Interview : TRANK

Interview TRANK. Entretien le 30 mai 2025 avec Michel André Jouveaux (chant)

Après une première rencontre avec le quatuor au complet pour parler de la sortie de The ropes, le premier album de Trank, puis un entretien avec Johann, leur batteur, fin 2021pour échanger au sujet de la version deluxe dudit album, c’est aujourd’hui avec Michel, l’intarrissable chanteur, que nous parlons (entres autres sujets) du second album, The maze, et de sa sortie en version vinyle. Il en a des choses à raconter!

The ropes remonte à fin 2020. Depuis, The maze est sorti fin 2024 ; quels retours en avez-vous eus ?

Les chroniques ont été très flatteuses jusqu’ici, toutes… Après, j’imagine qu’il y a des gens qui ont écouté cet album, l’ont trouvé tellement nul qu’ils n’ont pas voulu écrire à son sujet, mais on a eu des chroniques extraordinaires, et les chansons de l’album passent très bien sur scène, ce qui est un bon test pour nous. On passe beaucoup de temps à les peaufiner en studio – on est légèrement maniaques du son, de la production, on veut sortir des chansons dont on pense qu’elles sont les meilleures possible. Mais le but, c’est de les jouer sur scène. Les chroniques et l’accueil des chansons sur scène sont incroyablement positifs.

Si on se parle aujourd’hui, c’est parce que vous sortez maintenant une version vinyle de cet album. Déjà, pour The ropes, vous aviez sorti quelques mois plus tard, une version double de l’album avec un second CD de vos titres réarrangés par d’autres. Y a-t-il, avec cet album, des choses particulières ou doit-on arrêter maintenant cette interview ?

(Il explose de rire) C’est un vrai rêve de gosses pour nous ! Deux d’entre-nous sommes très fans du format vinyle… On aurait déjà voulu le faire pour The ropes, mais c’était un peu compliqué pour plein de raisons, pour la supervision… The ropes, c’est un album de 52’, qui est une durée batarde. Si on met plus de 44, 45’ sur un vinyle, la qualité du son s’en ressent vraiment. Au-delà de 50’, la dynamique est bâclée, le volume général est assez bas…

Et c’est trop court pour faire un double…

Voilà, et faire un double, ça coute deux fois plus cher. Ou alors, il fallait qu’on retire une chanson ou deux mais c’est comme te demander lequel de tes enfants tu veux mettre sur EBay ! A l’époque, on avait discuté et la sortie du vinyle n’était pas une priorité. Il y a beaucoup d’artistes, d’ingé sons… qui sont venus nous voir en nous disant qu’ils voudraient bien remixer tel ou tel morceau, en faire autre chose, de l’électro, de l’indus. On a priorisé ça et on a laissé tomber le vinyle, ce qui pour moi était un crève-cœur, mais il faut faire des choix. Du coup, quand on a attaqué ce nouvel album, je leur ai dit : « Ok, les mecs, mais on fait 44’ maximum ! Comme ça, on pourra faire le vinyle ! » (rires) Ça a entrainé un processus de sélection d’autant plus brutal pour savoir quels titres se retrouveraient sur l’album mais ça nous a permis de le sortir en vinyle. On en est très contents, d’autant plus qu’on a été très bien entourés pour la sortie de cet album, en particulier par Andy Van deck qui a fait le mastering. Il travaille à New York, il est très réputé en matière de mastering – il s’occupait notamment de celui de Porcupine Tree avant que ce soit Steven Wilson qu’i s’en occupe lui-même. Il est aussi réputé pour la qualité de ses mastering pour des albums vinyles, et quand il a masterisé l’album, il l’a fait en plusieurs versions : une version CD, une version plus haut débit pour le numérique, et une version pour le vinyle. La raison pour laquelle le vinyle sort un peu plus tard que le CD, c’est qu’on voulait aussi qu’il soit pressé dans une usine où on avait une garantie de qualité sur le résultat final. Les usines capables de très bien presser, il n’y en a que deux en Europe. Elles ont des listes d’attente assez longues, mais on espère que quand les gens vont écouter l’album, ils se diront que ça valait vraiment le coup d’attendre.

Encore faut-il avoir le matériel pour écouter le vinyle dans de bonnes conditions…              

C’est vrai, il vaut mieux avoir une bonne platine… L’intérêt du vinyle, il est là, sans passer par une numérisation du son qui ruine tout. Brancher un vinyle sur une enceinte connectée, non, ça marche pas, c’est un peu comme mettre un moteur de deux chevaux dans une Ferrari…

On n’avait pas eu l’occasion de discuter à la sortie de The maze, alors comment décrirais-tu la musique de Trank à quelqu’un qui ne vous connais pas encore ?

Oh, c’est la question la plus difficile… On a déjà du mal à la décrire nous-mêmes…

Je me rappelle que dans votre communiqué de presse de The ropes, vous aviez mentionné le fait que Deep Purple disait que s’ils se formait aujourd’hui, ils sonneraient comme Trank…

C’est vrai, ils avaient dit ça, c’est extraordinairement flatteur. Après… Je ne suis pas trop certain de savoir ce qu’ils voulaient dire par là (rires), mais ça nous a fait très plaisir. Du coup, ça nous a aussi mis la pression parce que dans le même communiqué, ils disaient à leur public de venir à l’heure, « on les a choisis, ils sont bien ». Donc, on s’est pointés, et là où d’habitude, en tant que première partie, tu commence à jouer avec une salle à moitié vide qui se remplit quand tu joues, on est monté sur scène à la Riga Arena, et la salle était blindée avec 16.000 personnes ! Des gens qui étaient là, les bras croisés, genre « vas-y, montre-moi ce que tu fais, on est venus pour ça… » Heureusement, ça s’est bien passé mais ils nous avaient bien mis la pression quand même (rires).

Revenons à ma question : comment tu décrirais la musique de Trank ?

La plaisanterie qu’on faisait au début, c’est de dire que c’est un peu comme si Soundgarden et Depeche Mode faisaient un bébé. Mais c’est un peu ça, il y a une base hard rock assez typée 90’s qu’on trouve dans la plupart des morceaux, avec une colonne vertébrale axée sur un gros riff, et des choses plus proche du rock alternatif, façon Muse des grandes années. Il y a cette base qui se mélange avec une influence post punk. Je suis le plus grand fan de Depeche Mode parmi les gens que je connais, et, forcément, ça s’entend, dans la façon d’utiliser l’électronique, par exemple. Là où les deux références se retrouvent, c’est dans ce qu’on trouve intéressant chez eux, cette capacité à composer de la musique avec une certaine noirceur et un côté très accrocheur et entrainant qui fait que tu rentre dedans immédiatement. Et ça, ça nous parle. A l’époque de The ropes, un chroniqueur avait commencé sa chronique en écrivant « gros son et émotions fortes », et ça nous va complètement. On ne fait pas de la musique extrême, avec du bruit non stop et des hurlements continus, on aime l’idée de susciter de l’émotion chez les gens. Le travail sur le son aussi est important. Mélanger des parties de guitares qui alternent entre une forme de puissance et une richesse de textures, d’ampleur d’atmosphère, avec de l’électronique va amplifier le côté « cinématographique » de la musique. Le fait d’avoir une rythmique basse batterie apporte aussi cette puissance et ces nuances. Johann, notre batteur, c’est le fan ultime de Toto, et a priori, tu ne va pas trouver cette référence chez la plupart des batteurs de metal ou de hard rock, souvent plus dans un style « tape-dur ». Cette étiquette de « gros son émotions fortes », ça nous va bien. Quand tu lis les chroniques de l’album, on cite un nombre de références incroyable. Certains ont parlé de A Perfect Circle, Nine Inch Nails, Disturbed, dont on avait aussi fait la première partie… Tout un tas de noms très flatteur, et ce que tous ces noms ont en commun, c’est une certaine façon de combiner une énergie intense avec une mélodie tout de suite accrocheuse. L’identité de Trank, c’est un peu ça.

On est d’accord que Trank ne se contente pas d’un style et puise dans de nombreuses références (il acquiesce). Si tu devais ne retenir qu’un seul titre de The maze pour définir ce que Trank est aujourd’hui, ce serait lequel ?

C’est une très bonne question ! Comme ça, au débotté, je te dirais Miracle cure qui est une chanson qui résume pas mal la personnalité du groupe. Pour moi, c’est peut-être celle qui nous résume le mieux, d’abord parce qu’elle a ce côté accrocheur et sombre, elle est sur un mid tempo assez lourd et elle mélange des moments de très forte intensité au niveau guitare et voix – on se rapproche du metal, souvent – avec des moments qui relèvent beaucoup plus d’une forme d’électro planante. Et puis, il y a un passage inattendu, qui marche très bien sur scène, c’est quasiment du rap. C’est plus de la parole rythmée que du chant. Le résultat donne quelque chose de très cohérent et qui, pour nous, sonne comme un mini film de 4 ou 5’. Il résume assez bien tous les contraste qu’on peut trouver dans notre musique.

Je reviens sur ce mot de « contrastes ». C’est quelque chose qu’on retrouve sur les deux versions de votre premier album (l’original est blanc, la seconde édition rouge et noire) que sur The maze avec ce labyrinthe sombre traversé par ce couloir de lumière.

La notion de contraste et de paradoxe dans la musique et dans l’image est très intéressante pour nous. J’aime beaucoup l’idée d’écrire des chansons qui vont traiter de sujets par définition assez lourds, mais de chercher transformer ce matériau en quelque chose qui permette d’établir une connexion avec les gens. Il y a un côté « alchimie » dans la musique que j’aime beaucoup. Même si on n’est pas tous angoissé au même niveau dans le groupe, àA un moment ou un autre, tu vas forcément plonger au tréfonds de ton estomac, ressortir une espèce de nappe de goudron a=et toutes les saloperies – la peur, la colère, l’angoisse, l’anxiété – et tu en ressors quelque chose de particulier, surtout dans le chant. Je me trouve très privilégié dans la mesure où je peux faire ça. Tu transformes, tu transmutes tes propres angoisses en quelque chose de positif, et c’est quelque chose que les gens ressentent, ce qui crée une connexion entre eux et toi. Ce contraste est au centre de tout. De manière générale, dans le contraste on trouve les nuances. On aurait tous 22 ans, on ferait la musique qui correspond à l’âge, on serait peut-être plus monolithique, monocorde ou monocouche. On est tous passés par là, et on recherche maintenant cette notion de contraste. Oui, elle est au cœur de tout ce qu’on fait.

On sait aujourd’hui qu’un groupe de rock, qui plus est français, ne vit pas, ou très difficilement de sa musique. Quelles sont vos métiers autres ?

On a des métiers très variés : David, qui est un gros costaud, fait de la sécurité privée, Johann fait du marketing dans une grosse société, ce qui était aussi mon cas jusqu’à il y a une dizaine d’’années, maintenant je suis indépendant, consultant en stratégie le jour et musicien la nuit, et j’ai aussi une boite de musique de pubs, ce qui fait que j’ai trois métiers ! Pas toujours facile à gérer… Emma, notre manageuse, travaille pour une concession automobile à Genève. Arnaud est informaticien et Nico est financier. On a tous des métiers, et des familles, et on considère Trank comme un métier… qui nous coûte de l’argent et qui est financé avec nos autres métiers ! On fait Trank par passion. La dernière chose qu’on veut entendre c’est « si voulez que ça se vende, que votre clip soit diffusé, il faut faire ci et ça ». on a la chance de pouvoir faire les choses comme on le veut sans avoir à se demander si ça va se vendre ou pas.

On en a vu des artistes qui se sont fourvoyés parce que leur management ou label leur disait quoi faire et le public n’a pas répondu présent… Trank c’est un groupe de rock. Le rock, c’est aussi la scène. A quoi faut-il s’attendre avec Trank en concert ? Va-t-on pouvoir vous voir un peu partout en France ?

Oui… On aime beaucoup jouer dans les festivals, on vient d’en enchainer trois d’affilée, et il y en a quelques-uns qui arrivent cet été. On y croise des gens qui sont exactement comme nous, des mordus qui font ça par passion, pas pour s’enrichir. On se retrouve à jouer pour des gens très demandeurs de musique. On aime beaucoup jouer dans ce contexte-là aussi parce que les gens qui organisent ces trucs deviennent rapidement des potes. On a le même virus, et ça crée des liens.

Mais en dehors des festivals, vous allez visiter les villes de France ? Il y a des gens qui se déplacent aussi en clubs…

Alors laisse-moi dire ceci : appel aux bookers et aux tourneurs ! Nous, on va là où on nous demande, la seule contrainte, c’est que maintenant, on est 6 sur scène. L’album, on l’a fait à trois, puisqu’on a eu un gros changement de line-up puisque Julien (guitare), avec qui j’avais cofondé le groupe a décidé de se consacrer à sa vie perso, le rythme de Trank n’était plus compatible avec sa vie. Il a participé à trois chansons sur l’album, mais on l’a fini sans lui. Mais maintenant, sur scène, on est six : Emma, notre manageuse, joue des claviers et s’occupe des samples, Arnaud, notre nouveau bassiste qui nous a été recommandé et qui partage à la fois notre éthique de travail, notre niveau d’exigence et notre sens de l’humour de débiles… et on a un second guitariste, Nico, qui était avec moi dans un groupe de reprise. On voulait un son plus étoffé sur scène, ce qui implique d’avoir deux guitares. Lui et David se répartissent les guitares, on n’a pas de lead ou de soliste, chacun joue en fonction de ce qui lui correspond le mieux. Donc on est six, et la logistique est forcément plus compliquée. Et on met un point d’honneur à essayer de répondre positivement à toutes les demandes, mais ce n’est pas toujours possible… Après, à quoi s’attendre ? Sur scène, la formule est proche de ce que tu trouves sur album, l’esprit musical ne change pas. Si sur album l’équilibre entre noirceur et lumière est de 60/40, sur scène, c’est l’inverse, l’intensité est là mais on communique beaucoup avec le public, on fait beaucoup participer les gens.

On parle de contraste, mais il y a aussi un point commun à vos deux albums qui entraine une question sur le prochain : ils commencent par l’article « The » (il rit). Le prochain va aussi commencer ainsi ?

C’est vrai ! Je ne sais pas… J’ai plaisanté l’autre jour en disant que le prochain s’appellera The end, comme ça il y aura « The » dedans et on aura encore une lettre en moins – cinq, quatre puis trois ! En fait, le titre de chaque album est venu du lien thématique qui unit la presque totalité des chansons. Un lien pas intentionnel, à la base. C’est moi qui écris les paroles, et je les écris à la fin. On travail un instrumental ensemble, que je laisse, comme en cuisine, « je réserve », quelques semaines ou jusqu’à 5 ans… A un moment, je ressors le morceau et je cherche dans mon bloc note l’idée qui pourrait coller, sur la rythmique ou autre. A partir de là, le texte et la mélodie vocale s’écrivent autour de ce thème. Pour les deux albums, au bout de cinq ou six chansons écrites, je me suis rendu compte qu’elles étaient liées par un thème commun. Dans The maze, c’est la quête de l’identité. C’est un thème qu’on retrouve partout, il y a une obsession identitaire, tant dans les discours de la gauche que de la droite, d’ailleurs, qui n’a jamais été aussi forte et, paradoxalement, il n’a jamais été aussi difficile de trouver sa propre identité et de l’affirmer. On reçoit tellement d’injonctions contradictoires qu’on ne sait plus où aller… on vit une époque où les gens doivent, ils ne sont pas encourager, ils sont forcés de se définir non pas en fonction de ce qu’ils font ou accomplissent, ce qu’ils créent, mais en fonction de qui ils sont, que ce soit une origine ethnique, réelle ou supposée, une appartenance religieuse, réelle ou supposée, un propos qui suffit à les définir « entièrement » et à les réduire dans l’esprit de gens qui sont les premiers à les juger et les condamner… Tu dois naviguer en permanence dans cette espèce de tir de barrage d’injonctions contradictoires sans vraiment jamais savoir ce qui va passer ou pas dans l’affirmation de ton identité. En plus de la pression naturelle imposée aux enfants et aux ados… The maze, c’est ça, ce labyrinthe intérieur et extérieur dans lequel on se trouve aujourd’hui avant de pouvoir répondre à cette question fondamentale : « qui suis-je ? » Elle est beaucoup plus complexe que cette vision simpliste, manichéenne, binaire – le mot qui tue ! – on met les gens dans des cases d’une manière simpliste, c’est effarant !

