SHAKA PONK : The final f*cked up tour à Orléans, le Zénith, 22 février 2024

Parfait. Shaka Ponk a ce soir, 22 février, offert au public du Zénith d’Orléans, complètement électrisé et survolté, le concert parfait de bout en bout. Difficile de croire que ce groupe exemplaire ai vraiment décidé de quitter la scène – on en a vu d’autres qui se sont depuis reformés… En tout cas, si The final f*cked up tour devait vraiment être cette dernière tournée, c’est par la grande porte que Shaka Ponk fait ses adieux. Retour sur un des plus mémorables concerts qu’il m’ait été donné de voir.

Ce soir, le Zénith d’Orléans affiche complet. C’est une foule bigarrée qui se masse devant l’entrée dans un froid glacial. Des jeunes, des plus expérimentés, des amateurs de rock, de meta ou autre, le public est à l’image de la population: varié. On a hâte de se retrouver au chaud. Le Zénith est déjà bien rempli lorsque nous arrivons et les lumières s’éteignent assez rapidement.

Ina-Ich a la lourde tâche de mettre le public en appétit. Le duo parisien propose un rock soft qui peut dénoter avec le ton de la soirée. Difficile en effet de chauffer une salle lorsque l’un est coincé derrière sa batterie et l’autre, la chanteuse Kim-Thuy Nguyen, est entourée de claviers.

Si c’est proprement fait et exécuté, si le public applaudi poliment, ce dernier ne s’emballe guère. La musique proposée par Ina-Ich ne me parle pas beaucoup et je constate qu’il y a beaucoup de monde aux bars et au merch de la tête d’affiche. Une première partie trop intimiste qui fait de son mieux mais ne risque pas de voler la vedette.

Shaka Ponk, Zénith d’Orléans le 22 février 2024

Etonnamment, les coursives du Zénith se vident pendant l’entracte, le public préférant trouver sa place dans la salle. Les lumières sont encore allumées lorsqu’une clameur retentit, la foule se tournant vers les passerelles du Zénith et pointant du doigt… Quoi donc? Sam et Frah, les deux chanteurs de Shaka Ponk, et C.C, le guitariste, arrivent dans la salle par derrière en traversant le public, descendent tranquillement les marches avant de se faufiler à travers la foule du parterre et trouvent enfin place sur une petite plate-forme au cœur du public.

Shaka Ponk, Zénith d’Orléans le 22 février 2024

Là, Frah annonce simplement que « comme il s’agit d’un concert spécial, on a décidé de faire les choses différemment« . Les lumières se tamisent laissant le trio entamer avec douceur ce show avec des versions acoustiques de I’m picky suivi de Gung ho (qui m’évoque le Black velvet d’Alanah Myles) et Run run run, les trois se tortillant tant bien que mal afin de pouvoir regarder le public où qu’il se trouve avant d’attaquer une version quelque peu plus électrisée de The house of the rising sun, Frah interrogeant avec douceur les public – « ça va, mes petits singes? » (référence à la mascotte du groupe) et de rejoindre la scène en traversant tranquillement la foule qui fraye un chemin aux trois.

Shaka Ponk, Zénith d’Orléans le 22 février 2024

Dès lors, Shaka Ponk – au complet – entraine son public dans un tourbillon aussi visuel qu’énergique et dansant. La scène est superbement décorée avec ces tas de livres qui sont comme un appel à renouer avec le papier et la culture, la connaissance. Une bibliothèque, et son salon (un canapé et une lampe), sur les murs de laquelle apparaitront plus tard des choristes qui se montreront totalement partie prenante du spectacle.

Shaka Ponk, Zénith d’Orléans le 22 février 2024

Un spectacle magnifié par des lumières exceptionnelles avec ces spots individuels qui trouvent diverses positions et orientations tout au long du concert, ici lampions intimistes, là éclairage sophistiqué.

Le show, cependant, c’est le groupe dans son ensemble qui le donne, chacun des musiciens se démenant comme un beau diable envouté. Mais tous les regards restent braqués sur le duo de chanteurs, un duo qui va chercher le public, qui serre des mains et qui danse, invite, incite à la fête.

Shaka Ponk, Zénith d’Orléans le 22 février 2024

On ne compte pas le nombre de fois où Frah plonge dans le public et se laisse porter par lui tout en continuant de chanter. Le gaillard est partout, tout le temps, Sam occupant la scène de long en large et ne laissant personne sans contact.

Même sa « provocation » est calculée lorsqu’elle annonce : « J’aime pas qu’on m’dévisage… Non, j’aime pas les gens. Mais toi, Orléans, j’aime bien » tout en allumant un clope parce que « j’fais une pause« ! Puis, assise sur son fauteuil, elle entame le très engagé Tout le monde danse alors que sont projetées des images de nos chers politiques internationaux copieusement sifflés par le public.

Shaka Ponk, Zénith d’Orléans le 22 février 2024

Comme si l’ambiance et le show n’étaient pas assez intenses, Frah annonce « qu’il est temps de monter le spectacle au niveau supérieur » et se fraye un chemin vers le podium central d’où il fait un nouveau discours plein d’humour prévenant le public qu’il va danser. « Mais c’est dangereux de tourner, tu peux tomber. Alors on t’écrase. Tu peux te casser le bras, et ça fait mal… Mais tu peux mourir, aussi. Ou, pire… tu peux perdre ton téléphone portable! C’est pire que de mourir, non? » Et c’est parti pour un gigantesque Circle pit qui voit une foule sautillante tourner autour de ce podium.

Shaka Ponk, Zénith d’Orléans le 22 février 2024

Puis, sur cet espace réduit, deux jeunes femmes rejoignent le chanteur. Calins et consignes sont donnés tandis que, sur scène, Sam occupe le public. puis un jeune homme monte aussi sur le podium sur fond de Smells like teen spirit. Il se laisse pousser et est récupéré par une foule de bras tendus qui l’accompagne dans cette séance de crowd surfing? Frah accompagne dans cette même séance chacune des jeunes femmes qui, visiblement, vivent là leur première expérience en la matière!

Shaka Ponk, Zénith d’Orléans le 22 février 2024

Le chanteur quitte ensuite son podium pour aller rejoindre les gradins, sous le regard ébahi du public, grimpe les marches, serre des pognes, fait le tour, redescend les escaliers, câline un homme en chaise roulante, s’arrête, repars… Bref, s’occupe des relations publiques avec un sourire jusqu’aux oreilles avant de se retrouver sur scène, de lonnnngggguuues minutes plus tard!

Shaka Ponk, Zénith d’Orléans le 22 février 2024

On le sait, Shaka Ponk a son engagement ancré en lui. Un engagement politique qui passe par le soutien à Sea Sheppard (« qui nous accompagne sur cette tournée. Nos dirigeants veulent faire changer les choses d’une certaine manière, Sea Sheppard veut aussi faire changer les choses, d’une autre manière. A chacun de choisir…« ) par l’éducation (avec un discours sur ce que les enfants devraient tous entendre de la bouche des parents).

Shaka Ponk, Zénith d’Orléans le 22 février 2024

Le groupe est alors rejoint sur scène par l’ensemble des 16 choristes qui proposent un superbe tableau de vie et de mort sur 13.000 heures. Alors que chacun chante et danse avec bonheur, tous tombent soudainement, les corps jonchés au sol évoquant une scène de guerre. Le réveil se fait sur fond d’engagement pour la cause humaine – le message est d’être qui tu es, hétéro, homo, peu importe – la cause de l’amour et de l’humanité, les deux chanteurs arborant un gigantesque drapeau multicolore, celui de la cause LGBT.

Shaka Ponk, Zénith d’Orléans le 22 février 2024

Shaka Ponk, après la présentation des musiciens, quitte la scène pour un long rappel. On en veut encore! Quelques minutes plus tard, les choriste réunis au milieu de la scène, plongés dans un simple éclairage, entament un gospel émouvant avant de s’écarter, laissant place à Sam et Frah, installés sur le canapé du salon de la bibliothèque. Mais ils ont la bougeotte et Rusty fonky vient clore cette soirée explosive avec l’incontournable plongeon final de Frah dans le public.

Shaka Ponk, Zénith d’Orléans le 22 février 2024

Près de 2 heures 30 se sont écoulées avant que le public ne retrouve le froid extérieur. Mais les cœurs sont chauds et les esprits conserveront longtemps les images de cette soirée exceptionnelle. Shaka Ponk nous a offert le concert parfait. Vivement le Hellfest en ce qui me concerne!

