Interview: FURIES

Interview FURIES: entretien avec Lynda Basstarde (chant, basse), Sam Flash et Billy Lazer (guitares), Zaza Bathory (batterie). Propos recueillis à Paris, bar le Magnétoscope, le 15 septembre 2020

FURIES: (de gauche à droite) Sam Flash, Lynda Basstarde, Zaza Bathory, Billy Lazer

Metal-Eyes : Avant de sortir votre premier album dont nous allons parler, vous avez publié une cassette 2 titres, en plusieurs couleurs. La cassette, c’est totalement typé 80’s (tout le monde approuve), nous sommes ici au bar le Magnétoscope (rue Drouot à Paris), outil très 80’s aussi. Qu’est-ce qu’il se passe entre vous et les années 80 ?

Zaza : C’est une période que nous avons vécue petits… On aurait, je parle pour tout le monde mais vous me reprenez si vous voulez, on aurait voulu pouvoir aller voir Judas Priest en 1984, Metallica et autres… Mes idoles, je les ai un peu loupées… Quand je les ai vus, ils étaient un peu croulants, j’étais un peu déçues. C’est surtout une période qui est très riche en matière de metal.

Lynda : Ça fait partie de nous. La cassette, on a voulu la sortir non seulement parce que c’est un clin d’œil à cette époque-là, mais aussi parce que c’est un petit objet, tout moignon, assez culte pour les collectionneurs…

Billy : C’est pas un objet cher, en plus. Ça permet de soutenir le groupe financièrement pour pas grand-chose…

Lynda : Mais il y avait aussi un code pour pouvoir télécharger ces titres en digital, bien sûr !

 

Metal-Eyes : Je vous connais depuis la seconde version du groupe, le quatuor 100% féminin. Depuis, il y a deux gras qui ont pris les guitares, et c’est la version la plus stable du groupe… Comment vous expliquez cette stabilité ?

Zaza : Ca fait maintenant plus longtemps qu’on joue avec eux…

Lynda : J’ai commencé en tant que bassiste de session avant d’intégrer le groupe, qui est devenu quatuor. J’ai pris le chant en plus, et on s’est un peu désolidarisées parce que Zaza et moi, on a une vision assez claire de ce qu’on veut faire, on veut aller très loin avec un groupe, faire pas mal d’album. Les autres filles, un peu moins, donc, un peu naturellement, il a fallu qu’on trouve d’autres musiciens…

Zaza : Les filles (ndmp : les guitaristes Levanna et Kim) sont simplement parties.

Lynda : Voilà… Et, du coup, Billy Lazer faisait partie de notre entourage, il nous suivait déjà partout en concerts…

 

Metal-Eyes : C’est le plus vieux en plus, ça fait très pervers… (rires général)

Zaza :

Billy : Ouais… « donne moi ton numéro ! » On est vite devenus potes, et je leur ai expliqué que ça faisait un moment que je voulais avoir un groupe de ce genre là. Je révais d’avoir un groupe de heavy, de laisser libre-court à ce que je voulais faire. On n’est pas dans une grande mode du heavy, même s’il y a un retour en ce moment, c’est vrai. Si tu es à Paris, que tu es musiciens, tu as plus de chance de trouver un groupe de metal extrême, de hardcore, voire de djent… Il n’y a pas tant de groupes de heavy metal que ça…

Sam : Donc tu as pris ce que tu as trouvé, c’est ça ce que tu es en train de nous dire ?

Billy : Non, mais si tu veux monter un groupe quand tu es en région parisienne, c’est pas si évident… Soit ce sont des groupes qui ont déjà une longue histoire derrière eux, soit… Des nouveaux venus, il n’y en a pas tant que ça…

Lynda : On s’est bien trouvés, il y a eu un bon timing. Ensuite, j’ai rencontré Sam, dans un bar, et je lui ai proposé d’auditionner. Il connaissait déjà Zaza.

