Interview BLOOMING DISCORD

BLOOMING DISCORD (Photo promo)

Interview BLOOMING DISCORD. Entretien avec Sam (guitare) et Vincent (guitare rythmique) le 26 février 2024

Je découvre le groupe avec ce premier album, donc commençons avec la traditionnelle question : quelle est l’histoire de Blooming Discord ?

Vincent : L’histoire du groupe ? C’est bien que tu en parles avec nous parce que nous sommes un peu à l’origine de ça. Le groupe a débuté en 2015. Alors, on part de quoi, là ?…

Sam : A l’époque, j’avais un groupe de rock. On faisait des reprises et ça ne me suffisait pas. Je voulais faire quelque chose qui ressemblait plus à ce que j’écoutais, ce qui me faisait rêver quand j’avais 14 ans, Bullet For My Valentine, ce genre de groupes. Un soir, je vais à un anniversaire avec ma guitare et quand j’arrive, Vincent, que je ne connaissais absolument pas, était là et il avait aussi sa guitare. Il jouait toutes les musiques que je kiffais… Depuis, c’est l’amour fou !

Vincent : On a passé la soirée à jouer les musiques de nos répertoire communs. Ca a super bien matché musicalement. L’anecdote, c’est qu’on a passé toute la soirée ensemble, elle se termine, tout le monde s’en va. A l’époque, je dormais sur place. Sam part, puis revient parce qu’il avait oublié sa veste (NdMP : après « l’amour fou » mentionné précédemment, ça commence à ressembler au coup de la panne cette histoire, non ?). Là, il me dit que c’était cool, qu’il a passé une bonne soirée, me dit « je monterais bien un groupe ». Moi aussi, j’en avais envie. On s’est promis de se contacter à la fin de l’été, on avait tous les deux des choses à faire. A la fin de l’été, on s’est retrouvés, on a commencé à répéter tous les dimanches avec notre batteur de l’époque. A partir de là, on a créé le groupe, on a recruté un bassiste… plusieurs bassistes avant de rencontrer Antho. Lui, était à Paris à l’époque, il venait en vacances à Marseilels, d’où il est originaire. Il ne vient pas du tout du metal, à la base, il fait de la tektonik (rires es 2). Il est DJ, aucune connaissance dans le metal.

Sam : D’ailleurs, il n’aimait pas ça, il avait des a prioris sur le metal à la base… On lui a fait écouter nos groupes fétiches et il s’est rendu compte que, en fait, c’était vraiment lui ! Il ne jouait pas du tout de basse à l’époque. Il nous a dit : « les gars, attendez moi, je finis mes études à Paris, et dans 3 moi, je reviens et je veux être votre bassiste ! » On lui a dit qu’on n’avait pas le temps d’attendre, on a vu plusieurs autres personnes et, au final, le temps est passé, et il est revenu… Ce qui était assez frappant quand on s’est rencontrés, Vincent et moi, c’est que lui vient de la musique classique, moi, du rock, et un DJ qui arrive. Les trois se retrouvent et font du metal (rires) !

Oui, maintenant, les mélanges de genres, la fusion, elle donne souvent les résultats qu’on connait…

Sam : Exactement. Blooming n’est pas forcément dans les clous du metal, dans ce qui « est à la mode » aujourd’hui…

Avant de parler de la musique de Blooming Discord, j’ai vu sur un site internet qu’en 2015 vous aviez un autre look que sur les actuelles photos, et d’autres noms de scène. On parle bien du même groupe ?

Sam : Oui, ça a bien évolué aussi ! A l’origine, il y avait une sorte de concept album. L’idée était de sortir un album, pas 2 Ep. Pour des raisons logistiques, d’apprentissage, aussi, on a décidé de scinder les choses : avoir une première expérience en studio pour apprendre, puis une autre pour progresser. On s’est rendu compte que s’était bien d’avoir fait comme ça parce que ça nous a permis de faire ce premier album avec un peu plus de qualité. L’esthétique à la base était très tournée vers nos influences, il y avait un concept, une histoire… Entre temps, on a grandi, on s’est détachés de nos bases, de la dissonance… On a décidé de se recentrer sur quelque chose de plus essentiel. Juste faire de la musique pour kiffer avec le public.

Vincent : Pour bien comprendre, à part Sam qui avait déjà une expérience avec des groupes de reprises, les autres, c’était vraiment notre première expérience. Le groupe s’est formé en 2015 et il y a eu beaucoup de temps d’apprentissage du travail de groupe, de la définition de la direction artistique… A la base, on disait « on aime la dissonance, Tim Burton et on veut créer quelque chose d’assez théâtral ». Ça a beaucoup évolué pendant ces années d’apprentissage. Finalement, ces 2 Ep qu’on a sortis ont été l’aboutissement de tout ce travail de quelques années. Savoir quelle était notre choix artistique. C’est pour ça que notre premier album sort 8 ans après. Il nous a fallu du temps pour apprendre. Toutes les erreurs d’un groupe, on est tombés dedans…

C’est aussi comme ça qu’on apprend et qu’on grandi. Quelles sont vos principales influences aux uns et aux autres ?

Vincent : Ça évolue aussi avec le temps ! En ce moment, je suis assez branché par While She Sleeps, Bring Me The Horizon, il y a beaucoup d’influence de ce qu’on écoutait dans les années 2000, Slipknot, Korn, Steel Panther aussi (rires).

Steel Panther, je l’entends moins !

Sam : A la base, dans le groupe, on est tous, individuellement et profondément amoureux de chaque artiste qui peut transmettre quelque chose à sa manière. Que ce soit dans l’interprétation, dans la sincérité de son discours ou juste avec un concept particulier. C’est pour ça qu’il a dit Steel Panther, mais ça peut même être Queen, Michael Jackson, Elvis… Dès qu’il se passe quelque chose, on a envie de retranscrire cette sensation qu’on a pu éprouver en écoutant, en voyant des artistes en live. C’est ça qui nous anime. C’est une démarche d’authenticité, retranscrire ce qu’on aime chez ces artistes-là. Je pense que tu as pu le voir sur cet album, ce qui nous unis, la musique qui nous fait rêver, c’est celle des années 90/2000. Il y a quelque chose de grunge dans cet album, presque comme si on était nostalgiques de ces années-là, du Grunge, du metalcore. On a voulu reprendre tout ça en se disant qu’on avait envie de rendre hommage à tout ça tout en y ajoutant une touche de modernité.

Rendre hommage à la musique des années 90/2000… Si vous deviez décrire votre musique à quelqu’un qui ne vous connait pas, que diriez-vous ?

