DEAD TREE SEEDS: Toxic thoughts

France, Thrash (M&O, 2024)

Les voici enfin de retours, nos thrashers fous de Dead Tree Seeds! Leur nouvel album, Toxic thoughts, pourrait se résumer ainsi: ça thrashe sévère! Et l’on aurait envie de répondre, genre Rostand: « Ah, non, c’est un peu court, jeune homme! On aurait pu dire… Oh, diable! Bien des choses en somme. En variant le ton: Poétique: « Aimez vous tant les furieux Slayer qu’un hommage vous leur rendez en une heure? » Prévenant: « D’inspiration je ne vous donne tort tant le chant évoque Kreator ». Dramatique: « Aucun vent ne peut de ce pas pousser l’esprit si présent de Metallica ». On pourrait continuer ainsi longtemps tant ce Toxic thoughts rend un chaleureux hommage à nos grands anciens sans jamais bassement les imiter. Car il y a tout au long de cet album une vraie personnalité, une puissance sans égal qui déboite en cadence maxilaires et cervicales. Tu te prends ces 10 titres – 9 plus l’intro – en pleine face sans jamais, ou presque, pouvoir reprendre ton souffle. Fort heureusement, Dead Tree Seeds nous offre un instant de répit avec une ballade judicieusement placée à mi-parcours. Hein, quoi? Une ballade, mais ça va pas la tête, non? Ce qui se rapproche le plus d’une ballade c’est une partie plus proche des instrumentaux des débuts de Metallica, certes, mais ballade? Ca va pas, non? Dès les premiers accords, DTS chope l’auditeur à la gorge et ne relâche jamais la pression. Ca tabasse sec et sévère et ça démonte sa mère ! Amateurs de thrash old school, foncez, vous ne serez pas déçu.

SLEAZY TOWN: Unfinished business

France, Heavy rock (M&O, 2024)

Intrigante sortie que ce Unfinished business, double album de Sleazy Town. Le groupe s’est formé à Paris en 2011, a publié un premier Ep 5 titres en 2013 (Midnight fight) et puis… Plus rien, à part des concerts qui lui permettent de forger son identité sonore. Mais discographiquement? Jusqu’à cette fin de mois d’avril qui voit débouler chez les disquaires ce Unfinished business sorti de nulle part. Clairement, il y a des affaires qui sont restées en plan ces 10 dernières années, et les amateurs de gros hard rock US vont être aux anges. Car dès les premières mesures de Machine gun rodeo, le groupe nous ramène à cette époque – bénie diront certains – qui vit tout Los Angeles se transformer en repère de musiciens permanentés au savoir faire redoutable. Ici, on pioche autant du côté des géants du hair metal (Mötley Crüe, Poison, Ratt, Great White, GNR…) que des monstres du hard et du heavy rock. Parmi les influences de Sleazy Town, on citera au hasard AC/DC, Iron Maiden, Aerosmith, Thin Lizzy ou Motörhead. Le groupe fait partie de cette génération qui a parfaitement intégré les codes du genre en y apportant sa touche personnelle et passionnée. La voix rocailleuse et chaleureuse de Andy Dean accompagne les riffs furieux et enjoués de JJ Jaxx, tandis que la basse de Macabre (!) et la batterie de Julian viennent renforcer cette sensation de puissance et de bien-être sonore. Il aura fallu plus de 10 ans pour que Sleazy Town sorte son premier album. Les quatre osent même sortir un double, imparable de bout en bout. 24 titres avec tout ce qui fait un grand album, sleaze et power ballad inclus. Il fallait oser, ils l’ont fait et avec quel brio ! Espérons seulement que ce buisiness laissé en plan ne soit que le démarrage d’affaires plus sérieuses encore. Rock on !