Shaka Ponk, Zénith d’Orléans le 22 février 2024

Merci à Cheyenne productions d’avoir rendu ce report possible.

Interview: ROLLYWOODLAND

Interview Rollywoodland. Entretien avec Rolly Wood (chant, basse) le 19 février 2024

Nous éviterons les détails du démarrage de cette interview totalement dans l’esprit de ce que le trio propose avec son nouvel album, Dark fate for judgement day, donc décalé et fun. Il y a des dossiers qu’on ne dévoile pas… Sauf si… Mais pas aujourd’hui. En plus, j’ai pas les images. Discutons, plutôt!

Rollywoodland

Le premier album de Rollywoodland est sorti il y a 12 ans. Que s’est-il donc passé depuis ? Ne me fait pas le coup de « la crise sanitaire » !

Ça en fait partie, mais pas que ça (rires). Disons qu’on a commencé à bosser sur cet album en 2013 et au moment où on allait commencer à enregistrer, ben… on s’est séparés. On a eu un break entre 2015 et 2018. On a retravaillé sur cet album, ensuite, il y a eu (il rit)… la crise sanitaire…

Il m’a fait le coup !

En fait, on habite assez loin les uns des autres, donc on ne pouvait pas se voir et ça a ralenti les choses…

Alors, justement, revenons en arrière. C’est la première fois qu’on discute, alors peux-tu me raconter l’histoire de Rollywoodland ?

A la base, c’était un projet solo que j’avais en tête en 2010 qui a débouché sur l’album Appetite for seduction qui est sorti en 2012. Il y a ensuite eu un changement de line-up et, ensuite, j’ai repris avec Ben Dog, le batteur d’un groupe que j’avais avant. On a commencé à bosser sur cet album et très rapidement on a eu 14 titres prêts. On a commencé à enregistrer la batterie et la basse en 2015. On a eu ce break dont je te parlais, on a recommencé à travailler dessus en 2018. Entre temps, il y a eu famille et bébés, donc tout était un peu en suspend sans être aux oubliettes…

Donc ce n’était pas la priorité non plus…

C’est ça, malheureusement. Si ça ne tenait qu’à moi, cet album serait sorti en 2015. La vie de groupe fait que parfois tu ne fais pas les choses quand tu veux, ou comme tu le veux. Ça nous a menés en 2020… J’ai réenregistré tout le chant chez moi pendant le Covid, les guitares de Yo Godon ont été enregistrées chez le guitariste entre 2020 et 2022. Entre temps, on a enregistré tous les instruments annexes, comme les shime, les percussions, les synthés… Ça faisait beaucoup de choses sur un album qui dure presque une heure, et, quand tu pars un peu de rien, ça fait beaucoup de travail ! Mener à terme un tel projet, c’est énormément d’investissement personnel et ça peut vite prendre du temps quand tu n’as pas de deadline. C’est un peu notre Chinese democracy, mais bien de chez nous (rires) !

D’où le groupe est-il originaire ?

On est en Rhône-Alpes. J’habite à côté de Genève, le batteur vit à Lyon et notre guitariste est en Savoie. On se retrouve à un point central pour répéter ;

Comment décrirais-tu la musique de Rollywoodland à quelqu’un qui ne vous connais pas ?

C’est du hard rock, tout simplement. Avec des influences diverses, Maiden, Mötley, Scorpions, Priest, Offspring, Kiss, beaucoup…

Donc on est bien ancrés dans les années 80.

Tout à fait. C’est un peu l’époque où j’ai découvert le monde. Ce qui sort, ce n’est pas réfléchi, c’est naturel et un processus spontané. On arrive à avoir des morceaux mid-tempo, des ballades, des titres plus rapides et au final, ça rejoint cette époque.

Il y a une touche supplémentaire : un côté humoristique, un peu décalé, mais pas un humour trash à la Ultra Vomit. Plutôt du détournement de références, comme les deux titres de vos albums – inutile de citer les références, je pense ! La pochette de ce dernier album, on sait tout de suite à quoi ça fait référence, on glisse le CD, le premier titre est limpide – le thème d’un fimm que tout le monde connait (il rit)… Il y a plein de références plus ou moins humoristique. Il y a une volonté de marquer les esprits ?

En même temps, on est sérieux dans notre démarche ! Pour moi, ce n’est pas qu’humoristique, c’est la vraie vie, les vrais films… C’est ce que je regarde et que j’aime. Je pense que l’autodérision est dans le sérieux de la situation. Pour moi, ça va au-delà de l’humour. Je l’annonce clairement, c’est ce que j’aime et ce qui fait foi pour moi. Ce sont de vrais hommages !

C’est pour ça que je parle autant d’humour que de référence, il y a un esprit bon enfant comme le hard rock des 80’s à la fois bon enfant et festif.

Souvent, en marchant dans la rue, j’ai une mélodie qui me vient à l’esprit, je siffle et ça me ramène à une scène d’un film, un moment de bravoure d’un héros… Du coup, je me mets naturellement à écrire un titre comme First blood, last cut en pensant à Rambo.

Dans ce cas, qu’est-ce qui t’a inspiré No dog shit (on the sidewalk) ?

Là c’est clairement une chanson engagée ! C’est le mal français, toutes ces merdes de chien qu’on ne ramasse pas ! Et il y en a marre.

J’imagine bien ce qui t’a inspiré dans la rue en marchant, alors !

Ah, putain ! tu sais, quand tu rentres de voyage et que tu essaies de slalomer entre toutes ces crottes avec ta valise, tu calcules l’espace en espérant que les roulettes vont passer entre et la valise au-dessus… Derrière, il y en a plein d’autres…. Marre, quoi (rires) ! Après, il y a d’autres morceaux engagés : Heaven for paradise ressemble à une ballade américaine, mais, en fait, c’est une chanson anti Jihad. Je l’ai écrite en octobre 2011, juste après les premiers attentats contre Charlie Hebdo. A l’époque, j’étais loin de me douter de ce qui allait se passer par la suite. Derrière le côté enfantin et doux du morceau, il y a des paroles qui sont très violentes.

Sachant que le Jihad, la « guerre sainte », c’est avant tout le combat intérieur mené pour lutter contre ses propres démons…

Ouais, moi, c’est clairement contre eux, contre tous ces mecs… Ce qui est fou, c’est de penser que ce titre date de bien avant tout ce qui allait suivre. Il y a aussi d’autres morceaux plus introspectifs comme Militaerritory, We all come from outerspace ou Love me, des thèmes plus personnels, des chansons d’amour, sur la place de l’humain dans le règne animal. Une façon un peu pudique pour moi de me dévoiler. C’est plus facile pour moi de chanter dans une autre langue parce que mon message sera moins compris par les gens de mon entourage.

Maintenant, si tu devais ne retenir qu’un seul titre de dark fate for judgement day pour expliquer à quelqu’un ce qu’est Rollywoodland aujourd’hui, lequel serait-ce ?

Je pense que ce serait Nunchaku, parce que c’est un morceau qui a un côté heavy, de bonnes parties instrumentales et qu’il reste facilement dans la tête. C’est pour ça qu’on l’a choisi en premier extrait. C’est un morceau assez court qui peut s’adresser à tout le monde. Même si aujourd’hui, je ne peux plus l’écouter (rires) !

Tu parlais de Rambo, mais il y a une autre référence évidente, et c’est un copain de Stallone, c’est JCVD…

Oui ! En fait, c’est tout con : c’est un morceau que Ben, notre batteur, a composé, et, un jour, j’étais en randonnée en montagne, je réfléchissais aux lignes de chant, aux paroles. Et le nombre de syllabes du refrain correspondait au nombre de syllabes de Jean-Claude Van Damme. Ça m’est apparu comme une évidence ! j’en ai parlé aux autres, ils étaient d’accord, du coup, j’ai écrit ce titre sur lui.

Vous lui avez fait écouter ?

Pas encore. C’est prévu, je réfléchi juste au meilleur moyen de procéder pour que ça ne tombe pas aux oubliettes… Je pense que c’est quelqu’un de très sollicité, donc je réfléchis à la meilleure manière de le faire… J’aimerai beaucoup tourner un clip avec lui, aussi, ce serait génial !

Ce serait un bon coup de marketing pour vous ! Un groupe c’est aussi la scène. Quels sont vos projets pour défendre cet album ?

On travaille dessus, on démarche pas mal. Après, ça demande beaucoup de temps et d’énergie pour faire bien les chose. Je pense qu’on va se tourner vers une boite de prod pour travailler ça pour nous. C’est très énergivore. Et je pense que quand tu passes trop de temps à faire ce genre de choses, tu t’éloignes de la musique… Si j’avais tout mon temps pour nous manager, je le ferais avec plaisir, mais je dois aussi gagner ma vie !