Quelle pourrait aujourd’hui être la devise de Trank ?

C’est une question, un exercice que j’aime bien qui m’évoque Depeche Mode qui, à une certaine époque prenait une phrase tirée de son contexte, issue d’une chanson et qui était imprimée en bas de la pochette et qui résumait un peu l’album… une devise pour Trank ? Il y en a plein de possible, celle qui me vient à l’esprit tournerait autour de – allez, je vais faire le vieux con – je vais citer Yoda : « fait ou ne fait pas ». On est très jusqu’au-boutistes dans le groupe, on est très exigeant sur notre façon de faire les choses. Être passionné c’est en soi une bonne chose. On vit dans un monde où il y a une sorte de fénéantise, d’apathie, un monde post téléréalité qui depuis 20 ans te montre que le meilleur truc à faire c’est de reste assis en espérant qu’une équipe de télé débarque pour démontrer à quel point tu es extraordinaire ! Pour nous, nous sommes tous des passionnés, l’idée c’est de faire ce que tu fais à fond.

As-tu quelque chose à rajouter avant de terminer ?

Oui, on parlait de la sortie de l’album en vinyle. S’il y a des gens intéressés, le meilleur moyen de se le procurer, c’est d’aller directement sur le site trankmusic.com. Je crois qu’il reste aussi quelques copies du premier album, plus beaucoup, mais il en reste. On parlait de passion il y a deux minutes, et je crois que, ce qu’i y a de plus gratifiant pour nous, en studio ou sur scène, c’est qu’on rencontre des gens aussi mordus que nous. La musique n’est plus le phénomène de masse culturel que c’était quand on était gosses, et ça fait d’autant plus plaisir de connecter avec des gens qui écoutent notre musique. C’est une des choses les plus incroyables et on a vraiment le privilège de faire ce qu’on fait !

Interview: STRATAGEME

Interview STRATAGEME. Entretien le 5 avril 2025 avec Butcho (chant) et Gérard (basse)

Stratagème 2025

Butcho, tu es le « petit nouveau du groupe » puisque tu es le dernier arrivé. Qu’est-ce qui t’a amené à intégrer Stratagème ?

B : C’est eux qui m’ont contacté. Je n’avais plus de groupe, et je connaissais Stratagème de nom, mais je n’avais pas vraiment écouté ce qu’ils font. Je me suis un peu penché sur leur discographie et j’ai trouvé ça vraiment super. Je ne comprends pas comment j’ai pu passer à côté… Super solos de guitares, super mélodies… Je me suis dit « waow, je veux faire partie de ce groupe ! »

Stratagème a été formé en 1970, a une courte discographie, seulement trois albums dont le premier est sorti en 2013…

G : C’est ça, mais ce n’est pas tout à fait exact. Le groupe est né en 1970 mais pendant plusieurs années, on avait un chanteur de folk/variété. Au départ, j’étais chanteur de Stratagème, pas bassiste. On était deux chanteurs : il y avait Robert Belmonte, le chanteur d’Océan, et moi. Au bout d’un an, Robert a souhaité faire une autre carrière qu’avec Stratagème. Moi, j’ai rencontré une personne, Patrick Abrial, en 1975…

Un lien avec Thibault ?

G : Voilà. Avec lui, on a fait deux albums : Abrial Stratagème group, chez Sonopress, et un second, au château d’Hérouville, en 1979. Il y a eu un troisième album, avec Thibault Abrial à la guitare avant qu’il ne joue pour Halliday.

Ce n’était donc pas encore tout à fait Stratagème…

G : C’était Abrial Stratagème, pas tout à fait Stratagème, mais il avait une certaine notoriété et c’était normal qu’on mette son nom en avant. Le dernier album date de 1982, chez CBS.

Il y a un très long gap entre 19882 et votre retour au début des années 2010…

G : Oui. J’ai arrêté Stratagème parce que, en 1984/85, on avait de grosses conditions de travail avec CBS derrière nous. Grosse tournée avec tout ce qu’il fallait, mais finalement Patrick a souhaité arrêter. Donc, en 1985, j’ai mis Stratagème au repos, parce qu’il fallait bien gagner sa croûte. J’ai fait un autre métier en parallèle. J’ai repris la musique en 2007/2008. Entre 85 et 2008, il s’est passé pas loin de 25 ans, j’ai passé un brevet d’État de coach sportif. En 2008, l’ancien guitariste de Stratagème est venu me voir, me proposant de refaire Stratagème, « comme ça, pour se marrer ». Le problème, c’est que quand tu remets le doigt là-dedans… Lui n’a pas pu continuer pour des problèmes de santé, alors j’ai pris Philippe Kalfon comme guitariste, et avec lui on a un peu parcouru la France pendant onze années. On a arrêté juste avant le Covid. J’ai eu des problèmes de santé qui nous ont poussés à arrêter…

Butcho, tu es arrivé quand ?

B : Il y a un an et demi.

Comment est-ce que, l’un et l’autre, vous décrirez la musique de Stratagème à quelqu’un qui ne connait pas le groupe ?

B : Je dirai que c’est du hard rock classique, avec des mélodies, des guitares. On n’a rien inventé mais on le fait avec cœur. Je me mets toujours à la place des spectateurs qui viennent en concert : qu’est-ce qu’ils voudraient entendre et que chanter pour les faire chanter ? Le plus important, c’est de faire participer le public, et c’est ce qu’on fait !

G : Je rejoins ce qu’a dit Butcho… Ce qui est intéressant dans ce nouveau Stratagème, avec Butcho mais aussi avec les deux guitaristes qui sont beaucoup plus jeunes, c’est qu’ils amènent ce côté un peu moderne, metal dans une musique traditionnelle « hard rock années 80 ». L’avantage, aussi, c’est d’avoir une personne comme Butcho – je ne le dis pas parce qu’il est là – c’est quelqu’un qui échange beaucoup avec le public, le fait participer, et je trouve que c’est vraiment intéressant.

B : C’est ça, en fait… Quand je vois des groupes qui sont scène en mode stress, derrière leurs instruments ou qui se prennent un peu trop au sérieux, ça me fait rire parce que ce n’est que de la musique, c’est un partage. Je me sens privilégié de faire de la musique parce que la musique, ça appartient à tout le monde. Une fois qu’on a créé les morceaux, ils ne nous appartiennent plus, c’est à tout le monde. C’est pour ça que j’aime communiquer, qu’il y ait un véritable échange, et les gens le ressentent quand je suis sur scène… Je m’éclate vraiment, tout le monde s’éclate, je ne me prends pas au sérieux. Même à l’époque de mon ancien groupe, Watcha, je ne me suis jamais pris au sérieux, je me suis toujours amusé. Je ne me prends jamais au sérieux, ce n’est que de la musique. La musique, c’est de l’amour, du partage…

Ce soir, avec Stratagème sur scène, il faut s’attendre à quoi ?

B : Nous, on a fait des concerts dans des conditions vraiment difficile, avec très peu de gens mais on s’est vraiment amusés. Ça ne fait pas de différence, qu’il y ait une personne ou 10.000, c’est pareil, on se donne à fond, avec cœur, et on s’éclate ! On va pas faire la gueule pour les gens qui ne sont pas venus, on s’en fout, ils ne sont pas là !

G : Ce qui est paradoxal, c’est qu’on a fait en septembre le festival de Mennecy. On est passés en milieu d’après-midi, et Butcho, et Stratagème, s’est mis le public dans la poche, malgré la présence de groupes comme ADX.

ADX connait souvent un regain de jeunesse avec ses changements de line-up…

B : Oui, ils ne sont que deux d’origine, dans ADX, le chanteur et le batteur…

Le public metal peut être très exclusif, mais il est aussi très ouvert.

B : Très ouvert, et tu sais quoi, dans le dernier Ep, on a fait une reprise de Celebration de Kool and the Gang en version metal. On voyait tous ces mecs avec des t-shirts de death metal ou de thrash chanter Celebration avec le sourire en plus !

Ça ne marche pas toujours… on se souvient d’un certain Metallica reprenant L’aventurier d’Indochine, le public a chanté mais ce n’était pas ça…

B : Oui, maintenant Indochine n’a rien à prouver. Je voudrais bien avoir leur public, qui est le meilleur public au monde. Je suis allé les voir deux ou trois fois, le public est fidèle, ils sont toujours là, que ça aille bien ou mal, le public est là. Je dis au public d’Indochine : « Respect »… Vraiment. Après on peut critiquer Indochine…

Si on revenait à Stratagème, plutôt ? Parlons de votre discographie : L’avant dernier album est sorti en 2017, c’est ça ?

G : Alors, c’est un peu particulier. Oui… Non… En 2013, il y a eu notre album du retour, en 2018, Memories, comme le Covid est arrivé, il n’y a pas eu de promo sur cet album toujours avec Philippe Kalfon (note de MP : il doit y avoir une confusion sur les dates, la crise sanitaire ayant débuté en 2020…). Un troisième album est sorti, Never stop, avec le batteur d’origine de Stratagème, c’est lui qui avait créé Stratagème, Michel Laplanche, qui fait partie de FTF music et qui s’occupe un peu de Stratagème maintenant. Il m’avait dit que ce serait bien de sortir un dernier album, et avec mon ami Jean-Pierre Paulet, on avait déjà quelques titres de prêts. On lui a dit qu’on avait du matériel, tout ce qu’il faut, qu’on pouvait sortir un album et que ce n’est jamais fini. Moi, je voulais arrêter parce que, bon… Problèmes de santé, je tiens plus debout, je vois plus rien… Il y a des choses qui ne me convenaient pas : le batteur était trop vieux, le guitariste, ça n’allait pas, le chanteur habitait dans les Ardennes… C’était compliqué. Quand j’ai rencontré Pat Cazu, l’actuel batteur, il m’a dit connaitre un guitariste avec qui il avait joué pendant 10 ans, Marc de Lajoncquière. Il nous a présentés, et je suis tombé sur le cul. Il nous en a présenté un second, Sébastien, et pareil…C’est des pointures, un excellent niveau !

Et comment as-tu rencontré Butcho ?

G : Oh, Butcho, je l’ai rencontré plusieurs fois, on se croisait dans les concerts, on en a fait quelques-uns ensemble… Je le connaissais… Pas intimement, mais…

Après, intimement ou pas, ça vous regarde ! (rire général)

G : Ouais… Après, il est rentré dans Last Temptation, avec Farid Medjane – il faut savoir que j’ai joué deux ans avec Farid dans un groupe qui s’appelle TNT. Un jour, alors qu’ils étaient en tournée avec Scorpions, il m’appelle, ils étaient dans le car et il me dit que Butcho est avec lui. Il me l’a passé, on a discuté, et finalement… Je lui avais déjà proposé de rejoindre Stratagème, il ne pouvait pas et un jour, je le rappelle, je lui redemande et il me dit « oui, pourquoi pas, on essaye ». Tout arrive au bon moment.

Comment, en dehors de tous ces changements de line-up, est ce que l’un et l’autre vous analyseriez l’évolution de Stratagème entre ses deux derniers disques ?

B : En travaille sur le mini Lp, je voulais quand même qu’il y ait les racines des deux albums post Abrial. Qu’on garde l’esprit hard rock mais avec une touche moderne – tout le monde veut apporter son petit quelque chose dans les compositions. Chacun met sa patte, ca ne sera jamais comme « l’ancien » Stratagème, mais on en garde l’esprit.

G : On veut garder les racines de Stratagème, mais on a l’apport de ces deux guitaristes. L’un d’eux est fan de Megadeth, et, naturellement, ça change énormément de choses dans la couleur de notre musique. Le second est beaucoup plus bluesy. C’est un grand musicien, il est premier basson dans le plus grand orchestre philarmonique de Paris. Le hard rock, c’est son kiff ! Il amène ce côté très blues, très bizarre !

B : Je dirai qu’il apporte ses influences, très Guns ‘n’Roses, Myles Kennedy, ce genre de chose…

Butcho, toi, je t’ai toujours connu avec plein de projets, que ce soit Showtime, groupe de reprise des années 80, Last Temptation plus récemment et tout à l’heure, tu me parlais de ton groupe tribute à Scorpions. Il s’appelle comment ?

B : Il s’appelle Scorpians, avec un A.

Qu’a-t-il de particulier, ce groupe ?

B : On voulait faire un vrai tribute à l’américaine, avec les mêmes instruments, les mêmes fringues… On s’est vraiment fait cheir à faire les fringues nous-mêmes, mais on voulait vraiment restituer dans le détail la tournée de 1985. D’ailleurs, on reprend les mêmes structures que sur World Wide Live, on reprend jusqu’aux chorégraphies…

Même les pyramides humaines ?

B : Les pyramides et le reste, il y aura tout !

On a des chances de vous voir tourner un peu partout ?

B : Pour l’instant, non, pas partout. On cherche un bon booker, et la première date sera à Mazingarbe, dans le Nord, le 20 juin. Ce sera ne date test, la première de Scorpians. C’est vraiment pour le fun, on fait en sorte de le faire bien.

Comment avez-vous été invités à ce concert,ce soir ?

G : C’est quand FTF a publié la dernière video de Stratagème… Chris Danacker (président de l’asso Crick for Zik et organisateur du Crick Fest) l’a vue, il a appelé FTF et il leur a dit qu’il voulait absolument Stratagème pour cette édition. Tout simplement… J’avais entendu parler du festival, Sortilège, que je connais bien, avait fait salle comble l’année dernière. Je me suis dit que si Sortilège avait joué ici, ça devrait le faire. On a quelques projets avec Chris, j’apprécie beaucoup sa façon de travailler et de penser…

Interview HEADCHARGER

Interview HEADCHARGER : entretien avec Romain Neveu (basse) le 8 mai 2025

Headcharger 2025

Juste avant qu’on ne parle de votre actualité, je voudrais que l’on revienne quelques années en arrière. Comme tout le monde, vous avez subi la crise sanitaire, Hexagram était sorti en 2017 et, en 2021, est arrivé Rise from the ashes. Avez-vous utilisé la période de crise sanitaire, d’enfermement et de restrictions pour peaufiner cet avant dernier album.

C’est exactement l’idée… De plus, juste avant la crise sanitaire, notre batteur a préféré arrêter, et notre guitariste aussi. Ce n’est pas évident de gérer la vie de musicien et la vie de famille… Sont ensuite arrivés Antoine (Cadot) à la batterie et David (Vallée) à la guitare – un autre David, c’est le prénom de nos deux guitaristes…

C’est un critère aujourd’hui ?