ORKHYS: Legends

France, Metal épique (Autoproduction, 2024)

Avec Legends, Orkhys pourrait bien y entrer, dans la légende. Le ton est donné, dès le morceau titre, un instrumental introductif sur fond de metal épique aux relents celtiques. Puis, titre après titre, Orkhys développe un univers varié, rapide et mélodique. Les guitares fusent tout au long de ces chansons qui toutes, traitent de personnages légendaires et méconnus. Si la section rythmique pose de solides structures, on admire aussi, c’est toujours la grande particularité d’Orkhys, le travaille de Laurène, harpiste, chanteuse et meneuse de revue de ce collectif dont on remarque la stabilité – Laurène est entourée aux guitares, des complices Brice Druhet et Henri Genty, du bassiste Julien Lancelot et du batteur Jean-Yves Chateaux). Malgré l’évidence de certaines sources d’inspiration (au hasard: Nightwish, Iron Maiden, voire The Cranberries pour le chant) Orkhys a aujourd’hui trouvé son identité sonore – ce metal épique agrémenté de la pureté médiévale de la harpe dont on note un titre chanté en français (Deirdre an bhroin) – autant que visuelle – non seulement un look travaillé mais également un design sombre et sobre. Trois ans après un premier album remarqué, Orkhys franchit un nouveau cap et nous offre un disque puissant, varié excellement produit. Vivement la scène!

FIREMASTER CONVENTION: Back in the game!

La voici de retour! C’est Issoudun (36) qui, cette année accueillera la Firemaster Convention du 25 au 27 octobre 2024. Située e plein cœur de la Région Centre Val de Loire, entre Bourges et Châteauroux, Issoudun est facilement accessible par la route.

Au programme, des conférences, des expositions, un market, des masterclass et, naturellement, des concerts. Car c’est ce qui fait la force de cette convention quelque peu bousculées par la crise sanitaire et une part de doute. Alors, adieux – ou n’est-ce qu’un « au revoir’? – Châteauroux, bonjour Issoudun.

Les premiers noms annoncés ont de quoi donner envie, jugez-en plutôt: du heavy metal de Airforce – le groupe fondé par Doug Samson, le premier batteur d’Iron Maiden, au très brutal Beyond The Styx, en passant par Nightmare, les fiers « ancêtres » du heavy metal tricolore, et les heavy punks de Tagada Jones, la fête promet d’être belle. Très belle!

Toutes les infos sont à découvrir sur le site de la Firemaster Convention, qui propose un accès direct à la billetterie. Comme pour les précédentes éditions, il existe deux formules: un pass journée (journée individuelle – 4,90€ – ou pass 3 jours – 12,90€) donnant accès l’ensemble de la convention, hors concerts des têtes d’affiches, ou un Night&day pass (22,90€ par jour ou 44,90€ pour les 3 jours – soit même pas le prix de deux jours complets!) qui donne accès à toutes les activités et tous les concerts du festival. A ce prix-là, il serait dommage de se priver.

Alors, à tous ceux – et celles – qui se plaignent du fait que, en dehors de Paris, Lyon et Clisson il ne se passe jamais rien… ben, vous savez ce qu’il vous reste à faire: se rendre à l’adresse suivante:

Palais des Expositions et des Sports d’Issoudun – Rue Georges Brassens, 36100 Issoudun pour assister à trois journées festives avec des concerts à taille humaine !

Interview découverte: RIVIERA PARADISE

Interview RIVIERA PARADISE ; Entretien avec Julien Giraud (Batterie) le 29 avril 2024

Comme c’est la première fois que nous échangeons, commençons par la plus originale des questions qui soit : Riviera Paradise, c’est quoi, quelle est son histoire ?

Riviera Paradise, c’est 4 musiciens qui font du rock, qui se sont rencontrés…alors, il y a eu plusieurs changements de line up : au départ, nous étions un trio, le bassiste et moi avec un autre guitariste. On a commencé à jouer ensemble sur un répertoire de reprises pour apprendre à nous connaitre. Comme ça fusionnait bien, on a commencé à vouloir faire nos propres compositions et pour cela, on voulait intégrer un chanteur qui prenne vraiment la place de chanteur/frontman. On a rencontré Kourros qui a intégré le groupe et avec qui on a commencé à composer.

J’imagine qu’il s’agit du Kourros qui était auparavant chanteur de Incry…

Tout à fait. C’est bien tombé parce que, à ce moment-là, Incry s’était arrêté, et lui étant disponible et à la recherche d’un nouveau projet, on ne se connaissait pas, mais par nos contacts, il a entendu parler de nous. On s’est rencontré et avons décidé de voir ce qu’on pouvait faire ensemble. Tout de suite, ça a collé… On a quand même donné un concert où on faisait des reprises, on lui a proposé de venir chanter avec nous, il a kiffé et rapidement on est partis dans l’idée de travailler des compositions ensemble.

