BRUCE DICKINSON: The Mandrake project

Angleterre, Heavy metal (BMG, 2024)

The Mandrake project ou chronique d’un succès annoncé… Depuis des mois déjà, c’est toute la planète metal qui s’émeut à l’idée de la sortie du nouvel album solo de Bruce Dickinson. Une promo comme seuls les plus grandes stars – et le chanteur d’Iron Maiden fait incontestablement partie de ces privilégiés – peuvent se la permettre, une promo soigneusement pensée et faite pour exciter les foules. Un battage fait de pubs dans la presse, tournée des radios, rencontres avec les (« des », le nombre de rencontres étant limité) fans pour des séances de dédicaces, production d’une version collector pour l’occasion… Comme si la promo officielle ne suffisait pas, même les fans les plus hardcore s’y mettent, se faisant le relai du décompte avant la sortie, des résultats des ventes, des témoignages lors de ces rencontres organisées… Bref une promo jusqu’à l’overdose qui pose une question: il est où le loup? Car oui, avec autant de remue-ménage, on peut avoir des a priori quant au résultat final de cet album que les fans auront attendus près de 20 ans. Certes, son retour au sein du giron Maiden l’a plus qu’occupé, mais force est de reconnaitre, à l’écoute de cet album, que ça valait le coup d’attendre. Une nouvelle fois, Bruce collabore avec Roy Z, qui tient ici guitare et basse et avec qui il compose la plupart des titres. D’emblée, on comprend que Bruce cherche à s’éloigner de l’univers purement heavy metal de la vierge de fer. Il nous propose un album au relents cinématographiques avec des chansons taillées pour le 7 art. La variété des genres, allant du heavy rock au metal symphonique, voire à l’acoustique est rafraichissante et interpelle plus qu’à son tour. L’émotion mise en scène est palpable, et Dickinson module et varie ses intonations avec un bonheur qu’on ne trouve plus forcément dans son autre groupe, même si certains moments évoquent naturellement Maiden. The Mandrake project s’en distingue cependant largement au travers de cette œuvre impressionnante et plus que réussie. Alors oui, voici un disque qui méritait bien un peu de tapage et on attend maintenant de retrouver le légendaire chanteur sur scène – un Olympia puis un Hellfest en bien meilleure position que British Lion…

POLARYS: Cosmic singularity

France, Heavy metal (Autoproduction, 2024)

Les Parisiens de Polarys se font rares… Après The Va’adian chronicles, un premier album puisant dans la SF paru en 2013, après 2 singles sortis de temps à autres, le groupe revient avec ce Cosmic singularity, un simple EP de 5 titres… « Simple », mais les titres sont longs, touffus et vraiment travaillés. La superbe pochette (signée Slo) donne le ton: Polarys évolue dans cet univers SF et propose un metal épique, puissant et enjoué. Comme un message au public à reconquérir, Back to war introduit cette galette en proposant divers tableaux, à la fois déterminés, inquiétants et épique. Le chant grave du guitariste Douchan est entrainant à souhaits. Le morceau éponyme démarre avec une évocation de Metallica avant d’aller explorer des sonorités plus spatiales et orientales. Certains sons me font même penser chant des baleines avant que le titre ne reparte en trombe avec une réelle efficacité. L’instrumental The long dark permet à la formation de proposer diverses ambiances dans des tiroirs aussi bien heavy que progressif. Deux termes qui résument l’esprit de Polarys qui ne cède pas à la facilité, varie les plaisirs comme sur le très enlevé Trapped in the hub, un des singles paru en… 2017 ou le plus que martial The warrior’s pledge. Il y a des coins à explorer et des découvertes tout au long de ce trop court Cosmic singularity dont on n’espère qu’une chose: qu’il soit le disque de la remise en forme, celui qui annonce un retour ou un redécollage.

Histoire d’une légende: JUDAS PRIEST (1ère partie)

Quinze ans déjà… Quinze années que Judas Priest a annoncé prendre sa retraite et, contrairement à tant d’autres, n’a finalement jamais arrêté nous offrant en 2024 un nouvel album studio – Invicible shield – et une nouvelle tournée, dont trois étapes sont prévues en France : le 5 avril à Lyon, le 8 à Paris et le 23 juin pour clore le Heavy week end de Nancy. Mais revenons quinze ans en arrière. Epitaph… C’est le nom qu’avaient décidé de donner les Metal Gods, à leur « tournée d’adieux en 2009. Vous vous en souvenez ? Oui, car cette « tournée d’adieux » n’avait d’adieux que le nom et le Priest a été, depuis back à de nombreuses reprises… Non seulement les Anglais « mettaient-ils un terme à leur carrière » mais, avec un nom pareil, on pouvait croire qu’ils avaient décidé de définitivement enterrer le mythe après quarante ans de bons et loyaux services. D’autant plus que le 20 avril 2009, Judas Priest postait sur son site www.judaspriest.com une nouvelle plus que surprenante : KK Downing, le guitariste co-fondateur du groupe, avait alors décidé de prendre sa retraite et de quitter le groupe. Une décision aussi soudaine qu’inattendue, d’autant plus surprenante qu’il ne semblait pas y avoir de réelle explication. Dont acte. Un départ brutal sans même des adieux live aux fans qui l’ont soutenu toutes ces années. Judas Priest n’a cependant pas tardé à lui trouver un remplaçant en la personne de Ritchie Faulkner, jeune guitariste alors âgé de 31 ans, présenté par le groupe comme plus que talentueux, et qui « va mettre le feu sur scène » dès le concert d’ouverture de cette nouvelle tournée, le 7 juin 2009 à Tilburg, en Hollande.

