MONOLYTH: A bitter end / a brave new world

France, death mélodique (Autorpoduction, 2018) – sortie le 25 septembre 2018

L’an dernier au Hellfest, sous Temple, je suis allé jeter une oreille et un oeil au set de Monolith. Une expérience brève tant l’ennui s’est emparé de moi rapidement. Alors, pensez, quand j’ai reçu cet album, ma première pensée a été « oh, non ». Mais un regard plus attentif me fait comprendre que, visiblement, il ne s’agit pas du même groupe. Non, celui-ci, ce Monolyth, s’écrit avec un Y salvateur! Je glisse donc le CD avec une curiosité attisée dans le lecteur pour y découvrir… du death metal. Premier constat, la pochette de A bitter end / A brave new world peut se regarder dans deux sens opposés. Un joli travail graphique qui me parle. Ensuite, en retournant la pochette, chaque titre est doublé d’un sous-titre genre mini résumé de la chanson. Original. Puis la musique démarre. Je passerai rapidement sur le « chant », style guttural hurlé qui, comme chacun sait, n’est pas du tout mon style, d’autant que c’est assez monocorde. En plus, j’ai la nette impression que l’anglais n’est guère maîtrisé. En ce qui concerne la musique, cependant, les morceaux sont travaillés et réfléchis, les mélodies incontestablement attirantes et efficaces. Monolythe propose avec A bitter end / A brave new world un disque extrême abouti que les amateurs découvriront avec plaisir.

ELYOSE: Reconnexion

Metal, France (Autoproduction, 2018) – sortie le 27 septembre 2018

Pour son troisième album (après Théogyne en 2012 et Ipso facto en 2015), les Parisiens de Elyose profitent de Reconnexion pour repenser leur approche musicale et offrir un son à la fois plus brut et direct et des mélodies pensées pour faire mouche. Elyose ne se contente en effet pas de chercher un style qui lui soit propre mais explore divers horizons, du metal symphonique aux intonations death metal, ou encore, à l’opposé, en visant la pop énergique. On reconnaîtra, naturellement l’influence d’Evanescence (le refrain de De tout là-haut semble plus qu’inspiré par un certain Wake me up inside…) ou d’Epica dont le guitariste chanteur Mark Jansen partage le chant sur le très énergique – et chanté en anglais – Psychosis. Les invités sont nombreux, d’ailleurs, puisque figurent rien moins que Raf Pener (T.A.N.K) sur Asyme’trie (qui me semble s’engager sur le terrain de la Syrie – dommage que les paroles ne soit pas plus compréhensibles, une des faiblesses de cet album…), Aurel sur Mes 100 ciels – premier single – ou encore Flo Lemonnier sur Les mots qui me viennent. Varié, enjoué, ce troisième album d’Elyose pourrait faire ressortir le groupe du lot des nombreux challengers, en tout cas, le placer dans le peloton de tête.

AMARANTHE: Helix

Metal mélodique, Suède (Spinefarm, 2018) – Sortie le 19 octobre 2018

En 2016, Maximalism m’avait quelque peu déçu. Trop dance et racoleur à mon goût. Avec ce cinquième album, Helix, les Suédois d’Amaranthe parviennent à retrouver ma sympathie. Si l’ambiance dancefloor metal est toujours présente, le propos de Helix se fait aussi plus rugueux. On trouve tout au long de cet album des influuences aussi variées qu’Epica (un peu partout), Beyond The Black (Dream), voire même, par instants, de Metallica (les premières mesures de GG6) ou du Rammstein (Breakthrough starshot). Une certaine forme de brutalité ressort des guitares autant que des voix et, naturellement, Helix est émaillé de ces rythmes particulièrement dansants qui font la particularité d’Amaranthe. Il suffit pour s’en convaincre d’écouter Countdown ou le déjà mentionné Breakthrough starshot au refrain irrésistible. My haven, plus froid et quelque peu prévisible, est moins attirant mais Amaranthe retrouve avec ce nouvel album un peu de sa superbe. A retrouver sur scène avec Powerwolf le 25 octobre prochain au Bataclan!