(Rires) De s’appeler David ? C’est très important, oui, il faut s’appeler David à la guitare ! On avait commencé à bosser et là, pouf, le couperet tombe. On sait que ça va être difficile de bosser sur les concerts, etc, mais finalement, on l’a plutôt pas mal vécu parce que, malgré ce petit mois où on a tous été bloqués, on a eu des dérogations grâce à notre tourneur pour pouvoir répéter. Finalement, pendant ce mois et demi, on s’est envoyés beaucoup de fichiers, ce que la technologie permet aujourd’hui, et Rise from the ashes est né comme ça. On a beaucoup bossé les morceaux en amont, on avait le temps. La seule chose qui est dommage, même si on avait des dérogations pour pouvoir répéter, c’est que c’est un album qui a plutôt été fait sur internet et assez peu en live. Ce qui fait qu’on n’a pas pu vraiment bien se connaitre musicalement, même si on se connait depuis très longtemps, jouer ensemble c’est autre chose : il fallait trouver les bons réflexes et des trucs comme ça.

C’est aussi une autre façon d’aborder votre travail…

Oui, c’est sûr. Après on travaille beaucoup dans l’optique du live, on se retrouve dans notre petit local de 15m² et on joue beaucoup là-dessus pour se préparer. Là, on n’a pas eu le choix, mais ça a bien marché, c’est un album dont on est super contents même si on n’a pas pu le défendre sur scène. La reprise a été longue, mais à côté de ça, la période a été super productive. On était chez nous, qu’est-ce qu’on avait à faire ? Nous occuper de nos enfants, de nos familles, mais on avait du temps pour la musique. L’interaction du live nous a manqué mais globalement, ça n’a pas été une mauvaise période.

Le titre de l’album était pensé avant ? Rise from the ashes fait évidemment penser au phénix qui renait de ses cendres…

Exactement, c’était ça l’idée. Globalement, on a composé les morceaux et avant la sortie on s’est demandé comment l’appeler, cet album. Il y avait un morceau, Rise from the ashes, qui a la base ne s’appelait pas du tout comme ça mais dont les paroles coïncidaient avec ces choses – tomber très bas puis remonter. C’est David, « Babou », le guitariste d’origine du groupe qui l’a suggéré, et, en fait, ça tombe bien. L’idée collait vraiment avec la période, et les paroles sont liées au fait que Sébastien, notre chanteur, avait eu pas mal de soucis dans sa vie personnelle et c’était une manière de remonter. Ce n’était pas qu’un clin d’œil.

Un an après, je vous ai vus au Hellfest sur la Mainstage 1, en plein jour. Quels souvenirs gardes-tu de ce concert ?

C’était complètement incroyable… On l’avait déjà fait en 2011… Le seul truc c’est qu’à chaque fois qu’on est invités au Hellfest, c’est en dernière minute, en remplacement de quelqu’un… Mais ça fait super plaisir quand tu reçois un message de Ben Barbaud qui te dis que tel groupe a annulé, « ça vous dit de jouer sur la main à telle heure ? », tu ne dis pas non parce que c’est une telle opportunité. Et c’est un concert de plus… avec un peu plus de monde qu’en temps normal… C’était une expérience de oufs.

Moi, je vous ai trouvés un petit peu perdu sur cette grande scène… Je n’ai pas senti un Headcharger au top de sa forme…

Je te dirai qu’on s’est donné comme on le fait à chaque concert, mais c’est vrai que la scène est gigantesque, que le snakepit n’était pas très fun… Là où d’habitude tu as 3 ou 4 mètres qui te séparent du public, avec les crash, là on est beaucoup plus loin. Mais on l’a vécu comme une belle date. Evidemment, devant 30.000 personnes, ça change la donne, sur une scène de plus de 20 mètres… C’est aussi pour ça qu’on a joué serrés, comme dans une sorte de club.

Mais ce n’est ni un club ni tout à fait le Hellfest de 2011…

Non, mais on aime jouer. Tout le stress était la journée d’avant. Quand on est arrivés sur scène pour les balances, on a fait ce qu’on sait faire : du rock. On a joué comme on le fait toujours, que ce soit devant 50 personnes, 300 ou 6000.

Après, ce sont aussi des impressions différentes liées au point de vue : vous êtes sur scène, je suis devant, vous jouez, je fais des photos…

Evidemment. Là, on avait fait venir toute l’équipe technique qui nous suit depuis toujours, notre éclairagiste, notre sondier de face, celui des retours… En plein jour, c’est pas évident, on a quelques lumières qui scintillent, ça fait un peu plat… On aurait joué en pleine nuit, le ressenti aurait été différent, mais c’était un moment plaisant, vraiment !

Parlons maintenant de votre actualité : Sway, votre dernier album, est sorti en septembre 2024. Quels sont les retours que vous en avez eus ?

Ecoute, on a eu plein de bons retours ! Et même nous, on a eu le temps de se redécouvrir en tant que groupe pendant cette période, et ça, c’est hyper cool parce qu’on a beaucoup plus répété ensemble, on a pu travailler les arrangements. En répète, il se passe des choses, quand tu es devant un ordi, c’est différent…

Déjà, il y a l’interaction humaine.

Absolument, après, c’est bien, aussi, d’avoir déjà une base de morceaux que tu as travaillés pour la jouer en live. Si tu n’as rien, tu as un peu « ah, tiens… on compose aujourd’hui ? Euh… comment on fait ? », alors que là, on a déjà quelque chose. Ce qui a été vachement bien perçu, c’est qu’on a pu en quelques sortes synthétiser nos 20 ans de vie du groupe, depuis les prémices en 2005 (avec Doggystyle) qui étaient très hardcore à aujourd’hui, plus rock. Petite info, le prochain album… On commence à en parler et il y aura du hardcore, du scream, aussi, le côté un peu rock, on va encore essayer de faire cette petite sauce. Mais du coup, Sway a été bien reçu, là où on a peut-être pu dérouter certaines personnes avec Rise from the ashes sur lequel on est sans doute un peu trop allés dans le rock. Le stoner a toujours été plus ou moins là, et là, on a réussi à remixer le tout…

Il y a autre chose, une grande différence que les amateurs ont pu noter : dans le chant de Sébastien, il y avait du scream, de la rage, qui a disparu sur Hexagram…

… Sur Hexagram, il y avait zéro scream, et quasiment pas sur Black diamond snake.

Et là, ça revient. Qu’est-ce qui vous donné envie de revenir à ce côté plus hardcore ?

En fait, c’est marrant : c’est les deux nouveaux, Antoine et Dav’. Ceux qui écoute du hardcore, c’est beaucoup moi, je suis même plutôt le seul, mais david aussi, post hardcore… Mais Antoine, lui, écoute peu de metal, il est plutôt dans des styles « classic rock » et des choses complètement différentes. Mais les deux nous ont dit que Headcharger, c’est aussi ça, ce rouleau compresseur enragé. Ils ont été les premiers à inciter Seb à regueuler, parce que c’est aussi ça, l’essence du groupe. Pour ceux qui nous connaissent depuis avant Hexagram, ils le savent que c’est nous…

On sentait déjà le changement venir avec Slow motion disease…

Ouais, Slow motion avait effectivement pas mal entamé ça. Je ne vais pas te dire qu’on s’est perdus, mais ce coté chanté et screamé, ce côté lourd avec de gros riffs, ce côté planant, c’est l’esprit de Headcharger. Donc pour le prochain, on s’est dit qu’il nous fallait quelque chose de bien burné mais pas que. Si c’est trop burné tout le temps, ça te lasse. Il faut varier les plaisirs, tu le verras ce soir, il y a des moments speeds, d’autres lourds, plus calmes. C’est ce qu’on aime.

Comment analyses-tu l’évolutions de Headcharger entre Rise from the ashes et Sway ? Il y a déjà deux choses dont tu as parlé, le fait que vous avez pu travailler ensemble et mieux vous connaitre humainement…

Oui, en tant que musiciens…

Et le côté qu’on vient d’aborder sur le retour des parties plus gueulées. Mais en dehors de ça, en quoi Headcharger a-t-il évolué ?

Déjà, on a évolué parce qu’on devient de meilleurs musiciens au fil des albums. On sait ce qui va marcher ou pas, et je pense que c’est la base d’un groupe. A la base, on est des copains, et on a grandi ensemble, du coup, on découvre ensemble quelles sont les limites, comment on peut aller plus loin. Entre ces deux albums, on a deux personnes qui « sont encore fraiches », qu’on connait depuis toujours et il y a de l’émulation, on a envie de faire de nouveaux trucs. Tu parlais de Slow motion disease, si on avait eu un peu plus de temps pour le faire, on aurait pu pousser certaines choses. Black diamoind snake a été un poil trop vite fait, aussi. Il le fallait, il y avait des demandes du label à l’époque. Mais ce qu’on apprécie toujours, c’est qu’on avance toujours. On ne se pose pas de limites : le fait d’avoir deux nouvelles personnes apporte de nouvelles idées, d’autres influences, de la fraicheur… et c’est comme ça qu’on a évolué. Il ya quelque chose de plus naturel sur Sway et Rise from the ashes, on a trouvé une autre manière de fonctionner. Et notre autre « routine » – qui n’en est pas une – c’est qu’on expérimente d’autres choses. On sait qu’il y a une sorte de cahier des charges Headcharger, mais on expérimente. Sur Sway, le morceau le plus calme, Against the storm fait très années 90 – le côté grunge, c’est ce qui nous lie – et ce morceau monte en puissance. Le dernier morceau, Obsessed, commence comme une comptine. On voulait quelque chose qui commence gentiment. A la base, quand je l’ai composé, il été vénère du début à la fin, mais on a rajouté cette guitare acoustique, un peu de chant enfantin et à la fin, c’est une grosse dévastation sonore ! Souvent quand on compose, on se laisse porter : j’ai une idée, les gars en ont d’autres et on voit ce que ça donne. On a toujours fonctionné comme ça.

Et on arrive au consensus…

C’est ça, et chez nous, la notion de consensus est hyper importante. On dépend les uns des autres…

Justement, un album c’est un travail d’équipe où chacun apporte sa personnalité. Qu’y a-t-il de toi dans Sway ?

Ce qu’il y a de moi dans Sway ? Eh ben… beaucoup de chose, parce qu’il n’y a pas que la musique, il y a aussi l’investissement, pour que le groupe continue à vivre. Mais si on parle de musique… C’est tout, on s’investit tous et chacun a un domaine où il excelle… Je ne suis pas le plus aguerri des musiciens, les plus aguerris…

Je parle de toi, pas des autres !

Moi, ce que j’y ai mis, c’est des compos. Comme je viens du hardcore, je fais des trucs assez basiques, après, c’est avec Babou qu’on rebosse, il remanie tout avec une oreille de guitariste. Je ramène une partie des morceaux, de la passion, je suis peut-être le mec le plus positif de la planète ! Globalement, j’ai tendance à … J’ai commencé à 14 ans avec Seb, après j’ai fait du booking et d’autres choses, mais j’ai envie que le projet continue parce qu’il y a toujours des trucs cools. Mais on l’amène tous cette passion, sinon on aurait arrêté depuis longtemps…

Headcharger aujourd’hui, ne vit pas de sa musique. Quelles sont vos activités annexes ?

On ne vit pas de notre musique mais on vit de la musique. Il faut que les gens comprennent que tu as beau faire 40 dates par an, ce qui n’est pas énorme, ça ne suffit pas pour faire une intermittence. On est tous intermittents du spectacle, les autres ne font que de la musique, ils ont d’autres projets musicaux qui leur permettent de tourner l’été. Les « anciens », on est aussi techniciens à côté, on bosse en théâtre, en festoches, dans des Zénith, on est techniciens plateau, backliner…

Vous travaillez tous autour du spectacle donc.

Oui, on ne pourrait pas faire tout ça autrement. On a fait le choix de l’intermittence, et, il faut le souligner : en France, on a la chance d’avoir ça – pourvu que ça dure ! On est peut-être encore plus dans la technique que dans la musique, mais on arrive maintenant à avoir des cachets à chaque concert qu’on fait. On n’est pas milliardaires, je le précise…

Il y a aussi une différence entre milliardaire et millionnaire…

Oui, c’est ça (rires). On n’est pas « dix millaires », si je peu dire ça. On arrive à s’en sortir, on a cette chance. On arrive quand même à faire pas mal de dates et bosser comme il faut.

Si tu devais ne retenir qu’un titre de Sway pour expliquer au public ce qu’est l’esprit de Headcharger aujourd’hui, ce serait lequel ?

Sur Sway… Je dirais peut-être Against the storm. Il a beau être le morceau le plus calme, il démarre calmement et il monte en puissance. Headcharger, c’est ça, on aime bien jouer sur les nuances, envoyer le boulet tout d’un coup, mais on aime aussi quand ça retombe. Against the storm, c’est un peu cet esprit, c’est un morceau assez typique de Headcharger. Un concert de Headcharger, c’est ça : des morceaux qui t’en mettent plein la gueule, et après, on te réécrase avec un morceau plus lourd, plus posé.

Si aujourd’hui tu devais – « devais », pas « pouvais » – réenregistrer un album de Headcharger avec le line-up actuel, ce serait quel album ?

Certainement Black diamond snake, qui était une sorte de transition un peu rock un peu stoner, et qui avait encore une base de Headcharger. Mais il manque des choses. Je pense que ce serait celui-là, oui.

Quelle pourrait être la devise de Headcharger aujourd’hui ?

Se faire plaisir ! S’il n’y a pas de plaisir, on n’est plus là… La musique c’est ça : continuer à faire de la musique et se faire plaisir. Être connu ? On s’en bat la rate, ça fait 20 ans qu’on fait ça, et on va continuer. Si les gens sont là, tant mieux, sinon, tant pis, nous on continuera de se faire plaisir !

As-tu quelque chose à rajouter ? On se retrouve de toutes façons pour le concert tout à l’heure…

Simplement merci à toi, merci de nous suivre depuis toutes ces années, merci aux gens qui nous suivent et nous soutiennent. On est un groupe qui aime bien remercier (rires). C’est une belle histoire de vie !

Interview: HELM

Photo promo
Photo promo

Interview Helm. Entretien le 3 mars 2025 avec Boris (chant) et Fabien (basse)

Je découvre Helm avec votre Ep, Reflets irisés. Pour commencer, pouvez-vous me raconter l’histoire de Helm ?

B : Nous sommes 4 dans le groupe, Fabien et moi, ainsi que Théo à la guitare et Baptiste, le batteur. On s’est rencontré tous les quatre dans une association qui organise tous les ans des concerts pour les Resto du Cœur. C’est plus que des concerts, même, ce sont des spectacles puisqu’il y a 80 personnes sur scène. Au fil des années, on savait qu’on avait des références communes et on s’est demandé si, en plus du spectacle, on pouvait monter un groupe pour jouer de la musique plus proche de ce qu’on aime et moins « variété ». Le groupe est né en 2022.

Juste après la crise sanitaire.

B : C’est ça, après Covid. L’idée de base, en tout cas pour moi en tant que chanteur : je voulais proposer quelque chose qui se fait peu, c’est-à-dire du chant en français, penser les morceaux et le texte comme de la chanson française pure et dure. Mais une chanson française qui serait plus « extrême ». l’ADN du groupe c’est ce mix entre chanson française et metal, et la colonne vertébrale du style de metal qui nous parle, c’est du prog avec des incursions dans plein d’autres styles qu’on va s’approprier…

Vous êtes originaire d’où ?

B : On est Toulousains. Maintenant, 3 membres du groupe sont héraultais de naissance mais toulousains de cœur.

Le nom de Helm, vous l’avez choisi pourquoi ? De mon côté, ça évoque un peu un gouffre… Avec une musique plus lumineuse cependant.