Mais ça, c’était avant… Car depuis, Judas Priest a publié non pas un, non pas deux mais bien trois nouveaux albums studio, un live et un méga coffret collector tiré à 3.000 exemplaires dans le monde, s’est lancé dans plusieurs tournées mondiales, expliquant que « finalement, non, l’idée de Epitaph était de mettre un terme aux longues tournées mondiales pour ne plus tourner que sur de courtes périodes et ne donner que quelques concerts soigneusement choisis ». En attendant de retrouver les Metal Gods sur scène, revenons sur (maintenant plus de) cinquante ans d’histoire.

Lorsque naquit Judas Priest du côté de Birmingham en 1970, personne n’aurait osé espérer une carrière aussi longue ni aussi riche. Celle-ci, pourtant n’est pas terminée. Car ce que le groupe enterre, ce sont les longues tournées, pas les concerts ni les enregistrements d’albums. Comme beaucoup d’autres formations à la carrière plus qu’honorablement longue, Judas Priest aura connu des hauts et des bas, tant en matière de réussite artistique ou commerciale qu’en termes d’image auprès du public. Mais une chose reste certaine : c’est que Judas Priest est devenu une référence incontournable depuis ses débuts.

LES ANNEES 70

Kenneth Downing, né le 27 octobre 1951, et Ian Hill, qui vit le jour le 20 janvier 1952, se connaissent depuis leur plus jeune âge. Ils ont fréquenté les mêmes écoles et, d’une certaine manière, se sont construits ensemble, se découvrant, au cours de l’adolescence des goûts musicaux communs. C’est naturellement qu’ils décident d’apprendre à jouer d’un instrument : Kenneth choisit la guitare, Ian la basse.

Lorsqu’ils s’estiment prêts, les deux compères décident de fonder un groupe. Nous sommes alors en 1970. Ils sont rejoints à cette époque par Alan Atkins, un chanteur dont le groupe, qui se nomme Judas Priest, vient de se séparer et qui leur propose ses services.

Si les débuts du groupe se font sous l’influence du blues, Downing insiste pour que Judas Priest durcisse le ton. Sa musique devient plus rock et plus dure, et le groupe, sans batteur attitré, écume la région de Birmingham. Mais des dissensions internes, dues, entre autres raisons, à des problèmes financiers, forcent le départ de Alan Atkins. Un premier changement s’impose alors, qui va avoir un impact déterminant sur le reste de la vie de Judas Priest.

Ian Hill fréquente à cette époque une jeune fille dont le frère chante au sein de Hiroshima. Elle suggère à son amoureux d’envisager la possibilité de le recruter. Rob Halford, qui a le même âge puisqu’il vint au monde le 25 août 1951, intègre ainsi Judas Priest et embarque avec lui son batteur John Hinch.
Si la légende n’est pas encore en marche, l’aventure peut toutefois commencer. Pour cela, le quatuor intègre, suivant la suggestion de son label, un second guitariste ; le fougueux Glenn Tipton, bien que de trois ans son ainé (il débarqua sur la planète le 25 octobre 1948) qui deviendra bien vite l’alter ego de celui qu’on appelle désormais KK Downing. Judas Priest ainsi complété entre en studio afin de donner naissance, sous la houlette du producteur Rodger Bain, à Rocka rolla, son premier effort. Une tentative qui ne marque pas l’histoire de la musique, le producteur ayant usé de son influence et de sa notoriété (il a notamment travaillé avec Black Sabbath) pour écarter des chansons que le groupe utilisera plus tard : The ripperGenocide ou encore Tyrant furent ainsi sacrifiées sur l’autel de la nécessaire production. La formation tire cependant les leçons de cet enregistrement afin de ne plus commettre ce type d’erreur et mieux se fier à son jugement.

Désormais, Judas Priest se donne un rôle actif dans la production, et commence, aux côtés de Jeffrey Calvert et Max West, dès l’enregistrement de Sad wings of destinyqui sort en 1976. Pour ce disque, Alan Moore tient les baguettes, mais il sera bientôt remplacé. La maison de disques, Gull, peut se déclarer satisfaite du début de succès rencontré par l’album de ses poulains. Les morceaux précédemment écartés touchent le public, tout comme le désormais classique Victim of changes.

La légende est en marche. Judas Priest commence à intéresser des majors, parmi lesquelles CBS qui finit par héberger, et pour de nombreuses années la formation anglaise. Le label compte bien capitaliser sur ce groupe à la réputation grandissante et obtenir un retour sur investissements. Dès 1977, Judas Priest sort le premier fruit de cette nouvelle collaboration : Sin after sin, enregistré avec le batteur Simon Philips, produit par Roger Glover (Deep Purple), est enregistré au Ramport Studios de Londres. Le groupe y signe les futurs classiques que sont Sinner ou Dissident agressor et reprend ce qui deviendra un incontournable lors de ses concerts, Diamonds and rust, que Joan Baez, chanteuse folk, a rendu intemporel. Sin after sin voit également l’équipe s’agrandir avec la venue de Roslav Szabo, un membre du team CBS, qui s’occupe de la conception et du design des illustrations des albums de Judas Priest. L’album marque par son orientation plus foncièrement heavy et parvient ainsi à séduire le public anglais qui lui offre une jolie 23ème place dans ses charts.

Le groupe renforce alors sa présence scénique afin de battre le fer tant qu’il est chaud. L’Angleterre tombe petit à petit et Judas Priest se voit même invité aux USA pour participer au Day On The Green Festival au côté de Led Zeppelin. Ce voyage outre Atlantique se fait en compagnie du nouveau batteur, Les Binks, et permet aux Anglais de voir grandir leur réputation chez l’oncle Sam. Le groupe découvre un pays qu’il lui faut absolument conquérir pour s’installer durablement dans le paysage musical mondial.

De retour en studio, Judas Priest s’attèle à l’enregistrement d’un nouvel album. Gull profite de l’aubaine pour sortir un premier Best Of Judas Priest coiffant sur le poteau la sortie, en 1978,de Stained class. Ce dernier, avec des titres un peu plus aérés comme SavageSaints in hellExciterWhite heat red hot ou encore Beyond the realms of death, présente une facette un peu plus « soft » du Priest, ce qui semble perturber légèrement le public anglais qui ne le place qu’en 27ème position. Ce disque, pourtant, confirme la position de leader de Judas Priest alors que la scène heavy britannique, qui subit de plein fouet l’explosion de débauche du Punk, est donnée pour moribonde.