Ready for more est votre premier album…

Oui, on vient de le sortir au mois de mars, le 22. C’est un album de compositions originales. Quelques années avant, Robin Lapalut est arrivé au poste de guitariste, et ça nous a donné une orientation beaucoup plus rock. Jusque-là, on faisait du blues, du metal, du blues rock… Là, on a une orientation rock.

« Orientation rock »… Comment décrirais-tu la musique de Riviera Paradise à quelqu’un qui ne vous connait pas, pour lui donner envie de vous écouter ?

Eh bien, euh…

Parfait, merci, ça me va !

(Rires) Je dirai qu’on a un univers à nous, qui nous est propre, qui vient de plusieurs influences, des influences qu’on n’a pas choisi de suivre. On s’est laissé influencer par différents styles de musique et différents groupes que chaque membre du groupe écoute. On a fusionné tout ça pour créer des titres aux accents rock US. Il peut y avoir sur cet album plusieurs styles qu’on peut retrouver, il y a des ballades, des morceaux au tempo rapide qui flirtent avec le metal, il y a du groove, du blues, du rock sudiste… On a fusionné tout ça sans chercher à copier, et ça donne une musique sincère qui vient de nous. Ça a été plutôt naturel dans l’aspect création, et ça donne un truc… On dit rock au sens large parce qu’il n’y a pas d’étiquette précise. C’est notre style à nous… Ce n’est pas non plus révolutionnaire…

Quand on écoute l’album, on n’a pas l’impression que vous cherchiez à inventer quoi que ce soit, on écoute plus un groupe qui cherche simplement à se faire plaisir…

Exactement, on cherche à se faire plaisir, de faire de la musique qui nous plait, et on espère qu’elle va plaire à d’autres personnes…

C’est album qui comporte 10 titres. Vous abordez des thèmes particuliers ou, là aussi, c’est ce qu’on trouve traditionnellement dans le rock ?

C’est ce qu’on trouve habituellement. On n’est pas un groupe de punk, engagé, révolutionnaire… On parle de mecs qui font du rock, il peut y avoir des histoires d’amour, de rockers… C’est toujours tourné de manière positive. L’album a été créé post-Covid, donc il y avait une volonté de notre part d’aller vers quelque chose de positif, pas d’aller vers quelque chose de triste et sombre. On joue avec le côté mélancolique, mais ce n’est pas sombre. C’est entrainant, et positif.

Il y a des thèmes qui, selon toi, n’ont pas leur place au sein de Riviera Paradise ?

Ah, oui ! On ne parlera jamais de politique, on ne cherchera pas à tacler qui que ce soit… On n’a pas envie de rentrer dans ce jeu-là, de dénoncer des choses… Après, chacun peut se faire sa propre interprétation de nos textes. Pour nous, c’est d’abord la musique, trouver des lignes de chant qui collent à la musique, mélodique, après on colle des mots sans chercher de double sens ou de choses trop compliquées.

Comment avez-vous procédé pour la composition et l’écriture de cet album ?

Très simplement : il suffisait qu’on se voie dans notre local de répétitions, dans lequel on enregistrait tout, en permanence. On était branchés comme dans un home studio mais avec des vrais instruments et des micros partout. On a créé les idées ensemble, pendant ces répétitions. Bien sûr, l’étincelle venait souvent d’un riff de guitare – Robin arrive avec une idée qu’il a travaillé la veille, moi je pose un rythme de batterie, Florent, sa basse. Après on propose d’autres idées, des changements de tempo, des accords différents. Mais en fait, tout s’est fait dans notre studio, assez simplement. Il suffisait de jouer ensemble pour créer la musique, et ça a été assez rapide. On mettait une journée pour créer un titre.

Donc ça a été assez instinctif et organique…

Exactement.

Si tu devais ne retenir qu’un seul des dix titres de l’album pour convaincre quelqu’un d’écouter l’album, lui faire comprendre que Riviera Paradise, c’est ça, ce serait lequel ? Pas forcément ton préféré, mais celui qui vous représente le plus.

Ce n’est pas évident, parce qu’il y a des morceaux qui viennent de plusieurs horizons… Je dirais Free yourself at last, parce que ça évoque la liberté, l’énergie, la mélodie… Ce n’est pas forcément le premier single de l’album, mais je pense que ça représente bien qui on est.

Vous êtes originaires d’où ?