B : Et ouais ! Un peu…

F : On n’a pas vécu la même histoire militaire que le gouffre de Helm… Pour nous, il y avait aussi la nécessité de trouver un nom qui ne soit pas à connotation française ou anglaise, de ne pas pouvoir directement « catégoriser » le groupe dans du français qui pourrait trop faire écho à « oh, c’est de la variétoche, j’y vais pas », mais pas que ce soit anglais pour ne pas se travestir. Helm, oui, on pense au gouffre, mais c’est court, plutôt accrocheur et ça correspondait à nos aspirations, c’est un nom qui rempli le cahier des charges. Et on trouve que ça nous correspond bien.

Vous venez de sortir un Ep. Il y a eu d’autres choses avant ?

B : C’est notre seconde sortie. Le premier Ep s’appelait Le passeur de corps qu’on a mis un an à préparer, on a tout fait avec nos petites mimines, le mix, le master, etc. Il est sorti en 2023. Le second, on a plus mis les soldats en ordre de bataille et on s’est entourés.

Comment analyseriez vous tous les deux l’évolution de Helm entre ces deux Ep ?

F : Comme Boris a dit, on a mis pas mal de temps à faire le premier. Les deux Ep avaient des objectifs différents : le premier, c’était de se découvrir, de découvrir la musique qu’on voulait faire ensemble. Le deuxième, on s’est dit qu’on avait encore des choses à proposer, on a des morceaux qui sont nés du live – trois morceaux sur cinq, je crois. Pourvoir écumer les scènes, pouvoir jouer, c’est une de nos aspirations principales. On a ajouté ce qu’il n’y avait pas sur ces bases de morceaux et qu’on voulait retrouver dessus. La différence d’approche, c’est au niveau de la manière de composer, qui a été plus dense, sur un temps beaucoup plus court. Humainement, on se connait mieux, on connaissait bien mieux nos rôles.

B : En plus, le second, en termes d’objectif… On a une approche particulière qu’on a voulu étirer au maximum. Je trouve que le second Ep va explorer d’autres choses, on voulait voir jusqu’où on pouvait aller pour atteindre des morceaux uniques, intéressant mais qui ne soient pas décousus.

Il y a 5 titres sur ce nouvel Ep, Reflets irisés. On trouve un peu de tout dans votre musique, du rock, du metal, du prog, des choses qui, pour moi, se rapprochent de la synth wave, de la chanson française aussi, surtout dans le phrasé des textes. Comment un groupe parvient-il à créer autant de diversité ? Vous avez une méthode particulière de composition, chacun participe ?

B : Les morceaux, on les écrit à deux, Baptiste et moi. Fabien et Théo interviennent en tant que « réactifs ». Ils vont réagir sur nos propositions et aiguiller le bateau, ou trancher lorsqu’on arrive à des points de désaccord. On compose beaucoup par « ping pong » : on écrit des morceaux entiers que l’on s’envoie, Baptiste et moi. Chacun le retravaille, l’amène dans une autre direction, et ce qui caractérise notre façon de faire c’est qu’on se pose toujours la question du rythme. Je ne parle pas du rythme de batterie, mais plutôt du flow. On essaie de regarder le morceau dans sa globalité et de déterminer quels sont les moments où on peu venir créer une fracture, une cassure. On joue beaucoup avec ça, ça nous fait plaisir, et souvent, lorsqu’on arrive sur un bridge, on se demande ce qu’on peu mettre comme bonbon qui va surprendre l’auditeur. C’est notre approche. Pourquoi on a autant de changement ? Parce qu’on essaie de visualiser la musique comme étant au service du texte. Nos textes sont assez narratifs donc on cherche, comme dans une BO de film, de souligner certains moments ou des émotions. Pour nous, le style musical est un outil pour souligner ça, on n’a pas peur de switcher radicalement.

Ça va en effet dans tous les sens mais de manière organisée. Quelles sont vos influences principales ?

B : Les miennes c’est Leprous, Maximum The Hormone, Poppy et, forcément, en tant que chanteur, du Starmania, Michel Berger, beaucoup de comédies musicales.

F : De mon côté, et je pense qu’on a tous cette influence en commun, il y a aussi Leprous, dans la manière d’orchestrer certaines parties. Ensuite, il y a du metal prog, du Haiken, du djent…

Si l’un et l’autre ne deviez retenir qu’un seul titre de cet Ep pour expliquer à quelqu’un qui ne vous connait pas ce qu’est l’esprit de Helm, ce serait lequel ?

F : Dans l’idée, je pense que Sacrés idoles peut être représentatif parce que c’est un des morceaux où l’on voit le plus ces cassures dont parlait Boris. Il y a une sorte de folie, il est assez naratif… C’est un bon résumé de ce que peut représenter Helm.

B : Moi, j’aurai dit Multiplier parce que c’est le premier single qu’on a sorti. Mais c’est pour les mêmes arguments que toi, Fabien. Ça marche pour les deux morceaux, mais Multiplier est un peu plus court, donc peut-être un peu plus abordable.

Pourquoi avoir choisi ce format d’Ep pour ces deux premières productions ?

B : Comme je le disais tout à l’heure, on a une formule un peu particulière, et comme le dirait Baptiste, un premier album, on n’en a qu’un seul. Et donc, il nous manquait un maillon avant d’attaquer le format album, on avait besoin de voir ce qu’était le pur jus de ce qu’on peut proposer pour aller vers un album qui sera surement plus… j’allais dire « cohérent », mais ce n’est pas le bon mo. Qui découlera plus d’une idée générale pour avoir une dizaine de morceaux qui feront un tout. Si tu prends Hotmailcore, c’est un morceau très rap – d’ailleurs c’est Fabien qui chante dessus. Ça nous faisait marrer, donc on l’a enregistré tel quel mais peut-être que sur un album on n’irait pas aussi loin… Je sais pas…

L’avantage de ce type de format c’est que vous pouvez, avec 5 titres, présenter une variété de visages, et lorsque l’album sortira, on sait aussi à quoi s’attendre…

B : C’est vrai. Ça nous permet aussi d’orienter vers ce que les gens auront préféré de l’Ep.

Quels sont les premiers retours de votre Ep ?

B : On en a eu quelques-uns et… On est un peu pris à notre propre piège : chacun a son titre préféré, ça dépend des goûts de chacun, mais ça ne m’aide pas à y voir plus clair… Tu en penses quoi, Fabien ?

F : Ce qu’on propose, du coup, est reçu de la même manière par le public. On a plusieurs choses à présenter, on a plusieurs directions qui nous animent et on se rend compte qu’il y a deux, voire trois morceaux différents qui sont les préférés. On n’a pas encore tiré les conclusions et je ne pense pas que ce soit trop grave s’il n’ya pas une direction précise qui se détache. On a le temps de faire vivre cet Ep, on saura tirer es conclusions par la suite.

Un groupe émergent ne vit pas encore de sa musique. Quels sont vos métiers dans vos autres vies à tous les quatre ?

F : On a trois ingénieurs et un développeur, Théo, le guitariste. On s’est rencontrés, on était encore étudiants. On a tous faits le même cursus, il y en a un qui est allé vers d’autres choses.

Pour terminer, quelle pourrait être la devise de Helm ?

B : euh… Ce serait une formule magique qui est dans le premier morceau : « si on pouvait se multiplier ». Pour nous, ce serait pas mal… Je sais pas si tu as mieux, Fabien ?

F : Mieux, là, non… Mais ce que tu dis, Boris, c’est aussi un peu le fil conducteur des thèmes abordés dans l’Ep.

Interview: CRICK FEST 4

Interview CRICK FEST4 – Entretien avec Chris Acker (orga). Propos recueillis le1er février 2025

Après avoir reçu Sortilège en 2024 pour une troisième édition plus que sold out, l’association Crick For Zik remet le couvert avec une quatrième édition du Crick Fest qui, cette année, accueillera 4 groupes (peut on imaginer que le CF5 en accueille 5 et ainsi de suite ?) Metal Eyes a tenu cette année encore à faire le point sur l’évolution de ce plus que sympathique mini festival.

La prochaine édition du Crick Fest se tiendra le 5 avril 2025, à Cléry Saint André.

A 18h30, cette année, plus tôt que d’habitude puisque cette année il y aura 4 groupes…

Qu’est-ce qui fait que cette année tu as décidé de passer à 4 groupes ?

Deux raisons : la première, je voulais que ça fasse vraiment « festival ». 3 groupes, c’est un gros concert…  Et puis, depuis l’année dernière, j’ai tellement de demandes que si je ne mets pas plus de groupes, il y aura un Crick Fest 50 ou plus, j’en sais rien !

Pour rappel, l’an dernier, Sortilège était la tête d’affiche, le Crick Fest a très rapidement affiché complet. Ce que tu dis sous entends que tu as eu des retours très positifs de cette troisième édition…

Énormément, oui. Parce que dans le milieu du metal, comme d’autres sans doute, les fans communiquent énormément, notamment par le biais des réseaux sociaux et, grâce aussi au fan club de Sortilège, j’ai eu 2 ou 300 retours disant que c’était un festival au top avec une organisation au top, des bénévoles, tout, tout au top. Et, forcément, quand ça plait, les gens en parlent… Tout le monde a dit « Vivement l’année prochaine ! » J’espère qu’ils ne se sont pas dit que j’allais reprendre Sortilège (rires)!  Ceci dit, ça n’aurait pas été possible vu les problèmes de santé de Bruno Ramos…

Pas de Sortilège cette année, et c’est tant mieux, sinon c’est une affiche qui se répète. Tu as eu énormément de retours positifs. On sait que tu avais depuis longtemps un groupe en tête et on sait aujourd’hui que la tête d’affiche de cette nouvelle édition c’est KingCrown, le groupe des frères Amore, ex-Nightmare. C’est eux qui t’ont contacté ou toi ?

Ni l’un ni l’autre, c’est un intermédiaire. J’avais un nom en tête, mais ce n’était pas KingCrown. J’ai été en contact avec leur manageur, avec le chanteur de ce groupe, on a été pas mal en discussion… A un moment, j’ai douté, je me suis demandé si je parlais avec la bonne personne parce que je n’y croyais pas. C’était trop facile…Je me disais que j’étais en train de me faire avoir. Tout ça m’a fait perdre deux mois… C’était un groupe étranger.

J’étais resté sur un groupe français, mais je n’arrivais pas à identifier lequel…

Rappelle-toi, la vocation de ce festival c’est de faire jouer des groupes de la scène locale qui ne sont pas accueillis ailleurs, et je voulais absolument faire venir un artiste qui est apprécié du grand public et qui attire du monde. Bingo avec Sortilège ! Après, c’est totalement égoïste, mais comme je suis le président de l’asso et le programmateur, ben… Je me fais plaisir ! Quand tu vois ceux qui nous quitte, je me dis que c’est le moment. Mais ce ne sera pas pour tout de suite. Un groupe étranger, ce n’est pas le même budget, entre le cachet, le transport… Tu additionnes tout ça, tu divise par le nombre max de spectateurs et ça te donne le prix de la place, et là… non. Ça grimpe trop et ce n’est plus dans le même esprit. Mais ce n’est pas perdu…

Tu es tombé comment sur KingCrown, alors ?

Prisma fait partie de FTF Music, qui est un label de distribution, diffusion et production. Par son intermédiaire, j’ai pu avoir le contact de Joe Amore. J’ai toujours adoré Nightmare, et là, quand j’ai écouté la production de l’album de KingCrown, j’ai pris une claque et je me suis dit « oui, ça va le faire » !

La production c’est une chose, faire venir un groupe à Cléry Saint André, c’en est une autre. Il y a eu Heartline et surtout Sortilège qui vous a aidé à placer Cléry sur la carte des lieux de concerts possibles (il approuve). Qu’est-ce qui a convaincu Kingcrown de venir ?

Comme pour Sortilège : ma passion pour cette musique, ma passion en tant que fan, que « patron » d’une organisation qui met les petits plats dans les grands pour passer une super soirée.

Kingcrown est la tête d’affiche, mais il y a aussi trois autres groupes : Prisma qui est ton groupe, on ne va pas en parler, il y a du délit d’initié pour que Prisma soit encore à l’affiche (il rit), et aussi Benzin et Stratagème, deux groupes assez différents, ce qui donne une affiche assez variée, plus rock, pas 100% hard/metal comme l’an dernier. Qu’est-ce qui t’a fait porter ton choix notamment sur Benzine, le plus rock des 4 groupes ?

Pour la petite histoire, j’ai joué plus jeune avec Bruno, le leader de Benzin. Je l’avais perdu de vue et grâce aux réseaux, on a repris contact. Je suis allé les voir jouer à un tremplin à Jargeau quand j’ai appris qu’il remontait un groupe et j’ai pris une grosse claque. Son jeu, sa voix, son allure, rien n’a changé. Bruno, c’est Bruno, voilà…

Qu’en est-il de Stratagème ?

Un peu comme pour KingCrown. Ça fait quand même 42 ans qu’ils tournent, et j’ai discuté avec Gégé, le leader, bassiste, et j’ai adoré leur dernier Ep, du hard rock propre, bien joué, moderne. Comme j’étais en mode « 4 groupes », c’est eux que j’ai retenus.

On ne va pas parler de Prisma, votre présence à l’affiche, tu nous l’as expliquée l’an dernier. En revanche, y a-t-il des nouveautés qui nous seront proposées ?

Plus que ça puisque, déjà, on a changé de clavier ! Gilles a voulu se consacrer un peu plus à sa famille. Officiellement, c’est Pascal qui joue maintenant avec nous. Mais, malheureusement, il ne pouvait pas assurer la date du 5 avril donc c’est Gilles qui sera là pour nous dépanner.  En ce qui concerne les nouvelles compos, ça avance, elles se durcissent, on est plus proche du heavy.  Elles se musclent.

Ça fait quelques temps que l’affiche a été dévoilée, que les places sont en vente aussi. Où en êtes-vous aujourd’hui sur les 350 places que peut accueillir la salle ?

Bizarrement, pas terrible du tout… Il reste encore plus d’un mois, on me dit que ce n’est pas trop grave… Toute la campagne de com, les flyers sur Paris, ça commence. Les gros concerts, ceux où on peut toucher du monde ne font que commencer, il y avait Mass Hysteria hier soir, d’autres arrivent. Après, je ne sais pas pourquoi les préventes ne décollent pas…

Il y a une piste à envisager : KingCrown est un nom beaucoup moins connu que Sortilège…

Exact, et ils sont plus loin. Sortilège, ils sont de Paris, et il y a plein de fans parisiens qui sont venus. Là, Grenoble… la fan base hésite plus.

Aujourd’hui, il y a quand même urgence à en parler…

Oui, totalement, il faut en parler par tous les biais. J’ai même été jusqu’à aller en parler auprès de France Info, Radio France, parce que je veux toucher tout le monde, ne pas avoir à regretter de ne pas l’avoir fait. Mais sans payer, non plus, mais je ne peux pas me permettre une demi-page dans un magazine…

Quel est le tarif des places ?

En prévente, elles sont à 18 euros, sur place, elles seront à 23. Pour les moins de 16 ans, elles sont à 15€ et 20€. On peut les prendre directement sur le site de l’asso et tout figure sur la page Facebook de Crick For Zik.

Comme l’an dernier, si des gens viennent de loin, ils ont la possibilité de dormir sur place, version camping ?

Même mieux, puisque cette année, nous avons l’autorisation de planter quelques tentes. On reste sur place, et on peut accueillir quelques personnes. Maintenant, il faut se rappeler qu’on est début avril, les nuits sont fraiches…

Au niveau du catering, ce sera toujours ton chili ?