Justement, quels sont vos métiers respectifs dans vos autres vies ?

Ben travaille chez Enedis, Yo est ingénieur informatique à Genève où je travaille aussi, je suis conducteur de train pour les Chemins de Fer Fédéraux. En gros, la SNCF suisse…

Mais qui fonctionne plus souvent !

Oh, oui, nous on carbure ! Il y a des trains tout le temps !

J’ai bien circulé avec les trains suisses lorsque je travaillais pour Swissair. Les formations se passaient à Genève ou à Zurich, et je circulais souvent en train entre ces villes.

Ah ! J’habite dans le pays de Gex, pas loin de l’aéroport. Entre Ferney et Gex.

Revenons à vous. Quelle pourrait aujourd’hui être la devise de Rollywoodland ?

Ah, putain… Je sais pas, je dirais « fun rock ». « Rock and fun »

Est-ce que je garde le « putain » ?

Ouais, tu le gardes aussi (rires) !

Comment se traduit ce Rock and fun sur scène ?

Je pense qu’on dégage une énergie assez positive. Dans les vidéos que je peux voir – je n’aime pas trop regarder des vidéos de nous sur scène mais, bon… – globalement c’est ce qui ressort. On cherche à retranscrire l’énergie de l’album sur scène.

C’est pourtant un bon exercice pour corriger ses erreurs.

Oui, mais c’est tout un processus. C’est pas facile de se voir ou de s’écouter chanter. Maintenant, j’ai un peu franchi le cap, mais je n’aime pas ça.

Mais ça te permet de préparer l’avenir…

Oui, on devrait rentrer en studio en fin d’année, on a déjà assez de matériel pour le futur album. Une bonne partie des titres tourne déjà, donc j’espère qu’on aura quelque en fin d’année prochaine. J’ai déjà deux albums d’avance dans ma tête !

On en reparlera plus tard, alors ! As-tu quelque chose à rajouter pour conclure ?

Non, je ne sais jamais quoi répondre à ça… Si, que les gens achètent l’album, vraiment ! S’ils ne l’achètent pas, ils vont passer une journée de merde (rires) ! Ne pas l’écouter, ne pas l’acheter, c’est forcément perdre son temps. C’est le seul conseil que je puisse donner, un conseil avisé, hein ! Je l’ai déjà, donc je sais de quoi je parle…

ROLLYWOODLAND: Dark fate for judgement day

France, Hard rock (M&O music, 2024)

Ca commence avec une intro que les amateurs de SF – et des concerts d’Airbourne – connaissent bien. Le thème générique de Terminator ouvre ce Dark fate for judgement day des Français de Rollywoodland dont le premier album, Appetite for seduction, avait vu le jour en… 2012. Les voici donc qui reviennent, plus d’une décennie plus tard, avec un nouveau méfait sous les bras, un album de 15 titres (Judgement day, l’intro, inclus) dans un esprit potache et décalé. On sourit au démarrage avec les Ugly, No shit (on the sidewalk) – un coup de gueule personnel comme nous l’explique le leader du groupe (interview à suivre) – ou autre Nunchaku qui évoquent aussi bien Steel Panther (sans les références sexuelles) que les plus récents Princesses Leya. L’ensemble fleure bon l’amour du heavy rock 80’s, du hair metal, certes, seulement voilà… Rapidement la recette retombe comme un soufflé qu’on aurait trop fait attendre. Même si Rollywoodland n’a pas la prétention de renouveler le genre, et malgré la chasse aux références distillées tout au long de cet album, il manque ce petit grain de folie, cette étincelle, qui (me) donnerait envie d’écouter ce disque d’une traite. Même si le tout est très correctement produit, et réserve quelque très agréables surprises (comme cette reprise de Michael Jackson, Another part of me), je passe un bon moment sans que pour autant quoi que ce soit ne m’envahisse l’esprit. Dark fate est un album de pure détente qui donne envie d’être réécouté, et, finalement, on ne lui en demande finalement pas plus.

Interview: AGUELENNA

Interview AGUELENNA. Entretien le 2 février 2024 avec Marc (batterie)

Marc, commençons par une question originale : je découvre Aguelenna, alors peux-tu simplement me présenter le groupe, son histoire ?

Je vais essayer d’être synthétique parce que c’est une longue histoire… Aguelenna est un groupe qui est né en 2007, en Seine et Marne. C’est un groupe de rock. On se définit comme jouant du power rock mélodique. Le groupe a connu diverses formes, il y a eu 3 line-up différents plus la forme actuelle. Il y a Rico (guitare) et Marie (chant), les fondateurs du groupe, et moi, je suis arrivé en 2015 à la batterie. Quand je suis arrivé, on a décidé de prendre un tournant nettement plus rock. On a réalisé un premier Ep qui est sorti en 2018. Dans la foulée, on a embrayé sur un album. On avait déjà travaillé quelques titres et on a travaillé ce premier album entre 2018 et 2019, on a fait toutes les maquettes. On a commencé à enregistrer la batterie en 2020, on a même terminé, et le Covid est arrivé… Ça a mis un coup d’arrêt à la production du disque. Je ne comprends pas pourquoi, c’était pas grand-chose… Ca a duré 5 ou 6 mois pendant lesquels on a pas pu faire grand-chose. On a repris la production du disque fin 2020, ça s’est poursuivi sur 2021 et on a terminé en 2022 pour arriver au mixage en 2023.

Vous l’avez donc enregistré sur la durée…

Oui, on a pris notre temps. On s’est dit que ça ne servait à rien de courir. Et le covid a aussi changé la façon de voir les choses. On a eu envie de prendre le temps de faire les choses bien.

Quelque part, ce n’est pas plus mal car tous ceux qui étaient déjà dans ce business de la musique ont eu le même coup de frein, et ont dû repousser leurs publications ; Donc repousser la sortie d’un album pour qu’il ne soit pas noyé dans la masse pouvait être stratégiquement intéressant…

C’était peut-être un mal pour un bien, effectivement. Maintenant, on était déjà prêts, on avait tout maquetté, on avait poussé la prod au maximum de ce qu’on voulait et on savait exactement ce qu’il fallait enregistrer. Les seules choses qui soient restées en suspens, c’est venu bien plus tard : tous les arrangements additionnels, les synthés, les FX qui sont venus se greffer. On l’a fait à la fin, c’était un peu la cerise sur le gâteau. On a aussi pris le temps de réfléchir à ses arrangements, ça a pris entre 6 et 8 mois.

Tu as dit que Aguelenna est un groupe de rock mélodique. C’est un terme assez vaste. Comment définirais-tu votre musique pour quelqu’un qui ne vous connait pas ?

C’est du power rock chanté en français. C’est important, les textes sont en français, même si on est plus sur une couleur musicale américaine qu’anglaise.

Quel type d’influence américaine ?

On se rapproche plus de groupes comme Foo Fighters, Paramore, Nirvana…

Un rock un peu plus grungy que power metal, donc.

On ne se définit pas comme un groupe de metal, en fait. Power oui, parce que c’est énergique, et ça se voit sur scène. On dégage une vraie énergie sur scène. On a beau faire du rock en français, on développe l’énergie du rock américain. Maintenant on aime aussi des groupes comme Aston Villa, Dolly… J’ai tendance à dire qu’on fait de la chanson. On travaille beaucoup nos textes, d’ailleurs…

Ils traitent de quoi vos textes, justement ?

On parle de sujets qui nous touchent, qui sont des sujets qui gravitent autour de nous : des sujets sociétaux, la maladie d’Alzheimer, on parle de racisme, de violences faites aux femmes. Des sujets variés. On traite aussi de la dyslexie… Des sujets qui touchent les gens.

Y a-t-il au contraire des sujets que vous n’abordez pas parce que vous pensez qu’ils n’ont pas leur place dans Aguelenna ?

Non, on ne se met pas de limite. C’est Marie qui pose ces thématiques, donc ça dépend d’elle. Pendant un temps, on s’est demandé si on parlait de politique, si on entrait dans une veine « engagée », même si là on touche du doigt 2 ou 3 sujets politiques.