Sam : C’est pas pareil que Billy, je suis le plus jeune. J’ai honte de le dire, mais en vrai, c’est tous des vieux là (rires) ! Personne ne pouvait tenir une guitare, donc, je leur ai proposé ! En fait, avant, j’avais un groupe, entre mes 15 et mes 18 ans, un groupe avec lequel on répétait régulièrement, très amateur. J’ai connu Zaza comme ça, puisqu’on habite dans le même coin, et j’avais envie d’aller plus loin dans l’expérience. J’étais un peu frustré parce que, quand tu arrives à 18 ans, tu vas plus loin dans les études, et ça te coince. J’ai rencontré Lynda et quand elle m’a expliqué qu’elle cherchait un guitariste, je me suis proposé.

 

Metal-Eyes : En plus, il y a un côté pratique : chaque guitariste a son côté, il y a un gaucher et un droitier…

Lynda : Exactement, c’est très joli, symétrique.

Zaza : Exactement, ils ne se prennent pas les manches…

Sam : En tout cas, pas de la guitare !

 

Metal-Eyes : Pourquoi avoir pris autant de temps avant de sortir votre premier album ?

Lynda : Il nous a fallu du temps pour bien nous connaître, musicalement. Le temps que tout se mette en place : comment on va procéder dans la composition, comment l’alchimie va s’opérer, et on voulait aussi bien faire les choses aussi…

Billy : Et il y a presque deux styles différents dans l’histoire de ce groupe… Quand le groupe était féminin, c’était très hard glam, et quand on est arrivé avec Sam, il a fallu reconstruire quelque chose de nouveau. On avait des influences différentes à la guitare. Ça prend du temps de trouver cette alchimie : il y a deux nouvelles guitares, deux nouveaux styles, il faut trouver comment composer…

 

Metal-Eyes : Et sans doute a-t-il fallu penser à une autre façon de chanter aussi ?

Lynda : Pas tant que ça, le chant reste assez heavy, et qu’il y ait des riffs thrash derrière, ça va bien.

Billy : Il fallait trouver le bon dosage : quand tu as un groupe qui fait du hard/heavy et que des éléments thrash arrivent, il faut tout doser.

Sam : Que chacun prenne sa place

Zaza : Il fallait aussi qu’on arrive à se rassurer : c’est pas grave si, dans le même morceau, tu as envie de mettre un riff de hard US, un riff à la Helloween, un autre à la Ozzy. Le truc, c’est que, si on arrive à bien tisser tout ça dans le même morceau, c’est possible. On a chacun nos influences, nos idées, et c’est ça qui fait notre essence, c’est ce qui va faire notre son, notre patte « Furies ». On ne veut pas copier Ozzy ou Helloween, mais il y a des mélodies qu’on aime et qui nous influencent. Ça prend du temps de se rassurer et de réaliser que ça va le faire…

Sam : Et que chacun trouve sa place… Quand je suis arrivé dans le groupe, Billy avait plein d’idées de riffs, avec une éloquence dans son jeu… Moi, je suis arrivé avec ma façon de jouer qui est beaucoup plus « à l’arrache », dans l’impro, et, de toutes façons, beaucoup plus thrash, et finalement, connaitre le discours de chacun permet, quand tu composes, de savoir ce que l’autre va faire, va pouvoir faire. En plus, chacun a une vision un peu différente : moi, je touche à d’autres instruments dans d’autres styles et j’essaie de chercher des influences ailleurs, Zaza a une oreille absolue et elle entend tout ce qu’on fait et elle est capable de trouver des harmonies de fou… Lynda, elle a une grosse intuition et aussi une grosse culture heavy metal, elle arrive toujours à recadrer un peu ce qu’on fait dans un esprit catchy à la années 80. A la fin, tous ces éléments mis bout à bout, ça nous a permis de créer une base solide sur laquelle on peut s’appuyer et se permettre de faire des erreurs. Et, finalement de se dire qu’on a quelque chose, on fait un album et on en est super contents !

Lynda : On commence à composer le deuxième et j’ai remarqué que ça va un peu plus vite.

Zaza : On a tous des automatismes, et on essaie, justement, de ne pas tomber dans ces automatismes. On veut que le suivant soit différent du premier album. En même temps, on communique mieux.

Sam : On arrive plus facilement à proposer des choses, il n’y a plus cette question de savoir comment l’autre va le prendre. Quand tu fais de la musique, il y a un investissement personnel, et, quand tu bosses avec quelqu’un depuis quelques années, quand tu lui fais une remarque, un jugement sur son travail, il sait ce que ça veut dire…Il y a moins d’ego.