Seulement, Judas Priest a l’esprit conquérant et propose dans la même année un disque beaucoup plus dur, forgeant (enfin) le style qui fit sa légende. Killing machine, pourtant subit la censure américaine à cause de son titre, bien involontairement cependant. Les USA ont récemment été le théâtre d’un massacre dans une école de Cleveland et « estiment » que le groupe fait ouvertement référence au meurtrier. L’album y est publié sous le nom de Hell bent for leather (une des chansons du disque) et marque les esprits au point que la tournée qui suit verra le nombre de dates grossir semaine après semaine. Car non content d’élaborer les codes musicaux du heavy metal moderne, Judas Priest en redéfini également l’image. Alors que nombre de musiciens évoluent avec l’apparence de hippies, Rob Halford et ses compères adoptent un look bien plus en rapport avec la musique : les vêtements de cuir tout de chaines et de clous bardés deviennent la marque visuelle bientôt indissociable du groupe. Un esprit sado maso, imposé au fil du temps par Rob Halford, entre au service d’une musique virile et macho. Judas Priest peut enfin décoller, ayant trouvé à la fois un son et une image. Les Anglais accueillent l’album à bras ouverts bien que lui offrant un moins bon classement dans les charts (n°32) et les Américains commencent à prendre le groupe au sérieux (n°128 du Billboard).

Le Japon est choisi pour que soit enregistré le premier témoignage public de Judas Priest qui parait en 1979. Unleashed in the east cartonne partout, se classant des deux côtés de l’océan (n° 10 en Angleterre et 70 aux USA) et sera bientôt soupçonné d’avoir été plus que retravaillé en studio, au point que certains le surnommeront « Unleahed in the studio ». Il faudra bien des années pour que le groupe parvienne enfin à convaincre que seul Rob Halford a dû réenregistrer ses parties tellement les prises live étaient mauvaises. Peu importe au final, car Judas Priest démontre avec brio sa maitrise de la scène, et l’engouement du public est bien réel. Mais la tournée aura eu raison du batteur. Les Binks quitte le groupe qui le remplace par Dave Holland. Débute alors une longue et très fructueuse collaboration qui durera toute la décennie suivante.

De son côté, Gull continue de tirer profit de son ancien poulain en sortant une nouvelle compilation sous la forme d’un double album, Hero, Hero qui relate, de nouveau, les premières heures des Anglais.

LES ANNEES 80

La légende s’installe, et cela sans perdre de temps. Profitant de son image – miraculeusement demeurée intacte malgré le raz de marée punk – et de l’afflux de jeunes groupes aux dents longues (mouvement que le monde connaitra bientôt sous l’acronyme NWOBHM), Judas Priest propose bientôt un nouvel album, présentant ainsi au monde son nouveau batteur, Dave Holland, né le 5 avril 1948 à Northhampton. British steel, produit par Tom Allom, fait un carton immédiat – et durable –grâce à son modernisme et sa détermination. Les désormais classiques Living after midnight et Breaking the law sont tout de suite la proie des radios qui en font de véritables hymnes du heavy metal, plaçant l’album en 4ème et 34ème place des Top anglais et américain. L’Angleterre cède, suivie par le vieux continent, les USA sont conquis, et Judas Priest connait enfin le plaisir des certifications en recevant disques d’or puis de platine. Le groupe se lance une nouvelle fois dans une intensive tournée américaine et se trouve enfin propulsé au rang de valeur sûre mondiale. L’Europe fera également l’objet d’un pilonnage en règle. Les années passées entre galères et espoirs sont désormais mises à profit, d’autant que la formation ainsi constituée (producteur inclus) restera stable tout au long de la décennie, et donnera naissance aux plus grands albums de Judas Priest.

Succès, formation stable, label confiant… Il est naturel pour tous les acteurs de vouloir capitaliser sur le nom de Judas Priest. Une obligation reste cependant à remplir : il est impératif de renouveler le succès américain. Pour cela, les six travaillent le son du groupe, et lorsque sort, en 1981, Point of entry, la surprise est de taille : les chansons plus lisses semblent mieux convenir aux radios américaines, ce qui, en cette période de renouveau metallique sur le vieux continent, n’a pas l’heur de plaire à tous les Européens. Le public américain ne s’avoue cependant pas totalement convaincu non plus, ne transformant ce nouvel essai qu’en disque d’or et n’offrant à l’album que la 39ème position du Billboard (et N° 14 GB). Mais loin de se décourager, les Anglais repartent sur les routes et sillonnent les deux côtés de l’Atlantique. Si le succès commercial de l’album est mitigé, de nombreux concerts affichent complets. Et sur scène, les You say yesDesert plains ou autres Heading out to the highway prennent une autre dimension.

Rapidement, pourtant, Judas Priest remet les pendules à l’heure. On ne joue pas avec les humeurs de ses compatriotes… Le groupe retourne en studio, toujours sous la houlette de Tom Allom, et donne naissance à Screaming for vengeance en 1982. Clairement, la formation s’éloigne des sirènes radiophoniques en durcissant le ton. L’aigle qui illustre la pochette, œuvre de Doug Johnson (auteur d’une trilogie priestienne qui commence ici) a les serres affûtées et son piqué n’a rien de pacifique : la bête metallique est lâchée et vient pour vaincre. Les morceaux lourds sont parfaitement taillés pour la scène, et la tournée qui suit continuera de mettre les USA à genoux. Screaming terminera double platine. Les intensifs coups de boutoirs chez l’oncle Sam durent pas moins de six mois, le public reprenant en chœur You’ve got another thing comin’Electric eye ou Bloodstone. Puis, une nouvelle fois, l’Europe cède, reconnaissant ses héros qui, désormais, sont surnommés les Metal Gods. Comme pour British steel, la force de l’album réside dans la variété des sons de l’ensemble. Jamais Judas Priest ne se répète, alternant riff acérés et lourdeur oppressante, hymnes de concerts et hits potentiels. Le succès se confirme à domicile (n°11) et sur le nouveau continent (n°17).

