Interview BULLRUN : entretien avec Gaël (guitare). Propos recueillis par téléphone, le 20 novembre 2020
Photo promo by Audrey Ritzenthal
Metal-Eyes : Gaël, nous nous étions rencontrés il y a trois ans pour la sortie de votre précédent Ep, Dark Amber. C’était une époque où on avait encore le droit de rencontrer des gens pour leur parler (il rit). Quel regard portes-tu sur ce disque trois ans après, quand tu y repenses, y a-t-il des choses que tu aurais faites différemment ?
Gaël : Sur Dark amber, non, je ne pense pas. C’était le fruit d’un état d’esprit. En fait, c’était 6 titres qu’on a extraits de ce qui devait être un album. On a préféré en faire un Ep, et c’est exactement ce qu’on voulait exprimer à ce moment-là. C’était un ton un peu punk rock, hard rock des années 80 et c’était notre état d’esprit à cette époque.
Metal-Eyes : Vous avez patienté 3 ans avant de proposer un autre Ep. Ça fait long pour un jeune groupe…
Gaël : On n’a pas particulièrement patienté… Ce qui s’est passé…
Metal-Eyes : Tu ne peux pas dire que c’est à cause du Covid, là !
Gaël (rires) : Bon, je vais essayer de trouver autre chose… On pensait effectivement sortir un CD un an plus tard, un album. Et, au final, ce n’est qu’un Ep 6 titres et, tu l’auras peut être remarqué, Wilderness est un peu différent. La direction musicale est un peu plus metal, un peu plus moderne, et c’est aussi un peu moins éclectique que Dark amber où tu passais d’un style à un autre, à des ambiances radialement opposé à quelque chose d’assez homogène, en tout cas c’est ce qu’on a essayé de faire. Ce changement de direction, il ne s’est pas fait tout seul, il découle beaucoup de notre collaboration avec Symhéris et JD Cardavelli qui nous ont aidés à trouver notre direction. Bullrun existe depuis 2011, mais ce n’est vraiment qu’à partir de 2016 qu’on a commencé à penser à la musique comme quelque chose de très professionnel, malgré notre statut. Dark amber, c’était notre premier jet et on continue encore à se chercher. Il a fallu écrire Wilderness, en axant notre propos vers quelque chose de plus metal, et on ne savait pas trop si on pouvait s’aventurer là- dessus, si c’était notre terrain… On a beaucoup réfléchi, et, à côté de ça, on s’est engagés dans un programme de coaching scénique, et musical, au Fog, à l’Empreinte de Savigny le Temple. Ils ont mis au point un programme de coaching scénique avec différents intervenants qui te donnent des pistes de réflexion et d’orientation différentes.
Metal-Eyes : La nouvelle star version metal…
Gaël : Ben, c’est un peu ça, parce qu’il y a quand même des élections. Et ça te permet de voir les choses différemment à la fin du programme. On a eu des avis, et on a eu une approche différente, et on a commencé à écrire en plein milieu, et on a enregistré vers aout 2019. On a défendu Dark amber sur scène pendant un an et demi, on a fait sa promo du mieux qu’on pouvait, et ensuite il y a eu ce programme. C’est vrai que ça peut faire long pour seulement 6 titres, mais ça nous correspond plus, je crois.
Metal-Eyes : Si on parle d’évolution, ce serait surtout d’un point de vue musical et maturité…
Gaël : C’est ça, même si le mot « maturité » me gêne un peu parce qu’on a toujours tendance à dire « c’est l’album de la maturité ». C’est une évolution qui était logique, on pouvait déjà prévoir ce qui allait se passer, il y avait déjà des passages assez metal dans Dark Amber. Là, naturellement, avec les thématiques du CD, on est partis sur quelque chose de beaucoup plus violent.