Parle nous un peu de cet album qui sort aujourd’hui : vend le moi pour m’inciter à filer l’acheter…

L’atout majeur de ce disque c’est qu’il n’y a pas deux titres qui se ressemblent. Il y en a 10 en tout. Ce qu’on voulait, c’est avoir une sorte d’album photos, comme on a à la maison, un instantané de ce qu’on était. Chaque titre a sa couleur et son univers. Et je trouve que ça colle bien avec les différents thèmes abordés. Le fait de chanter en français permet aussi un accès plus facile à ce qu’on raconte. Le fait de travailler en français permet de pouvoir écrire des textes à tiroirs, ce qu’on adore, et permet un effet poétique. On a voulu faire en sorte que les gens qui écoutent puissent aussi avoir leur propre interprétation des textes. Certains sont plus abordables, d’autres ont des sens plus cachés…

Ce n’est pas frontal, donc, ce qui signifierait imposer votre vision aux gens. Là, chacun peut se faire sa propre interprétation…

Exactement, et c’est tout le contraire de ce qu’on est ! Notre fonctionnement en interne… personne n’impose rien, on est toujours dans le dialogue, dans la discussion. Il faut que ça ait du sens de porter des textes de cette façon, que chacun puisse penser ce qu’il veut.

Vous n’êtes que 3 dans le groupe, ce qui fait aussi penser à tous ces power trios…

Oui, en effet. On était 4 jusqu’à 2023, mais la vie de groupe fait que notre bassiste n’est plus là. D’ù l’énergie qu’on donne sur scène, il faut qu’on donne autant que à 4. On n’a pas l’intention pour le moment de reprendre un bassiste, on est bien à 3…Ça laisse plus de place sur scène. Ce qui laisse sous-entendre que la basse est samplée, ce qui est le cas. Mais il y a une vraie basse sur scène, mais pas avec un vrai bassiste…

Et ça coute moins cher en frais d’hôtel, aussi…

Il y a de ça, oui (rires). Le contexte économique fait que… Mais on est 4 sur la route, il y a aussi notre ingé son.

Tu me disais que ton métier c’est la musique. Quelles sont vos métiers à chacun en dehors du groupe ?

Je suis musicien de métier, je ne fais que ça. J’accompagne des projets et des artistes en studio et sur scène. Marie, elle, a longtemps travaillé dans un centre aéré et, pour avoir plus de temps pour le groupe, elle a pris un poste dans une entreprise qui fait des composants pour l’aérospatiale. Rico, lui, est technicien de maintenance à la Poste.

Si tu devais ne retenir qu’un seul titre de votre album pour expliquer à quelqu’un qui ne vous connait pas ce qu’est Aguelenna, ce serait lequel ?

J’ai envie de te dire Pink punk, le premier single qu’on a sorti en octobre. Je crois que c’est le morceau qui résume le mieux ce qu’on est. On est dans une forme de synthèse de l’ensemble des titres et c’est un titre fédérateur. Et le sujet évoqué peut parler à tout le monde puisqu’on parle des personnes qui nous influencent au quotidien. Musicalement, il dégage une énergie, avec des mélodies ultra efficaces…

Maintenant, pour terminer, si tu devais penser à une devise pour Aguelenna, ce serait quoi ?

Waow… Pas mal… J’ai envie de dire « l’humanisme au travail ». L’humanisme parce qu’on est foncièrement, je pense, très humain. Si ça fonctionne bien entre nous 3, c’est aussi parce qu’on a des rapports très bienveillants entre nous et envers les autres. Aussi, parce qu’on est de sacrés bosseurs, donc on veut rester humain au travail.

WITCHORIOUS

France, Doom (Autoproduction, 2024)

Entrez. Entrez dans un univers sonore aussi sombre qu’oppressant, celui de Witchorious, formation francilienne qui a vu le jour (sans doute en pleine nuit sans lune) en 2019. Le trio composé du guitariste chanteur Antoine Auclair, de Lucie Gaget (basse et chant) et de son frère Paul à la batterie, propose un premier single en 2020 avant de proposer son premier album éponyme en 2024. Un nom qui associe Witch (sorcière) et Notorious (notoire) donne déjà une bonne idée du genre musical dans lequel le groupe a choisi d’évoluer. La lecture des crédits indique qu’un certain Francis Caste était au manettes de l’enregistrement au mixage, un gage a priori de qualité. Le trio propose une palette de chansons au chant écorché, aux rythmes lourds comme une masse, à la rage féroce… Ce premier album, s’il souffre, comme tant de groupes français, d’un anglais guère compréhensible (allez, un effort de tous ferait sans doute entrer notre belle nation parmi les sérieux prétendants au trône du metal international au lieu de nous cantonner dans la case « ridiculus » de Martin Popoff!), bénéficie d’une mise en son parfaitement en accord avec la musique. Witchorious a totalement intégré ses influences, de Black Sabbath à Possessed, en passant par Electric Wizard ou encore Cathedral. Un album évidemment recommandé aux amateurs du genre et aux curieux, les dépressifs, quant à eux, passeront leur chemin. Witchorious nous offre un premier album des plus prometteurs, alors, on attend la suite, qu’elle soit scénique ou discographique. Un groupe à suivre.

EVE’S BITE: Blessed in hell

France, Heavy metal (M&O music, 2024)

Formé à Saint Etienne en 2014 par le guitariste chanteur Olivier Jourget, Eve’s Bite publie 2 Ep (Dive into the vice en 2015 et Holy waters en 2017) avant de voir sa section rythmique jeter l’éponge en 2018. Il faudra à Olivier de la patience, deux années de patience, avant de compléter sa formation aujourd’hui composée de Anthony Coniglio à la seconde guitare, Nicolas Matillon à la basse et Laurent Descours à la batterie. Deux années puis un covid… mais rien ne semble vouloir entamer la volonté du leader dont le groupe revient aujourd’hui avec un album complet, Blessed in hell. Amoureux du heavy 80’s, foncez! Car si les influences sont évidentes – au hasard, Iron Maiden, Judas Priest, Metallica, Megadeth, Motley Crue, Ratt, sans parler de Skid Row (ce chant à la Sebastian Bach qui manque cependant parfois d’un peu de précision mais quand même…), voire même l’influence d’un Existance de plus en plus en vue – elles sont parfaitement intégrées à un ensemble entrainant. Ce Blessed in hell monte en puissance, fait taper du pied et secouer la tête. Alors s’il y a quelques défauts (une ballade pas forcément nécessaire, un chant parfois mal maitrisé, des arrangements qui pourraient être mieux arrangés), si les Stéphanois ne réinventent rien, on se laisse facilement prendre au jeu de Eve’s Bite. C’est frais, ça déménage et on n’en demande pas plus. De l’envie et du plaisir.

Interview: MASS HYSTERIA

MASS HYSTERIA @L’astrolabe, Orléans, 1er fév 2024

Interview MASS HYSTERIA. Entretien avec Mouss (chant) et Fred Duquesne (guitare). Propos recueillis le 1er février 2024 à l’Astrolabe d’Orléans

Après avoir reçu un appel de l’attachée de presse du groupe m’annonçant que Mouss et Yann sont tous deux HS et préfèrent se reposer et me proposant de faire l’interview avec un autre membre du groupe, c’est finalement le chanteur de Mass Hysteria qui insiste pour cet échange. Il est finalement en forme, même s’il veut préserver sa voix pour cette date de reprise. Il n’en est pas moins bavard qu’à son habitude, et c’est tant mieux ! Et quand tu discutes avec Mouss, tu es certain qu’on va aborder des sujets variés, de la musique, à la politique. Engagé ? Non, si peu… Le recadrer, parfois ? Pour quoi faire ?

Mouss, vous donnez ce soir le premier concert de la seconde partie de la tournée Tenace. Tout d’abord, comment s’est déroulée cette première partie ?

Wouah ! C’était intense… En fait, avec cette tournée, on vit quelque chose qu’on n’a jamais vécu avant : des salles complètes tous les soirs… Il n’y a peut-être que 3 ou 4 dates qui ne le sont pas encore. C’est honteux de dire ça, presque : avant c’était le contraire, il y avait 3 date complètes sur 30 et on disait « waow ! C’est cool ! » (rires).  En 2023, toutes les dates étaient complètes. Première partie, excellente, complètement folle. Au-delà de ça, il y a l’énergie qui s’en dégage. Quand une date affiche complet, il y a les gens, le public qui dégage cette énergie, il y a une dimension supplémentaire, tu ajoutes une étincelle et tout peut s’embraser…

Justement, y a-t-il ce soir, parce que c’est la première date de l’année, un peu de pression ?

