Dans la veine « old school », ces dernières années nous ont plus habitués à un revival du southern rock ou du rock psyché/stoner. Avec Black Spiders, on replonge dans les premiers jours du heavy metal, celui auquel on ne collait pas encore systématiquement cette étiquette mais qui savait se faire aussi pesant qu’envoûtant avec ses relents psychédéliques qui sentent bon la consommation de certains produits. Les amateurs connaissent déjà cette formation qui n’a pu défendre son dernier album (Black Spiders, paru en 2021) comme elle l’aurait pu si la crise sanitaire n’avait bloqué le monde entier à la maison et rabattu les cartes du monde musical. Alors il est temps de se repencher sur le travail de cette brillante formation de Sheffield formée en 2008 et qui revient avec un album très justement et de manière très optimiste intitulé Can’t die, won’t die. Après une intro qui sonne comme une incantation hypnotique et répétitive invitant à assister à un cérémonial, Hot wheels lance la machine. Le rythme est enlevé, les riffs directs. Tout au long de l’album, on retrouve des rythmes enlevés, des riffs directs et un chant chaleureux, celui d’un Pete Spilby allumé. Sans jamais laisser tomber la pression, Black Spiders varie les plaisirs, passant d’un destroyer presque dansant à un Alright alright alright plus poppy, pour revenir à des règlements de compte (Traitor’s walk, A rat is a rat) ou terminer sur un explosif End of the world. Can’t die, won’t die est une nouvelle déclaration d’intention des Anglais qui doivent désormais trouver et consolider leur public. Quand bien même les Black Spiders ne réinventent pas le monde du metal, ils se donnent avec tant de belle et bonne volonté que l’on a envie de les suivre. Ils ne lâcheront pas l’affaire, et c’est tant mieux!
C’est en 2016 que nait le trio anglais Urne qui se fait les armes et propose, en 2021, son premier album Serpents & spirit. Ce dernier a dû marquer Joe Duplantier, guitariste et hurleur en chef de Gojira, qui a décidé de produire le second album des Anglais. Enfin, « produire »… Le gaillard est crédité à la production ainsi que, accompagné de Johann Meyer, à l’enregistrement, au mixage et à l’édition… A l’écoute de A feast on sorrow, on comprend vite ce qui a dû plaire au Français tant la démarche musicale de Urne est lourde, sombre et complexe. Complexe car le trio composé de Joe Nally (chant et basse), Angus Neyra (guitare) et James Cook (batterie) ne se laisse jamais aller à la facilité, que ce soit dans les morceaux les plus courts – hors l’instrumental Peace de 1’12 – qu’il s’agisse de l’oppressant titre d’ouverture The flood came rushing in (6’05 de rage et de fureur des éléments), ou Becoming the ocean, ou encore, surtout, de ces deux pièces à rallonge que sont A stumble of words (11′) et The long goodbye/Where do the memories go qui vient clore cet album en 11’15 de lourde, oppressante et hypnotisante mélancolie. La lecture du livret permet de plus encore comprendre la démarche du groupe, Joe Nally en tête expliquant en avant propos les origines de cet album qui est tout sauf optimiste et qui met en avant la puissance destructrice des océans lorsque ces derniers s’éveillent. Un album exutoire, en somme, qui lui permet de faire le point sur la maladie La production est riche et massive, mettant en avant autant les orchestrations et arrangements subtils – quelle superbe introduction au piano sur le morceau titre ! – que le chant gras, parfois proche d’une colère black metal de Joe Nally. Urne fait partie de ces formations sur lesquelles on parie volontiers qu’elles deviendront des incontournables de demain. A feast on sorrow en est la meilleures des cartes de visites à découvrir d’urgence si ce n’est déjà fait.
Voilà un des concerts que je ne voulais pas rater, d’autant plus depuis le retour de John Corabi dans la famille The Dead Daisies. Si le groupe à entrées et sorties permanentes a toujours suivi les aspirations du commandant de bord David Lowy, j’ai, malgré deux bons albums, moins accroché à la période Hugues. Et puis, le alors quatuor n’a jamais vraiment posé ses valises chez nous avec « The voice of rock » – deux concerts en 2022 (à Vienne et Pennmarch), un Hellfest annulé en dernière minute… Bref, après la crise sanitaire, le capital sympathie est à reconstruire. Et ça, c’est quelque chose d’inné avec Corabi.