Metal-Eyes : Vous aviez trouvé résidences à Orléans à une certaine époque, si je me souviens bien…
Gaël : Exact, à une époque, la majorité de nos dates se passaient là-bas, on avait un début de fanbase à Orléans. C’était d’ailleurs assez bizarre de se dire qu’on n’avait jamais foutu les pieds de notre vie à Orléans et que c’est là-bas qu’on avait le plus de contact ! C’était génial. C’était cool, il y avait quand même une scène metal là-bas. On a perdu l’Infrared, qui était génial, qui a été remplacé par le Blue Devil’s. Qui a, lui aussi, je crois, fermé…
Metal-Eyes : Avec les derniers évènements, je ne sais pas. En tout cas, Hervé, parce que le public ne suivait pas, a décidé d’arrêter de produire les concerts, mais il mettait la salle à disposition des groupes qui la louait et se débrouillaient pour la logistique, la promo… Il produisait quelques noms, comme Blaze Bayley, par exemple…
Gaël : Cette date-là, elle nous a fait rêver, Bayley, quoi, merde, il fait venir Bailey !
Metal-Eyes : Deux fois, même, au Blue Devil’s d’Orléans… Revenons à Wilderness. Si le Covid n’a pas eu d’impact sur la conception de l’album qui, tu le disais a été enregistré en août 2019, la crise sanitaire a-t-elle retardé la réalisation du clip ?
Gaël : Oui à une certaine échelle, ; mais pas tant que ça parce qu’on était quand même sortis des clous. Déjà, on n’y croyait pas du tout au confinement, en mars. Pas du tout. Et on ne savait pas combien de temps ça allait durer. Vivre dans un pays où les gens ne peuvent pas sortir de chez eux, on ne l’imaginait pas. On ne l’avait pas anticipé et en janvier, début février, l’album, on l’avait. On s’est demandé quand il serait mieux de le sortir et on pensait début de l’été. Période des concerts, des festivals… et quand on a vu que tout s’annulait, onn s’est dit « autant le sortir maintenant » comme ça on pouvait prévoir le clip et le sortir en septembre. Sauf que… Alors on a d’abord sorti l’album en digital, et, heureusement, on avait prévu quelques vidéos teaser qu’on a pu mettre en avant. On avait quelque cartes d’avance mais le Covid nous empêche de faire la promotion correcte de notre CD, notamment en nous empêchant de pouvoir le défendre en concerts. Mais nous ne sommes pas les seuls.
Metal-Eyes : Ce clip dont tu parles, c’est celui de Fire and hate. Vous avez dû bien vous marrer pour le tourner…
Gaël : On s’est marrés mais… ça a quand même été éprouvant. 17 à 19 heures de travail, avec une équipe de 20 personnes, des explosions, donc tout un système de sécurité pour que personne ne se blesse. C’était une journée de fous, mais tout était parfait ! L’équipe était géniale, aucune tension sur le plateau malgré quelques galères… L’équipe était vraiment mortelle, les acteurs étaient géniaux. Je les ai découverts le jour du tournage, et ils sont énormes, super investis. Julien (Metternich, le réalisateur du clip) a une excellente vision cinématographique. Quand on l’a rencontré, on a su au bout d’une demi-heure de conversation qu’on allait bien s’entendre. On a le même humour, les mêmes références cinématographiques, les mêmes codes, on savait que c’était ce gars-là ! On voyait ce qu’il faisait avant – il a notamment fait un live d’Alice Cooper à l’Olympia, qui n’a malheureusement jamais vu le jour, travaillé avec Trepallium, visuellement, c’est mortel, le dernier live d’Ultra Vomit à l’Olympia. Il a une vraie culture metal, c’est vraiment son domaine. Le jour du tournage, il était d’un professionnalisme extraordinaire. Bosser avec des gens comme ça, aussi impliqués, ça fait plaisir. Non seulement ça fait plaisir, mais en plus on en a besoin : toutes les personnes avec qui on travaille sont des gens avec qui on s’entend bien.
Metal-Eyes : Quand on voit le résultat, actif, explosif, sexy et fun, on s’en rend compte. Pour moi, c’est le genre de clip qu’on ne voit plus assez en France. Ou ailleurs… On voit des lyrics video, sans scénario, même si celui-ci me fait directement penser à Mr and Mrs Smith…
Gaël : C’est une référence ! As-tu vu la référence à Terminator avec les roses ? C’est un des clins d’œil que Julien voulait absolument mettre parce qu’il adore Terminator. Il voulait que ce soit une fille qui prenne le rôle du Terminator. On a tous grandi avec Sara Connor ou Helen Ripley et on voulait un clip avec une meuf bad-ass ! On l’avait, donc c’était mortel.