(rires) J’adore entendre ça ! On va en parler lors de la prochaine réunion, mais il n’est pas impossible qu’on change. J’ai une autre spécialité ! Ce n’est pas impossible car Butcho (chanteur de Stratagème) a appris ça et il s’en régale à l’avance ! Ça fait plaisir à entendre, même Zouille il a parlé de ce chili !

Une dernière chose : si les ventes n’augmentent pas, il y a un risque d’annulation ?

Je l’ai déjà écrit et confirmé : il n’y aura pas d’annulation. Pourquoi ? Parce que j’ai un fonctionnement simple : je sais m’entourer de partenaires financiers ce qui fait que, si les ventes sont faibles, je ne bois pas trop le bouillon. Évidemment, ça nous ferait tous chier – musiciens, orga, bénévoles – si ça ne décolle pas, ce n’est jamais agréable de jouer devant peu de monde, mais quoiqu’il arrive, on maintiendra le Crick Fest.

As-tu quelque chose à rajouter ?

On peut ajouter que pour ceux qui achètent leur billet à l’avance, il y aura un petit cadeau, comme d’habitude, il y aura du merch, peut-être une boutique de CD/vinyles. Du tattoo éphémère et toujours nos bons sandwiches préparés avec du pain et des produits locaux !

Interview: DIESEL DUST

Interview DIESEL DUST. Entretien avec Raphaël (guitariste) le 23 décembre 2024

L’abum est sorti au mois de mai, mais ce n’est pas votre premier album. Le groupe s’est formé du côté de Lyon vers 2006, avant même…

Oui, le groupe existait déjà avant que ne l’intègre, c’était un groupe de reprises. J’ai rejoint le groupe en 2006.

Et en 2006, un album, Ghost dance, est sorti, suivi d’un autre en 2010, Second life, et après… plus rien… jusqu’à 2021/22. Que s’est-il passé pendant ce long break ?

Eh bien, on s’est mis en pause parce que notre chanteur était parti et quand on change deux fois de chanteur en peu de temps… ça m’a fatigué, et j’avais envie de monter autre chose. J’ai monté un théâtre et j’ai pris neuf années de repos psychologique, physique et moral pour travailler dans mon théâtre. C’était un repos musical, surtout !

Qu’est-ce qui a motivé le retour de Diesel Dust ?

Il y a plusieurs choses : je commençais à manquer de scène, de guitare… Après, le Covid est arrivé et mon père est décédé durant cette période et c’est là que je me suis remis à écrire. J’avais des choses à dire à mon père, j’ai écrit des textes mais sans musique, pour moi, les textes ne veulent rien dire, donc j’ai aussi composé la musique. J’en avais deux ou trois de prêtes et j’ai rappelé Nico, l’harmoniciste en lui proposant de reprendre. Il a hésité à peu près deux secondes et demie avant de me dire « oui ».

Il y a d’autres membres des « origines » ?

Non, il n’y a que Nico et moi.

Donc, le Diesel Dust 2021, c’est une version 3.0 puisque tu es arrivé après les débuts du groupe. C’est vraiment le renouveau de la formation…

Carrément. Notre ancien batteur a des soucis de santé et ne peut plus jouer, notre bassiste a des problèmes personnels… C’est pour ça qu’on a cherché d’autres membres. Le batteur, je jouais avec lui dans un groupe qui s’appelait Dead Cause, il connaissait le bassiste qui nous a rejoint. Le chanteur, je l’ai rencontré par hasard en écoutant des gens parler disant qu’il avait une belle voix mais pas de groupe, alors je l’ai contacté. Ça a été relativement simple et l’entente est tellement bonne que ce n’est plus un groupe, c’est carrément une famille !

L’album du retour, c’était Just before, suivi assez rapidement après par Between before and after, qui est un titre assez mystérieux. Peux-tu nous l’expliquer ?

Il annonçait en fait que les musiciens changeaient… Donc c’était après le début du groupe… et avant la fin…

Et maintenant, on n’est pas encore à the end, c’est Just another day… juste un autre jour. Quels sont les retours que vous avez eus de ce… On doit dire le troisième album ou le cinquième ?

Oh, je dirai plutôt le troisième, c’est vraiment le troisième que j’écris. Et ce sera la dernière mouture de Diesel Dust, il y aura d’autres albums si, comme c’est prévu, on reste ensemble. Je pense qu’on a gagné en maturité grâce à l’apport de chacun : notre batteur fait du metal dans un autre groupe, notre guitariste fait du Satriani, le bassiste joue dans un groupe de jazz rock et de punk et le résultat de toutes ces influences, c’est qu’on a fait un album que je trouve plutôt riche. La fan base qui nous suit depuis le début, tout le monde dit que c’est le meilleur album qu’on ait fait… Ça me va bien pour l’instant (rires) !

Toutes les influences dont tu parles, on ne les ressent pas vraiment parce qu’on sent surtout une culture très imprégnée de rock sudiste…

Ben… c’est le but ! Diesel Dust est un des cinq ou six groupes de rock sudiste français qui soit référencé. On ne voulait pas non plus quitter ce domaine-là, on peut tout mettre dedans. Le rock sudiste c’est une musique qui est généreuse, et aujourd’hui encore, on peut se permettre sur scène de faire des chorus de 8’ sans que personne ne trouve à y redire. Je pense qu’on a modernisé le style sur cet album, mais il reste un style aux grandes effluves 70’s. Tu peux te permettre d’allonger un morceau avec le public sans que ça ne gêne qui que ce soit, on n’est pas prisonnier des séquences… Il n’y a jamais un concert qui ressemble à un autre.

Quels sont les thèmes que vous abordez ? A la lecture des titres, on sent que c’est très culture US, les pochettes sont toujours en lien avec la culture indienne également…

Sur tous les albums, j’aborde tout le temps la culture amérindienne, dans le sens « défendre les Indiens d’Amérique ». J’ai lu les écrits de Sitting Bull, et je suis tombé raide de surprise devant la qualité de la poésie qu’il pouvait donner alors qu’il était en train de se faire massacrer. Je parle aussi beaucoup de la planète parce que notre génération est sans doute celle qui a commencé à prendre conscience qu’on mettait tout en l’air et que nos enfants allaient souffrir. Chaque album a sa chanson sur le thème, là, c’est Walking alone qui parle d’observer nos enfants marcher là où il n’y a plus rien… Après je parle beaucoup d’actualité ou de sujets qui me touchent, comme le décès de mon père. Just another day est une chanson très spéciale puisqu’elle parle du suicide de mon frère de sang et après il y a la violence faite aux femmes ou d’autres choses encore. Women est une chanson humoristique où j’inverse les rôles et je demande ce que c’est que ce monde où la violence envers les hommes est telle que tu ne peux même plus faire un compliment à une femme sans te faire engueuler (rires). Tu ne peux même plus dire « bonjour »… On va peut-être se faire lyncher. We ill never die aborde le thème de ce souhait d’immortalité, et nous, les musiciens, on a cet avantage que, même dans deux siècles, peut-être que quelqu’un retrouvera nos albums et nous écoutera, nous fera revivre. C’est une forme d’immortalité.

Il y a aussi N.I.C.O (Now I Carry On). Est-elle en rapport, est-ce un hommage à ton harmoniciste ?

Oui, c’est exactement ça, parce que, quand je l’ai appelé, il a mis deux seconde et demie pour me dire « oui, j’attendais que tu m’appelles » ! Même si le groupe s’est arrêté, on tapait souvent le bœuf tous les deux. Oui, c’est un hommage, jouer avec lui, c’est du bonheur, on est toujours du même côté sur scène et on reste les deux piliers de ce groupe…

Si tu devais ne retenir qu’un seul titre de Just another day… pour expliquer à quelqu’un qui ne vous connais pas ce qu’est Diesl Dust aujourd’hui, ce serait lequel ?

Ah… C’est compliqué… Mais je ferai peut-être écouter We will never die parce qu’il y a de la mélodie, du pseudo metal et beaucoup de recherche harmonique dans les chorus de guitares. Ça représente assez bien ce qu’on est.

Il y a un autre titre qui m’épate, c’est le morceau titre qui clôt l’album : il commence tranquillement et c’est une longue montée en couleurs. Comment l’avez-vous travaillé, parce qu’il est assez complexe ? J’ai l’impression que c’est un patchwork d’idées qui fonctionnent très bien ensemble…

J’ai voulu raconter la vie de mon ami qui s’est suicidé, et tout le texte est une sorte de prière, de regret de ne pas avoir été là au bon moment. Quand quelqu’un fait quelque chose comme ça, on regrette toujours de ne pas avoir été là… En fait, j’ai voulu résumer se vie… C’était quelqu’un qui avait des colères mémorables qui nous faisaient rire. La montée du chorus, c’est un peu sa colère – et je suis persuadé que c’est dans la colère qu’il a eu ce geste. La fin du morceau, un peu à la Pink Floyd, c’est vraiment un cri qui annonce la fin de l’album, la fin de vie, la fin de tout… La dernière phrase est dite par une femme, c’est sa veuve qui la prononce. C’est un morceau qui a été écrit comme un roman.

Ça monte plus en intensité qu’en puissance ou en couleurs… Non, c’est un morceau qui monte en gravité, je dirai…

C’est ce qu’on cherchait, et si tu le ressens comme ça, c’est parfait, c’était le but…

J’imagine qu’un groupe comme le votre ne gagne pas sa vie, alors quelles sont vos autres activités à chacun ? Tu as ton théâtre, et les autres ?

Il y a deux électriciens, le batteur et le bassiste – ils travaillent dans le même domaine, alors ils se comprennent très bien en musique aussi (rires) – notre chanteur est forestier, il travaille dans la recherche d’essences futures pour contre-carrer le réchauffement climatique, notre harmoniciste a son entreprise dans les fruits de mer, il forme les gens à respecter, comprendre et bien vendre les fruits de mer. Notre guitariste est prof de musique et je dirige un théâtre.

Si tu devais maintenant penser à une devise pour Diesel Dust, ce serait quoi ?

Euh… « Toujours honnête, toujours droit ». C’est exactement à l’image de notre musique et de nos textes, sincères jusqu’au bout.

Pour terminer, quels sont les 5 albums que tu as le plus écouté, le plus usés, dans ta vie ?

Ce n’est pas dans l’ordre précis mais je dirai : Physical graffiti de Led Zeppelin, made in Japan de Deep Purple, les System Of A Down, tous, parce que je trouve ce groupe d’une créativité et d’un niveau fabuleux… Agents of fortune de Blue Öyster Cult – mon jeu de guitare est très inspiré, à 80%, par Buck Dharma, et… Last rebel de Lynnyrd Skynyrd. C’est sans doute ceux-là que j’emmènerai sur une ile déserte…

C’est pour ça que je ne pose pas cette question d’ile déserte : si elle est déserte, il n’y a pas d’électricité, alors prendre des albums… As-tu quelque chose à rajouter pour terminer ?

Pas grand-chose sauf qu’il est temps que la France se réveille un peu… Il y a beaucoup de groupes en France qui mérite de vivre de leur musique – notamment Diesel Dust mais on est loin d’être les seuls… C’est dommage de voir ces groupes disparaitre et être remplacés par des « musiques » qui ne ressemblent à rien… Je ne citerai personne…

Interview DEATH DECLINE

Interview Death Decline. Entretien avec Fab (guitare) le 25 octobre 2024

Nous allons parler de votre nouvel album, Patterns of an imminent collapse. Mais d’abord, commençons avec ceci pour les observateurs : il s’agit de votre quatrième album – sortis en 2015, 2018, 2021 et cette année. Un album tous les 3 ans donc. C’est un rythme que vous vous êtes donné ?

Ouais, exactement (rires) ! Non, pas du tout, c’est surtout lié au rythme auquel on parvient à produire les albums, le temps qu’il nous faut pour composer assez de titres. C’est le rythme qu’on arrive à assurer plutôt qu’un « plan ». Toujours est-il qu’on essaye d’être régulièrement présent et d’avoir toujours quelque chose à proposer, de ne pas se faire oublier trop longtemps de manière à rester dans la tête des gens…

Trois ans, même si c’est un peu long, ça reste un rythme qui permet aux gens de savoir quand attendre de la nouveauté…

Après, comme tu le dis, nos quatre albums sont sortis avec ce délai, mais ce n’est pas quelque chose à quoi on tient particulièrement. Peut-être que vous aurez des surprises à l’avenir…

Que peux-tu nous dire au sujet de ce nouvel album pour nous convaincre d’aller l’acheter ?

Si tu aimes le thrash moderne avec une pointe de death metal, avec un son bien catchy et puissant… Eh bien, écoutes : cet album peut te plaire… Ça décrit un peu cet album.

C’est vrai que vous êtes dans une veine thrash très costaud, plus proche même du death. Tu aurais d’autres termes à utiliser pour décrire votre musique à quelqu’un qui ne vous connait pas ? Quand j’écoute cet album, ce n’est pas que du « bourrinage », il y a des aspects un peu plus… « mélodiques » …

Tu peux le dire, on a toujours incorporé dans nos albums des éléments qui peuvent être taxés de « mélodiques ». En soit, ce n’est pas une insulte. On tient toujours à amener ce côté, ça fait partie du son de Death Decline d’apporter des riffs mélodiques et des passages plus cools. Le but, ça n’a jamais été de proposer des albums qui bourrinent du début à la fin… Ce ne sera jamais dans l’optique du groupe, et comme tu le dis, il y a encore sur cet album pas mal de passages mélodiques qui alimentent des moments plus durs, pour les mettre aux standards de Death Decline.

Comment analyses-tu l’évolution de Death Decline entre A silent path, votre album précédent, et Patterns of an imminent collapse ?

Entre les deux, je pense que nous avons une évolution assez constante et logique. On ne force pas les choses, ça se passe assez inconsciemment. On a du mal à analyser les choses de manière plus techniques, on compose comme on le sent, pas en pensant à un moule ou un style musical en particulier. A partir du moment où on aime bien un riff, on compose un morceau à partir de ce riff. Ça amène des palettes vocales différentes, en fonction des morceaux et des sujets qu’on traite. C’est quelque chose d’assez naturel… Au niveau sonore, aussi, on a encore évolué un peu. C’est vrai que l’album peut paraitre plus direct et en même temps plus mélodique… En tout cas, on est totalement satisfait de l’évolution du groupe et de ce nouvel album.

Il y a un certain équilibre puisque le groupe n’a pas changé de line up ces trois dernières années. En revanche, The silent path est sorti en pleine crise sanitaire qui peut avoir eu un impact. Cette dernière a-t-elle eu un impact sur votre façon de faire ?

Je ne pense pas, pas dans les titres qu’on compose… Je pense plus dans notre méthode de travail et de composition : on avait dû s’adapter à l’époque et on a conserver certaines façons de faire. On s’est rendu compte qu’il y avait des choses qu’on avait mises en place pour The silent path qui fonctionnait plutôt pas mal – entre autres le fait de travailler les préproductions chez nous, bien avant l’album, chose qu’on ne faisait pas sur les deux premiers albums. On s’est un peu formés sur le sujet, on a investi dans du matériel pour faire des préprods chez nous et ça nous apporte quelque chose qu’on n’avait pas avant : une idée plus précise de comment el morceau va sonner avant d’entrer en studio.