Billy : Tu apprends à faire juger ton travail par autrui, à moins faire cavalier seul. Quand tu sais que l’équipe a fonctionné comme ça, tu fais confiance, à la fin, il y a une relation de confiance qui s’installe.

 

Metal-Eyes : Si je résume en deux mots, ce serait « complémentarité » et « communication » ?

Lynda : Et alchimie. Ce n’est pas cette alchimie magique mais (à Sam) quand tu parlais d’intuition, toi aussi, tu ressens bien les choses…

 

Metal-Eyes : Comment définiriez-vous votre musique pour quelqu’un qui ne vous connais pas et qui va découvrir votre premier album ?

Lynda : Ouh !

Zaza : Un mix de heavy, de thrash, du hard… Du « very virile heavy metal » (rires général). C’est une punchline que je sors depuis quelque temps, une sorte d’allitération. J’ai mis Virile au féminin. Moi qui suis batteuse, j’aime bien cette sensation de puissance. On dit souvent que la puissance c’est masculin, ben, il y a des femmes qui aiment ça aussi !

Billy : On essaie juste de ne pas être trop « neo heavy metal », il y a les codes, mais on rajoute des choses pour ne pas être juste une copie de Judas ou de Maiden.

 

Metal-Eyes : Puisqu’on parle de « traditionnel », il y a une video qui circule, Voodoo chains. Elle fait très Scoubidou. Un peu avant les années 80…

Lynda : Ouais ! C’est la pochette animée, en fait

Zaza : On est une équipe !

Sam : C’est vrai que ça fait Scoubidou, je n’y avais jamais pensé !

 

Metal-Eyes : Justement, en dehors du chien, il y a deux filles et deux gars… Alors qui est qui ? Je rappelle : il y a Sam, Fred, Vera et Daphnée…

Sam : Moi, je suis Sammy !

Billy : Moi, n’importe quelle heure, je suis Scoubidou ! Mais Voodoo chains illustre très mal ce que je viens de dire, parce que c’est un titre très hard rock…

Note : on n’arrive pas à départager les filles, mais il manque de toute façon la représentation de Fred….

 

Metal-Eyes : Mais à la fin, il monte quand même en puissance.

Sam : On va l’appeler Scoubi Chains, maintenant !

 

Metal-Eyes : L’album sort le 16 octobre. Vendez le moi…

Sam : Que je te lke vende ? Tiens, voilà notre album, c’est 10 euros ! (rires)

Zaza : Tu connais pas Furies ? C’est un super groupe, il y a deux meufs, deux mecs, les mecs sont symétriques sur scène, et ça déchire, il y a une énergie folle…

 

Metal-Eyes : Ok, mais vends moi l’album. Ne me vends pas le groupe…

Sam : Si tu l’achètes et que tu le mets sous une lumière UV, il y a une photo des meufs à poils, mec ! Eh ouais ! Dix balles, le truc (rire général)

Lynda : Chaque titre, chaque morceau a sa propre énergie, son propre univers et ses propres émotions. On est transporté dans un univers que chacun peut s’approprier, la musique c’est aussi ça. Ça parle souvent d’histoires qui illustrent de grands concepts comme la vieillesse, la liberté, la tentation. Il y a un titre en français, aussi, Antidote. Chacun peut choisir son antidote pour pouvoir s’y raccrocher. Chaque morceau se termine sur une note positive.

 

Metal-Eyes : Pourquoi avoir choisi de ne chanter qu’un seul titre en français ?

Lynda : On voulait composer majoritairement en anglais, mais on voulait quand même composer un peu en français parce qu’on est Français. Je pense qu’il y aura à l’avenir deux morceaux en français, 20%. C’est un exercice pas facile, pour que ça sonne bien.

 

Metal-Eyes : Sans pour autant avoir cette étiquette de hard rock français.

Lynda : Non, mais on reste Français. On fait du hard rock anglais mais français !