Vincent : J’aime bien définir le groupe comme jouant du rock metal. Le mot metal vient après. Il y a vraiment cet esprit rock dans ce qu’on fait. Je pense que quelqu’un qui n’écoute pas de metal peut apprécier. Ça peut être une porte d’entrée d’écouter ce qu’on fait parce que notre musique est assez ouverte. On a du mal à nous définir dans un style, même si en ce moment il y a une tendance très metalcore… C’est un milieu qui a des codes très précis, et nous, on se trouve un peu entre deux. Il y a des choses metalcore, mais en même temps, notre metal est plutôt gentil… C’est pour ça que je dis que c’est une porte d’entrée, les gens qui découvrent ça peuvent se dire qu’en fait, le metal c’est aussi ça…

Ce que j’ai noté en écoutant l’album c’est une variété dans les morceaux. Il y en a qui sont bruts de décoffrage, d’autres plus soft – j’ai noté que Idolies est un titre « tendre » même si derrière il y a des guitares très heavy. Vous ne vous contentez pas de ne faire que du metalcore. Il y a une variété d’influences que vous intégrez dans votre musique.

Vincent : Exactement, et c’est la force d’un album : avec un produit « complet », on peut montrer toutes les facettes de nos influences. C’est très bien d’avoir un morceau très « brut de décoffrage » comme tu disais, mais Blooming Discord, ce n’est pas que ça. C’est bien d’avoir aussi un titre comme Unlive, beaucoup plus… On va sortir les briquets pendant le concert ! Il y a des moments plus émotionnels, tristes ou nostalgiques. On essaie vraiment de faire ressortir toutes nos influences.

Sam : Au-delà de ça, c’est aussi dans la personnalité de chaque membre du groupe, tant dans les influences que dans ce qu’il peut se passer pendant le processus d’écriture. Par exemple, tout le monde a des hauts et des bas dans la vie. Unlive, c’est un moment qui pouvait être difficile dans la vie du bassiste – c’est lui qui l’a écrit. Sur le moment, on n’a pas forcément compris mais on s’est dit que si c’était important pour lui d’écrire cette musique. A la base on se disait que la musique était très belle et ensuite, on a tous traversé des moments difficiles et on a tous chialé sur cette musique. Elle est forte et elle signifie quelque chose pour nous.

Qui sont les musiciens qui composent aujourd’hui Blooming Discord ? Je suis allé vérifier votre site internet et il n’y a rien concernant votre ou line-up sur votre bio…

Sam : Disons que nous sommes dans un collectif où chaque personne apporte quelque chose. Ça part vraiment de la personnalité de chacun.

Vincent : On avait un premier batteur, Sébastien Papillon, qui a quitté le groupe après le premier Ep, et on l’a remplacé par Sébastien Lanthelme, donc on a gardé le « Seb » (rires). C’est quelqu’un qui est arrivé après la fondation du groupe, avec qui on s’entend super bien. C’est comme une famille. Quand on recrute – on a eu des phases de recrutement au début et au milieu quand on cherchait un nouveau batteur – on avait besoin des compétences et du côté technique, mais on avait aussi énormément besoin du côté relationnel, « famille ». Avant de recruter Seb, on a eu plusieurs batteurs qui avaient le côté technique mais avec qui ça ne matchait pas… On ne s’entendait pas suffisamment pour continuer dans le bon sens. Quand on a rencontré Seb, ça a collé directement, amicalement ou au niveau des compétences. Ca fait maintenant trois ans qu’il est avec nous. Il y a donc Seb à la batterie, Sam, guitariste soliste et fondateur du groupe, moi-même, fondateur également et guitariste rythmique, Anthony Scavenger, le fameux bassiste qui voulait rentrer dans le groupe et qui a acheté une basse pour ça, et Karim, alias Cage, le chanteur qui est entré dans le groupe aux tous débuts.

Parlons un peu de Karim, justement. Je suis très exigeant sur le chant anglais. Vous avez fait le choix de chanter en anglais et, pour une fois, j’ai la très agréable surprise d’écouter quelqu’un dont l’anglais est parfaitement compréhensible.

Sam : Alors… Karim il parle toutes les langues du monde (rires) ! Il est « multilingue », il parle français, arabe, italien, espagnol, c’est un don qu’il a… Il est trop fort !

Mais son anglais, il le travaille d’une manière particulière ?

Sam : Il a vécu une grosse partie de sa vie en Egypte et il me semble que l’anglais, là-bas, est assez parlé. Et il a beaucoup voyagé, aussi.

Vincent : Il faut aussi savoir que Karim est également champion du monde d’orthographe en français ! A 8 ans ! On crèche chez sa sœur à Paris qui nous a confirmé que c’est vrai. Bon, il n’avait pas 8 ans, elle nous a dit qu’il avait 13 ou 14 ans, il a été dans un concours d’orthographe, un concours mondial. C’est une compétition où il n’ya avait que des vieux, et c’est lui, à 14 ans, qui a gagné et devenu champion du monde d’orthographe. Voilà… Il a un côté littéraire très poussé et son don de pouvoir parler plusieurs langues doit venir de là.

Et c’est très agréable de pouvoir enfin écouter un groupe français dont le chant anglais est passe partout. Je pars du principe que si tu décides de chanter en anglais c’est que tu envisages de pouvoir exporter ton groupe hors de frontières francophones. Vous le féliciterez de ma part ! Maintenant, j’ai aussi l’impression qu’il y a parfois deux chanteurs : du chant clair, du chant guttural beaucoup plus brutal… C’est lui qui s’occupe de tout le chant ?

Vincent : En studio, oui, à 98%. Il y a quelques parties qui sont chantées soit par Sam soit par nous en clair. Les back, en live, ce n’est pas lui qui les fait, normal, mais en studio, c’est lui, oui.

Si l’un et l’autre vous deviez ne retenir qu’un seul titre de Memories from the future pour décrire à quelqu’un qui ne vous connait pas ce qu’est Blooming Discord aujourd’hui, ce serait lequel ? Pas le meilleur, pas votre préféré, vous avez trois minutes pour convaincre avec un titre…

Sam : S’il y a trois minutes pour convaincre, disons qu’avec Latch tu auras une bonne idée. Il y a cette volonté d’être une porte d’entrée vers le metal

Vincent : Il y a ce côté festif…

Sam : Festif et fédérateur, il y a du chant clair, du chant saturé, il ya de l’énergie. Je dirais Latch. Après, personnellement…

Ce n’est pas ma question (rire général) ! Tu as dit Latch, ça me va. Vous êtes tous les deux d’accords, sur ce titre ?