Pour la première fois, une année passe sans qu’un nouvel album de Judas Priest ne voie le jour. Mais en 1983, le groupe n’a pas d’autre choix que de se concentrer sur la route. Et sur son avenir. Il serait tentant de chercher à séduire plus encore le public américain, mais KK Downing et sa bande optent pour l’option heavy metal pur et dur. Le contraire serait malvenu en nommant son nouvel album Defenders of the faith. L’efficacité de Some heads are gonna rollRock hard ride free, Eat me alive ou Freewheels burning, démontre que le groupe n’a rien perdu de son mordant, bien au contraire. Plus agressive que jamais, la formation améliore autant que possible les recettes utilisées sur Screaming for vengeance, tout en travaillant ses nouveaux morceaux pour la scène. Seulement, voilà, nous sommes en 1984. Les Américains ont les oreilles tournées vers les sons développés par Van Halen et son méga succès Jump. Résultat : Defenders of the faith ne récolte qu’une « maigre » récompense de platine, mais en Europe, on reste persuadés qu’il n’y a pas de plus efficace porte étendard de la cause metal que Judas Priest, accompagné, soyons honnêtes, des désormais imposés Iron Maiden, Saxon et Def Leppard. Cependant, en ces heures de rude concurrence (le hard US et glam metal commencent à faire fureur), l’album est moins plébiscité, n’atteignant que la 19ème position à domicile, et 18ème aux USA. Pourtant, où qu’il passe, le groupe remplit stade sur stade, proposant un spectacle visuel complet. L’année 1985 sera principalement consacrée à la route avec succès avant que les dieux du metal n’entrent de nouveau en studio.

En deux ans, le glam ou hair metal a pris ses quartiers : les cheveux permanentés sont de mise, et les diffusions en radio un passage obligatoire. Si la couverture de Turbo est une nouvelle fois marquée de la signature de Doug Johnson, Judas Priest fait mentir l’illustration (par ailleurs un peu trop douce, faite d’un métal trop poli et brillant), car plutôt que d’enfoncer le clou du metal et passer à la vitesse supérieure, Rob Halford and Co. préfèrent flirter avec les ondes et introduisent – sacrilège ultime – des claviers et synthétiseurs dès que possible… Clairement, Turbo loverPrivate property ou le très engagé Parental guidance visent à séduire les fans de ce hair metal qui voit chaque album se transformer plusieurs fois en récompense de platine. Le public européen est déconcerté, d’autant que si le groupe conserve le look cuir et clous, il adopte des tenues pour le moins saugrenues et à l’opposé de l’image SM jusque-là développée. Le public fait quelque peu payer au Priest cette offense, mais fi ! La tournée est une nouvelle fois un triomphe qui se traduit par un (double) album live, un Priest… Live, à la couverture hideuse, un témoignage de nouveau destiné au public américain. Car ce sont cinq morceaux issus de Turbo qui sont ici présents et le verdict est clair : si les Yankees lui réservent un accueil raisonnable en transformant ce disque en Or, les fans européens restent intransigeants, et même distants.

Priest semble entendre le message et décide de durcir de nouveau le ton afin de remettre les pendules à l’heure. Mark Wilkinson récupère les pinceaux et frappe un grand coup afin de faire passer visuellement le message que le groupe développe musicalement tout au long de Ram It Down, qui parait en 1988 : le heavy metal reste l’apanage de Judas Priest et de quelques rares héritiers. Mais le mal a été fait et malgré de féroces morceaux comme Come and get itRam it downBlood red skies, la profession de foi heavy metal ou la reprise explosive de Johnny B. Good de Chuck Berry, le public européen boude ses anciens héros, pensant sans doute qu’il y aura un autre retournement de veste. Les Américains, de leur côté, semblent ne pas comprendre ce revirement et n’offrent qu’une faible récompense en Or au groupe. Pourtant, comme souvent, le public continue de courir les salles de concerts où les prestations restent d’un haut niveau. Et même si la tournée est un succès, ce public est moins nombreux, de même que les dates. Dave Holland, le batteur qui a traversé la décennie avec Judas Priest profite de ce moment pour quitter le groupe (ou, plus exactement, se fait remercier ayant quelques démêlées avec la justice qui l’envoie faire un séjour à l’ombre. On apprendra plus tard que le batteur a été condamné pour pédophilie. Il est décédé à Lugo, en Espagne, le 16 janvier 2018)

Bientôt la suite…

QAMELTO: Scotoma

France, Rock (Autoproduction, 2024)

Qamelto nous avait interpelés avec son premier Ep, Sors, paru en 2020. Le groupe revient avec Scotoma, un album qui sonne et donne beaucoup. Démarrant avec L’hôte, le groupe semble vouloir régler des comptes et nous offre des textes qui sonnent comme une délivrance sur des mélodies qui, si elles paraissent simples, se glissent dans la tête. Qamelto varie par la suite ses plaisirs avec des morceaux plus lents, speed, s’oriente vers des atmosphère plus aériennes, lourdes ou sombres. Le chant déterminé et rugueux accompagne des guitares incisives et une rythmique directe. Qamelto nous offre un album dynamique et entrainant, rafraichissant même. Parfois, la « simplicité » reste ce qu’il y a de plus efficace.