Ce soir, la Machine du Moulin Rouge est plus que correctement remplie et le public accueille un Spike, ex chanteur de The Quireboys, qui propose ce soir un set acoustique; Seul en scène, accompagné de sa guitare et entouré s’un chevalet et de ce qui fait office de mini bar avec deux verres, le chanteur est de très bonne humeur. Tout au long de son set, il ne fera que blaguer, évoquer des souvenirs entre deux chansons. Sa démarches se faisant moins assurée au fil des minutes, nous sommes quelques uns à nous demander quel est exactement le contenu de son verre à bière…
Le gaillard sème quelque peu le doute évoquant régulièrement un nouvel albu de « The real Quireboys »..; Serait-il donc de retour au bercail? Non, il a désormais son propre groupe qu’il a nommé The Real Quireboy. Est-ce le meilleur choix de patronyme? Permettez moi d’en douter, mais l’avenir sera plus explicite.
Son set est composé de classiques des Quireboys et de quelques reprises, mais il est surtout composé de souvenirs qu’il évoque, des ces moments passés sur la route avec Whitesnake et Aerosmith (c’est la plus belle année que j’ai vécue. On n’a touché aucune drogues cette année là, non, non, rien du tout! ») et partage facilement, toujours avec le sourire et sa bonne humeur communicative, anecdotes sur anecdotes. Le public se marre, et tant mieux. Car le set musical en lui même peut, sans ces intermèdes, sembler un peu longuet, même si le public reprend en chœur certains des titres les plus connus. Mais le gaillard, malgré les signes du staff lui indiquant qu’il est temps d’arrêter, continue de jouer, cherchant un titre dans son classeur… Un set dont on se souviendra plus pour la déconne simple que pour le contenu musical, aussi sympathique soit-il.
Un pupitre, un pied de micro et une caisse, c’est assez rapide à sortir de scène. A peine 15′ après la fin du set de Spike, la Loco… euh, la Machine est replongée dans le noir. The Dead Daisies déboulent pied au plancher avec Resurrected. Un choix de titre d’ouverture qui sonne comme les meilleures augures et qui, je le pense, n’est pas un choix fait à la légère. D’ailleurs, la tournée elle-même s’intitule Resurrected Tour…
Il faut peu de temps à Doug Aldrich et John Coraby pour saisr le public à la gorge, public qui découvre ce soir le « petit nouveau », le bassiste Michael Devin, presqu’un clone de Marco Mendoza en plus… concentré. C’est aussi le cas du capitaine David Lowy qui se lâche au fil des titres.
Corabi est ce soir très en forme, et communique très facilement avec le public. Il est visiblement heureux d’être de retour au bercail. Si, ce soir, TDD fait naturellement la part belle à sa discographie avec Corabi, le groupe n’écarte pas la période Hugues dont trois petits morceaux sont joués (Unspoken et Bustle and flow de Holy ground et Born to fly de Radiance).
Le public reste cependant particulièrement réceptifs aux désormais classiques du groupe qui défilent les uns après les autres. Les musiciens occupent chaque espace de la scène, allant chercher e public autant que faire se peut.
Brian Tichy nous gratifie d’une superbe et puissant solo de batterie avant que Corabi ne prenne le temps de présenter chaque musicien, prétexte à mini medley. « Si vous aimez ce que vous entendez, c’est grâce à moi! Si vous n’aimez pas ce que vous entendez, c’est de sa faute » dit-il en désignant David Lowy qui entame Highway to hell (AC/DC). Puis vient le tour de Brian Tichy (Living after midnight, Judas Priest) et du nouveau venu… « Je suis allé chez mon ex-femme, un jour, et dans mon canapé, ce mec était assis. Je t’ai déjà remercié de m’avoir soulagé d’elle? » demande-t-il à Michael devin avant que ne résonnent les premiers accords de Heaven and hell (Black Sabbath). « L’homme aux cheveux dorés » c’est naturellement Doug Aldrich, désormais le plus ancien membre « permanent » de TDD (Smoke on the water, Deep Purple). Puis c’est au tour du chanteur de se voir présenté avec We’re an American band (Grand Funk Railroad).
La tension est telle qu’on sent l’approche de la fin du concert. Mais avant cela, toujours de bonne humeur, Corabi vient taquiner le public: « Vous avez ce truc en France avec le vin. Mais aimez-vous la bière? Et le whisky? Vous aimez la tequila? Voulez-vous faire un tour au Mexique? » et c’est parti pour un explosif Mexico baigné de lumières vertes, rouges et blanches, au couleur du drapeau mexicain.