Sam : Oui, après, personnellement je pense qu’on est aussi tous les deux d’accord (rires) !

 Mais ce n’est pas ma question, je m’en fous de ça ! Vous m’avez parlé de 2 Ep ; j’ai trouvé Bramble and bones, mais pas le second, comment s’appelle-t-il ?

Sam : A la base, ça devait n’être qu’un album comme on l’a dit, qui s’est transformé en 2 Ep : le premier Bramble and bones, et le second Chamble and stones.

Le titre de l’album, Memories from the future, est assez dystopique. Vous traitez de thèmes particuliers ?

Sam : Ce qu’on aime bien, c’est ne pas donner de réponses aux sujets qu’on traite. Il y a un côté très philosophique… C’est Karim qui écrit la plupart des textes. On ajoute des petites choses de temps en temps, mais c’est principalement lui qui s’occupe de tout. Il faut savoir que Karim, c’est une âme…

Vincent : Torturée.

Sam : Voilà, torturée, qui, comme on le disait tout à l’heure est très orienté littérature. On aime ce côté-là de Karim qui aime poser beaucoup de questions sans apporter de réponses…

Vincent : Au-delà de ça, Karim a un côté très mystérieux, on ne le connait vraiment que quand on écoute et qu’on lit les paroles. Les paroles de cet album sont profondément introspectives. Il parle vraiment de choses qui lui sont propre et on peut en interpréter pas mal de choses sur, par exemple, des pulsions émotionnelles, qui sont contrastées. Le fait de s’avouer qu’on aime des choses, par exemple « tu ne te souviens pas de moi mais je me souviens de toi » (« you don’t remembrer me but I remember you »), ça ne s’adresse pas à quelqu’un en particulier, ça s’adresse à lui-même… Il ya beaucoup de contrastes dans Blooming Discord. Rien que dans le nom, déjà : Blooming, c’est la floraison, Discord, la discorde, le chaos. D’un point de vue instrumental aussi, il y a beaucoup de montées, de tensions, de détentes…

Y a-t-il des sujets que vous estimez, aujourd’hui, ne pas avoir leur place dans Blooming Discord ?

Sam : Politiquement… On est un groupe qui parle des difficultés de la vie, de la difficulté de gérer ses émotions, certaines situations. On n’a pas forcément envie de s’engager politiquement. Non pas qu’on n’a pas envie de prendre de risques, c’est juste que ce n’est pas le but aujourd’hui…

Si vous deviez penser à une devise pour Blooming Discord, ce serait quoi ?

Sam : Lanister paye toujours ses dettes (rires) ! Non… On peut prendre une seconde ? Ce serait « faire la fête et niquer des mères » (rires des deux ».

Vincent : En fait, on a la volonté de vouloir unifier les gens dans la fête…

Donc il y en a un qui est plus foncièrement rock n roll et l’autre qui cherche à rattraper le coup (les deux se marrent) ! Vous avez quelque chose à ajouter pour clore cet entretien.

Sam : Simplement que les gens qui vont lire cette interview aillent écouter Blooming Discord, qu’ils soient novices ou pas dans le metal. Il ne faut as penser que ça ne va pas vous plaire, chacun peut se reconnaitre dans pas mal de chanson. Et on est chauds pour venir faire la fête avec eux.

Quels sont justement vos projets de concerts ?

Vincent : On a quelques concerts de prévus : il y en a un le 23 mars à Avignon, à l’Aquabar, en compagnie de Scarlean et d’autres invités. On a fait notre release party le 7 février, sold out sur préventes et il y a beaucoup de gens qui n’ont pas pu rentrer… Du coup, on a réussi à trouver une date « de secours » pour ceux qui voudraient venir, ce sera le 29 mars au Jazz road de Mirabeau, à côté de Marseille, ensuite, le 31 mai pour un tremplin pour le Metaldays (NdMp : en Slovénie) de 2025.Quatre groupes vont jouer, l’un des quatre sera sélectionné par un jury pour aller jouer au Metaldays en 2025. On a aussi nos premières dates européennes : une à Milanet une à Bologne, en Italie, les 3 et 4 mai. On prépare ensuite une tournée pour l’automne 2025. On voudrait traverser la France en ligne droite, on ferait Marseille, Lyon, Paris, Lille, Bruxelles…

C’est pas tout à fait une ligne droite…

Vincent :… Quasiment (rires) ! on aimerait bien sortir un peu plus, aller en Allemagne…

Merci à tous les deux, j’espère pouvoir vous voir sur cette tournée si vous passez par Orléans

Sam : Avec plaisir ! On y a joué il n’y a pas très longtemps, c’est une très belle ville. On a été épatés par la beauté de la ville et on a envie de revenir !

SIDILARSEN au Rock In Rebrech 13: entretien avec l’orga

Entretien avec Arno T. WALDEN, organisateur du festival Rock In Rebrech. Propos recueillis le 3 février 2024.

Les 25 et 26 mai prochains se tiendra la nouvelle édition du festival Rock In Rebrech. La petite commune voisine d’Orléans accueillera pour l’occasion un plateau 100% français avec la présence des locaux de La Jarry, la venue des Princesses Leya et une très belle tête d’affiche avec les Toulousains de Sidilarsen. Arno nous explique tout de cette 13ème édition – et plus encore… Visitez dès à présent le site pour obtenir vos billets: Rock In Rebrech 13 ou avec le lien Helloasso

Arno T. Walden – Rock In Rebrech

Pour commencer, Arno T. Walden… Qui es-tu ?

(Rires) Je suis un musicien qui a fait ses premières armes sur le secteur d’Orléans. Ensuite, je suis allé à Paris, j’ai suivi des formations dans une école de chant, je suis parti en Angleterre, j’ai pas mal voyagé, en fait, avant de revenir m’installer dans la région. A une époque, j’étais intermittent mais après j’ai cessé. Et j’ai remis le pied à l’étrier parce que ça me manquait… Quand j’ai repris la musique, d’abord pour me distraire, puis, de fil en aiguille, il y a des gars qui m’ont fait me reconnecter. A l’époque, c’était un peu plus long parce qu’il n’y avait pas internet… J’ai fait un album avec un premier groupe, ensuite je suis parti sur un projet plus perso sous mon nom, j’ai fait deux albums, j’ai monté les Troopers (NdMP : The Iron Troopers, tribute band à Iron Maiden, qui sera en concert à Rebréchien le 20 avril prochain). Là, dernièrement, j’ai rejoint Trafic Jam (groupe fondé par Valentin Labani). Je suis musicien professionnel, et depuis quelques temps, je fais aussi du chant classique.