Quels sont les sujets dont vous traitez ? Un titre comme celui de cet album (Les signes d’une chute imminente) c’est très positif, très enthousiasmant comme notion…

(Rires) Ben, écoute, j’ai envie de te dire qu’on ne fait pas du funk non plus (rires) ! Les sujets qu’on abordent ? Globalement les comportements humains, dans leurs mauvais côtés… Ça peut être au niveau social, écologique, des sentiments… On brosse un portrait qui peut paraitre pessimiste, nous, on a plutôt l’impression qu’il est réaliste. Comme je sais qu’Alexis, au chant, a tendance à écrire des paroles pour quelles soient libres d’interprétation pour l’auditeur. Il va composer se paroles d’une manière ouverte à l’interprétation.

Y a-t-il des thèmes qui selon toi, selon le groupe, n’ont absolument pas leur place dans Death Decline ?

Je pense que pour traiter d’un sujet il faut déjà qu’on soit tous à peu près raccord pour le traiter. On est plutôt ouverts à parler de tout, il n’y a pas de tabou. Je n’ai pas un sujet en tête qu’on n’évoquerait pas… On n’évoquera pas frontalement la politique. On n’est pas apolitique mais on ne donnera pas notre avis, ce n’est pas la vocation du groupe. Ce n’est pas le propos du groupe de partager des opinions politiques.

On parle de la pochette un peu ?

Oui…

Je pense que personne n’a dû vous le dire, mais elle m’évoque un peu celle de Quadra de Sepultura, surtout le verso qui représente un crane. Il y avait une volonté de faire un clin d’œil à Sepultura ?

Alors, vu que Sepultura a annoncé sa fin de carrière après ce dernier album, c’était purement volontaire pour prendre leur place sur la scène internationale (rires) !

L’ambition est là, claire et précise !

Tu parles au futur Andreas Kisser (rires !) Non, non, pas du tout ! On a déjà dit à Alexis, notre chanteur, qu’il ressemble à Max Cavalera, ça reste raccord ! Plus sérieusement, on reste clients et fans de Sepultura mais on n’a pas pensé à cet album au moment de faire faire l’artwork par Stan W. Decker, qui s’occupe de nos pochettes depuis le premier album. L’idée, c’était d’avoir quelque chose de thématique, une sorte d’écusson, une plaque de marbre… Quelque chose de frontal, un emblème… On n’avait pas, au départ, évoqué la pièce de monnaie mais ça rentrait dans les codes. Quand Stan nous a proposé cet artwork, on l’a trouvé tellement efficace qu’on est resté dessus, on n’a pas changé. On se doutait bien que le rapport avec Sepultura se ferait mais il n’y avait pas une volonté de s’influencer d’eux…

Surtout que le personnage que l’on voit de profil est identique à celui de The silent path – j en’ai pas les autres pochettes sous les yeux. C’est une sorte de mascotte ce personnage cornu ?

Oui, si tu regardes les deux premiers albums, tu verras qu’il est également présent, de façon plus humaine, plus… distinct. Sur The silent path, il est plus comme une statue, une divinité qui s’élèverait au-dessus des hommes. C’est un peu une mascotte et c’est une volonté de notre part de conserver ce personnage avec des cornes qui peut apparaitre sous plusieurs formes. C’est quelque chose d’assez classique sur la scène metal que d’avoir un personnage récurent qui apporte une identité visuelle.

Au verso, à la place du cou, il y a une sorte de mappe monde qui est, j’imagine, en lien avec le titre de l’album…

Euh, ouais… alors là, si tu veux… On a donné toute notre confiance à Stan qui a travaillé de concert avec Alexis pour créer toute une identité visuelle qui comme vraiment aux sujets abordés.

Si tu devais ne retenir qu’un titre de ce nouvel album pour expliquer aux gens ce qu’est aujourd’hui Death Decline, ce serait lequel ?

Elle n’est pas facile, ta question, parce que l’album a été composé pour que chaque morceau soit complémentaire, du coup, chaque morceau apporte quelque chose au spectre sonore de Death Decline et de cet album… C’est vrai que ce n’est pas une question facile…

Tu as 5’ pour me convaincre d’écouter le reste de l’album…

(Rires) Alors, sur Towards void and oblivion tu trouves beaucoup d’éléments qu’on aime développer : de la mélodie, des changements de rythmes, d’ambiances, des riffs thrashy bien rentre dedans… C’est un morceau qui est catchy, brutal, en même temps mélodique et incisif. Je pense qu’il représente plutôt bien ce qu’on est capables de faire… Sinon, tu as aussi un morceau comme…

Non, non ! Je n’en ai demandé qu’un ! Ne cherchez pas à négocier, Monsieur, ça ne marche pas ici !

(Rires) Alors Towards fera l’affaire !

Quels sont les 5 albums que tu as le plus « bouffés », usés jusqu’à la corde dans ta vie ?

Il y aura, concrètement, en premier lieu Ride the lightning de Metallica – ça reste mon album fétiche tous groupes confondus – Il y a aussi Bonded by blood d’Exodus…

On est dans les origines du thrash…

Ouais, exactement. Je suis plutôt fan de thrash, on va dire que c’est moi, le « parrain thrash » du groupe… Ensuite, il y a Defenders of the faith de Judas Priest. Après, qu’est-ce qu’il pourrait y avoir ? Le premier Led Zeppelin ? Oui, carrément… Il y a aussi… Leprosy de Death, et sans doute Killers d’Iron Maiden que j’ai énormément écouté étant jeune…

Ça en fait six…

Ouais, ben… tu choisiras (rires) !

Monsieur est dans la négociation aujourd’hui ! On le sait, un groupe de rock en France, d’autant moins de metal et encore moins dans votre style, ne vit pas de sa musique, ou très rarement. Quelles sont vos autres activités dans vos autres vies ?

Moi, je suis électricien du bâtiment, Alexis est chef cuistot, il tient une cave à bières et une taverne rock/metal sur Châlons sur Saône. Alex, à la basse, est mécanicien de formation, Jordan, à la guitare, est informaticien, et Arnaud, notre batteur, est pour l’instant ouvrier viticole.

Vous avez des concerts prévus pour les mois à venir ?

Là, on a pas mal enchainé… On était le week end dernier à Martigues pour une super date, on a fait la Vapeur à Dijon, le Ferrailleur à Nantes pour la release party… On bosse d’arrache-pied pour composer une tournée digne de ce nom pour 2025… Vous allez pouvoir nous voir aux quatre coins de la France en 2025 !

Il n’y a pas que les coins, en France, il y a tout l’intérieur ! Moi, je suis carrément dans le Centre…

Tu veux qu’on joue où, du coup ?

Je suis à Orléans.

Ça fait partie des villes qu’on essaye de faire depuis un moment. Ça devrait se faire…

Pour terminer, si tu devais penser à une devise pour Death Decline, ce serait quoi ?

Je ne sais pas… C’est peut-être classique mais je dirai « Strike hard, strike fast »

Interview: KLOGR

Interview KLOGR. Entretien avec Rusty le 14 octobre 2024.

Rusty, tu appelles pour parler du nouvel album de Klogr…

Oui, le nouvel album, Fractured realities, sortira le 31 octobre. On a commencé à l’enregistrer pendant le confinement. C’était une période étrange parce que nous avons commencé à écrire de nouveaux morceaux mais avec la mauvaise énergie… Personne ne savait si ça fonctionnerait, si un jour le monde tournerait de nouveau. Mais nous croyions toujours en la musique et nous avons, j’ai, commencé à composer. Après ça, certains membres du groupe ont eu des difficultés, avec leur « vrai » boulot et d’autres choses. Le process a vraiment repris en 2023 lorsque l’opportunité de remonter sur scène s’est présentée. Nous nous sommes alors dit que nous devions terminer nos compositions. Il y avait des choses différentes de ce que nous avions déjà fait, nous avons retrouvé la bonne énergie et nous avons terminé l’album au début de l’année 2024.

Tu as dit qu’un des membres du groupe avait des obligations personnelles. Cela signifie-t-il qu’il y a eu un changement de line-up ?

Non, on a eu un changement avec l’album Keystone, en 2017, parce qu’un des membres ne pouvait nous suivre en tournée. Pour certains d’entre nous, Klogr n’est pas le travail principal, alors c’est difficile de mixer la « vraie vie » avec la vie d’une tournée. Pendant la période de la pandémie, certains d’entres nous ont rencontré des problèmes avec le travail normal, et ce ne fut pas facile. Je ne veux pas parler de « dépression » mais les sentiments étaient au plus bas, rien n’était réuni pour que nous puissions composer de la bonne musique. Nous avons perdu une partie de notre enthousiasme vis-à-vis de la musique.

Comment avez-vous retrouvé cet enthousiasme ?

Je suis entré dans le studio, et j’ai dit : « les gars, on se réveille ! Nous avons la possibilité de partir en tournée, alors on se réveille et on compose ces putains de chansons ! » Et c’est ce que nous avons fait. Retourner sur scène était important… Nous ne sommes pas un groupe internet, de streaming, nous avons besoin d’être sur la route, avec un vrai public, nous devons prendre le temps de partager avec d’autres. On ne veut pas avoir un écran entre le public et nous ! Quand nous avons eu la chance de pouvoir reprendre la route, nous avons retrouvé la bonne énergie. Maintenant, nous avons 46 concerts prévus en 52 jours, ce qui est la bonne dimension pour Klogr.

Keystone était votre précédent album, c’est à cette époque que nous nous sommes rencontrés pour la première fois. Comment analyserais-tu l’évolution du groupe entre ces deux albums, Keystone et Fractured realities, sachant que, bien sûr, 2020-2022 c’était la crise sanitaire…

Keystone a été produit par une sorte de dieu, qui a produit deux albums de Godsmack… C’est un de mes mentors dont j’ai appris beaucoup, notamment grâce au temps passé en studio avec lui en 2017. Après, nous avons passé beaucoup de temps à tourner, entre 2017 et 2019. Après, j’ai passé deux ans à travailler sur mon projet solo, j’ai réarrangé des covers – de Soundgarden, Alice In Chains, Johnny Cash… – avec des influences Nine Inch Nails. J’avais besoin de découvrir d’autres styles musicaux aussi, d’autres atmosphères. Quand on a commencé à composer pour le nouvel album de Klogr, j’ai dit aux autres membres du groupe qu’on devrait inclure, dans notre musique, ces éléments et instruments électroniques. Notre musique est une forme de metal grunge des 90’s. On devient vieux, on a besoin de fraicheur. On doit trouver quelque chose de plus moderne. Nous ne sommes pas un groupe de metalcore, ni indus, mais nous pouvons ajouter certains de ces éléments dans notre musique. Et ça marche, notre autre guitariste, Crivez, aime aussi beaucoup de groupes qui font partie de mes influences. On a commencé à écrire ensemble, et la plus importante différence entre nos deux derniers albums, c’est notre approche : nous sommes plus expérimentés, et c’est aussi la raison pour laquelle j’ai décidé de produire cet album, de mettre la main dessus en tant que producteur. En 2011, j’avais produit le premier album, j’ai développé de l’expérience depuis, en tant que producteur avant d’être musicien ou front-man. Maintenant, il est temps de prendre ma revanche (rires) ! Me mettre en première ligne n’a pas été facile, mais je remercie tous les producteurs qui ont travaillé avec Klogr avant. Je me dis que j’ai vraiment fait du bon boulot, parce que je trouve que c’est vraiment un bon album.

Il y a aussi un défi avec cet album : il y a dix chansons, et tu veux pouvoir proposer dix vidéos différentes… Peut-on imaginer que, mises bout à bout, ces vidéos donneront une histoire ?

Tu sais, ce n’est pas un album typique de rock, et il n’y a pas d’histoire racontée. Il y a différentes photos, chacune représentant un état émotionnel différend, une lutte intérieure, un désordre mental, un désordre alimentaire… Des choses que chacun peut vivre au quotidien, de diverses manières. Certains peuvent en user, d’autres en être victimes. Pour les vidéos, j’ai demandé à Joe et Jumpy, deux anciens membres du groupe qui sont aujourd’hui vidéastes, de travailler avec moi. Je leur ai expliqué ce que j’avais en tête, dans mon esprit tordu : décrire ces émotions au travers de vidéos. Il y a une artiste qui débute chaque vidéo en ouvrant une valise dont elle sort un ustensile : le premier, c’est un masque couronné qu’elle place sur son visage. Elle est aussi devenue le clown effrayant… à la fin de la chanson, elle enlève le masque qu’elle place dans une boite. A la fin des dix vidéos, elle trouve un dernier objet, et… et… la question se pose. Il faut regarder la dernière vidéo pour comprendre les infos et pouvoir les interpréter.

Le thème principal de l’album porte donc sur ces dysfonctionnements, alimentaires, psychologiques, émotionnels…

Oui. Oui, parce qu’un des aspects que nous voulons expliquer dans l’album est que nous vivons ce genre de dysfonctionnement. Selon nou, 80% de ces troubles sont le fait de la société actuelle. Des parents jusqu’à l’acceptation par la société… Nous sommes en 2024, nous sommes sans doute libres de déclarer nos préférences sexuelles mais ce n’est pas normal, chacun devrait pouvoir être libre de vivre sa vie comme il l’entend ! Le second aspect, c’est que ta liberté ne peut pas nuire aux autres libertés. Nous devons en parler parce qu’il y a encore tant de gens qui vivent avec des sentiments négatifs, avec la peur sans pouvoir mettre un nom sur ces sentiments. Quand tu sais les nommer, peut-être peux-tu les accepter et leur faire face. Nous ne sommes pas médecins, nous n’avons de leçons à donner à personne, c’est juste notre point de vue que nous exprimons. Et expliquer comment, dans le passé, certains d’entre nous ont pu faire face à ces problèmes.

Vous n’êtes pas médecins… Quels sont vos autres métiers dans la vie ?

Je suis producteur, j’ai mon studio. Je dirige aussi une école de musique et d’autres choses. Le batteur est prof de musique, et il peut trouver un remplaçant pour animer ses cours quand on part en tournée. On espère vraiment que la réponse à cette question, en 2025, sera « on n’a pas besoin d’autres jobs ! » (rires). On croise les doigts.

Si tu devais ne retenir qu’un seul titre de l’album pour me convaincre d’aller acheter l’album, la chanson qui vous représente le mieux aujourd’hui, tu retiendrais laquelle ?

Je vais te faire une réponse étrange : Whale fall est la chanson la plus bizarre de l’album. Alors peut-être qu’elle ne représente pas bien le son de l’album, mais elle peut clairement éveiller quelque chose en toi qui t’amènerais à plonger dans la musique de Klogr et penser que si ces gars peuvent jouer ce genre de choses, peut-être peuvent-ils jouer d’autres trucs étranges.

Fractured realities évoque un peu la pandémie, car tout le monde vivait dans une forme de réalité fracturée. Tu as aussi évoqué une forme de retour de la dictature avec des autorités d’extrême droite qui reviennent au pouvoir. Ces réalités fracturées sont elles aussi liées au monde actuel ?

Oui, je le pense et, peut-être plus que « fracturé », nous devrions parler de « fragile » parce que nous avons vécu une très belle période dans les 70’s, 80’s, 90’s, nous pouvions penser au bien-être et nous pouvions faire toujours plus. Maintenant, nous avons sans doute trop dans certains pays du monde et nous avons perdu de vue nos objectifs initiaux, nos émotions. Nous avons oublié le pourquoi je fais ci ou ça. On s’est encore plus perdus pendant la pandémie : de nombreux couples, familles ont explosé parce qu’incapables de vivre dans un même appartement pendant tout ce temps. C’est pareil dans le reste du monde, il y a maintenant de plus en plus de guerre partout. La crise que nous visons remonte à 2000 ans déjà, parce qu’on n’apprend pas de nos erreurs, on n’est pas capables de faire des choses glorieuses comme notre architecture ou d’avoir de belles actions pour l’humanité sans être, en même temps, plus que stupides. Si nous prenions plus de temps à observer la Nature, et les animaux, soit disant moins intelligents que nous par ce que nous sommes des « homo-sapiens », mais en fait, ils sont plus intelligents que nous parce qu’ils agissent naturellement, sans trop de réflexions ni d’objectif destructeur. On pêche 90% des poissons de l’océan et on en gâche énormément en jetant. L’homme a envie d’avoir toujours plus de tout, et crée un déséquilibre.