BLOOMING DISCORD: Memories from the future

France, Metalcore (mais pas que) (Autoproduction, 2024)

Il aura fallu 8 années aux Marseillais de Blooming Discord pour enfin offrir à son public son premier album, Memories from the future. Un premier album qui fait suite à 2 Ep qui ont permis à la petite bande de finaliser son line up, tester et se planter et vraiment trouver son identité musicale. Ce sont ici 10 titres qui nous sont livrés et la surprise est au rendez-vous. Si Blooming Discord évolue de prime abord dans un registre proche du metalcore, on se rend vite compte qu’il y a plus que ça dans ce qui motive le groupe. On reconnait aisément les sources d’inspirations de Blooming Discord qui puise dans les 90’s et le début des années 2000, et le son – superbement produit – est très américain. Le chant, à la fois clair et plus brutal de Karim fait des merveilles et l’on ne peut noter un accent qui pourrait, à juste titre, laisser croire qu’on n’a pas à faire à quelqu’un qui aurait grandit en France. Tout au long de ces dix titres, Blooming Discord nous entraine dans une furie auditive tout autant que dans des rythmes simplement entrainants ou dans un peu plus de douceur. Le groupe s’est donné les moyens de ses ambitions et nous propose un premier album d’une rare efficacité qui ratisse large et s’adresse à tout le monde. Une superbe carte de visite qui donne envie d’en découvrir plus.

HEAVY WEEK END: l’affiche complète

On avait déjà envie d’y être avec les premières annonces… Gérard Drouot Productions, l’organisateur de l’évènement nancéen, vient de dévoiler les nouveaux noms qui s’ajoutent à l’affiche du Heavy Week End. Ce festival se tiendra sur 3 jours au Zénith de Nancy les 21, 22 et 23 juin prochains.

Viennent donc de s’ajouter The Last international, le 21 juin, Sortilège et Pretty Maids le 22, Ayron Jones et Tom Morello le 23 pour un total de 11 groupes mythiques ou en passe de le devenir.

TAGADA JONES: Trnt – best of 1993-2023

France, Rock/Hardcore (At(h)ome, 2024)

Que de chemin parcouru par les Bretons en trois décennies! De confidentiel, à force de tournées, d’albums toujours de meilleure qualité, d’un engagement clairement revendiqué doublé d’un esprit festif, de concerts explosifs et fédérateurs, Tagada Jones le quatuor punk/hardcore est devenu une des valeurs sûres du rock énervé français. pour fêter ça, nous en parlions il y a peu avec Fred Duquesne, producteur (et guitariste de Mass Hysteria), Tagada Jones a décidé de réenregistrer certains de ses titres les plus emblématiques. Ce Trnt – best of 1993-2023, est un rapide résumé de la carrière de Niko et ses comparses qui permettra aux plus anciens fans d’avoir une relecture de ces chansons et aux plus jeunes de mieux connaitre ce passé qui a mené les Rennais là où ils sont aujourd’hui. Si les albums les plus récents sont mis en avant (plusieurs extraits de La peste et le cholera et A feu et à sang), certains, sans doute plus « obscurs » et moins populaires, manquent à l’appel, mais peu importe. Car en revisitant, parfois accompagné des Bidons de l’An Fer (Le dernier baril, Vendredi 13, Nation to nation, Mort aux cons), chacun des 15 morceaux prend une autre dimension, dégageant tout autant de puissance et d’énergie. Si c’est la set-list qui nous attend lors de la tournée à venir, ça va dépoter et pogoter grave! Tagada Jones est aujourd’hui un des piliers incontournables du Rock français, et ce Trnt – best of 1993-2023 est là pour nous le rappeler. Superbe.

FIFTY ONE: Love/hate

France, Punk/Thrash (M&O, 2024)

En ouvrant son album avec l’instrumental Adios motherfucker, le groupe de punk rock Fifty One (à ne pas confondre avec la formation hard rock Fifty One’s kidnapée au début des années 2000 après quatre albums) se pose comme une formation thrash explosive. Pourtant, dès Stroke of midnight, le groupe s’oriente vers ce punk rock US festif et télévisuel. Ne serait-ce – encore une fois, comme trop souvent avec les groupes hexagonaux – ce ridicule accent anglais qui vient gâcher mon écoute, la Californie, le soleil et la fête sont au rendez-vous. On cite les influences? Fifty One s’inspire directement de ses ainés, Sum 41, The Offspring ou Green Day en tête. Musicalement enjoué, ce Love/hate bénéficie d’une production soignée qui rend justice au genre. Le groupe ne réinvente rien mais met tant de cœur à l’ouvrage que l’on a envie de les soutenir. On a envie de sauter, chanter et surfer… Reste un détail à travailler pour séduire un public étranger.

GREYBORN: Scars

France, stoner (Ep autoproduit, 2024)

Une basse ronflante, grasse et saturée introduit lourdement Scars, un Ep de 5 titres qui démarre avec le morceau titre. Greyborn a été formé par le batteur chanteur Théo Jude qui, accompagné du guitariste Maxime Conan et du bassiste Guillaume Barrou propose un premier Ep, Leeches, en 2022 aux sonorités embrumées. Le groupe évolue dans un registre stoner/doom et revient avec ce Scars tout aussi sombre et lourd. Passé le cap d’un chant anglais incompréhensible, l’amateur se plongera dans ces morceaux oppressants et inquiétants. A thousand dreams away se détache du lot par sa rythmique plus dansante, tandis que Tetany, court instrumental, offre un moment plus léger à l’ensemble. La production minimaliste apporte une touche organique vintage, mais la sursaturation peut nuire à une écoute sereine. Volontairement hors du temps, Scars s’inscrit dans un registre sonore qui revient en force. C’est sans doute là la grande faiblesse de ce disque qui ne se démarque pas de la masse. Pas désagréable, certes, mais pas mémorable non plus. Dommage…

Interview BLOOMING DISCORD

BLOOMING DISCORD (Photo promo)

Interview BLOOMING DISCORD. Entretien avec Sam (guitare) et Vincent (guitare rythmique) le 26 février 2024

Je découvre le groupe avec ce premier album, donc commençons avec la traditionnelle question : quelle est l’histoire de Blooming Discord ?