J’ai cru comprendre qu’à un moment tu travaillais aussi pour la municipalité…

J’étais élu. Comme tout bon citoyen, tu peux faire partie du Conseil municipal. J’ai trouvé ça intéressant, et je faisais partie de l’équipe, on a remporté le mandat précédent et j’ai été délégué à la culture. Déjà, avant, en tant que bénévole, je m’occupais du Rock in Rebrech. Là, en étant à la mairie, j’étais encore plus impliqué.

Peux-tu nous parler de l’histoire du Rock In Rebrech ? Ce n’est pas la première édition…

Ouh là ! Non, c’est la 13ème édition ! En tout, ça fait 15 ans que le festival existe, avec deux années d’interruption…

Lesquelles ? Je ne vois pas de quoi tu parles…

(Rires) Wasted years… On va éviter de parler de ces mauvais souvenirs… Comment est né le Rock In Rebrech ? Il y a 15 ans, un élu la mairie, Ludovic Langlais, est venu me dire qu’il avait envie de monter un… ce n’étais pas un festival, un tremplin rock sur Rebrechien. Il savait que j’étais musicien, et il voulait que j’utilise mon réseau pour développer son projet. En tant que musicien, ça m’intéresse de voir comment tout ça se passe de l’autre côté de la scène. Mon réseau, il était déjà essentiellement rock, hard rock, metal, donc l’identité « esthétique » du tremplin était toute trouvée. Je n’allais pas faire venir des groupes de reggae ou de pop, ce n’était pas mon domaine. Je ne connais personne là-dedans… On fait une première édition à la salle polyvalente, ça se passe super bien. On remet le couvert l’année suivante, sous la formule « tremplin ». J’étais un peu… frileux, parce que je n’aime pas vraiment cette idée de « compétition » en musique, dans l’art. En sport, OK, mais faire un « concours de musique », c’est tellement subjectif, ça dépend des envies de chacun… Donc, la seconde année, on le refait, mais ça merdouille. Notamment au niveau des votes du public, on n’était pas organisés, certains ont voté 72 fois… Troisième année, on remet le couvert et je suggère de faire venir une tête d’affiche pour rameuter du monde. Mon idée, c’était aussi de promouvoir mon style de musique auprès des gens. Déjà en France, le metal n’est pas très médiatisé, alors en ruralité, on n’imagine même pas ! Je me suis un peu posé comme « pasteur du metal » (rires). On est quand même assez bizarres, nous les métalleux : on a envie que tout le monde connaisse mais en même temps, on veut garder ça pour nous (rires).

On le voit avec les grands festivals. Beaucoup de personnes disent que « c’était mieux avant quand il n’y avait que 2.000 personnes ». Oui, mais derrière, il y a aussi une ambition !

Une ambition, une économie… On n’est jamais contents. Mais c’est un peu les Français… Donc, on fait venir Satan Jokers. Et là… C’est un peu le binz dans l’organisation, on arrivait à la fin du mandat, il commence à y avoir des tensions au sein de l’équipe municipale – je n’étais pas au fait de tous ces aspects-là à l’époque. Je fais venir Satan jokers, mais je jouais aussi. Donc, j’avais une double casquette. Au final, ça se passe super bien et c’est à ce moment qu’il y a la rupture avec le tremplin rock. L’année suivante, je fais partie de l’équipe municipale qui est élue. On remet le Rock In Rebrech sur la table de travail et j’impose en quelques sortes le Rock In Rebrech. On continue avec nos têtes d’affiche, il y a eu Elmer Food Beat, carton phénoménal. On a fait ça dans la salle polyvalente qui peut accueillir, je crois, 300 personnes. Là, on était largement au-delà (rires) !

Donc, il y a eu trois années de tremplin puis la volonté de transformer l’évènement en festival avec une vraie tête d’affiche. A l’époque le festival était gratuit.

Oui, il n’y a que l’an dernier où il soit devenu payant. Mais on va en reparler… Avant, il a toujours rencontré du succès, on a reçu, de beaux noms…

J’ai noté Cock Robin, Vulcain, Chris Slade Timeline, Marco Mendoza (NdMP : respectivement ex-batteur notamment d’AC/DC et ex-bassiste de Whitesnake, The Dead Daisies et d’autres). Comment te débrouilles-tu pour entrer en contact avec gens-là et les convaincre de venir à Rebréchien. Parce que Rebréchien, ce n’est pas Orléans, c’est rural…

On est d’accord ; il y a trois axes fondamentaux : d’abord, en tant que musicien, je connais beaucoup de programmateurs, de boites de booking… j’ai des amis que je contacte, à qui je pose des questions. Je réseaute beaucoup, en direct… Ensuite, comment convaincre les artistes de venir ? il y a le passif : quand ils voient les photos, entendent le bouche-à-oreille… la réputation les convainc. Et le truc « bassement mercantile », l’argent : un artiste a besoin de se nourrir. On lui propose un tarif, il est d’accord, il vient. Ils sont dans cette démarche de promotion, de « capter » des gens qu’ils ne toucheraient pas autrement…

J’imagine que pour des gens comme ceux que nous avons cités, des fines gâchettes reconnues, les tarifs ne sont pas les mêmes. Pour un festival gratuit, comment trouvez-vous les finances ?

