès les premières mesures de Hell, fire and damnation, le ton est donné. Les bouches à feu crachent leurs flammes tandis que le public scande le refrain de ce futur classique avec entrain. Et Biff, majestueux observe avec sérieux et attention la foule devant lui.

SAXON @Heavy Week End 2025

Si Saxon a composé certains hymnes incontournables que l’on retrouve ce soir (besoin de les citer? Alors, en vrac, Motorcycle man, Strong arm of the law, Wheels of steel, Heavy metal thunder, Dallas 1pm, 747 (strangers in the night)…) le groupe nous dégaine quelques raretés qui font du bien.

SAXON @Heavy Week End 2025

On a ainsi droit à Power and the glory et Dogs of war, nouvellement réintroduit dans la set list ainsi que 1066, un des trois extraits du dernier album. Les connaisseurs le savent, ils sont en train de vivre un de ces grands moments, un de ces concerts francs et directs, sans chichi. Et même si Biff, qui referme régulièrement son manteau, semble avoir froid, le public lui mange dans la main. Le concert se termine magnifiquement avec Princess of the night, toujours aussi imparable.

SAXON @Heavy Week End 2025

Si Saxon ne surprend pas les fidèles, le groupe impressionne toujours par sa puissance et ses prestations toujours aussi solides. Désormais parfaitement intégré, Brian Tatler confirme être le meilleur choix possible pour remplacer Paul Quinn. On remarque aussi que, de son côté, Nibbs Carter est beaucoup plus calme qu’il y a quelques années, headbangant avec plus de raison. Reste que la machine de guerre est de sortie (malheureusement pas le Fuckin’ pigeon… mais ça, ce sera pour le mois de septembre !)

SAXON @Heavy Week End 2025
POWERWOLF @Heavy Week End 2025

Elles sont là, elles sont de sortie les meutes de loups-garou, impatientes de répondre à l’appel d’Attila Dorn et de Falk Maria Schlegel. Qu’on aime ou pas sa musique, un concert de Powerwolf est toujours prometteur de bons moments. Au pluriel. Car plus que le show, c’est le partage, la communion entre le groupe et le public. Un grand voile cache la scène, et dès que ce dernier tombe, le public se libère.

POWERWOLF @Heavy Week End 2025

Bless ’em with the blade lance les hostilités – Powerwolf débute également sa nouvelle tournée ce soir, le public du HWE a donc droit à l’exclusivité du show! – et, très vite, très tôt, Attila s’adresse au public. Toujours en français, délivrant son éternel message « heavy metal is religion ». Forcément, ceux qui découvrent ce soir Powerwolf ne peuvent qu’être séduits tant par cette communion que par l’excellence du show proposé. Pas une seconde ne se passe sans un clin d’œil, un sourire, une complicité tant entre les musiciens qu’avec, surtout, le public.

POWERWOLF @Heavy Week End 2025

Les frères Greywolf monopolisent la scène lorsque Falk se retrouve coincé derrière ses claviers. Il est naturellement bien souvent présent en avant scène, accompagnant Attila, très en voix, dans cette grand-messe célébrant le heavy metal et son armée (Army of the night).

POWERWOLF @Heavy Week End 2025

« On va faire bouger nos hanches« , annonce Attila. « Qui veut danser avec moi? Avec Falk? » Le teasing lancé, tous deux font deux pas de danse annonciateurs de Dancing with the dead et, crachés ses premières banderoles qui retombent légèrement sur le public.

POWERWOLF @Heavy Week End 2025

Attila invite ensuite le public à chanter quelques mesures avec lui, le préparant ainsi à l’accompagner sur Armata strigoi. Chacun chante aux ordres d’Attila: tout le monde, puis les femmes puis les hommes (quelque peu plus nombreux) et même… « maintenant, la sécurité privée, allez, chantez avec nous la sécurité privée!« , rappelant que « je suis le maestro de cérémonie » lorsque le public s’élance avant son ordre. Communication, communion même, et humour font ce soir très bon ménage.