Vincent : L’histoire du groupe ? C’est bien que tu en parles avec nous parce que nous sommes un peu à l’origine de ça. Le groupe a débuté en 2015. Alors, on part de quoi, là ?…

Sam : A l’époque, j’avais un groupe de rock. On faisait des reprises et ça ne me suffisait pas. Je voulais faire quelque chose qui ressemblait plus à ce que j’écoutais, ce qui me faisait rêver quand j’avais 14 ans, Bullet For My Valentine, ce genre de groupes. Un soir, je vais à un anniversaire avec ma guitare et quand j’arrive, Vincent, que je ne connaissais absolument pas, était là et il avait aussi sa guitare. Il jouait toutes les musiques que je kiffais… Depuis, c’est l’amour fou !

Vincent : On a passé la soirée à jouer les musiques de nos répertoire communs. Ca a super bien matché musicalement. L’anecdote, c’est qu’on a passé toute la soirée ensemble, elle se termine, tout le monde s’en va. A l’époque, je dormais sur place. Sam part, puis revient parce qu’il avait oublié sa veste (NdMP : après « l’amour fou » mentionné précédemment, ça commence à ressembler au coup de la panne cette histoire, non ?). Là, il me dit que c’était cool, qu’il a passé une bonne soirée, me dit « je monterais bien un groupe ». Moi aussi, j’en avais envie. On s’est promis de se contacter à la fin de l’été, on avait tous les deux des choses à faire. A la fin de l’été, on s’est retrouvés, on a commencé à répéter tous les dimanches avec notre batteur de l’époque. A partir de là, on a créé le groupe, on a recruté un bassiste… plusieurs bassistes avant de rencontrer Antho. Lui, était à Paris à l’époque, il venait en vacances à Marseilels, d’où il est originaire. Il ne vient pas du tout du metal, à la base, il fait de la tektonik (rires es 2). Il est DJ, aucune connaissance dans le metal.

Sam : D’ailleurs, il n’aimait pas ça, il avait des a prioris sur le metal à la base… On lui a fait écouter nos groupes fétiches et il s’est rendu compte que, en fait, c’était vraiment lui ! Il ne jouait pas du tout de basse à l’époque. Il nous a dit : « les gars, attendez moi, je finis mes études à Paris, et dans 3 moi, je reviens et je veux être votre bassiste ! » On lui a dit qu’on n’avait pas le temps d’attendre, on a vu plusieurs autres personnes et, au final, le temps est passé, et il est revenu… Ce qui était assez frappant quand on s’est rencontrés, Vincent et moi, c’est que lui vient de la musique classique, moi, du rock, et un DJ qui arrive. Les trois se retrouvent et font du metal (rires) !

Oui, maintenant, les mélanges de genres, la fusion, elle donne souvent les résultats qu’on connait…

Sam : Exactement. Blooming n’est pas forcément dans les clous du metal, dans ce qui « est à la mode » aujourd’hui…

Avant de parler de la musique de Blooming Discord, j’ai vu sur un site internet qu’en 2015 vous aviez un autre look que sur les actuelles photos, et d’autres noms de scène. On parle bien du même groupe ?

Sam : Oui, ça a bien évolué aussi ! A l’origine, il y avait une sorte de concept album. L’idée était de sortir un album, pas 2 Ep. Pour des raisons logistiques, d’apprentissage, aussi, on a décidé de scinder les choses : avoir une première expérience en studio pour apprendre, puis une autre pour progresser. On s’est rendu compte que s’était bien d’avoir fait comme ça parce que ça nous a permis de faire ce premier album avec un peu plus de qualité. L’esthétique à la base était très tournée vers nos influences, il y avait un concept, une histoire… Entre temps, on a grandi, on s’est détachés de nos bases, de la dissonance… On a décidé de se recentrer sur quelque chose de plus essentiel. Juste faire de la musique pour kiffer avec le public.

Vincent : Pour bien comprendre, à part Sam qui avait déjà une expérience avec des groupes de reprises, les autres, c’était vraiment notre première expérience. Le groupe s’est formé en 2015 et il y a eu beaucoup de temps d’apprentissage du travail de groupe, de la définition de la direction artistique… A la base, on disait « on aime la dissonance, Tim Burton et on veut créer quelque chose d’assez théâtral ». Ça a beaucoup évolué pendant ces années d’apprentissage. Finalement, ces 2 Ep qu’on a sortis ont été l’aboutissement de tout ce travail de quelques années. Savoir quelle était notre choix artistique. C’est pour ça que notre premier album sort 8 ans après. Il nous a fallu du temps pour apprendre. Toutes les erreurs d’un groupe, on est tombés dedans…

C’est aussi comme ça qu’on apprend et qu’on grandi. Quelles sont vos principales influences aux uns et aux autres ?

Vincent : Ça évolue aussi avec le temps ! En ce moment, je suis assez branché par While She Sleeps, Bring Me The Horizon, il y a beaucoup d’influence de ce qu’on écoutait dans les années 2000, Slipknot, Korn, Steel Panther aussi (rires).

Steel Panther, je l’entends moins !

Sam : A la base, dans le groupe, on est tous, individuellement et profondément amoureux de chaque artiste qui peut transmettre quelque chose à sa manière. Que ce soit dans l’interprétation, dans la sincérité de son discours ou juste avec un concept particulier. C’est pour ça qu’il a dit Steel Panther, mais ça peut même être Queen, Michael Jackson, Elvis… Dès qu’il se passe quelque chose, on a envie de retranscrire cette sensation qu’on a pu éprouver en écoutant, en voyant des artistes en live. C’est ça qui nous anime. C’est une démarche d’authenticité, retranscrire ce qu’on aime chez ces artistes-là. Je pense que tu as pu le voir sur cet album, ce qui nous unis, la musique qui nous fait rêver, c’est celle des années 90/2000. Il y a quelque chose de grunge dans cet album, presque comme si on était nostalgiques de ces années-là, du Grunge, du metalcore. On a voulu reprendre tout ça en se disant qu’on avait envie de rendre hommage à tout ça tout en y ajoutant une touche de modernité.