Non, en tout cas, pas moi. Je n’angoisse jamais avant un concert, que ce soit l’Astrolabe ou le Hellfest, je n’ai jamais de crampe d’estomac avant de monter sur scène. Jacques Brel, il vomissait de trac avant chaque concert… dans Mass Hysteria, il y en a quelques un qui ont le trac, pas jusqu’à vomir…

Mais j’imagine que c’est un trac sain…

Exactement. Moi, j’arrive à ne pas y penser, je n’anticipe rien, je rentre dans l’arène. Une fois que je suis sur le plongeoir, ben… je vais plonger !

Avez-vous apporté quelques modifications par rapport à la première partie de la tournée, dans la setlist, le jeu de lumières, de scène… ?

Oui, notre lighteux a apporté quelques modifications, il a changé le… comme on dit maintenant, le light design. Un tableau, comme ils appellent-ça. Il y a des créations pures pour certains morceaux. Et on a intégré deux nouveaux morceaux, qu’on a encore répétés là, il n’y a pas un quart d’heure. Deux morceaux de Tenace 2 : Le triomphe du réel et L’émotif impérieux. On les a rajoutés à notre setlist, c’est la première fois qu’on va les jouer ce soir.

Parmi les nouveaux titres de Tenace 1, y en a-t-il que vous avez décidé d’écarter parce que vous vous êtes rendu compte qu’ils ne fonctionnent pas aussi bien que ce que vous souhaitiez ?

J’ai une très mauvaise mémoire… Si Rapha était là, il te le dirait immédiatement, c’est lui qui se charge de la setlist. Mais oui, c’est arrivé qu’on se rende compte que sur ce titre ça prend moins, alors on l’écarte. Souvent, c’est un vieux morceau qu’on n’a pas joué depuis longtemps.

Je pensais plus aux nouveaux titres…

Sur les nouveaux titres ? Non. On a eu une appréhension pour Le grand réveil, parce que c’est très chanson française, un peu guinguette, accordéon. On avait un peu peur de la réaction du public, et en fait, non, c’est passé. Mais ça n’a pas pris tout de suite, cet esprit guinguette/metal/guinguette…

Mais ça apporte une variété qui permet de casser le rythme, aussi.

Exactement, c’est le plaisir dans la diversité. Mais ce morceau ne s’est pas imposé tout de suite. Il a mis un peu de temps avant de vraiment prendre.

On ne va pas revenir sur le choix de faire Tenace en deux parties, n sait que la première est plus sombre, la seconde plus lumineuse. Mais il y a un fait : cinq ans séparent Tenace de Maniac. Cinq années pendant lesquelles on a aussi eu deux années de crise sanitaire. Cette crise sanitaire, cette pause forcée, a-t-elle influencée la composition et l’écriture de Tenace ? Est-ce que ce temps qui nous a été « accordé » vous a permis d’améliorer vos compos ?

Les deux à la fois ! Ça m’a influencé, même galvanisé. Ça m’a influencé comme jamais depuis… je vais te dire : depuis 2005. J’avais voté « non » pour l’Europe, pour le traité de Maastricht. 2005 : 58% des Français disent « non ». Sarkozy, lui, dit « ben oui, en fait ». Mais… Ça va pas ou quoi ? On fait un référendum, c’est un vote, souverain… Il a craché dessus. Là, je n’ai plus cru à la politique. On appelle ça une apostasie, tu ne crois plus en la religion ou autre… J’étais un apostat, je ne crois plus du tout à la politique. Même les journaux que je lisais étaient « oui, bon d’accord… » Mais vous rigolez ou quoi ? J’avais 30 ans… La crise sanitaire a révélé encore plus que je n’imaginais à quel point les politiciens de cette Europe là – je parle de l’Europe parce que je m’en fous de Donald Trump, Poutine, Ping et les autres dictateurs. On nous dit de faire gaffe à ces dictateurs mais, avant, on peut parler de ton bilan avant de faire celui des autres ? il faut avoir le cul propre avant de vouloir torcher celui des autres, tu vois ce que je veux dire ? J’ai l’impression que cette Europe… Le bloc de l’Est s’est effondré avec le mur de Berlin, maintenant, j’ai l’impression qu’on a créé le bloc de l’Ouest, avec une Kommandantur – Bruxelles, c’est le parti… On ne peut même plus décider qui rentre en France, ou pas…

Pas que, on le voit aujourd’hui avec les agriculteurs…

Exactement, ils sont en train de tuer les agriculteurs comme ils ont tué le système hospitalier. Macron, depuis 10 ans, avec Hollande… faut pas oublier que Macron il bossait pour Rothchild avant… Il a fait des allers retours entre le privé et le public. Quand il était à Bercy, il a vendu la France en pièces détachées, Thalès aux Américains, Alsthom…

Maintenant, en quoi tout cela t’a-t-il influencé pendant les années de crise sanitaire ?

Je fais un petit flash-back : 2005, on s’est assis sur notre droit souverain de vote et de référendum. 2010, je fais L’armée des ombres. C’est toute l’époque 11 septembre, guerre en Irak – une guerre illégitime, il n’y a jamais eu d’armes de destruction massive. Il y a plus d’un million d’Irakien qui ont été tués… Toute cette clique qui est allée en Irak méritait d’être jugés par la Cour pénale internationale. On tue des hommes, des femmes et des enfants… C’est pas un match de foot avec des hooligans débiles qui se tapent dessus, là on parle de guerre et de mort. Il n’y a pas de mort légitime, quoi…

Sauf la mort naturelle…

Sauf… oui, exactement, merci de me reprendre ! Donc 2010, je dresse un constat assez noir avec L’armée des ombres. Je demande ce qu’ils veulent, nous mettre des puces sous la peau, des QR Code ? Jusqu’où vont-ils aller ? Après le 11 septembre, il y avait le Patriot act, on pouvait venir chez toi si on te soupçonnait de terrorisme… Pas besoin de mandat, tu peux te faire balancer par un connard et être emmerdé… C’était mortifère et stressant. Moi qui ne croyais plus à la politique, j’y croyais encore moins, encore moins les Américains. Je me disais qu’il fallait être en mode résistance, dissidence. Je suis contre la violence, contre le vandalisme, contre cramer des magasins, des banques, des poubelles, des voitures… Ça, pour moi c’est des débiles qui font ça. Vraiment, ces gens-là, je les déteste, c’est de la racaille, des sans cerveau. J’ai eu des problèmes avec ça, il y a des mecs qui sont venus me voir à la sortie d’un concert. Des « antifas »… Je les avais insultés au Hellfest – je crois que c’est dans le DVD – et les mecs il viennent m’emmerder : « ouais, t’as quoi contre les antifas ? » Quoi, les antifas ? Déjà, montre moi où est le fascisme, il est où Mussolini ? « Oui, Le Pen… » Mais arrête, Le Pen, c’est pas un fachiste, c’est une tête de mort, si tu veux, une tête de con, c’est un mec que t’aimes pas, d’accord, mais il n’est pas pour les chemises brunes, il n’a jamais dit vouloir pendre les gens sur la voie publique, place de la Concorde… Il ne pourrait pas faire ça ! Et s’il était fasciste, il n’aurait pas de parti, il n’aurait jamais eu le droit de se présenter, tu vois ce que je veux dire ?

On pourrait en parler pendant des heures…

Des heures ! bon, depuis 2010, ça boue dans ma tête, et là… arrive le covid. Tout le monde flippe, moi le premier. Mais d’où ça vient ? On ne sait pas, d’un laboratoire… On n’en sait rien. D’ailleurs, ils ne cherchent même plus… Normalement, tu cherches la souche, mais là, non… Après il y a eu toute ces mesures. Alors est-ce que le covid a eu une influence ? Oui, il a même rajouté une dimension supplémentaire à ce que je pensais depuis 2010. Et tout s’est articulé. Même si je ne sais pas si tout ça était voulu ou pas, il y a un putain de virus qui nous a fait chier et il y a eu des conséquences. On était tous en danger. Il y a eu des lois liberticides, mais en même temps, on ne savait rien… Ça a été fait dans l’urgence, d’accord. On ne pouvait pas faire des études pendant 6 mois ? Il y a toujours des volontaires pour faire ce genre de choses. Il y a toujours des gens prêts à subir des tests pour la science. Pas moi ! Ah, non, à moins qu’il y ait un groupe placebo et qu’on me dise que j’en fais partie. Mais ça ne marche pas si tu le sais ! Aujourd’hui, il y a des études qui ont été faites qui ont prouvé que la distanciation sociale ne servait à rien. Les Japonais ont fait une étude sur le port du masque : au bout de 4 heures, je ne te dis pas ce qu’ils ont trouvé dedans. Le masque, c’est pour les malades. Celui qui est en bonne santé, il veut porter un masque ? Pas de soucis !