ANTI FLAG: American reckoning

Punk acoustique, USA (Spinefarm, 2018)

Anti Flag a décidé de prendre son public un peu de court… Les punks anarchistes américains sont de retour avec un nouveau volet de la série « American »: après American spring et American fall, ils nous offrent aujourd’hui American reckoning. Il s’agit en réalité de versions acoustiques des deux albums précités, et le résultat est plus qu’intéressant. Si le chant garde ce côté narquois qui sied tant au punk, le reste est dépouillé et sobre. 7 chansons sont ainsi revisitées, Anti flag leur apportant une autre couleur. Puis, le groupe décide d’un contre pied total avec 3 reprises retravaillées à leur sauce. Autant dire que s’il est surprenant d’entendre Gimme some truth de Lennon aussi électrifiée, la chanson en devient rageusement séduisante, au même titre que For what it’s worth (Buffalo Springfield) et Surender (Cheap Trick). Judicieux et efficace, comme choix qui permet à ce disque de se démarquer de la concurrence. American reckoning, s’il doit être la conclusion d’une trilogie, vient superbent la clôre.

SHVPES:Greater than

Metal, Royaume-Uni (search and destroy/Spinefarm, 2018) – Sorite le 9 septembre 2018

Avec Greater than, les Anglais de Shvpes pourraient bien franchir un pallier et devenir plus que de simples outsiders. Si je n’avais guère accroché avec le premier album du groupe d’un des fils de Bruce Dickinson, en l’occurrence le vocaliste Griffin, je dois bien reconnaître que ce nouvel opus est plus attirant à de nombreux égards. Tout d’abord, le gaillard a décidé de varier ses performances vocales. exit les cris constants, place à plus d’ouverture. Bien sûr la rage est présente, mais on retrouve de nombreux passages plus ambiancés, doux et même une forte influence rap « à la » Prophets Of Rage, ce dès Calloused hands. Et puis, on ne boude pas son plaisir à l’écoute de clins d’oeil à nombre de formations en vue. Comment ne pas penser au Raining Blood de Slayer en écoutant le riff en arrière plan de Someone else? La semi ballade de Two wrongs , no rights séduira les jeunes filles tandis que les « oh oh » de Afterlife laissent penser que le groupe vise haut tant les backings vocs sont aisées à faire reprendre par une foule juvénile en concert. Rap, thrash, metal core, Shvpes serait en train de redéfinir son identité sonore qu’on n’en serait guère surpris. Shvpes propose ici un album puissant, bien produit et surtout varié et s’offre le luxe de convier de prestigieux invités (Matt Heafy de Trivium sur Rain et Rosanne Hamilton, chanteuse folk, sur War). même s’il n’est pas évident à écouter d’une traite, Greater than reste unalbum à découvrir.

JOE BONAMASSA: British blues explosion live

Blues Rock, USA (Provogue, 2018)

Mais il ne s’arrête jamais, le gaillard! Studio, live, collaborations diverses… Joe Bonamassa passe le plus clair de son temps à jouer au point qu’on peut se demander s’il a d’autres centres d’intérêts. Il joue. Pour son plaisir, et celui de partager. Et pour le nôtre, aussi. Car loin de Joe l’idée de se répéter, de se reposer sur son répertoire, pourtant déjà très riche. Ici, avec British blues explosion live, Joe nous propose non pas un double album live, mais un double album live hommage aux grands du genre. Il se fait plaisir en reprenant du Jeff Beck, Eric Clapton, Jimmy Page… Ce disque a été capté lors de son concert donné le 7 juillet 2016 à Londres. Pas de lézard, le son est irréprochable, tout autant que l’interprétation de ces 14 titres qu’on souhaiterait entendre s’étirer encore et encore… Est-il utile de se plonger dans le détail de ce disque, d’extraire un morceau plutôt qu’un autre? Non, car les amateurs du guitariste savent qu’ils peuvent, les yeux fermés, se procurer l’un, l’autre ou la totalité des formats de ce British blues explosion live: double CD, DVD, Blu-ray ou même triple vinyle bleu-blanc-rouge. Pas de cocorico ici, non, non… il s’agit bien des couleurs du drapeau britannique, pour honorer l’héritage rock et blues que laisse ce pays. Un must, à consommer sans modération.