De Seine et Marne.

Alors pourquoi ce nom de Riviera Paradise ? Parce que la Seine et Marne, ça n’a pas grand-chose à voir avec la Riviera, la Côte d’Azur…

C’est vrai, c’est vrai… Au début, on faisait des reprises, on s’est amusés à jouer du Stevie Ray Vaughan et le titre Riviera Paradise nous a marqués. Riviera Paradise, ça évoque la France, la French Riviera, et c’est un mot international. On a trouvé ça plutôt positif, qui évoque le soleil. On cherchait un nom qui ne soit pas français, mais pas trop anglais non plus… On voulait trouver une passerelle entre tout ça et c’est Riviera Paradise qui est sorti.

Le nom touche l’international, vous chantez en anglais… J’imagine qu’il y a une volonté de séduire au-delà de nos frontières ? Une ambition de vous exporter ? Comment vous y prenez-vous ?

On compte voyager, aller jouer en Allemagne, par exemple. On s’est aperçu, depuis qu’on a partagé notre album sur les plateformes numérique – c’est génial aujourd’hui, ça… Ça permet d’être écoutés dans le monde entier – on s’est aperçus qu’en Allemagne il y a beaucoup d’écoutes. L’Allemagne nous intéresse, on sait qu’il y a du public qui écoute du rock, friand de nouveautés… L’Angleterre aussi… On essaie de passer dans les médias internationaux pour voir s’il y a un intérêt, si ça mord… Après on verra si on peut se déplacer pour aller jouer à l’international. Oui, on en a envie !

Quels sont vos métiers dans vos autres vies ? Un groupe de rock qui sort son premier album ne vit pas de sa musique…

En fait, on est tous les 4 musiciens. On vit de la musique et des cours de musique. On donne tous des cours et on joue dans différents groupes, différents styles.

Alors, Kourros (chant) ?

Kourros est dans l’ensemble rock, rock français, il lui arrive de jouer en duo dans des café-concert avec un guitariste. Et à côté, il est prof de chant.

Florent (Gaya, basse) ?

Florent ne donne pas de cours, il est essentiellement musicien. Il peut être amené à faire jazz, de la chanson française, de la musique électronique, du rock, de la pop…

Toi, Julien (Giraud, batterie) ?

Alors, ça va te surprendre, je joue de la musique irlandaise. Je joue avec Celtic Sailors, je joue aussi dans des groupes de variété, je fais de mariages et d’autres groupes de rock qui chantent en français.

Et Robin (Lapalut, guitare) ?

Et Robin, il fait aussi de l’évènementiel, des mariages et des soirées privées et il a aussi d’autres groupes de metal.

En gros, il y a une belle variété des genres que vous pratiquez, et quand on mélange tout ça, le résultat est plus riche…

C’est ça. Ce qui nous ramène tous à Riviera Paradise, notre bébé, le projet qui nous tient à cœur et qu’on essaye de développer. Comme tu le disais, on ne gagne pas d’argent avec mais on veut le développer parce qu’il exprime sincèrement nos influences, sans se poser de questions. Dans les autres groupes, on est un peu des caméléons, on travaille nos instruments, on sait jouer. On prend du plaisir à jouer tous ces styles, mais c’est dans Riviera Paradise qu’on joue ce qu’on a au fond de nous.

Si tu devais penser à une devise pour Riviera Paradise, ce serait quoi ?

Ben… Ready for more ! Comme le titre de l’album, qui est autant pour les gens qui nous découvrent que pour nous, dans le sens où on est prêts à défendre cet album sur scène, et aller plus loin, partager tout ça avec les auditeurs.

Le titre de l’album est en effet direct, et sous-entend « attendez-vous à beaucoup plus » !

Exactement, ce n’est qu’un début !

Un groupe de rock, c’est aussi la scène. Comment comptez vous défendre et présenter Ready for more sur les routes ?

On va le défendre sur scène en jouant le plus possible en France et à l’étranger. On a des concerts de prévus, mais l’agenda peine à se remplir… Etant indépendants, on a passé beaucoup de temps à préparer et finaliser cet album. Maintenant, on rentre dans la phase de promotion. Il faut d’abord faire connaitre notre album. On a quelques concerts de prévus : le 242 mai à Soisson, le 8 juin à Coulommiers, et quelques autres dates pendant l’été. Mais d’abord, on a besoin de faire écouter notre musique pour que les gens se déplacent aux concerts. Ce qu’on voudrait, c’est que les gens viennent pour nous voir, et pour qu’ils viennent, il faut qu’ils nous aient déjà entendus.