POWERWOLF @Heavy Week End 2025

Un loup garou sur fond bleu blanc rouge accompagne La bête du Gévaudan, titre chanté en français pour le plus grand bonheur de tous, suivi par le classique Demons are a girl’s best friend. Jamais Powerwolf ne laisse retomber la pression, que ce soit avec la pyro et les confettis – encore – sur Fire and forgive ou en faisant – toujours – participer le public, qui ne se fait pas prier.

POWERWOLF @Heavy Week End 2025

Le combat des « Uh » (coté Falk) et « Ah » (côté Attila) fait toujours son effet, et fonctionne à merveille, plus encore, une fois le « concours » terminé, lorsque 6.000 gorges reprennent le gimmick tout au long de Werwolves of Armenia, suivi de Heretic hunters.

POWERWOLF @Heavy Week End 2025

Les festivités continuent jusqu’à la conclusion habituelle, l’incontournable We drink your blood. Clairement, ce soir, Powerwolf a brillamment lancé sa nouvelle tournée. Le public repart ravi, la bave de la meute s’étant transformée en sourires marquant des visages simplement heureux d’avoir vécu ce moment. Un grand, très grand concert qui, malgré le froid, vient clore une première journée plus que prometteuse d’un week end de très belle fête. On sera de retour demain, promis!

POWERWOLF @Heavy Week End 2025

Interview : TRANK

Interview TRANK. Entretien le 30 mai 2025 avec Michel André Jouveaux (chant)

Après une première rencontre avec le quatuor au complet pour parler de la sortie de The ropes, le premier album de Trank, puis un entretien avec Johann, leur batteur, fin 2021pour échanger au sujet de la version deluxe dudit album, c’est aujourd’hui avec Michel, l’intarrissable chanteur, que nous parlons (entres autres sujets) du second album, The maze, et de sa sortie en version vinyle. Il en a des choses à raconter!

The ropes remonte à fin 2020. Depuis, The maze est sorti fin 2024 ; quels retours en avez-vous eus ?

Les chroniques ont été très flatteuses jusqu’ici, toutes… Après, j’imagine qu’il y a des gens qui ont écouté cet album, l’ont trouvé tellement nul qu’ils n’ont pas voulu écrire à son sujet, mais on a eu des chroniques extraordinaires, et les chansons de l’album passent très bien sur scène, ce qui est un bon test pour nous. On passe beaucoup de temps à les peaufiner en studio – on est légèrement maniaques du son, de la production, on veut sortir des chansons dont on pense qu’elles sont les meilleures possible. Mais le but, c’est de les jouer sur scène. Les chroniques et l’accueil des chansons sur scène sont incroyablement positifs.

Si on se parle aujourd’hui, c’est parce que vous sortez maintenant une version vinyle de cet album. Déjà, pour The ropes, vous aviez sorti quelques mois plus tard, une version double de l’album avec un second CD de vos titres réarrangés par d’autres. Y a-t-il, avec cet album, des choses particulières ou doit-on arrêter maintenant cette interview ?

(Il explose de rire) C’est un vrai rêve de gosses pour nous ! Deux d’entre-nous sommes très fans du format vinyle… On aurait déjà voulu le faire pour The ropes, mais c’était un peu compliqué pour plein de raisons, pour la supervision… The ropes, c’est un album de 52’, qui est une durée batarde. Si on met plus de 44, 45’ sur un vinyle, la qualité du son s’en ressent vraiment. Au-delà de 50’, la dynamique est bâclée, le volume général est assez bas…