Billy : Sans leur manquer de respect, je crois que tous ces groupes français de metal des années 80, c’est quelque chose qui leur a été demandé, de chanter en français pour les radios… Il y en a beaucoup qui avait du talent, Lynda a fait équipe avec Sortilège pendant un moment, et ils étaient talentueux, tous. Ils étaient talentueux, mais on leur a tout de suite mis ce frein de la langue. Faut pas avoir honte de sa langue -c’est pour ça qu’on a mis cette proportion de 1 titre ou 2 sur 10 – mais il faut aussi être exportable, et le français, c’est une limite…

 

Metal-Eyes : Cependant, il y a beaucoup de groupes français qui, lorsqu’ils commençaient à chanter en anglais, ben… on se rendait vite compte qu’ils étaient français.

Zaza : Ils n’étaient pas crédibles…

Billy : Pour ça, il faut bosser un peu pour être crédible.

 

Metal-Eyes : Quels sont les différents formats que vous prévoyez pour cet album ?

Lynda :

Zaza : En CD, déjà, c’est le minimum. Il sera disponible sur notre Bandcamp, mais aussi via Season of Mist en version physique. Le vinyle sortira certainement un peu plus tard, il faut proposer de nouvelles choses aussi…

Lynda : Peut-être une édition limitée… Cassette, ce n’est pas prévu pour le moment

Billy :

 

Metal-Eyes : Trois années séparent la cassette et l’album, Fortune’s gate. Comment analysez-vous l’évolution du groupe, en dehors du fait que, maintenant, vous vous connaissez mieux ?

Zaza : Il y a eu un challenge pour nous, en tout cas pour moi, au niveau de mon instrument. Depuis la cassette, et même avant, je me suis un peu boostée notamment à cause des compositions de Billy qui sont souvent très speed et assez… soutenues. Techniquement, il y a eu un gros challenge. On s’est tous challengés techniquement ! Aussi par rapport à l’écriture des morceaux, qui sont plus élaborés.

Billy : Evolution, oui, mais d’un autre côté, la cassette est aussi à voir comme un point de départ du nouveau Furies. Ça nous a permis de mieux définir ce qu’on voulait faire

Zaza : Sam et Billy dans le groupe, qui prenait aussi une autre direction, peut-être plus intense qu’avant.

 

Metal-Eyes : Si vous deviez chacun ne retenir qu’un seul titre de l’album pour expliquer ce qu’est Furies à quelqu’un qui ne vous connais pas, ce serait lequel ?

Zaza et Sam : You and I :

Lynda : Je suis d’accord, parce qu’il y a un peu de tout : un peu de thrash, un refrain assez heavy et fédérateur, un passage un peu sombre aussi – on aime bien aller dans le sombre –

Zaza : Des solo hyper bien !

Billy : Comme Antidote, même si c’est chanté en français, je trouve que musicalement, c’est un super condensé de Furies aussi. C’est deux morceaux là représentent bien ce qu’est Furies.

 

Metal-Eyes : L’album a-t-il subi un retard du fait de la crise du Covid ?

Zaza : Non, à part le clip You and I

Lynda : On avait tout prévu dans une école audio-visuelle, mais malheureusement, la veille, à 19h, on apprend que tout est fermé et qu’on ne pourra pas rentrer… On avait tout prévu : des plans de lights, du matos, une grosse somme de matériel qu’on n’a pas pu utiliser… On s’est rabattus sur un hangar, mais on peut dire que le Covid… Ça nous a foiré le clip.

Zaza : Pas foiré, mais ce n’est pas ce qu’on voulait. Quand on a pensé au clip, on avait plein d’idées, mais on était tous les quatre d’accord : on ne voulait pas un clip de hangar ! Résultat : on a fait un clip de hangar ! (rires)

Sam : Tous les groupes ont fait un clip de hangar !

Lynda : Ça nous a aussi annulé des dates qu’on devait faire en Suède, en Allemagne…Reportées, mais on ne sait pas quand…

 

Metal-Eyes : Quelle pourrait être la devise de Furies en 2020 ?

Tous ensemble : All together and union forever !

Zaza : C’est le refrain de You and I…

 

Metal-Eyes : Une dernière chose, Zaza : tu es aussi chargée de com’ pour la Metalhead convention qui devait se tenir en octobre. On a appris son annulation. Annulation ou report ?

Zaza : Pour l’instant, elle n’est pas reprogrammée, mais on attend des nouvelles de Reed Expositions qui est à la base du projet. Pas d’info pour l’instant. C’est en stand-by….

 

Merci à Romain Richez (Agence Singularité) pour l’orga et l’accueil !