Metal-Eyes : Si aujourd’hui tu devais décrire votre musique pour quelqu’un qui ne vous connait pas, tu lui dirais quoi ?
Gaël : Je dirai que Bullrun c’est surtout une musique assez directe, sans compromis, qui cherche avant tout à aller à l’essentiel. On essaie d’éviter les détours. Il faut aussi se rappeler qu’au départ, Bullrun n’était pas censé être un groupe de metal. On était censé être un groupe de rock sudiste à la Molly Hatchet, ZZ Top, Lynyrd Skynnyrd, mais bon… on s’est rendus compte qu’on aime bien quand le grain est plus dur et que ça joue un peu plus vite !
Metal-Eyes : Le chant de Rémy me fait aussi penser à Headcharger…
Gaël : Headcharger, oui… C’est un groupe français, non ? Ils n’étaient pas d’Orléans ?
Metal-Eyes : Non, ils sont de Caen… Orléans, on avait Wild Dawn.
Gaël : Ouais, Wild Dawn, c’était bien… Dommage que ça n’existe plus… Maintenant, je sais que Rémy aime bien Headcharger, il m’en a parlé plusieurs fois, mais je ne pense pas que ce soit une influence. Quand il me parle de ce qu’il aime bien au chant, c’est James Hetfield, et un peu Lemmy pour l’écriture : des phrases courtes, avec tout un tas de sens que chacun peu interpréter.
Metal-Eyes : Pourquoi avoir choisi ce format de 6 titres ?
Gaël : D’abord, comme je le disais, parce qu’on se cherche encore, du moins, on se cherchait encore. Ensuite, ce n’est pas un manque de moyen, mais on a préféré avoir quelque chose pour le tester. Une belle pochette, un beau contenu, et je pense que Wilderness défini au mieux ce qu’on sait faire aujourd’hui. Je pense que le prochain CD s’en inspirera.
Metal-Eyes : Si tu devais n’en retenir qu’un titre pour définir justement ce que vous êtes aujorud’hui, ce serait lequel ?
Gaël : Je pense que ce serait Fire and hate. C’est un des titres les plus concis et efficace. Il y a des riffs qui vont droit au but, il n’y a pas de solo – on n’y a même pas pensé, et ce titre n’en a pas besoin. On a voulu aller à l’essentiel.
Metal-Eyes : Ce n’est pas un hasard si c’est celui que vous avez choisi pour le clip…
Gaël : Ce n’est pas un hasard, mais pour le coup, ce n’est pas nous qui l’avons choisi. C’’est Julien. Comme on travaille avec des gens très créatifs, on n’impose rien, on ne veut pas les freiner. On lui a demander lequel des 6 titres l’inspirait le plus, il a dit que c’est sur Fire and hate qu’il fallait faire quelque chose.
Metal-Eyes : Une dernière chose : quelle pourrait être la devise de Bullrun aujourd’hui ?
Gaël : Heu… « Toujours plus. Toujours plus, toujours plus loin ».
Metal-Eyes : Marrant, c’est exactement ce que tu m’as dit il y a trois ans…
Gaël : C’ets vrai ? Ben tu vois, on est fidèles à nous-mêmes. Tu vois, c’est notre philosophie : Dark amber est un super disque, mais on considère que Wilderness, quelque part, est mieux. Contrairement à Dark amber, on a sorti un clip. Donc, plus loin ! Peut-être qu’un jour on aura fait le tour, mais on est dans une phase systématique d’apprentissage.
Metal-Eyes : L’album est sorti, on peut se le procurer où ?
Gaël : Il est sorti en physique, on peut aussi se le procurer en digital sur toutes les plateformes. Il suffit d’aller sur notre site pour pouvoir le commander (https://www.bullrunofficial.com/)
Metal-Eyes : Gaël, je vous souhaite plein de bonnes choses, qu’on puisse bientôt vous voir sur scène
Gaël : Merci beaucoup, je l’espère aussi…
Metal-Eyes : Et on se reparle dans trois ans !
Gaël : (rires) Enfoiré ! A dans trois ans alors !
Allez aussi, surtout, voir le making-of du clip :
https://www.youtube.com/watch?v=H2J4ncpRn9s