As-tu quelque chose à ajouter pour terminer cet entretien ?

Déjà je tiens à te remercier et j’espère que cette interview et ta chronique donneront envie aux gens d’écouter cet album. Et j’espère un jour venir jouer au Dropkick à Orléans. On est en train de voir si c’est possible.

EKO: Déficit d’humanité

France, Metal (M&O, 2024)

La rage en français, ça a du bon… EKO, qui existe depuis 2015 et a connu moult changements avant de nous proposer ce Déficit d’humanité, un album révolté qui dit ce qu’il a à dire. Musicalement, les 11 titres évoquent – naturellement pourrait-on penser – Rage Against The Machine, mais le groupe puise également du côté de Living Colour, Fishbone, Bad Brains et autre groupes de ce que l’on désignait comme fusion, ce metal qui inclut hip hop, phrasé rap et irrévérence punk. Textuellement, on pense à nos groupes revendicatifs, Trust ou No One Is Innocent ou Mass Hysteria en tête. Des comparaisons certes faciles mais Eko apporte sa propre personnalité. Le groove omni présent ne laisse jamais indifférent et qu’on soit d’accord ou non avec les paroles, on ne peut qu’admirer la détermination directe d’Eko à faire passer son message. Un constat de la situation actuelle d’un monde en perdition et empli d’inhumanité. Sur scène, ça doit dépoter sévère!

Interview: NIGHTMARE

Interview NIGHTMARE. Entretien avec Yves CAMPION (basse) le 25 avril 2004

Yves, pour rappel, parce qu’on ne va pas revenir sur l’histoire de Nightmare : le groupe s’est formé en 1979 à Grenoble, a connu plusieurs line-ups et publie aujourd’hui son 12ème album studio, Encrypted. Cependant, revenons un peu en arrière : votre précédent album, Aeternam, est sorti en 2020. Une année qui évoque certains souvenirs pas toujours très agréables. Vous avez subi la crise sanitaire de plein fouet avec ce disque…

Tout à fait… On l’a même enregistré, pour tout te dire, en plein confinement. On se débrouillait pour rejoindre le studio. On sortait avec des autorisations…

En plus, vous n’habitez pas tous au même endroit, ça ne devait pas être facile de vous retrouver.

Avec Magie, ça pouvait se faire, mais… il fallait magouiller pour sortir de chez nous !

I’m just a rock’n’roll rebel ! (Il rit). Est-ce que cette période de crise sanitaire vous a permis, comme ce fut le cas pour de très nombreux autres musiciens et autres professionnels, de vous réinventer dans le cadre des enregistrements, avez-vous développé l’utilisation des outils que l’informatique moderne nous offre pour travailler à distance ?

On en a discuté un moment… Certains ont fait du stream, ont fait des concerts à distance… Nous, on n’était pas trop partants pour faire ça, on était vraiment sur l’album. On avait moins de stress en ce qui concerne la sortie, même si la maison de disques avait une date prévue… Il y avait une tournée prévue, elle était actée, mais il a fallu reporter les dates plusieurs fois. C’est une période où on n’avait pas trop de visibilité, mais d’un autre côté, on avait peut-être plus de temps pour travailler sur l’album, et être moins dans le stress de la deadline avec une date précise où il faut rendre les masters. On avait des deadlines, mais c’était plus souple.

Maintenant, 4 ans après, Encrypted sort. Il y a encore eu un changement de vocaliste. Vous avez quelques difficultés à vous stabiliser avec un ou une vocaliste. Maggie, un album, Madie, un album, et là, c’est le premier album de Barbara…

Tout à fait… Malheureusement…

C’est quoi, Yves Campion dictateur en chef ?