Et c’est trop court pour faire un double…

Voilà, et faire un double, ça coute deux fois plus cher. Ou alors, il fallait qu’on retire une chanson ou deux mais c’est comme te demander lequel de tes enfants tu veux mettre sur EBay ! A l’époque, on avait discuté et la sortie du vinyle n’était pas une priorité. Il y a beaucoup d’artistes, d’ingé sons… qui sont venus nous voir en nous disant qu’ils voudraient bien remixer tel ou tel morceau, en faire autre chose, de l’électro, de l’indus. On a priorisé ça et on a laissé tomber le vinyle, ce qui pour moi était un crève-cœur, mais il faut faire des choix. Du coup, quand on a attaqué ce nouvel album, je leur ai dit : « Ok, les mecs, mais on fait 44’ maximum ! Comme ça, on pourra faire le vinyle ! » (rires) Ça a entrainé un processus de sélection d’autant plus brutal pour savoir quels titres se retrouveraient sur l’album mais ça nous a permis de le sortir en vinyle. On en est très contents, d’autant plus qu’on a été très bien entourés pour la sortie de cet album, en particulier par Andy Van deck qui a fait le mastering. Il travaille à New York, il est très réputé en matière de mastering – il s’occupait notamment de celui de Porcupine Tree avant que ce soit Steven Wilson qu’i s’en occupe lui-même. Il est aussi réputé pour la qualité de ses mastering pour des albums vinyles, et quand il a masterisé l’album, il l’a fait en plusieurs versions : une version CD, une version plus haut débit pour le numérique, et une version pour le vinyle. La raison pour laquelle le vinyle sort un peu plus tard que le CD, c’est qu’on voulait aussi qu’il soit pressé dans une usine où on avait une garantie de qualité sur le résultat final. Les usines capables de très bien presser, il n’y en a que deux en Europe. Elles ont des listes d’attente assez longues, mais on espère que quand les gens vont écouter l’album, ils se diront que ça valait vraiment le coup d’attendre.

Encore faut-il avoir le matériel pour écouter le vinyle dans de bonnes conditions…              

C’est vrai, il vaut mieux avoir une bonne platine… L’intérêt du vinyle, il est là, sans passer par une numérisation du son qui ruine tout. Brancher un vinyle sur une enceinte connectée, non, ça marche pas, c’est un peu comme mettre un moteur de deux chevaux dans une Ferrari…

On n’avait pas eu l’occasion de discuter à la sortie de The maze, alors comment décrirais-tu la musique de Trank à quelqu’un qui ne vous connais pas encore ?

Oh, c’est la question la plus difficile… On a déjà du mal à la décrire nous-mêmes…

Je me rappelle que dans votre communiqué de presse de The ropes, vous aviez mentionné le fait que Deep Purple disait que s’ils se formait aujourd’hui, ils sonneraient comme Trank…

C’est vrai, ils avaient dit ça, c’est extraordinairement flatteur. Après… Je ne suis pas trop certain de savoir ce qu’ils voulaient dire par là (rires), mais ça nous a fait très plaisir. Du coup, ça nous a aussi mis la pression parce que dans le même communiqué, ils disaient à leur public de venir à l’heure, « on les a choisis, ils sont bien ». Donc, on s’est pointés, et là où d’habitude, en tant que première partie, tu commence à jouer avec une salle à moitié vide qui se remplit quand tu joues, on est monté sur scène à la Riga Arena, et la salle était blindée avec 16.000 personnes ! Des gens qui étaient là, les bras croisés, genre « vas-y, montre-moi ce que tu fais, on est venus pour ça… » Heureusement, ça s’est bien passé mais ils nous avaient bien mis la pression quand même (rires).

Revenons à ma question : comment tu décrirais la musique de Trank ?