TDD quitte la scène après sa version de Midnight Moses avant de revenir pour offrir l’incontournable Long way to go – plus que jamais d’actualité… – et de conclure avec sa dernière reprise en date, Slide it in. Marrant quand on pense que deux des membres actuels des Daisies sont passés dans le giron du Whitesnake de Coverdale…
Ce soir, si la Machine n’affichait pas complet (faut dire que cette salle est tout sauf pratique pour circuler ou voir correctement), The Dead Daisies nous a offert un concert chaleureux, nous montrant un groupe très en forme – mais ne s’est pas prêté à son habituelle séance de dédicaces après son show… Avec une telle énergie, nul doute que le groupe sera bientôt de retour avec un nouvel album et de nouvelles dates. En tout cas, la soirée fut à l’image du groupe: rock’n’roll et chaleureuse!
Merci à Olivier Garnier d’avoir rendu ce report possible.
Depuis leur retour en 2009 avec Walk through fire, les frères Gallagher n’ont de cesse de redonner une vie à Raven. Ainsi, trois ans après l’excellent Metal city, le trio est de retour avec un nouveau batteur, Mike Heller, et un nouvel album, All hell’s breaking loose, paru au début de l’été. Dire que les inventeurs du Athletic rock sont dans une forme éblouissante est un euphémisme. De bout en bout, cet album est explosif, proposant des titres speed au possible, d’autres plus foncièrement heavy , mais toujours empreints de ces mélodies qui donnent envie de se casser la nuque (Surf the tornado ou le morceau titre). Marque de fabrique du combo, le chant de John Gallagher, également bassiste, est toujours aussi tordu, puissant et agressif, presque opératique tout en donnant envie de reprendre les refrains avec lui. Celui de Turn of the screw est imparable, et loin d’être le seul exemple en ce sens… Un chant particulier, certes mais qui donne ce style inimitable à Raven. Son frère, Mark, propose toujours des riffs directs qui cherchent l’efficacité avant tout. Quant au dernier arrivé, Mike Heller, il frappe à en démonter ses fûts et a totalement sa place dans le combo. De Medieval, agressif à souhaits, au saignant Go for the gold (ou « for the throat »?), Raven varie les plaisirs, casse les rythmes sans jamais relâcher la pression. Les amateurs de l’objet apprécieront également le livret du CD, richement illustré de dessins style comics dans lesquels les musiciens deviennent des héros combattant les démons échappés de l’enfer. Un peu à la manière de Charmed mais en plus sanglant. Raven est plus en forme que jamais et on voudrait bien les retrouver sur scène au début de l’été prochain. Les paris sont ouverts…
Judas Priest est enfin sorti des studios et nous présentera bientôt son nouvel album, Invicible Shield dont la sortie est annoncée le 8 mars 2024. En attendant, Rob Halford et ses comparses ont dévoilé un nouveau titre lors de leur concert au festival Power Trip, Panik attack, à écouter en cliquant ci-dessous.
Rendez vous à Lyon et Paris les 5 et 8 avril 2024 – et pourquoi pas en festivals l’été prochain?
Biff Byford a trouvé la fontaine de jouvence… Rien ne semble pouvoir l’arrêter. Ni le poids des ans, ni le manque d’inspiration. Là où d’autres préfèrent placer les groupes de leurs enfants en première partie de leurs propres formations, le mythique chanteur de Saxon fait le choix, depuis la crise sanitaire tout au moins, de collaborer avec son fils Seb. Pas pour le mettre en avant, non, mais bien pour créer ensemble une œuvre permettant à deux générations de travailler sur des influences parfois communes et souvent très éloignées. Biff Byford revient donc aujourd’hui présenter le second album de Heavy Water, ledit projet mené conjointement avec Seb Byford, par ailleurs également fondateur de Naked Six (Lost art of conversation, en 2020). Sur le premier album du « duo », Red city brick (2021), on avait pu découvrir une famille qui testait diverses choses pour se retrouver musicalement, et cela fut une belle occupation en pleine période de pandémie. Avec Dreams of yesterday, le duo continue d’explorer les envies et influences musicales de chacun, et la palette est variée. Du nostalgique morceau titre qui ouvre l’album avec une envie de retourner en 1965 au grunge qui a vu Seb grandir, le duo père/fils se fait plaisir en explorant une musique à la fois puissante, entrainante, vintage, directe ou parfois plus douce, se partageant le chant au gré des titres. L’énergie est bien présente, Biff particulièrement en voix – tel un bon vin, elle se bonifie avec le temps – reprend la basse qu’il a toujours affectionnée tandis que Seb, en plus d’un chant puissant et différent de celui de son père, se charge des guitares. OK, Heavy Water ne révolutionne pas le rock, mais est-ce là l’objectif de la famille Byford? Non, bien sûr, et le plaisir est ici tellement présent qu’il en devient joliment contagieux. Il y a dans ce disque une vraie complicité familiale et ça, c’est somme toute assez rare.