(Rires) Si c’était Yves Campion dictateur en chef, il n’y en a pas 4 autres qui m’auraient suivi ! Il faut être honnêtes, quand une personne s’en va, ou qui est virée, si ça se passe bien, en général, les autres ne sont pas d’accord… Ce n’est pas ce qu’on souhaite. On ne recrute pas quelqu’un pour se dire que ce n’est pas le bon… Maintenant, les choses se sont passées comme ça, on a toujours eu la chance de… « rebondir » de rester dans l’ascendant. Barbara, elle a été dans le bain dès le départ. On a joué au Full metal week end, à Majorque, au départ, on devait jouer 30’ et au final, on a joué 75’ ! On apprend ça 15 jours avant, elle a foncé dans le tas, elle a bossé comme une dingue et elle y est allée…

Elle n’avait pas vraiment le choix, non plus !

Oh, si, elle aurait pu nous dire que c’était trop tôt, aussi…

Oui, mais elle est jeune, il y a le côté « défi » de la prestation…

Oui, c’est exactement ça, elle l’a pris comme un défi.

Comment avez-vous sélectionné Barbara ? Combien de personnes avez-vous auditionnées et qu’est-ce qui a fait la différence ?

Comme on avait des dates, ça a été très compliqué. Matt connaissait quelqu’un, et sur les réseaux sociaux, ça va assez vite… On l’a contactée, on a discuté et… On n’avait pas 36 choix, on a joué, et ça s’est super bien passé, naturellement. Avec un peu de stress, quand même, parce qu’on n’avait qu’une personne. Il y a aussi une question d’implication, Barbara s’est tout de suite entièrement impliquée…

C’est votre troisième chanteuse. Est-ce qu’à un moment vous vous êtes dit que vous pouviez aussi revenir à un chanteur ?

C’est un challenge. On avait tenté à l’époque quand Joe et David sont partis en 2015. On a fait un pari, notre maison de disques nous a soutenus – « allez-y, faites un coup avec une chanteuse » – et avec Magalie, le public a suivi. Quand elle est partie, le label nous a dit de rester avec une chanteuse ; Forcément, deux chanteuses c’est deux identités différentes mais on a choisi de relever le défi et de garder ce cap.

Qu’apporte Barbara de plus que Maddie ? Dans votre bio, il est écrit qu’elle « transcende Nightmare amenant le groupe dans une autre dimension ».

Sans changer totalement d’identité, elle a un truc en plus : elle growle. Même dans les anciennes versions de Nightmare il y en a un peu, sur Genetic disorder on était parti sur des territoires extrêmes, des terrains qui n’étaient pas tout à fait les nôtres. Il y avait aussi Frank qui faisait des riffs beaucoup plus thrash… Alors, avoir une chanteuse qui growle vraiment bien nous a poussé à explorer ce panel. Sans vouloir dénaturer le groupe, non plus. Je pense qu’on a voulu réaliser un album très ambitieux d’un point de vue technique, et c’est pour ça qu’on a voulu explorer le chant…

Justement, tu parles de ce côté exploratoire. Comment, en dehors de l’arrivée de Barbara, analyses-tu l’évolution de Nightmare entre Aeternam et Encrypted ?

Beaucoup plus riche… Aeternam est un super album, mais là, je pense qu’on est dans un album beaucoup plus riche en termes de compositions. Là on est allé beaucoup plus loin. Sur le morceau Encrypted, par exemple, il y a un passage qui touche à Ihshan, dans les orchestrations, avec de la double, du blast. On a ouvert encore un peu plus le champ des possibles. On a utilisé le chant de Barbara sur des titres rapides, un peu à la Arch Enemy… Il y a des choses qu’on n’avait pas forcément testées avant… On explore sans dénaturer le groupe. Il y a d’ailleurs des morceaux très heavy metal old school, comme Wake the night, un peu à la Black Sabbath, mais ça reste du Nightmare. On a simplement poussé la direction artistique dans des zones un peu plus…vastes. Il y a des longues parties musicales, aussi… Matt, qui a composé une bonne partie de l’labum, est partie dans cette direction.

Tu parles de ces musiciens qui, aujourd’hui, forment depuis des années le noyau dur de Nightmare (il approuve). Quelle a été l’apport de Barbara ? Elle a eu son mot à dire ?

Même plus que ça, elle à même travaillé sur la direction artistique… C’est elle qui a lancé l’idée Encrypted, elle a écrit beaucoup de textes… Je travaille toujours beaucoup le chant, et on a essayé des choses, on a cherché à voir où ça brillait le plus, et, franchement, ça a été une étroite collaboration, un vrai travail d’équipe. Quand elle a écrit des textes, elle les a faits, et les a interprétés. Elle s’est vraiment appropriée ce qu’elle a écrit.