Comme nous arrivons à la fin de cette interview, peux-tu me dire quels sont les 5 albums que tu as le plus écoutés dans ta vie ?

Okay… alors… Ce n’est pas une question difficile : I, the mask de In Flames. Ten thousand days, de Tool. Diamond eyes de Deftones, Half of the bowl de Shovel et Staind de Staind. Je garde toutes ces infos sur mon profil Spotify…

Quelle pourrait être la devise de Klogr aujourd’hui ?

« Soyez authentiques ». Si tu veux partager ta musique avec le public et sans chercher à être rock star, alors pose toi et reste authentique…

As-tu quelque chose à rajouter pour conclure ?

Oui, je pense vraiment que Fractured realities est notre meilleur album à ce jour. Ca fait prétentieux, mais on a beaucoup travaillé dessus et clairement, il surpasse le reste. Nous sommes impatients de le présenter en concert et de pouvoir ensuite aller discuter avec le public au stand de merch. On verra si j’ai tort ou raison ! J’espère qu’on pourra se voir à un de ces concerts !

Interview BONE RIPPER

Interview Bone Ripper. Entretien avec WD Glashouwer (chant). Propos recueillis par Zoom le 10 octobre 2024.

Comme c’est la première fois que nous échangeons, peux-tu me raconter l’histoire de Bone Ripper ? D’où venez-vous, quand vous êtes-vous formés, pour quelle raison ?

WD : Beaucoup de questions ! Nous venons du nord des Pays-Bas, nous sommes originaires de Harlingen. Bone Ripper est né il y a maintenant deux ans, mais le groupe n’est pas si jeune que ça. Nous faisions partie d’un groupe avant, Manu Armata, un groupe hardcore qui a démarré en 2007. Le groupe était composé de 4 personnes – un batteur, un bassiste, un guitariste et moi au chant. Le guitariste a décidé d’arrêter et on s’est demandé si on cherchait un autre guitariste pour continuer avec Manu Armata ou si on décidait de laisser tomber le groupe pour faire autre chose…  Ce que nous avons décidé, c’est d’intégrer deux nouveaux guitaristes, il y a toujours le batteur, le bassiste et le chanteur d’origine. Pour nous, il s’agissait d’une nouvelle opportunité puisque nous avions passés 15 ans avec seulement un guitariste, nous avions développé une certaine forme de hardcore et là, nous avons eu l’occasion de faire les choses… pas différemment, mais avec plus de possibilités puisque nous avons choisi de travailler avec deux guitaristes. On peut explorer d’autres horizons. Aussi, le guitariste de Manu Armata était un membre fondateur, alors on a décidé de ne pas continuer sous ce nom. On ne veut pas finir comme ces groupes qui n’ont plus qu’un membre original et continuent d’utiliser le même nom. Donc, on a choisi de devenir Bone Ripper. Le groupe n’a certes que 2 ans d’existence mais dans la réalité, nous avons près de 17 ans d’expérience !

Comment décrirais-tu la musique de Bone Ripper ?

Nous, on appelle ça du hardcore metallique ! C’est toujours du hardcore mais il y a plus d’éléments, d’influences metal, comme les riffs de guitares, la double grosse caisse… Avant, on était plus dans l’esprit direct des groupes de hardcore new-yorkais.

Quand j’ai écouté votre album, j’ai perçu beaucoup d’influences thrash, Exodus, Metallica, Slayer, tout ce metal de la Bay Area mélangé au hardcore…

Oui, je vois ce que tu veux dire. Je pense que pour beaucoup de ces groupes, le chanteur a une influence sur le genre. Je suis un chanteur hardcore, et j’ai le sentiment d’avoir un certain flow, je cherche des airs sur lesquels le public peut chanter avec nous, on fait souvent ça dans le hardcore. Si tu écoutes le metal plus classique, il y a plus de cris, moins « d’hymnes ». C’est une chose fondamentale dans le hardcore. Notre guitariste vient du metal, et je pense qu’il est très inspiré par ces groupes de thrash old school, comme il est attiré par des groupes plus modernes, bien sûr. Il y a une vraie combinaison de tout ça chez nous, et j’entends souvent les gens me le dire. Je ne peux le nier, il y a des influences thrash. Mais, tu sais, pour moi, il est toujours difficile de placer une étiquette sur ta musique.

C’est en tout cas de l’énergie pure. Cet album est rapide, puissant, énergique et direct. Il dure à peine 25’.

Je sais ! Il y a beaucoup d’albums metal avec de chansons qui durent 5 ou 6’. Dans le hardcore, on peut même avoir des titres qui ne durent qu’un ou deux minutes (rires) ! L’album n’est pas long mais il dure selon moi juste ce qu’il faut.

La première fois que je l’ai écouté, j’en attendais plus. Je me suis dit : « quoi ? Déjà fini ? » J’en voulais plus !

C’est plutôt un bon signe, non ? Je veux quitter les gens quand ils en veulent un peu plus. Je l’ai vécu aussi, il y a des disques dont tu voudrais entendre plus de choses. Mais il y a aussi ceux où, après six ou sept chansons, tu décroches. Il y a tant d’album avec, quoi ? Huit chansons, plus une intro, un interlude, donc il y a dix titres mais seulement huit chansons. Les gens, quand ils aiment, ils en veulent toujours plus, et c’est toujours bon à entendre.

D’après ce que je sais, il y a 3 frères dans le groupe.

C’est exact, oui.

Comment travaillez-vous ensemble ?

Ça va tout seul. Visiblement, je suis un de ces frères (rires) ! L’un des guitaristes est mon frère, et le batteur est mon plus jeune frère. Il était également l’un des fondateurs de Manu Armata, donc je jouais déjà avec lui depuis 15 ans. Avec mon autre frère, je jouais dans un autre groupe en tant que bassiste quelques années. Tu sais, quand il y a ce genre de fratrie, on écoute souvent le même genre de musique, on fait partie de groupes. On n’a jamais vraiment eu l’occasion de faire quelque chose ensemble alors on s’est dit que ça pouvait être l’occasion de pouvoir, enfin, jouer ensemble entre frères ; Le truc marrant, c’est que le guitariste qui a quitté Manu Armata est revenu un an plus tard, a réintégré le groupe parce que le guitariste qui jouait dans Bone Ripper avec mon frère a fait un burn-out et il ne pouvait plus continuer. Donc j’ai demandé à notre ancien guitariste… Tu sais, j’ai bossé avec lui dans deux ou trois groupes, on a commencé ensemble quand j’avais 13 ans, j’en ai aujourd’hui 44… On fait de la musique ensemble depuis près de 30 ans et, en fait, c’est un peu comme si lui aussi était un autre de mes frères.

C’est donc plus une fratrie qu’une dictature, Bone Ripper…

Exactement. Il n’y a pas le big boss du groupe. Quelqu’un doit s’occuper du business et tout le monde suit. Mais si quelqu’un n’est pas d’accord, nous en discutons. Il n’y a jamais de clash, ça marche très bien comme ça.

Un groupe de rock, est aussi destiné à jouer sur scène. Quelle est la situation de Bone Ripper de ce point de vue ? Est-ce que le nom de Bone Ripper a fait son trou et avez-vous la possibilité de donner des concerts et quels types de shows donnez-vous ?

Manu Armata était un nom assez connu sur la scène métal des Pays Bas, on a aussi beaucoup joué en Europe. Maintenant, ce n’est pas comme si on l’avait simplement remplacé, mais c’est plus facile pour nous, en tant que groupe, de ne pas avoir à tout recommencer et jouer dans des pubs ou au bar du coin de la rue devant trois personnes. Non, ça a plus été : « oh, ils ont un nouveau groupe ? Qu’ils viennent jouer ici ! » Ça a donc été relativement plus facile, et on a déjà donné beaucoup de concerts par ici, dont des festivals, mais aussi en Allemagne… Les gens commencent à citer le nom de Bone Ripper grâce à ces concerts.

Avec un album qui ne dure que 25’, j’imagine que vous intégrez aussi quelques titres de Manu Armata dans vos sets ?

Non, non ! En fait, si, on en joue un (rires) ! Mais c’est juste parce que l’ancien guitariste est revenu. En gros, ce que nous sommes aujourd’hui, c’est Manu Armata avec un guitariste de plus ! Lorsqu’il est revenu, nous avons décidé d’intégrer une chanson de notre ancien groupe. Mais nous avons aussi sorti l’an dernier, en janvier, un Ep de 6 titres, donc on a celles-ci et le 8 titres de l’album. Quand on s’est lancé dans l’aventure Bone Ripper, nous devions nous assurer d’avoir suffisamment de nouveau matériel pour pouvoir donner des concerts. Nous ne voulions pas nous retrouver en studio de répètes pendant deux ans avant de pouvoir jouer. Quand on a commencé, on avait déjà des chansons composées et on a décidé de faire un Ep qui permettait aux gens de découvrir le groupe avant de venir en concert. On a immédiatement commencé à travailler sur notre album, World ablaze, immédiatement après.

De quoi traitent les paroles de l’album ? Son titre est déjà très explicite…

Je parle de beaucoup de choses… Le titre de l’album est, comme tu le dis, un message en soi. Les guerres qu’il y a dans le monde, les politiques de droites qui montent partout, le réchauffement climatique, la discrimination… Je travaille ces thèmes individuellement et il y a une autre partie de mes paroles qui sont assez négatives mais je ne veux pas que les gens ne voient que le côté négatif. Alors j’écris aussi des textes au sujet de victoires dans nos vies, de victoires dans nos combats, face à l’adversité. Ce ne sont que des choses que je vis et rencontre, des évènements qui se produisent autour de moi, dans le monde…

Y a-t-il des paroles ou des thèmes qui n’ont pas leur place chez Bone Ripper ?

Non, je ne crois pas. J’écris sur des thèmes qui me concernent. Je n’évite rien, je ne me dis pas que je ne peux aborder tel sujet… J’écris avec mon cœur.

Et les autres membres du groupe, de cette fratrie, ont-ils un mot à dire s’ils ne sont pas d’accord avec les paroles ?

Oui, bien sûr, s’ils ne sont pas d’accord, on peut en parler. Mais jusqu’à présent, ils sont d’accord avec ce que j’écris. Aussi, lorsque j’écris, on se retrouve et je leur explique le thème, ce que les paroles signifient pour moi, le pourquoi et le comment de ce texte. Tu sais, on est 5 dans ce groupe et chacun, naturellement, a son opinion. Nous allons cependant dans le même sens, ce n’est pas comme si dans le groupe il y avait quelqu’un d’extrême droite et quelqu’un d’extrême gauche. Il y a des perceptions différentes, mais on a des idées communes à la base. Depuis tout ce temps, ils me connaissent et savent ce que je pense. Bien sûr, si je commençais à écrire des texte sur la suprématie blanche, ils me demanderaient tous « mais c’est quoi cette merde ? »  (rires) !

Pour quelqu’un qui ne vous connait pas, si tu devais ne retenir qu’un seul titre de World ablaze pour expliquer ce qu’est Bone Ripper aujourd’hui, ce serait lequel ? Celui qui vous représente le plus.

Je pense que ce serait Fear of death. Il y a tous les éléments musicaux qu’on trouve chez nous, et, en ce qui concerne les paroles, elles semblent sombres mais dans l’ensemble c’est une chanson assez positive. L’un dans l’autre, c’est un choix qui montre ce qu’on cherche à faire la plupart du temps.

Je ne connais pas la situation musicale aux Pays-Bas excepté pour certains groupes. Vous vivez de votre musique ou avez-vous d’autres métiers à côté ?

Bien sûr, on travaille à côté. Personnellement, j’ai un studio d’enregistrement à côté, c’est ma principale source de revenus, mon occupation principale. Les autres ont aussi un travail régulier. Notre batteur est graphic designer, il travaille pour une agence marketing, il réalise des logos et des sites web. Eric, notre guitariste, travaille pour une entreprise qui fabrique des gros appareils frigorifiques. Mon frère, l’autre guitariste est un manager pour une industrie agro-alimentaire, des produits laitiers…Le bassiste fait différentes choses : on partage le studio d’enregistrement, il fait aussi du commerce en ligne dans la fabrication de mobilier en bois, et il travaille en free-lance pour une entreprise qui fabrique des gobelets en plastique, ceux que tu trouves en festivals. C’est une entreprise qui collabore avec la plupart des grandes équipes de foot aux Pays-Bas et de grands festivals.

Quels sont maintenant les 5 albums que tu as le plus écoutés dans ta vie ?

Waow ! Pour moi, tout a commencé avec Madball, Demonstrating my style. Un autre album qui m’a beaucoup influencé, c’est In this defiance de Strife. Ensuite… j’écoute beaucoup de hardcore des 90’s, mais ces 2 dernières années j’ai vraiment craqué pour Straight From The Path, Lionheart est aussi un des groupes que j’apprécie. Comme je fais beaucoup de production, j’écoute beaucoup d’albums dont j’aime le son. Oh, c’est une question difficile (rires) !

Je l’aime bien ! Retourne dans ton passé, c’est là qu’on les trouve généralement…

Oui… Il y a bien les premiers albums de Terror… Hatebreed, aussi, j’écoute beaucoup Hatebreed. Mais j’écoute aussi beaucoup de punk et de skate punk… Maintenant, le plus important pour moi reste Madball, c’est le groupe qui m’a donné envie de me lancer.

Quels sont les projets de Bone Ripper pour 2025 ?

Le principal, comme toujours, c’est de pouvoir donner de bons concerts et rencontrer des gens. Nous sommes 5 avec chacun des obligations, ce qui nous empêche d’organiser une grande tournée. Mais pour 2025, on voudrait faire quelques festivals, ce qui est en cours, et on voudrait aussi pouvoir tourner en Allemagne, au Danemark, un peu plus à l’étranger, un ou deux week-ends.

Vous avez signé avec une agence de booking ?

Non… Manu Armata avait signé avec un label français je crois, mais avec Bone Ripper, nous avons décidé de tout faire nous-mêmes. Nous avons simplement recruté Mike (Mike de Coene, Hard Life Promotion) pour s’occuper des relation médias pour nous. Pour le reste, c’est nous qui faisons tout.

As-tu quelque chose à rajouter ?

Non, merci pour cette interview, c’était une conversation sympa. J’invite simplement les gens à écouter notre album – on peut le trouver sur Spotify…

Et achetez l’album !

Oui, achetez-le, mais si vous ne le pouvez pas, écoutez-le sur Spotify, ça nous rapportera 0,0001 euro. Si les gens apprécient l’album, c’est le principal. Si vous pouvez venir nous voir en concert, si vous pouvez nous booker pour un concert aussi, nous serons là !

Interview: ASYLUM PYRE

Asylum Pyre: Fabien, Ombeline, Yohann, Clément et Thomas

Interview Asylum Pyre. Propos recueillis au Dropkick Bar d’Orléans le 27 septembre 2024. Entretien avec Ombeline Duprat (chant), Yohann Cadot (guitare, chant), Thomas Calegari (batterie) et Clément Botz (Attractive Chaos, remplaçant exceptionnel de Pierre Emmanuel Pelisson, guitare) et, à la fin, Fabien Mira (basse)

La dernière fois que nous avons échangé, c’était pour la sortie de votre précédent album, N°4. Le nouvel album, Call me inhuman est sorti il y a quelques mois. Quels sont les retours que vous en avez eus ?