La plaisanterie qu’on faisait au début, c’est de dire que c’est un peu comme si Soundgarden et Depeche Mode faisaient un bébé. Mais c’est un peu ça, il y a une base hard rock assez typée 90’s qu’on trouve dans la plupart des morceaux, avec une colonne vertébrale axée sur un gros riff, et des choses plus proche du rock alternatif, façon Muse des grandes années. Il y a cette base qui se mélange avec une influence post punk. Je suis le plus grand fan de Depeche Mode parmi les gens que je connais, et, forcément, ça s’entend, dans la façon d’utiliser l’électronique, par exemple. Là où les deux références se retrouvent, c’est dans ce qu’on trouve intéressant chez eux, cette capacité à composer de la musique avec une certaine noirceur et un côté très accrocheur et entrainant qui fait que tu rentre dedans immédiatement. Et ça, ça nous parle. A l’époque de The ropes, un chroniqueur avait commencé sa chronique en écrivant « gros son et émotions fortes », et ça nous va complètement. On ne fait pas de la musique extrême, avec du bruit non stop et des hurlements continus, on aime l’idée de susciter de l’émotion chez les gens. Le travail sur le son aussi est important. Mélanger des parties de guitares qui alternent entre une forme de puissance et une richesse de textures, d’ampleur d’atmosphère, avec de l’électronique va amplifier le côté « cinématographique » de la musique. Le fait d’avoir une rythmique basse batterie apporte aussi cette puissance et ces nuances. Johann, notre batteur, c’est le fan ultime de Toto, et a priori, tu ne va pas trouver cette référence chez la plupart des batteurs de metal ou de hard rock, souvent plus dans un style « tape-dur ». Cette étiquette de « gros son émotions fortes », ça nous va bien. Quand tu lis les chroniques de l’album, on cite un nombre de références incroyable. Certains ont parlé de A Perfect Circle, Nine Inch Nails, Disturbed, dont on avait aussi fait la première partie… Tout un tas de noms très flatteur, et ce que tous ces noms ont en commun, c’est une certaine façon de combiner une énergie intense avec une mélodie tout de suite accrocheuse. L’identité de Trank, c’est un peu ça.

On est d’accord que Trank ne se contente pas d’un style et puise dans de nombreuses références (il acquiesce). Si tu devais ne retenir qu’un seul titre de The maze pour définir ce que Trank est aujourd’hui, ce serait lequel ?

C’est une très bonne question ! Comme ça, au débotté, je te dirais Miracle cure qui est une chanson qui résume pas mal la personnalité du groupe. Pour moi, c’est peut-être celle qui nous résume le mieux, d’abord parce qu’elle a ce côté accrocheur et sombre, elle est sur un mid tempo assez lourd et elle mélange des moments de très forte intensité au niveau guitare et voix – on se rapproche du metal, souvent – avec des moments qui relèvent beaucoup plus d’une forme d’électro planante. Et puis, il y a un passage inattendu, qui marche très bien sur scène, c’est quasiment du rap. C’est plus de la parole rythmée que du chant. Le résultat donne quelque chose de très cohérent et qui, pour nous, sonne comme un mini film de 4 ou 5’. Il résume assez bien tous les contraste qu’on peut trouver dans notre musique.

Je reviens sur ce mot de « contrastes ». C’est quelque chose qu’on retrouve sur les deux versions de votre premier album (l’original est blanc, la seconde édition rouge et noire) que sur The maze avec ce labyrinthe sombre traversé par ce couloir de lumière.

La notion de contraste et de paradoxe dans la musique et dans l’image est très intéressante pour nous. J’aime beaucoup l’idée d’écrire des chansons qui vont traiter de sujets par définition assez lourds, mais de chercher transformer ce matériau en quelque chose qui permette d’établir une connexion avec les gens. Il y a un côté « alchimie » dans la musique que j’aime beaucoup. Même si on n’est pas tous angoissé au même niveau dans le groupe, àA un moment ou un autre, tu vas forcément plonger au tréfonds de ton estomac, ressortir une espèce de nappe de goudron a=et toutes les saloperies – la peur, la colère, l’angoisse, l’anxiété – et tu en ressors quelque chose de particulier, surtout dans le chant. Je me trouve très privilégié dans la mesure où je peux faire ça. Tu transformes, tu transmutes tes propres angoisses en quelque chose de positif, et c’est quelque chose que les gens ressentent, ce qui crée une connexion entre eux et toi. Ce contraste est au centre de tout. De manière générale, dans le contraste on trouve les nuances. On aurait tous 22 ans, on ferait la musique qui correspond à l’âge, on serait peut-être plus monolithique, monocorde ou monocouche. On est tous passés par là, et on recherche maintenant cette notion de contraste. Oui, elle est au cœur de tout ce qu’on fait.