Elle a pris les choses à bras-le-corps… Quels sont les thèmes abordés sur Encrypted ?

Alors… Le thème général, parce qu’il n’y a pas de concept avec des morceaux liés… Chaque morceau est connecté à ce concept, lié au mot « Encrypted » : on a tous des vestiges du passé qui peuvent écrire l’histoire du futur. Tout est écrit. La fin de l’espèce humaine, le passage dans l’au-delà… Ce que le monde vit aujourd’hui, quoi !

Et il y a des thèmes qui, selon, vous, n’ont pas leur place dans Nightmare ?

On a toujours été, sauf un peu au début… On n’est pas Mass Hysteria ou No One, on n’est pas du tout un groupe politique. On est plus dans le mystique, la transcendance, dans l’ésotérisme. Il y a un groupe que je vénère depuis des années et qui continue de m’inspirer, c’est Crimson Glory. Ils ont sorti un chef-d’œuvre en 1987 et c’est toujours d’actualité. Transcendence est toujours un de mes albums de chevet…

Si tu devais ne retenir qu’un titre de Encrypted pour expliquer à quelqu’un qui ne vous connait pas ce qu’est Nightmare aujourd’hui, ce serait lequel ?

Je dirais qu’on a fait un bon choix avec le premier single, Saviours of the damned, c’est un titre rapide, au niveau de la ligne de chant, il est top, il monte crescendo. C’est un titre ultra catchy, du début à la fin. Je ne sais pas comment les gens le perçoivent et je suis curieux de le savoir…

Vous avez déjà annoncé quelques concerts sur votre site, et il y en a un qui me surprend : l’album sort au mois de juin et vous faites votre release party le… 17 octobre…

Alors, merci d’aborder le sujet ! Je voulais en parler, tu as bien fait de lancer le sujet ! C’est un concert qu’on veut historique et qui me tient vraiment à cœur : c’est le concert des 40 ans de l’album Waiting for the twilight qui était sortit en octobre 84. Tu vois la relation ? Et comme on s’est rabibochés avec Jo et David, on veut célébrer ça. On va présenter le nouvel album mais il y aura aussi le line up originel, avec les anciens, tous ceux qui ont participé à cet album. On va faire un double set, un best of, avec l’ancien et le nouveau Nightmare. On invite tout le monde à venir parce que ça va être ultra culte. Ça se passera chez nous, à Grenoble, à L’Illiade, une salle qu’on aime bien, qui a un super son. Tout ce que je peux dire aux gens qui n’ont pas encore leur billet, c’est : faites vite, les places partent très vite !

Un tel évènement sous-entend de garder des traces, donc il y aura un album live à suivre ?

On y travaille, c’est en discussion. Il y a bien sûr, toujours, le label dans la boucle. On y tient vraiment, tous, parce que ce n’est pas quelque chose qu’on pourra faire deux fois…

Et puis, il y a aussi le fait que réunir autant de personnes, ça ne se fait pas comme ça, il faut tenir compte des agendas de chacun…

Exactement. Et puis, avec Jo et david, on s’est retrouvés, que ça fait partie de notre vie… Avec Jo, on s’est simplement dit qu’il nous reste peut-être moins de temps à vivre que le temps qu’on a passé ensemble (rires). Ce serait quand même stupide de ne pas laisser une trace de ce type de moment. Dans une relation, il y a toujours des beaux moments et des choses moins belles… Alors rappelons nous des choses belles, on ne sait pas si on sera encore là demain. Dans 10 ans, on ne sait pas où on sera. Le fait qu’on se soit retrouvés avec David et Jo, c’est quelque chose qui me rend zen. Chacun a ses groupes, j’ai joué avec eux, c’est des super mecs. Il n’y a plus d’animosité, on est vraiment heureux de le faire.

Il y a aussi le retour de la Firemaster convention les 25 et 26 octobre à Châteauroux…

Oui, on y sera le 26 octobre, le jour de mon anniversaire !

Alors je viendrai le fêter avec toi ! il y a une belle affiche ce week end là, avec Tagada Jones, vous…

Oui, ça va être une belle date, aussi !

Quelle pourrait être la devise de Nightmare aujourd’hui ?

Pourquoi pas Encrypted ? Parce que tout est écrit… Et il y a aussi le karma. Après, on est croyant ou pas, mais souvent, quand on est négatif, on provoque le négatif et inversement.