FIVE FINGER DEATH PUNCH: And justice for none

Metal, USA (Eleven seven, 2018) – Sortie mai 2018Aau regard des événements de l’an passé – le départ brutal d’Ivan Moody en cure de désintox et son remplacement sur le pouce par Tommy Vext, chanteur de Bad Wolves – on peut se demander où Five Finger Death Punch (5FDP pour les intimes) a trouvé le temps d’enregistrer ce septième album, paru juste avant l’été. Mais il est bien là, et Moody en forme. Le groupe va droit au but, proposant 13 chansons qui, pour la plupart, durent moins de 4′. Recherche d’efficacité oblige. Fake et Top of the world sont une introduction brutale et agressive – quelqu’un peut s’amuser à compter le nombre de « fuck »  et dérivés crachés par Moody sur le premier morceau, svp? avant que 5FDP ne varie ses plaisirs. Blue on black, une ballade qui monte en puissance, sonne comme une confession du chanteur. Puis les affaires sérieuses reprennent avec des tonalités qui évoquent les albums qui ont permis au groupe de vraiment commencer à percer en Europe, les deux volets de Wrong side of heaven. Un peu de piano sur I refuse introduit la seconde power ballad un peu sirupeuse bien que dotée d’une jolie mélodie (tout comme la troisième, When the seasons change). La paire de guitaristes – Zoltan Bathory et Jason Hook – tricotent des riffs puissants qui tranchent dans le vif. On regrettera simplement un peu trop de morceaux « doux », même si Will the sun ever rise qui clôt ce disque propose différents tempi, du lent au rageur. Si 5FDP tient ce rythme, et espérons que la cure d’Ivan ait été, malgré sa rapidité, efficace et sera durable, il ne fait guère de doute que le groupe franchisse un nouveau palier grâce à cet album varié et plus que réussi.

BAD WOLVES: Disobey

Metal, USA (Eleven seven, 2018) – Sorti le 11 mai 2018

Tommy Vext s’est fait remarquer l’an dernier en remplaçant, au pied levé, Ivan Moody, démissionnaire temporaire (filant en cure de désintox) et depuis revenus au sein d’un 5FDP sous les feux de la rampe. C’est en cette même année 2017 que se forme Bad Wolves avec le même Vext au chant, accompagné des guitaristes Chris Cain et Doc Coyle, du bassiste Kyle Konkiel et du batteur John Boecklin, tous ayant déjà un solide passé musical au sein de, en vrac, Devil Driver, Vext, God Forbid, In This Moment et j’en passe. Bad Wolves est donc une sorte de super groupe dont on peut attendre le meilleur avec Disobey, son premier album paru en mai (tient, comme le dernier 5FDP!) chez Eleven seven (tiens, comme le dernier 5FDP, quelle coïncidence étonnante!). Alors, oui, la puissance est là – l’ensemble est bien plus rugueux que 5FDP, par exemple – et les surprises au rendez-vous. Bien sûr, on ne peut que s’attarder sur cette reprise savamment retravaillée du Zombie des Cranberries, véritable hommage à sa chanteuse brutalement disparue, Dolores O’Riordan. C’est le morceau le plus calme de cet album qui se rapproche souvent du metalcore. Sauf que le chant est ici plus mélodique que ce que nous propose habituellement ce genre explosif. Ici, après les deux premiers titre rentre dedans (Officer down, Learn to live), les mélodies se veulent imparables (No masters, Remember when, ou la ballade Hear me now), les airs facilement mémorisables ou les riffs épileptiques (Better the devil, Jesus slaves) mais… Mais tout semble tellement travaillé pour faire mouche que je me demande combien de temps ils peuvent tenir ces gars de L.A. Et puis, quand tu vas sur le site et qu’en guise de page d’accueil tu tombes sur le merch avec un maillot de basketball à plus de 100 USD, pour un jeune groupe, il y a de quoi se poser des questions, non? Au final, Bad Wolves nous offre un premier album puissant, varié, qui s’écoute d’une traite avec plaisir. C’est un bon début.