Je t’explique en deux temps : premier temps, c’est « l’époque mairie ». A cette époque-là, c’est organisé par la mairie. Il y a une enveloppe globale pour gérer la mairie, et à l’intérieur, un budget pour la culture, entre autres. Sur mon mandat, il avait été choisi de prioriser le festival qui était l’évenement culturel de l’année pour la commune. Il y avait d’autres postes un peu moins couteux, comme des cérémonies. On globalisait tout ça. Le Rock In Rebrech étant gratuit, beaucoup de gens venaient et on se rattrapaient sur la buvette et la restauration. Il y avait aussi un partenariat avec Super U, V and B, des entreprises qui faisaient un peu de mécénat. S’il y avait un déficit, la mairie faisait un jeu de chiffre. Tous les ans, il y avait une compensation de déficit. Naturellement, quand tu fais des entrées gratuites, tu ne peux pas espérer entrer dans tes fonds… De toute façon, la culture n’a pas vocation à être excédentaire. La culture fonctionne aussi avec tous les à-côtés, il faut le comprendre. La culture, la santé, l’éducation… ce ne sont pas des secteurs pour gagner de l’argent. Ils sont là pour apporter de la cohésion dans un peuple, de la matière grise, générer des richesses par ailleurs. Si on prend l’exemple du Hellfest : si le festival s’arrête demain, ce sont tous les Clissonnais qui vont faire la gueule. Parce que le festival permet aux restaurants, aux hôtels, aux Air BnB, aux commerces de faire leur chiffre d’affaires pour l’année. C’est grâce à la culture, il faut vraiment avoir cette vision un peu plus large que le seul concert. Le maire de l’époque avait cette vision. Il avait bien compris cet intérêt de fédérer. Et on parle de Rebréchien ! Ça ne choquait personne, ce déficit. Six ans plus tard, le maire en place – il avait cumulé trois mandats et voulait passer à autre chose, ce que je comprends – se retire. Changement de municipalité, je décide de ne pas me représenter sur une liste. Traffic jam commence à décoller, on est signés sur un gros label, Rockshots records, et je me dis que je n’aurais jamais le temps… Entre ma formation de chant lyrique, les cours de chant que je donne, les Troopers, Trafic jam… « comment je vais faire ? » Je n’aime pas m’engager à la légère, donc j’arrête la mairie. Mais le nouveau conseil me demande de reprendre le Rock In Rebrech, avec l’asso dont je fais partie, No Mad Musik. La nouvelle municipalité a commencé juste avant le covid. L’an dernier, c’était la seconde édition avec eux. La libération arrive, en 2022 on fait venir Marco Mendoza. On a fait un vrai carton, je crois qu’on a eu 3.000 personnes ! Enorme !

Vous avez déplacé le festival en extérieur il y a quelques années. C’est une autre capacité que la salle polyvalente. Vous pouvez accueillir combien de personnes ?

J’ai envie de te dire que c’est presque illimité. Il y a un terrain de foot et tout un espace vert autour de la salle polyvalente. C’est là qu’on installe la scène. Je pense qu’on pourrait accueillir facilement 10.000 personnes. Après, c’est Rebréchien qui aurait des difficultés pour stocker les bagnoles (rires) ! Donc, après cette date avec Marco Mendoza, on s’est dit « c’est bon, c’est parti ! » En plus, on commence à attirer des stars internationales ! Classe. On bosse sur une autre édition, on attire des noms comme Krashkarma, Jelusick… là, on a quelque chose d’intéressant qui commence à se construire. En décembre 2022, je me fais pirater tous mes réseaux : mon compte Facebook, Instagram, mail, le site internet… tout ça pète. Impossibilité de retourner sur les anciens comptes – je suis banni… Je n’arrive à joindre personne, la panique totale… En janvier je crée un nouveau compte, je repars de zéro…

J’ai comme le sentiment que tu vas nous parler de la communication qui a foiré… On en vient donc à cette édition de l’an dernier, 2023, qui a été une grosse déception avec peu de monde…

Voilà… En plus, on a mis un moment à réagir. Tous les comptes connexes, et j’en assume la responsabilité, tous ces comptes, les Troopers, le festival, etc, tout était relié à mon compte sans autre administrateur. Donc tout ça… Terminé ! On aurait dû avoir un autre administrateur, et là, on aurait pu récupérer les comptes. En février, mon ancien partenaire son m’appelle en me disant qu’il n’a pas les reins assez solides pour assurer le son sur deux journées de festival. J’appelle des pros, je vois les montants… On a déjà signé les contrats avec les artistes, on ne peut plus faire machine arrière… Donc là, on devait faire payer les entrées, pas d’autre possibilité. On a fait 3.000 personnes l’année d’avant, faire payer les entrées, même si on ne fait rentrer que 2.000 personnes – là, on était dans nos délires – on fait les calculs, la buvette… L’objectif c’est d’être à zéro… En mars, on enclenche la com physique. Je contacte mon imprimeur qui m’annonce avoir mis la clé sous la porte… Il me donne un contact, un tuyau crevé, j’appelle partout… On fini par trouver quelqu’un en avril. Tu imagines ? En avril ! Le festival il est un mois après ! On n’a pas une affiche, pas de com’ sur internet et là… Coup de grâce : j’apprends qu’il y a un concert qui est organisé, un concert gratuit, à Saint Lié la Forêt, le même jour, avec des food trucks, qu’il y a autre chose un peu plus loin… je n’ai pas eu le temps de rentrer en contact avec eux, mais je suis prêt à parier que tout ça est dû au fait que nous n’ayons pas eu le temps de communiquer. Ils n’ont pas fait exprès d’organiser ça le même jour que nous, ils ne le savaient tout simplement pas ! Avant que ça ne commence, j’étais persuadé que ça allait être la merde. Les gens qui gueulent parce que c’est payant… 8€, quoi ! Comment c’est possible d’avoir ce genre de mentalité aujourd’hui ? Mais quand tu y réfléchis, ça a été gratuit pendant 11 ans, la musique, c’est gratuit – tu as un abonnement à 4€ et tu as tout à portée de main…

Aujourd’hui, on le voit : les groupes, c’est la scène et le merchandising qui les font vivre. Le guitariste de Black Stone Cherry disait il y a peu que la scène, c’est la seule chose que le public ne peut pas pirater ! Tu veux voir un groupe en vrai, tu dois y aller…

Je trouve ça bien. La scène, c’est l’endroit où doit être un musicien.

L’an dernier, il y a eu cette grosse découverte : Krashkarma. Ceux qui ne sont pas venus ou qui ont fait demi-tour peuvent le regretter…

Ah, oui ! Krashkarma, j’ai des nouvelles d’eux très régulièrement, ça faisait un moment que j’avais un œil sur eux. Qu’ils puissent faire cette musique à deux, c’est incroyable ! Je les ai découverts grâce au manager de Trafic Jam. C’est un malin, lui, il déniche des talents…

Ça veut dire que Trafic Jam c’est un groupe talentueux ?