Pour conclure, on le sait : dans le rock et dans le metal, très rares sont ceux qui vivent de leur musique. Quelles sont vos activités respectives dans vos autres vies, hors Nightmare ?

J’ai toujours été dans la musique puisque j’ai un magazine – Metallian – et une boite de prod. Frank travaille dans une usine qui fait des impressions de je sais pas quoi, Barbara est intermittente, Matt fait des petits boulots et Niels travaille chez un agent… Oui, on a tous un travail alimentaire à côté, bien sûr.

As-tu quelque chose à ajouter avant que nous ne terminions ?

Je pousse vraiment les gens à venir à ce concert d’octobre, même s’il y a des bornes à faire. Il y a toutes les infos sur le site et les réseaux, c’est assez facile à trouver et ça va être un concert ultra historique, il faut venir !

AS A NEW REVOLT: Acid

France, Rap metal (Autoproduction, 2024)

Rappelez-vous, nous avions pu découvrir le metal rapé de As A New Revolt (AANR) en 2021 et pu témoigner du résultat en live lors de la prestation du duo au Hellfest. AANR revient aujourd’hui avec Acid, un album plus abouti, tant dans le son que dans les compositions, au nombre de 9. Impossible de ne pas penser à toute la vague neo metal, Korn en tête, certes, mais ce serait un peu trop réducteur. Il y a ici de la recherche de son, ce son techno/hip hop auquel se mêle la rage et la fureur d’un metal des cités. Alors, OK, on ne peut guère foncièrement parler ici de metal, mais les amateurs de puissance rapée, de sons électro et de rage vocale seront ici servis. Pas forcément mon truc, mais je me dis que quand j’arrive à la fin de ce genre d’album c’est que, au fond, il y a quelque chose…

WATERTANK: Liminal status

France, Rock (Atypeek music, 2024)

Voici bientôt 20 ans que Watertank a vu le jour du côté de Nantes… De la formation d’origine, il ne reste que Thomas Boutet, guitariste au chant torturé qui a vu son groupe plusieurs fois remodelé. Aujourd’hui entouré de Romain Donet (guitare), Willie Etié (basse) et Matthieu Bellemere (batterie), le groupe nous offre son quatrième album, un disque forgé dans un rock que certains définissent comme indépendant ou alternatif. Les guitares saturées et déterminées enrobent un chant étouffé et mélancolique sur des rythmes variés. Avec Liminal status, Watertank évoque en musique une forme de souffrance intérieure, explore des univers rock et grungy, parfois sombres, à d’autres moments rassurants. On se laisse entrainer dans cet univers sonore sans pour autant sombrer dans la déprime. Watertank nous offre un album épuré, dépouillé, au propos musical direct.

THE HELLECTRIC DEVILZ: The devilz playground

France, Hard rock (Brennus music, 2024)

Comment prendre cet album qui, visiblement, cherche à tromper l’auditeur? Ok, la pochette donne quelques indications sur le genre de musique que pratique The Hellectric Devilz, groupe basque formé en 2017 et déjà auteur d’un premier album paru en 2020 : du hard rock burné qui lorgne vers le metal et le glam. Maintenant, la lecure des titres de ce nouveau disque, The devilz playground interpelle: dans un premier temps, ils sont logiquement numérotés de 1 à 10 mais on se rend compte que les sous-titres sont en ordre inversé… Double sens d’écoute? A tester, certainement! En tout cas, les basques nous proposent un hard rock burné théâtralisé de bout en bout. « Ladies and gentlemen, welcome… » Si l’anglais est perfectible, le groupe se fait plaisir avec ces 10 chansons qui lorgnent autant du côté du heavy rock de Motörhead période Overkill que du glam/punk irrévérencieux, du metal anglais renaissant de la période NWOBHM ou encore le thrash de la Bay area qui commence à faire son trou. Que ce soit la double grosse caisse qui bastonne, les riffs tranchants, une basse à la Steve Harris, le chant qui s’offre des envolées dignes d’un John Gallagher (Raven) ou des textes gentiment sataniques, tout est réuni pour offrir un bon moment à l’auditeur amateur de décibels et de rythmes endiablés. Sous ses airs parfois effrayants, on découvre souvent un diable séducteur. Laissez-vous tenter…