Rendre hommage à la musique des années 90/2000… Si vous deviez décrire votre musique à quelqu’un qui ne vous connait pas, que diriez-vous ?

Vincent : J’aime bien définir le groupe comme jouant du rock metal. Le mot metal vient après. Il y a vraiment cet esprit rock dans ce qu’on fait. Je pense que quelqu’un qui n’écoute pas de metal peut apprécier. Ça peut être une porte d’entrée d’écouter ce qu’on fait parce que notre musique est assez ouverte. On a du mal à nous définir dans un style, même si en ce moment il y a une tendance très metalcore… C’est un milieu qui a des codes très précis, et nous, on se trouve un peu entre deux. Il y a des choses metalcore, mais en même temps, notre metal est plutôt gentil… C’est pour ça que je dis que c’est une porte d’entrée, les gens qui découvrent ça peuvent se dire qu’en fait, le metal c’est aussi ça…

Ce que j’ai noté en écoutant l’album c’est une variété dans les morceaux. Il y en a qui sont bruts de décoffrage, d’autres plus soft – j’ai noté que Idolies est un titre « tendre » même si derrière il y a des guitares très heavy. Vous ne vous contentez pas de ne faire que du metalcore. Il y a une variété d’influences que vous intégrez dans votre musique.

Vincent : Exactement, et c’est la force d’un album : avec un produit « complet », on peut montrer toutes les facettes de nos influences. C’est très bien d’avoir un morceau très « brut de décoffrage » comme tu disais, mais Blooming Discord, ce n’est pas que ça. C’est bien d’avoir aussi un titre comme Unlive, beaucoup plus… On va sortir les briquets pendant le concert ! Il y a des moments plus émotionnels, tristes ou nostalgiques. On essaie vraiment de faire ressortir toutes nos influences.

Sam : Au-delà de ça, c’est aussi dans la personnalité de chaque membre du groupe, tant dans les influences que dans ce qu’il peut se passer pendant le processus d’écriture. Par exemple, tout le monde a des hauts et des bas dans la vie. Unlive, c’est un moment qui pouvait être difficile dans la vie du bassiste – c’est lui qui l’a écrit. Sur le moment, on n’a pas forcément compris mais on s’est dit que si c’était important pour lui d’écrire cette musique. A la base on se disait que la musique était très belle et ensuite, on a tous traversé des moments difficiles et on a tous chialé sur cette musique. Elle est forte et elle signifie quelque chose pour nous.

Qui sont les musiciens qui composent aujourd’hui Blooming Discord ? Je suis allé vérifier votre site internet et il n’y a rien concernant votre ou line-up sur votre bio…

Sam : Disons que nous sommes dans un collectif où chaque personne apporte quelque chose. Ça part vraiment de la personnalité de chacun.

Vincent : On avait un premier batteur, Sébastien Papillon, qui a quitté le groupe après le premier Ep, et on l’a remplacé par Sébastien Lanthelme, donc on a gardé le « Seb » (rires). C’est quelqu’un qui est arrivé après la fondation du groupe, avec qui on s’entend super bien. C’est comme une famille. Quand on recrute – on a eu des phases de recrutement au début et au milieu quand on cherchait un nouveau batteur – on avait besoin des compétences et du côté technique, mais on avait aussi énormément besoin du côté relationnel, « famille ». Avant de recruter Seb, on a eu plusieurs batteurs qui avaient le côté technique mais avec qui ça ne matchait pas… On ne s’entendait pas suffisamment pour continuer dans le bon sens. Quand on a rencontré Seb, ça a collé directement, amicalement ou au niveau des compétences. Ca fait maintenant trois ans qu’il est avec nous. Il y a donc Seb à la batterie, Sam, guitariste soliste et fondateur du groupe, moi-même, fondateur également et guitariste rythmique, Anthony Scavenger, le fameux bassiste qui voulait rentrer dans le groupe et qui a acheté une basse pour ça, et Karim, alias Cage, le chanteur qui est entré dans le groupe aux tous débuts.

Parlons un peu de Karim, justement. Je suis très exigeant sur le chant anglais. Vous avez fait le choix de chanter en anglais et, pour une fois, j’ai la très agréable surprise d’écouter quelqu’un dont l’anglais est parfaitement compréhensible.

Sam : Alors… Karim il parle toutes les langues du monde (rires) ! Il est « multilingue », il parle français, arabe, italien, espagnol, c’est un don qu’il a… Il est trop fort !

Mais son anglais, il le travaille d’une manière particulière ?

Sam : Il a vécu une grosse partie de sa vie en Egypte et il me semble que l’anglais, là-bas, est assez parlé. Et il a beaucoup voyagé, aussi.

Vincent : Il faut aussi savoir que Karim est également champion du monde d’orthographe en français ! A 8 ans ! On crèche chez sa sœur à Paris qui nous a confirmé que c’est vrai. Bon, il n’avait pas 8 ans, elle nous a dit qu’il avait 13 ou 14 ans, il a été dans un concours d’orthographe, un concours mondial. C’est une compétition où il n’ya avait que des vieux, et c’est lui, à 14 ans, qui a gagné et devenu champion du monde d’orthographe. Voilà… Il a un côté littéraire très poussé et son don de pouvoir parler plusieurs langues doit venir de là.

Et c’est très agréable de pouvoir enfin écouter un groupe français dont le chant anglais est passe partout. Je pars du principe que si tu décides de chanter en anglais c’est que tu envisages de pouvoir exporter ton groupe hors de frontières francophones. Vous le féliciterez de ma part ! Maintenant, j’ai aussi l’impression qu’il y a parfois deux chanteurs : du chant clair, du chant guttural beaucoup plus brutal… C’est lui qui s’occupe de tout le chant ?