On sait aujourd’hui qu’un groupe de rock, qui plus est français, ne vit pas, ou très difficilement de sa musique. Quelles sont vos métiers autres ?

On a des métiers très variés : David, qui est un gros costaud, fait de la sécurité privée, Johann fait du marketing dans une grosse société, ce qui était aussi mon cas jusqu’à il y a une dizaine d’’années, maintenant je suis indépendant, consultant en stratégie le jour et musicien la nuit, et j’ai aussi une boite de musique de pubs, ce qui fait que j’ai trois métiers ! Pas toujours facile à gérer… Emma, notre manageuse, travaille pour une concession automobile à Genève. Arnaud est informaticien et Nico est financier. On a tous des métiers, et des familles, et on considère Trank comme un métier… qui nous coûte de l’argent et qui est financé avec nos autres métiers ! On fait Trank par passion. La dernière chose qu’on veut entendre c’est « si voulez que ça se vende, que votre clip soit diffusé, il faut faire ci et ça ». on a la chance de pouvoir faire les choses comme on le veut sans avoir à se demander si ça va se vendre ou pas.

On en a vu des artistes qui se sont fourvoyés parce que leur management ou label leur disait quoi faire et le public n’a pas répondu présent… Trank c’est un groupe de rock. Le rock, c’est aussi la scène. A quoi faut-il s’attendre avec Trank en concert ? Va-t-on pouvoir vous voir un peu partout en France ?

Oui… On aime beaucoup jouer dans les festivals, on vient d’en enchainer trois d’affilée, et il y en a quelques-uns qui arrivent cet été. On y croise des gens qui sont exactement comme nous, des mordus qui font ça par passion, pas pour s’enrichir. On se retrouve à jouer pour des gens très demandeurs de musique. On aime beaucoup jouer dans ce contexte-là aussi parce que les gens qui organisent ces trucs deviennent rapidement des potes. On a le même virus, et ça crée des liens.

Mais en dehors des festivals, vous allez visiter les villes de France ? Il y a des gens qui se déplacent aussi en clubs…

Alors laisse-moi dire ceci : appel aux bookers et aux tourneurs ! Nous, on va là où on nous demande, la seule contrainte, c’est que maintenant, on est 6 sur scène. L’album, on l’a fait à trois, puisqu’on a eu un gros changement de line-up puisque Julien (guitare), avec qui j’avais cofondé le groupe a décidé de se consacrer à sa vie perso, le rythme de Trank n’était plus compatible avec sa vie. Il a participé à trois chansons sur l’album, mais on l’a fini sans lui. Mais maintenant, sur scène, on est six : Emma, notre manageuse, joue des claviers et s’occupe des samples, Arnaud, notre nouveau bassiste qui nous a été recommandé et qui partage à la fois notre éthique de travail, notre niveau d’exigence et notre sens de l’humour de débiles… et on a un second guitariste, Nico, qui était avec moi dans un groupe de reprise. On voulait un son plus étoffé sur scène, ce qui implique d’avoir deux guitares. Lui et David se répartissent les guitares, on n’a pas de lead ou de soliste, chacun joue en fonction de ce qui lui correspond le mieux. Donc on est six, et la logistique est forcément plus compliquée. Et on met un point d’honneur à essayer de répondre positivement à toutes les demandes, mais ce n’est pas toujours possible… Après, à quoi s’attendre ? Sur scène, la formule est proche de ce que tu trouves sur album, l’esprit musical ne change pas. Si sur album l’équilibre entre noirceur et lumière est de 60/40, sur scène, c’est l’inverse, l’intensité est là mais on communique beaucoup avec le public, on fait beaucoup participer les gens.

On parle de contraste, mais il y a aussi un point commun à vos deux albums qui entraine une question sur le prochain : ils commencent par l’article « The » (il rit). Le prochain va aussi commencer ainsi ?