(Rires) Je ne peux pas le dire ! Mais, bon… Mais chez Rock World, sa boite, il va y avoir des trucs intéressants. Jelusick, Krashkarma, tout ça, c’est lui ! Marco Mendoza aussi…

Là, on a toute l’histoire du Rock In Rebrech, dont l’an dernier avec la défection non seulement du public, mais également, le second jour, celle de 50% des food trucks…

Ouais, alors ça… Ils sont là pour faire du business, d’accord, mais ils ont signé un contrat. Tu l’honores, le contrat que tu signes. Je suis musicien, je signe un contrat avec une salle, qu’il y ait 10 ou 10.000 personnes, je joue. Il m’est aussi arrivé de jouer dans des endroits, de festivals ou autre, où il n’y avait pas assez de monde, et je n’ai pas été payé… Tu sais, il y avait un des food trucks, il était tenu par un gars qui venait du monde du cirque. Il me disait « je vous comprends. Parfois, on allait dans un village, on faisait 4.000 personnes, le lendemain, on s’installait ailleurs et il y avait 10 personnes. On donnait quand même notre spectacle. » C’est le jeu… Quand tu acceptes de faire partie d’un évènement, tu en fais partie s’il gagne, mais aussi s’il perd. C’est trop facile de dire « j’accepte d’en faire partie s’ils gagnent » ! On est tous embarqués dans la même aventure. Là, ce qu’il s’est passé, c’était très, très limite. Les food trucks, c’est fini ! Il n’y en aura plus un seul sur le festival. On va faire comme avant : du bénévolat, on va mettre les friteuses, les barbecues, et c’est reparti ! Ce n’est même pas la peine de penser à un food truck ! Non… Le V and B, oui, c’est notre partenaire historique et je les remercie, ils sont incroyables. Le patron des enseignes de Chécy, Ingré et Olivet, Richard Facen, est devenu un ami depuis. V and B est une chaine qui a été lancée dans les années 2000. Leur concept, c’est de vendre de l’alcool, vin et bière, et ils font un peu pub, lieu de détente « afterwork ». Tu peux aller boire un pot jusqu’à 20h, après ils ferment.

Dans un premier temps, lors de la soirée soutien au Rock in Rebrech, tu as annoncé les trois groupes du 25 mai : La Jarry, une formation locale, les Princesses Leya, un groupe humoristique – très sérieux en même temps parce que pour atteindre ce niveau d’humour, il faut y aller – et les Toulousains de Sidilarsen (qui viennent d’annoncer la sortie le 19 avril de leur huitième album Que la lumière soit). Tu as par la suite annoncé que le festival continuerait le 26 mai. Les deux jours seront en extérieur ?

Oui, tout se passera dehors. En fait, ça va ressembler exactement à ce que tu as vu l’année dernière…

Avec plus de monde…

Ben, oui. J’espère bien ! Le samedi, ce sera la journée des « spécialistes », ou des « pros » avec les groupes que tu as cités. Le lendemain, je suis en train de monter la programmation, on va proposer une « scène découvertes » avec des groupes locaux, des gens du coin qui veulent monter sur scène. Je ne peux pas le faire le samedi, j’ai vu comment ça se passe : tout le temps, les gens arrivent vers 18 heures, 19 heures. Faire venir des groupes à 16 heures pour les balances – la tête d’affiche sait sa balance avant les premiers groupes – c’est toute une organisation. Alors faire venir la tête d’affiche le matin pour la mise en place et pour que des groupes locaux jouent devant peu de monde, ça n’a pas de sens. Du coup, on fait le samedi avec les « têtes d’affiche », on va proposer une solution de camping avec vestiaires, douches, des gites… tout ce qu’il faut. Le lendemain, dimanche, ce sera un esprit scène ouverte avec entrée gratuite.

Donc le 25 sera payant. Tu as une idée des tarifs ?

Les préventes sont à 18 euros, ce sera plus cher – environ 20 euros – sur place le samedi (les préventes sont disponibles sur le site du festival: Rock In Rebrech 13 ou avec le lien Helloasso). On fait plus cher, oui. Cependant, j’ai regardé tous les festivals qui accueillent Sidilarsen cette année, le moins cher est à 17 euros. Partout où ils vont, c’est ce tarif. Et puis, j’écoutais il y a quelques jour un économiste qui disait – ça a résonné en moi – « ce qui est gratuit n’a pas de valeur ». Ce qui signifie que, aux yeux des gens, comme c’est gratuit, ce n’est pas respectable. Mais si tu payes, tu y donnes de la valeur… (NdMp: signalons également que l’achat d’un billet en prévente donne également droit à une boisson gratuite)

Tu ne veux pas faire la bière gratuite ?

(Rires) Ça, il faut voir avec Richard !

On est donc bien sur 2 journées, la première payante, avec pour objectif d’amortir, et la seconde, gratuite.

Exactement. Le dimanche, on laisse à disposition les barbecues, les gens pourront même faire leurs propres grillades. En revanche, la buvette reste payante.

Puisque tu parles de restauration : aujourd’hui, nous sommes dans une époque très écoresponsable. Vous allez fonctionner avec le système ecocup, des couverts et emballages recyclables ou bio dégradables ?

Alors, les couverts, je reconnais que je n’y ai pas encore pensé mais on va tendre vers le plus propre possible. Depuis quelques années, chaque année, on voit les choses évoluer. Au début, on ramassait des déchets de tous types, maintenant, le rangement se fait en une journée. Le soir, c’est nickel. Les écocup, ça a vraiment changé beaucoup de choses. Pousser plus loin, maintenant, c’est logique.

Parlons maintenant de la campagne de communication. Autant l’an dernier, vous avez pris une douche froide, là, elle a déjà commencé. Il y a des flyers et des affiches qui circulent. Quid des affichages, annonces presses, médias ?

Déjà il va y avoir une annonce dans Rock Hard, dans quelques jours on va au Hellfest corner à Paris pour essayer de monter avec eux un partenariat. Je voudrais pouvoir faire un « event » avec des places à gagner. On a aussi fait faire un logo qui représente Baphomet… Il va y avoir une campagne d’affichage, j’ai été interviewé sur France Bleu, et on passe par la Fédération des musiques métalliques qui existe depuis 2 ans. Pascal Guegue travaille avec des institutionnels, l’Adami, la Sacem… Il cherche à promouvoir le metal en France, c’est un peu le pèlerin du metal, il va partout… Maintenant, je crois que j’ai fait le tour… On s’est pris un râteau l’an dernier, ça ne nous empêche pas d’aller de l’avant. On a pu récupérer un peu avec la soirée de soutien mais on continue. Et on a une super affiche.

Je vais découvrir live les deux premiers groupes, cependant, Sidilarsen, je les ai vus à plusieurs reprises, et à chaque fois, c’est une claque. On passe un super moment. Leur musique est aussi metal qu’électro, et ça dépote ! En même temps, on revient à une affiche 100% française, ce qui doit, j’imagine générer des coûts un peu moins importants…

J’aime beaucoup leur côté crossover. Maintenant, pour les coûts, oui, même si, au début, j’ai contacté Rage tour et quand ils m’ont annoncé les tarifs de Mass Hysteria, j’ai dit non, ce n’est pas pour nous. Ils m’ont dit qu’ils avaient aussi Sidilarsen, qui fête ses 20 ans et sort un nouvel album. Ouh… là, oui, ça m’intéresse ! Je leur ai proposé de prendre deux groupes, « est-ce que vous me faites un prix ? »… Bref, les négociations mercantiles ! Donc, on aura aussi Princesses Leya, un groupe humoristique moins « crado » qu’Ultra Vomit. Moins caricatural… J’aime pas qu’on se moque de mes jouets en plus… C’est comme quand, pour résumer le Hellfest, tous les ans, Quotidien qui ne montre que des culs… C’est pas ça le Hellfest, c’est du spectacle, de la musique, une ambiance ! Si tu n’as vu que ça… Fais ton boulot de journaliste quoi !