Vincent : En studio, oui, à 98%. Il y a quelques parties qui sont chantées soit par Sam soit par nous en clair. Les back, en live, ce n’est pas lui qui les fait, normal, mais en studio, c’est lui, oui.

Si l’un et l’autre vous deviez ne retenir qu’un seul titre de Memories from the future pour décrire à quelqu’un qui ne vous connait pas ce qu’est Blooming Discord aujourd’hui, ce serait lequel ? Pas le meilleur, pas votre préféré, vous avez trois minutes pour convaincre avec un titre…

Sam : S’il y a trois minutes pour convaincre, disons qu’avec Latch tu auras une bonne idée. Il y a cette volonté d’être une porte d’entrée vers le metal

Vincent : Il y a ce côté festif…

Sam : Festif et fédérateur, il y a du chant clair, du chant saturé, il ya de l’énergie. Je dirais Latch. Après, personnellement…

Ce n’est pas ma question (rire général) ! Tu as dit Latch, ça me va. Vous êtes tous les deux d’accords, sur ce titre ?

Sam : Oui, après, personnellement je pense qu’on est aussi tous les deux d’accord (rires) !

 Mais ce n’est pas ma question, je m’en fous de ça ! Vous m’avez parlé de 2 Ep ; j’ai trouvé Bramble and bones, mais pas le second, comment s’appelle-t-il ?

Sam : A la base, ça devait n’être qu’un album comme on l’a dit, qui s’est transformé en 2 Ep : le premier Bramble and bones, et le second Chamble and stones.

Le titre de l’album, Memories from the future, est assez dystopique. Vous traitez de thèmes particuliers ?

Sam : Ce qu’on aime bien, c’est ne pas donner de réponses aux sujets qu’on traite. Il y a un côté très philosophique… C’est Karim qui écrit la plupart des textes. On ajoute des petites choses de temps en temps, mais c’est principalement lui qui s’occupe de tout. Il faut savoir que Karim, c’est une âme…

Vincent : Torturée.

Sam : Voilà, torturée, qui, comme on le disait tout à l’heure est très orienté littérature. On aime ce côté-là de Karim qui aime poser beaucoup de questions sans apporter de réponses…

Vincent : Au-delà de ça, Karim a un côté très mystérieux, on ne le connait vraiment que quand on écoute et qu’on lit les paroles. Les paroles de cet album sont profondément introspectives. Il parle vraiment de choses qui lui sont propre et on peut en interpréter pas mal de choses sur, par exemple, des pulsions émotionnelles, qui sont contrastées. Le fait de s’avouer qu’on aime des choses, par exemple « tu ne te souviens pas de moi mais je me souviens de toi » (« you don’t remembrer me but I remember you »), ça ne s’adresse pas à quelqu’un en particulier, ça s’adresse à lui-même… Il ya beaucoup de contrastes dans Blooming Discord. Rien que dans le nom, déjà : Blooming, c’est la floraison, Discord, la discorde, le chaos. D’un point de vue instrumental aussi, il y a beaucoup de montées, de tensions, de détentes…

Y a-t-il des sujets que vous estimez, aujourd’hui, ne pas avoir leur place dans Blooming Discord ?

Sam : Politiquement… On est un groupe qui parle des difficultés de la vie, de la difficulté de gérer ses émotions, certaines situations. On n’a pas forcément envie de s’engager politiquement. Non pas qu’on n’a pas envie de prendre de risques, c’est juste que ce n’est pas le but aujourd’hui…

Si vous deviez penser à une devise pour Blooming Discord, ce serait quoi ?

Sam : Lanister paye toujours ses dettes (rires) ! Non… On peut prendre une seconde ? Ce serait « faire la fête et niquer des mères » (rires des deux ».

Vincent : En fait, on a la volonté de vouloir unifier les gens dans la fête…

Donc il y en a un qui est plus foncièrement rock n roll et l’autre qui cherche à rattraper le coup (les deux se marrent) ! Vous avez quelque chose à ajouter pour clore cet entretien.

Sam : Simplement que les gens qui vont lire cette interview aillent écouter Blooming Discord, qu’ils soient novices ou pas dans le metal. Il ne faut as penser que ça ne va pas vous plaire, chacun peut se reconnaitre dans pas mal de chanson. Et on est chauds pour venir faire la fête avec eux.

Quels sont justement vos projets de concerts ?

Vincent : On a quelques concerts de prévus : il y en a un le 23 mars à Avignon, à l’Aquabar, en compagnie de Scarlean et d’autres invités. On a fait notre release party le 7 février, sold out sur préventes et il y a beaucoup de gens qui n’ont pas pu rentrer… Du coup, on a réussi à trouver une date « de secours » pour ceux qui voudraient venir, ce sera le 29 mars au Jazz road de Mirabeau, à côté de Marseille, ensuite, le 31 mai pour un tremplin pour le Metaldays (NdMp : en Slovénie) de 2025.Quatre groupes vont jouer, l’un des quatre sera sélectionné par un jury pour aller jouer au Metaldays en 2025. On a aussi nos premières dates européennes : une à Milanet une à Bologne, en Italie, les 3 et 4 mai. On prépare ensuite une tournée pour l’automne 2025. On voudrait traverser la France en ligne droite, on ferait Marseille, Lyon, Paris, Lille, Bruxelles…

C’est pas tout à fait une ligne droite…

Vincent :… Quasiment (rires) ! on aimerait bien sortir un peu plus, aller en Allemagne…

Merci à tous les deux, j’espère pouvoir vous voir sur cette tournée si vous passez par Orléans

Sam : Avec plaisir ! On y a joué il n’y a pas très longtemps, c’est une très belle ville. On a été épatés par la beauté de la ville et on a envie de revenir !