C’est vrai ! Je ne sais pas… J’ai plaisanté l’autre jour en disant que le prochain s’appellera The end, comme ça il y aura « The » dedans et on aura encore une lettre en moins – cinq, quatre puis trois ! En fait, le titre de chaque album est venu du lien thématique qui unit la presque totalité des chansons. Un lien pas intentionnel, à la base. C’est moi qui écris les paroles, et je les écris à la fin. On travail un instrumental ensemble, que je laisse, comme en cuisine, « je réserve », quelques semaines ou jusqu’à 5 ans… A un moment, je ressors le morceau et je cherche dans mon bloc note l’idée qui pourrait coller, sur la rythmique ou autre. A partir de là, le texte et la mélodie vocale s’écrivent autour de ce thème. Pour les deux albums, au bout de cinq ou six chansons écrites, je me suis rendu compte qu’elles étaient liées par un thème commun. Dans The maze, c’est la quête de l’identité. C’est un thème qu’on retrouve partout, il y a une obsession identitaire, tant dans les discours de la gauche que de la droite, d’ailleurs, qui n’a jamais été aussi forte et, paradoxalement, il n’a jamais été aussi difficile de trouver sa propre identité et de l’affirmer. On reçoit tellement d’injonctions contradictoires qu’on ne sait plus où aller… on vit une époque où les gens doivent, ils ne sont pas encourager, ils sont forcés de se définir non pas en fonction de ce qu’ils font ou accomplissent, ce qu’ils créent, mais en fonction de qui ils sont, que ce soit une origine ethnique, réelle ou supposée, une appartenance religieuse, réelle ou supposée, un propos qui suffit à les définir « entièrement » et à les réduire dans l’esprit de gens qui sont les premiers à les juger et les condamner… Tu dois naviguer en permanence dans cette espèce de tir de barrage d’injonctions contradictoires sans vraiment jamais savoir ce qui va passer ou pas dans l’affirmation de ton identité. En plus de la pression naturelle imposée aux enfants et aux ados… The maze, c’est ça, ce labyrinthe intérieur et extérieur dans lequel on se trouve aujourd’hui avant de pouvoir répondre à cette question fondamentale : « qui suis-je ? » Elle est beaucoup plus complexe que cette vision simpliste, manichéenne, binaire – le mot qui tue ! – on met les gens dans des cases d’une manière simpliste, c’est effarant !

Quelle pourrait aujourd’hui être la devise de Trank ?

C’est une question, un exercice que j’aime bien qui m’évoque Depeche Mode qui, à une certaine époque prenait une phrase tirée de son contexte, issue d’une chanson et qui était imprimée en bas de la pochette et qui résumait un peu l’album… une devise pour Trank ? Il y en a plein de possible, celle qui me vient à l’esprit tournerait autour de – allez, je vais faire le vieux con – je vais citer Yoda : « fait ou ne fait pas ». On est très jusqu’au-boutistes dans le groupe, on est très exigeant sur notre façon de faire les choses. Être passionné c’est en soi une bonne chose. On vit dans un monde où il y a une sorte de fénéantise, d’apathie, un monde post téléréalité qui depuis 20 ans te montre que le meilleur truc à faire c’est de reste assis en espérant qu’une équipe de télé débarque pour démontrer à quel point tu es extraordinaire ! Pour nous, nous sommes tous des passionnés, l’idée c’est de faire ce que tu fais à fond.

As-tu quelque chose à rajouter avant de terminer ?

Oui, on parlait de la sortie de l’album en vinyle. S’il y a des gens intéressés, le meilleur moyen de se le procurer, c’est d’aller directement sur le site trankmusic.com. Je crois qu’il reste aussi quelques copies du premier album, plus beaucoup, mais il en reste. On parlait de passion il y a deux minutes, et je crois que, ce qu’i y a de plus gratifiant pour nous, en studio ou sur scène, c’est qu’on rencontre des gens aussi mordus que nous. La musique n’est plus le phénomène de masse culturel que c’était quand on était gosses, et ça fait d’autant plus plaisir de connecter avec des gens qui écoutent notre musique. C’est une des choses les plus incroyables et on a vraiment le privilège de faire ce qu’on fait !