SUICIDAL TENDENCIES: STill cyco punk after all these years

Crossover, USA (The Orchard, 2018) – Sortie le 7 septembre 2018

Pratiquement deux ans jour pour jour après la sortie de l’excellent World gone mad, Suicidal Tendencies revient avec STill cyco punk after all these years. ST en majuscule, détail qui a son importance. Pourquoi? Parce que si, à l’évidence, il s’agit d’un clin d’oeil aux initiales du groupe de Mike Muir, et que le mot en entier – « still » signifie « toujours » ou « encore » – le reste, en minuscules – « ill » donc – signifie « malade ». Alors le groupe est-il toujours cyco punk après toutes ces années ou au contraire ST est il malade, découragé de ce genre? Faut dire qu’avec les nombreux changements de line-up – Muir reste le seul membre originel du combo californien de Venice – ce ne serait guère étonnant. Une seule solution, cependant, pour trouver la réponse: écouter cet album. Et dès l’introductif I love destruction, le message est clair: le skate punk, ou plus simplement crossover des Américains fait mouche. On sent même une certaine joie et un vrai plaisir à se retrouver. Chacun des musiciens à son espace d’expression, à l’instar de Dave Lombardo qui se lâche littéralement sur All kinda crazy dès que son tour est annoncé. Lost my brain… once again fait évidemment référence à l’album que Mike Muir a enregistré sous le patronyme de Cyco Miko en 1996. Et là, je me dis (les fans de longue date, que je ne suis pas, auront vite fait le lien): « oui mais… attends, y a un truc ». Et en effet, ce STill cyco punk ressemble à s’y méprendre à un réenregistrement dudit Lost my brain, l’ordonnancement des titres variant quelque peu. Seul Sippin’ from the insanitea ne figure pas sur l’album de 1996. Alors si ST est en forme, j’en reviens à ma question: doit-on traduire le titre de cet album par « toujours en forme » ou « ST malade »?

TURBOWOLF: The free life

Hard rock psyché et déjanté, Royaume-Uni (So recordings, 2018)

Il y a quelques mois, nous sommes allés à la rencontre de Chris, le chanteur de Turbowolf, afin de discuter de ce nouvel album, paru juste avant l’été (cf. interview). Le titre de ce disque, The free life, résume parfaitement l’esprit des Anglais qui ne s’imposent ici aucune limite. Ils explorent d’improbables sonorités, puisent dans le psyché des années 70, le heavy de la même période, s’inspirent des Hawkwind, Black Sabbath et imposent leur propre style à ce mélange original. No no no, Capital X, Cheap magic proposent d’hallucinantes guitares saturées, une énergie rythmique explosive que l’on retrouve tout au long des 11 titres du disque. Bien sûr, on a l’impression de faire un voyage dans le temps, trois ou quatre décennies en arrière, mais comment résister à l’efficacité de ces Half secret, un peu disco, Domino (rien à voir avec le morceau de Kiss) ou Blackhole? Le morceau titre, avant dernier du disque, est proche du doom tant il est lent et lourd, mais évolue vers un speed quasi incontrôlable et hypnotique. Alors pour peu qu’on aime les guitares toujours saturées, les ambiances à la fois oldies et modernes, les inspirations bruitistes, on se penchera sur ce disue hors du temps et intriguant.