OD : Globalement, très positifs et enthousiastes. Les gens étaient vraiment très contents…

« Ils étaient »… Ça veut dire qu’ils ne le sont plus ?

OD : Si, si, ils le sont toujours (rires) ! La sortie de l’album remonte déjà à l’année dernière. On a eu de très bonnes chroniques dans la presse, donc ça a été un succès critique.

YC : Album du mois dans Rock Hard, Italie et Allemagne, et quelques classements dans les meilleurs albums de l’année aussi… On n’a jamais eu ça avant…

Et on se sent comment dans ces moments-là ? Je ne le demande pas à Clément… (rire général)

YC : Ah… L’égo est satisfait, au moins du point de vue « travail bien fait ».

La suite est pour quand, alors ?

OD : Justement, ce matin encore, on était en train de travailler sur le prochain. Pas de date à annoncer parce que ça reste compliqué pour nous de se voir et d’avancer sur l’album… Mais qui sait ? L’enregistrement sera sans doute l’année prochaine ? On n’a jamais vraiment arrêté… De toutes façons, Yohann… On a coutume de dire qu’une fois qu’on en termine un, il a déjà dix autres albums prévus derrière. Un poil moins, mais il y en a trois ou quatre (rires)

YC : Oui, c’est un peu ça… Après, aujourd’hui se pose la question du format… Album ou pas ? Petite partie par petite partie ? Moi, je suis amoureux du format album, autour de 45/50’… Est-ce que c’est la bonne chose aujourd’hui ?

Aujourd’hui, peut-être pas, mais dans votre cas, il y a une histoire qui se suit, donc le format album parait logique…

OD : Oui, ça parait logique mais derrière… C’est la question de la pertinence de sortir un album… S’il n’y a pas de tournée derrière, un album a deux semaines de durée de vie, et encore ! Ça veut dire travailler dessus pendant 3 ou 4 ans sur quelque chose dont, au final, tu ne fais plus rien deux semaines plus tard…

Justement, vous avez fait quoi depuis la sortie de Call me inhuman ?

JC : On a donné quelques concerts, on n’a pas eu l’occasion de faire une vraie tournée de 10/15 dates, pour des raisons financières, d’organisation, de support… Sinon, on serait partis avec plaisir.

Visuellement, sur N°4, il y avait une princesse qui se protégeait avec un masque à gaz. Là, il s’agit de la même princesse devenue carnivore, anthropophage même ?

JC : Depuis le début, en fait, cette image féminine, c’est celle de Gaïa, Mère Nature. Elle est représentée avec le masque… D’ailleurs, on le rappelle à chaque fois, c’était bien avant Covid (rire général)…

OD : On aurait dû mettre un pangolin…

YC : Cette femme, c’est notre « mascotte » qui vit différentes aventures. Elle est plus apeurée sur N°4 tandis que sur Call me inhuman, on sent qu’elle s’énerve un peu.

Vous abordez quoi comme thèmes sur ce dernier album ? Toujours l’environnement, mais j’ai aussi l’impression que vous mettez un peu plus le doigt sur notre inhumanité…

YC : C’est ça. Déjà, c’est la suite des albums précédents puisqu’il y a une histoire depuis le début, on installe les personnages petit à petit. Il y a une sorte d’armée de résistants, les Fighters, avec d’autres gens autour qui nous aident. Là, le « inhuman » est résumé avec le dernier titre de l’album, Call me inhuman, dans lequel il y a cette phrase : « si tout ce que je vois est humain, alors je veux être inhumain ».

En gros, si Dieu a fait l’homme à son image, on peut se poser des questions…

YC : Voilà, exactement…

Il y a eu Covid entre temps, cependant, comment analysez-vous l’évolution du groupe entre ces deux derniers albums ?

TC : Je trouve que N°4 a défini une sorte de nouveau départ. Je suis arrivé pour défendre l’album en tournée et au niveau des gens qui sont restés dans le groupe, ça a amené Yohann à écrire la musique un peu différemment, lié avec les gens qui étaient là. Là, ça fait deux albums de suite avec une formation plutôt stable. Ça s’est affiné autour d’un noyau de gens qui sont là. Personnellement, j’amène ce que je peux, ce que je sais faire et Yohann se dépatouille pour faire quelque chose. Au final, ça donne deux albums cohérents avec une évolution. Il y avait une patte avant, il y a quelque chose de neuf sur N°4 qui reste sur Call me inhuman. Qu’est-ce qu’on va faire sur le suivant ? Yohann nous a parlé de séances de travail basse/batterie en plus de ses séances avec Ombeline, donc nous aussi on va faire des choses, se laisser porter.

Ombeline, on a suivi tes aventures bosniennes. Est-ce que ça a eu un impact sur l’écriture, la composition ou l’enregistrement de cet album ?

OD : Mmhh… Non, pas du tout je pense.

YC : Pour le prochain, probablement un peu, oui…

OD : Oui, parce qu’il y a des thématiques qu’on va évoquer, on va faire des parallèles avec des vies de personnes qui existent vraiment, mais en soit, non, ça n’a pas changé grand-chose.

Je trouve qu’il y a musicalement quelques influences de ce côté…

OD : Pour le coup, ça, ce sont mes propres influences musicales mais que j’avais bien avant d’aller vivre en Bosnie. Comme le disais Thomas, on vient chacun avec un bagage musical particulier, ensuite, on dit à Yohann « je voudrais essayer ça » et il se débrouille ! Parfois ça colle, d’autres fois, non…

TC : Il est plutôt preneur de propositions… Il fait avec et on voit ce que ça donne…

Donc, il y a une sorte de pot commun d’idées (Ombeline approuve) avec une sorte de chef d’orchestre qui met le tout en forme. Dictateur ou pas ?

Tous : Non… non…

Vous avez un discours très écolo, avec un discours proche de l’Homme. Y a-t-il des sujets particuliers que vous avez abordés sur cet album ?

YC : Oui, et qu’on va encore plus aborder sur le prochain album. Maintenant, c’est très, très compliqué d’en parler juste comme ça en quelques mots… Globalement, dit comme ça, ça peut paraitre simple : si tu prends The nowhere dance qui parle de gens qui vont être happés par certaines choses complètement futiles en dansant sur de futurs cadavres, c’est un peu ça la thématique. Maintenant, il y a une note d’espoir sur Virtual guns ou Fighters. Je ne suis pas super optimiste dans l’ensemble, mais il y a quand même des gens bien (il sourit). Autant essayer de construire avec ces gens.

Il y a un certain engagement dans les textes… Tout le monde participe à l’écriture des paroles ?

OD : Là aussi, c’est ouvert (rires) !

YC : C’est pareil, on discute beaucoup. Parfois on est d’accord, parfois pas, donc ça alimente les thématiques. Pour le prochain album, Ombeline m’a parlé de certaines personnes qu’elle a rencontrées, ce qu’elle disait tout à l’heure. Ça peut être vraiment inspirant de parler d’histoires ancrées dans le réel, de parler de vrais fighters…

D’autant plus avec des cultures différentes…

YC : Oui, il y a ce pont entre différentes cultures, c’est quelque chose d’imoirtant pour nous.

OD : Ça fait de vraies histoires à raconter. Ce qui a été écrit, cette espèce de dystopie, ça fait une histoire qu’on raconte depuis plusieurs albums, sauf que là on commence à varier avec des choses qui se passent dans la vie réelle. Alors, ce n’est pas dit tel quel, mais il y a une vraie inspiration, il y a des gens qui font des choses, vraiment. On trouvait intéressant d’ancrer ce réel dan la musique, de parler, de rendre hommage à ces personnes-là qui, du coup, risquent leur vie.

YC : Parfois, lorsque j’écris certaines choses qui peuvent être vues par certains comme extrêmes, je demande à Ombeline si elle se sent de chanter ça…

OD : Ah, c’est moi la caution ?

YC : Ouais (rire général).

Y a-t-il, au contraire, des thèmes que vous n’aborderez pas, qui n’ont pas leur place dans le groupe ?

YC : Ouais… des trucs à la con, « I love you machin, mon amour machin »…

OD : Tu vois, il est très optimiste !

YC : Des choses qui ont été faites 50 milliards de fois, des love ballads…

Il y en a qui marchent encore…

YC : Oui, mais ça a été fait et très bien fait par d’autres. On ne va pas refaire ce qui existe déjà. On veut faire quelque chose avec notre propre identité. C’est une thématique dont on pourrait se demander ce qu’elle vient faire chez nous…

Vous avez cet engagement sur disque. Est-ce qu’il se traduit aussi à l’extérieur ?

OD : Je l’ai fait pendant des années, avec le WWF et d’autres, et c’est vrai que je n’ai pas repris depuis que je suis partie en Bosnie.

YC : Encore une fois, c’est difficile à expliciter. Oui et non, on a tous nos contradictions… pour moi, c’est la limitation de la viande, des déplacements, même si ce sont des choses à faible impact. J’ai un travail scientifique à côté et je bosse sur des projets qui ont pour objectif de limiter certains impacts. On peut avoir des discours extrêmes, mais il faut aussi avoir des discours de réalisme. On ne peut pas dire demain aux gens que l’avion ou la voiture, c’est fini. Si on doit continuer de les utiliser, on peut peut-être le faire d’une autre façon, d’une meillleure façon, en limitant l’impact. Modestement, dans mon travail, j’essaie d’inclure ces limitations…

TC : Moi, je fais régulièrement des maraudes la nuit avec les gens de ma ville. On bosse avec une asso et on distribue de la nourriture, des boissons. Ça s’est présenté, et ce qui est marrant, c’est qu’il y a une grosse liste d’attente de gens qui veulent aller aider. C’est même pas évident de pouvoir aller faire ces maraudes !

Et toi, Clément ?

CB : J’ai un certain engagement dans la vie de tous les jours, plutôt vegan, et de façon générale, je fait tout en télétravail pour limiter au maximum mes déplacements (NdMP : à ce moment, le soudcheck baterie redouble) Ah, ouais, on entend bien la batterie, tu va pouvoir enregistrer ?

Normalement, oui, mais je ferai le tri si nécessaire, j’ai eu pire !

CB : Je fais donc en sorte de limiter l’impact de mes déplacements.

YC : Je voudrais rebondir là-dessus, parce que c’est vrai que la thématique sociale est peut-être moins évidente dans les paroles. Elle est liée aussi aux gens qui n’ont vraiment aps eu de pot… Si on pouvait aussi citer l’association Chapitre 2 qui œuvre pour les gens qui sont en très grande précarité. J’ai eu l’occasion de les côtoyer, ils sont vraiment très investis.

On a commencé à aborder le sujet, quelles sont vos autres activités ? Un groupe comme Asylum Pyre ne vit pas de sa musique.

OD : Je suis journaliste, et j’ai aussi d’autres projets à l’étranger, en Bosnie, dans le secteur culturel.

YC : Je suis architecte système et systémique.

TC : Je suis musicien professionnel, je fais des installations techniques vidéo et je bosse pour une municipalité, je gère le local de répètes.

CB : Je suis chef de projet numérique et développeur.

Concernant l’album, qui est sorti il y a quelques temps, si vous deviez ne retenir qu’un seul titre de Call me inhuman pour expliquer ce qu’est l’esprit de Asylum Pyre à quelqu’un qui ne vous connait pas, ce serait lequel ? Pas le meilleur, pas votre préféré mais le plus représentatif ? Et ce n’est pas forcément le même pour tous…

OD : Le plus représentatif ? J’aime bien The true crown (I seek your war), parce que d’un point de vue musical, il y a un peu de tout. Maintenant, je vais parler en tant que chanteuse, mais c’est aussi là que j’ai pu expérimenter différentes voix. J’ai une affinité particulière aussi avec ce titre, le fait que je vive en Bosnie, avec des gens qui ont tous connu la guerre… « I seek your war », je me le suis approprié différemment. Être avec des gens qui ont souffert, avoir des amis proches, je l’interprète différemment. Il y a une réalité qui s’est greffée sur ce titre qui n’était pas présente au début.

YC : Aujourd’hui, je vais dire Sand paths. Il est assez varié, un peu prog, il y a des passages plus soft, un passage plus dur. Il ne se sufift pas à lui-même pour l’ensemble de l’album mais il y a un peut tout…

TC : Pour moi, ce serait – on ne l’a pas jouée hier à Paris, d’ailleurs – There, I could die. Juste parce que je la trouve super belle. L’ambiance, la voix, c’est un titre un peu différent des autres, peut-être un peu moins violent, mais il y a une ambiance…

Il a fait l’objet d’un clip aussi.

TC : Absolument. C’est un titre très chouette, vraiment.

CB : Je trouve que celui qui est le plus représentatif, c’est Virtual guns. Il y a plein de choses, entre les ambiances, les riffs…

YC : Excellent choix, excellent ! Et Fabien, le bassiste est arrivé…

Alors, Fabien, je ne vais pas reprendre toutes les questions, simplement, quel est pour toi le titre le plus représentatif de l’album ? 5Ombeline se marre) Alors… Fabien s’en va…

YC : Attends, Fabien, reprend les titres !

OD : Bonjour Fabien !

FM : Virtual guns évidemment. C’est le plus varié, plein d’influences, le début est très tribal et après, ça s’énerve… C’est un condensé de tout l’album.

Profitons maintenant du silence qui revient pour une question plus personnelle : quels sont les 5 albums que vous avez le plus écoutés dans votre vie ?

TC : Iron Maiden, Killers, Queensrÿche, Rage for order, un album de Yes dont j’ai oublié le titre… (il le retrouvera plus tard : Big generator), King Crimson, Thrakattak et un des deniers lives de Frank Zappa, The best band you never heard.

YC: Cradle Of Filth, Cruelty and the beast

OD: Ah… Je voulais le citer aussi…

YC : Tu peux. Helloween, Keeper of the seven keys part 2, Blind Guardian, ah… j’hésite entre Somewhere far beyond et Imaginations from the other side… Loreena McKennitt, The book of secrets et Mistral gagnant de Renaud.

OD: Ben… Je ne connais pas le nom des albums… En gros : Mylène Farmer, Goran Bregovic, Champagen for gyspies, Cruelty and the beast aussi de Cradle Of Filth. J’aime beaucoup aussi Honeymoon de Lana Del Rey. Après, il y a des influences diverses, beaucoup de musique classique, surtout du baroque, mais je ne sais même pas quoi citer…

CB : Master of puppets de Metallica, euh… Ah, j’avais tout en tête, j’ai tout oublié (rire général) ! Images and words de Dream Theater, The perpetual motion de The Old Dead Tree, L’école du micro d’argent d’Iam et Sonder de Tesseract.

FM : Moi, c’est principalement helvétique, avec l’album qui s’appelle The origins (NdMP : va trouver de seul groupe il s’agit avec un titre aussi peu courant…), Epica avec The Quantum enigma, Nightwish avec Once, après, c’est différentes parties de vie… Il y a une époque j’écoutais énormément System Of A Down, Toxicicty, Bullet For My Valentine…

Maintenant, si vous deviez penser à une devise pour le groupe, ce serait quoi ?

YC : Ah, ben on l’a!

OD: Harder, faster, lourdeur (elle explose de rire) ! On en a plusieurs…

YC : Et celle qu’on écrit partout : Tree your mind.

OD : Ça, c’est la devise sérieuse !