Comme les Japonais, ils portent un masque pour protéger les autres…

Exactement. Maintenant, je comprends qu’on l’ai demandé dans l’urgence, mais il y a des décisions aberrantes… rappelle-toi, à un moment, tu pouvais aller boire un verre au bar. Mais « si vous buvez debout, c’est bon, mais pas assis ». Donc, si tu es un nain, tu ne peux pas aller dans les bars… Je ne connais pas les solutions, mais je demande juste qu’on nous donne des faits.

En tous cas, cette période a impacté ton état d’esprit, ta façon d’écrire, et le résultat c’est en partie Tenace.

Ça m’a rendu fou, oui ! Tenace, ça signifie « toujours là, toujours debout », et encore plus résigné à résister. Le covid m’a amené à cette réflexion : on était à l’apogée de ce qu’on peut appeler « l’état profond », cette espèce de main invisible qui gouverne et qui place ses pions. C’est pas un mal d’avoir de l’argent et de vouloir placer les gens qu’on apprécie à certains postes. Macron, Schiappa et tous ceux-là font partie d’un club qui s’appelle Young Global Leaders, les jeunes leaders du monde. En Angleterre, partout dans le monde il y en a. C’est une élite choisie par qui ? Par le forum économique mondial.

Stop ! Pause, sinon on est là jusqu’à la fin du concert ! Et j’ai d’autres questions…

Oui, tu as raison ! Mais allez faire des recherches sur ce forum et ce « club ». Ils ont dit, écoute-moi bien « en 2030, vous ne posséderez plus rien et vous serez heureux ». En fait, ce qu’ils veulent, c’est que tu sois locataire à vie de tout ce que tu as. Voiture, maison…

Revenons à Mass Hysteria. Le groupe est assez stable depuis quelques années, depuis l’arrivée de Jamie. Comment analyserais-tu l’évolution du groupe entre vos deux derniers albums, Maniac et Tenace ?

Alors… Avec l’arrivée de Jamie à la basse il y a plus de 5 ans et celle de Fred il y a bientôt dix ans… Là, c’est notre dixième album. Au huitième, Matière noire, je pensais arrêter. Je venais de perdre mes parents, c’était le huitième album, pour moi le 8 c’est le signe de l’infini. Je me disais que, symboliquement, il pouvait se passer quelque chose, on a un disque d’or – on est les seuls à en avoir reçu un dans ce style de musique en France avec Trust et No One, je crois. Donc, Matière noire, c’était en… 2012 ? 2014 ?

Non, c’était en 2015… Il y a L’enfer des dieux, titre tristement prémonitoire…

Oui, merci… C’est vrai, il y a des repères mnémotechniques en plus ! Sur cet album, Jamie venait d’arriver, et je dis à Yann, avant le début de la tournée, que je pense que c’est ma dernière. Je sortais d’une période pas facile, j’avais plus mes parents, et je lui dis que c’était peut-être la fin de quelque chose, que je devais peut-être passer à autre chose… C’est une aventure de 20 ans, quand même, ça se réfléchit… Yann me dit « OK, je respecte, pas de soucis… » et tous les week ends, il me pose la question : « alors, tu es sûr, tu arrêtes ? » Oui, oui. Et puis, ça s’est emballé, il y a eu une espèce de truc avec cet album, les salles ont commencé à plus se remplir, c’était le début de ce qu’on connait aujourd’hui… Là, je me suis dit qu’il y avait peut-être un signe… Je suis dans un esprit un peu dissidence, tu sais.

Non, c’est vrai ?

(Rires) oui ! Et donc je me suis dit que ma place était peut-être toujours là. Yann vient me voir au bout de trois ou quatre mois et me demande « alors, tu en es où ? Tu arrêtes toujours ? » Ah, ta gueule, me fais pas chier ! (Rires) Ben non, j’arrête pas ! Là, je planais, j’étais sur un tapis volant, à 30 cm du sol ! J’avais besoin de ça, j’avais perdu mes parents – je n’en parle jamais, ça fait bizarre…

Tu en parles parce que ça explique un état d’esprit, tu vivais quelque chose de difficile, tu avais besoin de remettre les compteurs à zéro, ce qu’il s’est passé…

Grâce au public, et grâce à mon groupe, oui. J’étais porté par le public et mes gars. Dans ma tête, j’avais trouvé mon envie. Je ne veux pas faire de psychologie de bazar, mais quelque part j’avais perdu mes parents et je les ai retrouvés : le public, c’est mon père, le groupe ma mère. Je me suis demandé pourquoi j’avais pensé un jour arrêter. Qu’est-ce qui m’est passé par la tête ?

En fait, la plus grande évolution, c’est plus entre Matière noire et Maniac qu’entre Maniac et Tenace ?

Ouais, absolument !

Entre ces deux derniers, il y a plus une sorte de stabilité, de continuum qu’il n’avait pas sur les albums précédents.

Voilà, c’est ça !

Si tu devais aujourd’hui ne retenir qu’un seul titre des deux volets de Tenace pour expliquer à quelqu’un qui ne vous connais pas ce qu’est Mass Hysteria aujourd’hui, lequel serait-ce ?

De Tenace ? un seul titre ? C’est dur, parce qu’il y a un titre qui nous représente au niveau de l’état d’esprit mais pas forcément au niveau musical : L’art des tranchées. J’explique ce qu’on est, ce que le public metal est. « On ne connait pas l’art, l’art ne nous connait pas ». Le metal n’a pas besoin de télé, de radio, ça n’empêche qu’en France, il y a un des plus gros festivals de metal. Dans les années 90, il y avait encore du metal à la télé, plus maintenant. Pour moi, L’art des tranchées, c’est un des morceaux qui nous représente le plus. Et en plus le titre, c’est aussi l’histoire du metal, qui a avancé pas à pas et creusé son sillon… Metallica a fait beaucoup, c’est un peu les Beatles du metal…

Les Beatles avaient leur album blanc, Metallica (il termine avec moi)…

Leur album noir ! Absolument, merci !

Mass Hysteria est aujourd’hui l’un des plus importants groupes en France. L’industrie musicale est en crise depuis quelques années. Est-ce que ça a eu un impact sur le financement de Tenace ? Est-ce que, comme ce fut le cas il y a encore peu, vous avez un label, Verycords, qui a financé l’enregistrement ou avez-vous dû mettre vos deniers pour cet enregistrement ?

Non. On aurait aimé s’autoproduire, financièrement, on ne l’a jamais fait. Mais on a la chance d’avoir un label qui nous finance. Pas avec des budgets pharaoniques, mais assez confortables. On est entré chez Verycords en 2010 pour L’armée des ombres, album qui a rencontré un certain succès. Ils étaient contents, on a resigné pour un autre album, Matière noire qui a très bien marché, et on a continué. On a un rapport de confiance avec eux depuis cinq albums, même si on n’a pas un budget illimité non plus, il y a une vraie symbiose. Je reviens à ta question de savoir en quoi le covid a influencé Tenace: on a eu plus de temps pour réaliser cet album, d’où les 14 titres. Si on n’avait eu moins de temps, on n’aurait pu enregistrer que 10 morceaux. On a eu plus de temps, et grâce à notre label, on n’a pas eu à s’autofinancer. On gagnerait plus d’argent, en s’autofinançant. Soyons clairs : moins il y a d’intermédiaires, plus il y a de bénéfice. Mais on n’est pas assez bons pour épargner (je ris). C’est vrai, c’est un cauchemar ! Par exemple, le cachet du Hellfest, la dernière fois – en 2019 – on a tout mis dans le show du Hellfest : la vidéo, la pyrotechnie, on avait une équipe de 24 personnes alors qu’en tournée, on est 12. On jouait une heure, on avait 24 techniciens, ça nous a coûté un bras, des dizaines de milliers d’euros. Au lieu de faire un peu moins, de garder un peu de bénéfice, on a tout claqué !

Aujourd’hui, Mass Hysteria a une position enviable, voire enviée, alors est-ce que vous vivez de votre musique ou avez-vous des activités complémentaires annexes. Je sais que Yann a une activité sportive, mais les autres ?