As-tu quelque chose à rajouter concernant le Rock In Rebrech ?

Je crois que nous avons fait le tour, il y a déjà beaucoup de choses. Merci beaucoup !

Pour obtenir vos billets: Rock In Rebrech 13 ou avec le lien Helloasso

Interview: ROLLYWOODLAND

Interview Rollywoodland. Entretien avec Rolly Wood (chant, basse) le 19 février 2024

Nous éviterons les détails du démarrage de cette interview totalement dans l’esprit de ce que le trio propose avec son nouvel album, Dark fate for judgement day, donc décalé et fun. Il y a des dossiers qu’on ne dévoile pas… Sauf si… Mais pas aujourd’hui. En plus, j’ai pas les images. Discutons, plutôt!

Rollywoodland

Le premier album de Rollywoodland est sorti il y a 12 ans. Que s’est-il donc passé depuis ? Ne me fait pas le coup de « la crise sanitaire » !

Ça en fait partie, mais pas que ça (rires). Disons qu’on a commencé à bosser sur cet album en 2013 et au moment où on allait commencer à enregistrer, ben… on s’est séparés. On a eu un break entre 2015 et 2018. On a retravaillé sur cet album, ensuite, il y a eu (il rit)… la crise sanitaire…

Il m’a fait le coup !

En fait, on habite assez loin les uns des autres, donc on ne pouvait pas se voir et ça a ralenti les choses…

Alors, justement, revenons en arrière. C’est la première fois qu’on discute, alors peux-tu me raconter l’histoire de Rollywoodland ?

A la base, c’était un projet solo que j’avais en tête en 2010 qui a débouché sur l’album Appetite for seduction qui est sorti en 2012. Il y a ensuite eu un changement de line-up et, ensuite, j’ai repris avec Ben Dog, le batteur d’un groupe que j’avais avant. On a commencé à bosser sur cet album et très rapidement on a eu 14 titres prêts. On a commencé à enregistrer la batterie et la basse en 2015. On a eu ce break dont je te parlais, on a recommencé à travailler dessus en 2018. Entre temps, il y a eu famille et bébés, donc tout était un peu en suspend sans être aux oubliettes…

Donc ce n’était pas la priorité non plus…

C’est ça, malheureusement. Si ça ne tenait qu’à moi, cet album serait sorti en 2015. La vie de groupe fait que parfois tu ne fais pas les choses quand tu veux, ou comme tu le veux. Ça nous a menés en 2020… J’ai réenregistré tout le chant chez moi pendant le Covid, les guitares de Yo Godon ont été enregistrées chez le guitariste entre 2020 et 2022. Entre temps, on a enregistré tous les instruments annexes, comme les shime, les percussions, les synthés… Ça faisait beaucoup de choses sur un album qui dure presque une heure, et, quand tu pars un peu de rien, ça fait beaucoup de travail ! Mener à terme un tel projet, c’est énormément d’investissement personnel et ça peut vite prendre du temps quand tu n’as pas de deadline. C’est un peu notre Chinese democracy, mais bien de chez nous (rires) !

D’où le groupe est-il originaire ?

On est en Rhône-Alpes. J’habite à côté de Genève, le batteur vit à Lyon et notre guitariste est en Savoie. On se retrouve à un point central pour répéter ;

Comment décrirais-tu la musique de Rollywoodland à quelqu’un qui ne vous connais pas ?

C’est du hard rock, tout simplement. Avec des influences diverses, Maiden, Mötley, Scorpions, Priest, Offspring, Kiss, beaucoup…

Donc on est bien ancrés dans les années 80.

Tout à fait. C’est un peu l’époque où j’ai découvert le monde. Ce qui sort, ce n’est pas réfléchi, c’est naturel et un processus spontané. On arrive à avoir des morceaux mid-tempo, des ballades, des titres plus rapides et au final, ça rejoint cette époque.

Il y a une touche supplémentaire : un côté humoristique, un peu décalé, mais pas un humour trash à la Ultra Vomit. Plutôt du détournement de références, comme les deux titres de vos albums – inutile de citer les références, je pense ! La pochette de ce dernier album, on sait tout de suite à quoi ça fait référence, on glisse le CD, le premier titre est limpide – le thème d’un fimm que tout le monde connait (il rit)… Il y a plein de références plus ou moins humoristique. Il y a une volonté de marquer les esprits ?

En même temps, on est sérieux dans notre démarche ! Pour moi, ce n’est pas qu’humoristique, c’est la vraie vie, les vrais films… C’est ce que je regarde et que j’aime. Je pense que l’autodérision est dans le sérieux de la situation. Pour moi, ça va au-delà de l’humour. Je l’annonce clairement, c’est ce que j’aime et ce qui fait foi pour moi. Ce sont de vrais hommages !

C’est pour ça que je parle autant d’humour que de référence, il y a un esprit bon enfant comme le hard rock des 80’s à la fois bon enfant et festif.

Souvent, en marchant dans la rue, j’ai une mélodie qui me vient à l’esprit, je siffle et ça me ramène à une scène d’un film, un moment de bravoure d’un héros… Du coup, je me mets naturellement à écrire un titre comme First blood, last cut en pensant à Rambo.

Dans ce cas, qu’est-ce qui t’a inspiré No dog shit (on the sidewalk) ?

Là c’est clairement une chanson engagée ! C’est le mal français, toutes ces merdes de chien qu’on ne ramasse pas ! Et il y en a marre.

J’imagine bien ce qui t’a inspiré dans la rue en marchant, alors !

Ah, putain ! tu sais, quand tu rentres de voyage et que tu essaies de slalomer entre toutes ces crottes avec ta valise, tu calcules l’espace en espérant que les roulettes vont passer entre et la valise au-dessus… Derrière, il y en a plein d’autres…. Marre, quoi (rires) ! Après, il y a d’autres morceaux engagés : Heaven for paradise ressemble à une ballade américaine, mais, en fait, c’est une chanson anti Jihad. Je l’ai écrite en octobre 2011, juste après les premiers attentats contre Charlie Hebdo. A l’époque, j’étais loin de me douter de ce qui allait se passer par la suite. Derrière le côté enfantin et doux du morceau, il y a des paroles qui sont très violentes.