Depuis sa formation au début des années 2000, You Me At Six, malgré une ténacité remarquable, 7 albums au compteur et un line-up assez stable, n’a jamais réussi à véritablement percer. Avec ce nouvel essai, Truth decay, le groupe parviendra-t-il à s’extraire de la masse? D’une durée d’un peu plus de 45′ pour 13 titres, le groupe nous propose une musique inspirée de ce punk popisant – ou de cette pop punkisante, au choix – tant prisé des ados un peu révoltés. Les 5 ont souhaité se replonger dans la musique avec laquelle ils ont grandi autant que dans leurs premiers albums pour en offrir un condensé à leurs fans. Le résultat est un album de rock festif et entrainant, du genre à être joué dans des stades devant des milliers de bras qui tanguent en cadence de gauche à droite. La production donne à l’ensemble une touche de bienveillance énergique au sein de laquelle, comme sur le morceau titre, trainent un peu de rage et de rugosité. Mais est-ce suffisant? Souvent trop consensuelle et « easy listening », ce Truth decay n’apporte rien de neuf dans le genre mais pourrait séduire des foules adolescentes (un peu comme le firent à une époque les One D). Il semble loin le temps où You Me At Six recevait le Kerrang ! Award du « meilleur groupe britannique » en 2011. Il n’est jamais bon de se reposer sur une (éphémère) gloire passée…
L’annonce est discrètement parue sur la page Facebook du groupe: Paul Quinn, le guitariste historique et cofondateur avec Biff Byford de Saxon a décidé d’arrêter les tournées intensives avec ses vieux complices – le groupe a un line up inchangé depuis 2009.
« Après beaucoup de réflexion, notre bon ami et compagnon guerrier Paul Quinn a décidé de se retirer des tournées de Saxon. Après de nombreuses années sur la route, avec son lot de stress et de fatigue qui accompagnent de longues tournées, Paul ne souhaite pas que sa performance en pâtisse et laisser tomber ses compagnons de routes et ses fans » – La suite du communiqué ci-dessous.
C’est donc un des piliers de Saxon, membre plus qu’actif depuis la création du groupe en 1976 et compositeur de riffs qui ont fait la légende des Anglais – inutile de les rappeler, j’espère – qui met un terme à ces longues tournées. Ceci ne remet donc nullement en cause la participation de Paul, aujourd’hui âgé de 71 ans (il est né à Barnsley le 26 décembre 1951), à la création de futurs albums, dont on attend désormais le successeurs de Carpe diem, très bien nommé en l’occurrence.
J’ai vu Saxon pour la première fois en 1981, au Pavillon Baltard, sur la tournée Wheels of steel, puis sur presque chaque tournée exception faite de la période que j’ai passée dans le Midi au cours des années 90 – période la plus creuse pour le groupe. Jamais le groupe ne m’a déçu live, donnant toujours, même aux plus jeunes, de vraies leçons de performances scéniques. J’ai pu rencontrer cet homme charmant et un peu perdu sur la tournée Call to arms – il n’en revenait pas que Saxon en soit déjà à son 19ème album… D’autres albums ont suivi depuis, et pas des moindres, quelques studios et de nombreux live – et je me suis entretenu avec lui pour la dernière fois lors de la promo du premier album de reprises, Inspirations, en pleine période de pandémie. Car même là, jamais Saxon, jamais Paul ni Saxon n’ont baissé les bras. Il arrive pourtant i moment où il faut savoir se retirer, et Paul estime visiblement que ce temps est arrivé.
En un mot comme en cent: Paul, merci pour ces plus de quatre décennies à nous concocter certains des hymnes les plus fédérateurs du heavy metal. Take care! On attend la suite avec impatience.