Oui, Yann est coach sportif. Il n’y a que Rapha, le batteur, et moi, qui n’avons pas d’activité annexe. Je suis avec ma femme depuis 30 ans et je pense que si j’étais seul, je serai obligé d’avoir un taf à côté. Grace à elle, je n’en ai pas besoin. On vit raisonnablement. On vit bien avec Mass Hysteria, mais pas assez bien pour vivre à Paris. Si on n’avait pas 2 salaires, on ne pourrait pas vivre à Paris. En plus, la qualité de vie… Je suis Breton, et j’ai envie de rentrer en Bretagne. On est en train de faire les démarches, ça va nous prendre deux, trois ans… Mais oui, on vit de notre musique mais certains ont des activités annexes parce qu’on ne gagne pas assez pour vivre à Paris.

Fred est aussi producteur, très actif dans son domaine. Que fait Jamie ?

Je ne sais pas si j’ai le droit de le dire mais il est technicien à la télé. Pour la Star Ac’, The Voice, par exemple. C’est lui qui se charge d’installer le matos, batterie, guitare…

Le chanteur de Disconnected a aussi d’autres activités de chant hors metal, il est prof et interviens, je crois, dans des comédies musicales plus pop…

Ah ouais ? C’est cool !

Est-ce qu’on parle du 29 juin ?

(longue pause)…Le 29 juin ?

Oui, le 29 juin 2024, Mass Hysteria sera de retour au Hellfest et va jouer avant Metallica. Je dis bien avant, vous serez sur la même scène, Main 1, et pas intermédiaire sur la Main 2… Comment se prépare-t-on à jouer en « ouverture » de Metallica ?

Alors, déjà qu’on s’était mis une pile sur le Hellfest 2019, là on a un cachet confortable donc on va faire pareil. On ne peut pas faire moins, en plus, on va jouer plus longtemps. On est en train de réfléchir à la scénographie.

A ce moment Fred arrive dans la pièce. Je l’invite à nous rejoindre

La question que je posais à Mouss est : comment on se prépare pour une date comme celle du 29 juin qui arrive ? J’imagine que ça met une certaine forme de pression…

Fred : On se prépare déjà un peu mentalement ! On le sait depuis un moment, mais, oui, il y a une pression. On n’a pas encore entamé la partie technique, mais c’est dans 6 mois…

Moins de 5…

Ah, oui, moins de 5 ! Le temps passe vite (rires). On l’a déjà fait, donc on n’est pas perdus, mais oui, tu as raison, il y a une certaine pression. Ça augmentera sur le mois précédent le concert. Mais on a une équipe technique qui est super, à fond sur les lights, la scénographie. La technologie fait qu’on peut préparer un show en avance. Thomas, notre lighteux, bosse beaucoup sur ce genre de choses. On peut voir la gueule du show avant de l’avoir fait. Et avant le concert, on va faire une résidence dans une sorte de hangar assez grand. Je ne sais pas s’il y aura des particularités, des featurings. On va faire le show de Mass Hysteria, point.

Il y a un autre concert qui est important, c’est celui que vous donnerez le 25 janvier 2025 au Zénith de Paris. C’est quand même assez exceptionnel pour un groupe français, dans ce style de musique, d’annoncer un tel concert plus d’un an à l’avance. Ce sera la fin de la tournée, est-ce que pour l’occasion, vous prévoyez quelque chose de particulier ?

On l’avait déjà fait sur la tournée d’avant, mais malheureusement, ce jour-là, il y a eu la grève des transports… On a fait un score malgré tout correct. Les gens sont venus à pieds, se sont débrouillés… On avait fait quelque chose de particulier. Tu sais, ce n’est pas des plateaux qu’on fait tous les jours, mais quand c’est notre show sur une grosse scène, pas un festival, il faut qu’on intègre des choses spéciales. Techniquement, ça nécessite un peu plus de mise en place, mais nous, on déroule le show comme d’habitude. On reste nous-mêmes ? Est-ce que c’est pour ça qu’on arrive à des plateaux aussi gros, je ne sais pas… Je me méfie clairement de la technologie.

C’est bien, c’est le producteur qui dit qu’il se méfie de la technologie !

Je vais voir des groupes modernes, Architects et d’autres il y a peu, et je me suis emmerdé… Le son est parfait, ça part dans tous les sens, il y a 50 voix en même temps, c’est du play-back, c’est froid, il n’y a pas de contact avec les gens. C’est notre maitre mot, le contact humain, ce que ces groupes-là ont un peu oublié. C’est bien beau la technique, d’avoir de belles lumières et tout, mais sans le côté humain, ben… Tu t’emmerdes… C’est quelque chose qui ne se travaille pas, tu l’as ou pas.

Mass Hysteria est suffisamment important aujourd’hui pour s’offrir une tournée des Zéniths. Pourquoi ce choix de tourner intensivement dans des petites salles ?

Mouss : Je ne crois pas qu’on puisse autant remplir les Zéniths que ça. On va faire celui de Paris, l’Arena de Brest, aussi, peut-être celui de Lille. Mais, pour nous, les petites salles ça reste notre format maximum. Tu es proche du public. Si on ne faisait que des Zéniths, ça m’embêterait. Ce n’est pas pareil de faire que des Zéniths ou que des SMAC. On a fait les deux… Par exemple, avec Le gros 4, on n’a fait que des Zéniths, c’était mortel parce qu’il y avait 4 groupes.

Et ce n’était pas tous les soirs la même tête d’affiche…

Voilà, et il y avait une ambiance, on s’est éclatés !

Fred : Et les gens venaient participer à une grosse fête.

Mouss : C’était après le covid, c’était un peu compliqué. On faisait 3.000 personnes par soir il y avait quatre groupes. Je ne sais pas si Mass Hysteria, tout seul, pourrait le faire.

Fred : C’est pas sûr, non… Là, on passe dans les salles locales, avec une moyenne de 1.000 places. Si c’est complet, on est déjà contents. Passer à 6.000, de temps en temps, OK…

Mouss : Comme on fait pour la date à Paris. C’est presque un Zénith pour nos 30 ans. Plus qu’un Zénith pour la tournée Tenace, celui-là va clore la tournée mais il célèbrera aussi nos 30 ans.

Je reviens à une question que j’ai déjà posée à Mouss : Fred, si tu devais ne retenir qu’un seul titre de Tenace 1 et 2 pour expliquer ce qu’est Mass Hysteria aujourd’hui, ce serait lequel ?

Fred : Un seul sur les 14 ? C’est compliqué… Il s’est passé tellement de choses dans le studio que c’est difficile… Tenace, quand on l’a fait (Mouss réagit avec un « aah ! Pas mal, pas mal » approbateur), on sentait qu’il se passait quelque chose de particulier il est accordé comme on ne l’a jamais, fait, il a une texture particulière… Il y a des morceaux, comme L’enfer des dieux, tu les fais et dans l’après-midi, tu sais que tu tiens quelque chose. Oui, Tenace

Mouss : Oui, Tenace, dans le fond et dans la forme, ça peut le faire. Moi, j’ai dit L’art des tranchées, mais je pensais plus au fond, au texte…

Si vous deviez maintenant penser à une devise pour Mass Hysteria, ce serait quoi ?

Mouss (sans hésiter) Positif à bloc…

Fred : Oui, très bien !

Sans surprise… une dernière chose : si aujourd’hui Mass Hysteria devait – pas pouvait, « devait » – réenregistrer avec le line-up actuel un des albums de Mass, ce serait lequel ?

Fred (il rit) : Alors, je sais ce que Yann voudrait…

Mouss : Oui, moi aussi !

Mais vous ? Yann n’est pas là…

Mouss : Ça tombe un peu sous le sens… l’album noir (2005), le quatrième album, celui qui a suivi De cercle en cercle (2001)

Fred : Effectivement, c’est la vision de Yann. Moi, je l’aime bien tel qu’il est. Il aurait voulu que ce soit un son plus moderne, machin truc…

Mouss : Moi aussi, je l’aime bien. Entre nous, je suis sûr que, si on le refaisait, il ne serait pas aussi bien que l’original… (Fred confirme) Rappelle-toi : Suicidal Tendencies, leur premier album avait un son naze. Ils l’ont refait quinze ans après, avec des zicos de ouf… mais… Il n’y a plus le même son, c’est moins bien. Il n’y a plus l’authenticité d’avant.

Mais si tu devais…

Ah, je ferai celui-là !

Fred : Moi, je referais Une somme de détails (2007), parce que c’était ma première fois avec eux en production et que j’entends ce que je pourrais faire sonner mieux. Mais je pense qu’il faut aussi laisser les choses là où elles sont. C’est un peu le syndrome de la démo : tu t’y habitues pendant un an, après tu l’enregistres avec un super son… Oui, mais c’était mieux à tel endroit… Tu l’as écouté plus que l’album, en fait. Il n’y a pas le même charme, tu t’es habitué aux défauts de l’album. L’album noir, pour moi, il n’a pas de défauts, il a une couleur. C’est aussi une partie de l’histoire du groupe, ça monte et ça descend. C’est bien, dans la vie d’un groupe qu’il y ait des hauts et des bas…

Mouss : Au moment d’enregistrer un morceau, tu es en pleine création, dans la psychologie de l’enregistrement de l’album. Si tu le refais 10 ans après, tu ne pourras pas être dans cet état d’esprit, l’intention ne sera pas pareille, ton humeur non plus, tu feras peut-être ça avec un peu de distance… Après, il faudrait qu’on essaye quelques titres pour voir. Après, se lancer sur un album entier ? Ou alors, faire un best-of, mais tu réenregistres tous les morceaux du best-of.

Fred : Ce que vient de faire Tagada Jones…

Mouss : Mais non ?

Fred : Si, je viens de faire 15 titres avec eux, il n’y en a qu’un de nouveau et ils ont réenregistré les 14 autres. Il y en a qui rendent super bien… Certains, ça marche mieux, même !

Avez-vous quelque chose à rajouter, tous les deux ?

Mouss : simplement merci Metal-Eyes, merci aux lecteurs du webzine. Merci de suivre la scène française et les actus musicales. Et, surtout : restez positifs à bloc !

Fred : Très bonne fin…

MASS HYSTERIA live à Orléans: la galerie

Retrouvez ici le live report complet

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LAST QUARTER: For the hive

France, Doom (Autoproduction, 2024)

C’est lourd, c’est lent, ça s’intitule For the hive et c’est le nouvel Ep des Parisiens de Last Quarter. Il y a de la mélancolie tout au long des 4 titres de ce premier essais du groupe formé en 2018. On se retrouve dans l’univers d’un Black Sabbath déprimé et dépouillé, de sonorités profondes et d’un chant langoureux. Un ensemble qui commence à se faire explosif au milieu du troisième titre, Next morning. Mais l’ensemble reste résolument plus doom que metal, sombre, intriguant et oppressant. We’ll be just fine, qui vient conclure ce disque – dont on ne peut que reprocher un chant dans un anglais presqu’incompréhensible – de façon plus joyeuse, avec sa basse slappée et ses riffs enjoués, même si le propos devient plus noir et rageur. Je verrai bien Last Quarter investir une certaine Temple à un certain festival, l’esprit est en tout les cas là.

6:33 live à Orléans (Dropkick bar, le 26 janvier 2024)

Retrouvez ici la galerie photos du concert

Il s’en sont passées des choses depuis la dernière fois que j’ai pu voir 6:33 en concert. C’était à Orléans, dans la petite salle de l’espace Eiffel (report ici), le groupe était encore masqué, avait deux claviers, un seul chanteur… Depuis, la formation a plus qu’évolué, se débarrassant tout d’abord de ses masques (cf. l’interview de Rorshach en 2021 pour la promo du dernier album), d’un clavier, adoptant une chanteuse et travaillant une autre identité visuelle. Alors, retrouver les ex-monstres sur scène, à Orléans? Forcément, pas possible de les manquer même si je n’ai découvert cette date que tardivement.

Mais une question se pose quand à la tenue de ce concert: alors que les agriculteurs en colère sont aux portes de Paris, le groupe pourra-t-il faire le déplacement? Lorsque j’arrive sur place, le batteur m’indique qu’ils n’ont rencontré aucun blocage, que la route a été fluide. Tout le monde s’affaire pour la mise en place puis file diner avant de recevoir son public.

CHAOS RULES @Dropckick Bar, Orléans, 26 janvier 2024

Les hostilités débutent avec les Orléanais de Chaos Rules, dont le batteur est également chanteur et guiitariste au sein du groupe prog Esprit d’escalier que j’avais découvert en ouverture d’Orpheum Black il y a environ un an (autre live report ici). Dire que les deux projets sont radicalement différents est un euphémisme… Chaos Rules porte bien son nom tant le cyber punk du quatuor se veux explosif et post apocalyptique. Un peu comme le look de son chanteur et du guitariste dont on ne regrettera qu’une chose: qu’il ne soit pas plus élaboré (un mec qui se balade avec des tuyaux d’alimentation en haut et bermuda en bas, ça dénote un peu…) et généralisé à l’ensemble des musiciens de la formation. L’identité visuelle est un élément important de l’image d’un groupe.

CHAOS RULES @Dropckick Bar, Orléans, 26 janvier 2024

Ceci étant, impossible de nier l’énergie de Chaos Rules qui dès le premier titre terminé, joue la franchise et le capital sympathie. Le chanteur nous explique en effet le sens de ce qui est projeté derrière le batteur: le titre de la chanson suivi de lettres et de chiffres.

CHAOS RULES @Dropckick Bar, Orléans, 26 janvier 2024

Les lettres correspondent chacune à un riff, le chiffre, le nombre de fois qu’il reste à jouer ce riff. Riffs numérotés de A à H, soit 8 en tout pour développer le catalogue du groupe. Huit riffs qu’on retrouve donc à chaque titre, et chacun des musicien a son prompteur lui indiquant quoi jouer. J’ai une pensée pour tous nos anciens qui ne peuvent aujourd’hui se passer d’anti-sèches mais ne l’avouent jamais…

CHAOS RULES @Dropckick Bar, Orléans, 26 janvier 2024

Les 45′ qui suivent sont une déflagration continue de guitares furieuses et de rythmiques endiablées qui viennent soutenir le chant peu mélodieux et très virulent du vocaliste. Ce dernier ne tient pas un instant en place et, malgré sa rage vocale, se montre très enjoué et moqueur. On ne compte pas le nombre d’allusion à certains ministres ce soir (« Bon, il nous reste à peu près deux chansons. « A peu près », ouais… On a été à l’école publique nous, alors on ne sait pas compter. Ni lire d’ailleurs… »)

CHAOS RULES @Dropckick Bar, Orléans, 26 janvier 2024

Bien que peu nombreux, le public est réceptif certains n’hésitant pas, à la fin du concert, à rejoindre le groupe sur scène pour une photo. une belle introduction à une soirée déjà bien chaleureuse.

6:33 @Dropkick Bar, Orléans, 26 janvier 2024

Il est proche de 22h30 lorsque 6:33 monte sur scène. A la fois concentrés et joyeux, les musiciens profitent de l’intro pour s’encourager avant d’attaquer avec le très entrainant et cartoonesque Wacky worms. Les amateurs du groupe le savent: la musique de 6:33, pour paraphraser Mass Hysteria, c’est plus que du metal. Tout le monde peut y trouver son compte et ce soir, il y en aura justement pour tout le monde.

6:33 @Dropkick Bar, Orléans, 26 janvier 2024

La complicité entre Flo « Rorschach » et Bénédicte, les deux chanteurs, est d’une telle évidence qu’on pourrait croire que le duo de vocaliste travaille ensemble depuis des années tant ils semblent se connaitre par cœur. Si lui se charge de communiquer avec le public, elle n’est jamais en reste se lançant dans des pas de danse ou des figures plus ou moins grimacières.

6:33 @Dropkick Bar, Orléans, 26 janvier 2024

Si le dernier album en date (Feary tales for strange lullabies: the dome) est naturellement mis en avant avec pas moins de cinq extraits (Wacky worms, Holy golden boner, Party Inc., Release the he-shes et Act like an animal), l’ensemble de la discographie roschachienne est visitée dans une ambiance toujours bon enfant – seul le tout premier album n’est pas représenté.

6:33 @Dropkick Bar, Orléans, 26 janvier 2024

Rorschach entraine sa complice dans un petit tango rapidement interrompu par un bassiste visiblement jaloux, ce qui fait marrer tout le petit monde sur scène, mais il y a plus, bien plus. Car 6:33, c’est non seulement une musique décalée, mais également une mise en scène et en lumières pensée pour ne laisser personne indifférent. Preuve en est, un public qui se fait plus nombreux au gré des titres et qui clame son adhésion au concept du groupe.

6:33 @Dropkick Bar, Orléans, 26 janvier 2024

6:33 aura ce soir fait bien plus que simplement faire monter la température. Une prestation aussi soignée que naturelle qui donne envie de voir cette formation hors normes grandir et grossir afin de jouer sur des scènes plus grandes devant un public plus vaste. On a des pépites en France, alors soignons les. Ce fut en tout cas une excellente soirée.

6:33 @Dropkick Bar, Orléans, 26 janvier 2024

Retrouvez ici la galerie photos du concert