Sachant que le Jihad, la « guerre sainte », c’est avant tout le combat intérieur mené pour lutter contre ses propres démons…

Ouais, moi, c’est clairement contre eux, contre tous ces mecs… Ce qui est fou, c’est de penser que ce titre date de bien avant tout ce qui allait suivre. Il y a aussi d’autres morceaux plus introspectifs comme Militaerritory, We all come from outerspace ou Love me, des thèmes plus personnels, des chansons d’amour, sur la place de l’humain dans le règne animal. Une façon un peu pudique pour moi de me dévoiler. C’est plus facile pour moi de chanter dans une autre langue parce que mon message sera moins compris par les gens de mon entourage.

Maintenant, si tu devais ne retenir qu’un seul titre de dark fate for judgement day pour expliquer à quelqu’un ce qu’est Rollywoodland aujourd’hui, lequel serait-ce ?

Je pense que ce serait Nunchaku, parce que c’est un morceau qui a un côté heavy, de bonnes parties instrumentales et qu’il reste facilement dans la tête. C’est pour ça qu’on l’a choisi en premier extrait. C’est un morceau assez court qui peut s’adresser à tout le monde. Même si aujourd’hui, je ne peux plus l’écouter (rires) !

Tu parlais de Rambo, mais il y a une autre référence évidente, et c’est un copain de Stallone, c’est JCVD…

Oui ! En fait, c’est tout con : c’est un morceau que Ben, notre batteur, a composé, et, un jour, j’étais en randonnée en montagne, je réfléchissais aux lignes de chant, aux paroles. Et le nombre de syllabes du refrain correspondait au nombre de syllabes de Jean-Claude Van Damme. Ça m’est apparu comme une évidence ! j’en ai parlé aux autres, ils étaient d’accord, du coup, j’ai écrit ce titre sur lui.

Vous lui avez fait écouter ?

Pas encore. C’est prévu, je réfléchi juste au meilleur moyen de procéder pour que ça ne tombe pas aux oubliettes… Je pense que c’est quelqu’un de très sollicité, donc je réfléchis à la meilleure manière de le faire… J’aimerai beaucoup tourner un clip avec lui, aussi, ce serait génial !

Ce serait un bon coup de marketing pour vous ! Un groupe c’est aussi la scène. Quels sont vos projets pour défendre cet album ?

On travaille dessus, on démarche pas mal. Après, ça demande beaucoup de temps et d’énergie pour faire bien les chose. Je pense qu’on va se tourner vers une boite de prod pour travailler ça pour nous. C’est très énergivore. Et je pense que quand tu passes trop de temps à faire ce genre de choses, tu t’éloignes de la musique… Si j’avais tout mon temps pour nous manager, je le ferais avec plaisir, mais je dois aussi gagner ma vie !

Justement, quels sont vos métiers respectifs dans vos autres vies ?

Ben travaille chez Enedis, Yo est ingénieur informatique à Genève où je travaille aussi, je suis conducteur de train pour les Chemins de Fer Fédéraux. En gros, la SNCF suisse…

Mais qui fonctionne plus souvent !

Oh, oui, nous on carbure ! Il y a des trains tout le temps !

J’ai bien circulé avec les trains suisses lorsque je travaillais pour Swissair. Les formations se passaient à Genève ou à Zurich, et je circulais souvent en train entre ces villes.

Ah ! J’habite dans le pays de Gex, pas loin de l’aéroport. Entre Ferney et Gex.

Revenons à vous. Quelle pourrait aujourd’hui être la devise de Rollywoodland ?

Ah, putain… Je sais pas, je dirais « fun rock ». « Rock and fun »

Est-ce que je garde le « putain » ?

Ouais, tu le gardes aussi (rires) !

Comment se traduit ce Rock and fun sur scène ?

Je pense qu’on dégage une énergie assez positive. Dans les vidéos que je peux voir – je n’aime pas trop regarder des vidéos de nous sur scène mais, bon… – globalement c’est ce qui ressort. On cherche à retranscrire l’énergie de l’album sur scène.

C’est pourtant un bon exercice pour corriger ses erreurs.

Oui, mais c’est tout un processus. C’est pas facile de se voir ou de s’écouter chanter. Maintenant, j’ai un peu franchi le cap, mais je n’aime pas ça.

Mais ça te permet de préparer l’avenir…

Oui, on devrait rentrer en studio en fin d’année, on a déjà assez de matériel pour le futur album. Une bonne partie des titres tourne déjà, donc j’espère qu’on aura quelque en fin d’année prochaine. J’ai déjà deux albums d’avance dans ma tête !

On en reparlera plus tard, alors ! As-tu quelque chose à rajouter pour conclure ?

Non, je ne sais jamais quoi répondre à ça… Si, que les gens achètent l’album, vraiment ! S’ils ne l’achètent pas, ils vont passer une journée de merde (rires) ! Ne pas l’écouter, ne pas l’acheter, c’est forcément perdre son temps. C’est le seul conseil que je puisse donner, un conseil avisé, hein ! Je l’ai déjà, donc je sais de quoi je parle…

Interview: AGUELENNA

Interview AGUELENNA. Entretien le 2 février 2024 avec Marc (batterie)

Marc, commençons par une question originale : je découvre Aguelenna, alors peux-tu simplement me présenter le groupe, son histoire ?

Je vais essayer d’être synthétique parce que c’est une longue histoire… Aguelenna est un groupe qui est né en 2007, en Seine et Marne. C’est un groupe de rock. On se définit comme jouant du power rock mélodique. Le groupe a connu diverses formes, il y a eu 3 line-up différents plus la forme actuelle. Il y a Rico (guitare) et Marie (chant), les fondateurs du groupe, et moi, je suis arrivé en 2015 à la batterie. Quand je suis arrivé, on a décidé de prendre un tournant nettement plus rock. On a réalisé un premier Ep qui est sorti en 2018. Dans la foulée, on a embrayé sur un album. On avait déjà travaillé quelques titres et on a travaillé ce premier album entre 2018 et 2019, on a fait toutes les maquettes. On a commencé à enregistrer la batterie en 2020, on a même terminé, et le Covid est arrivé… Ça a mis un coup d’arrêt à la production du disque. Je ne comprends pas pourquoi, c’était pas grand-chose… Ca a duré 5 ou 6 mois pendant lesquels on a pas pu faire grand-chose. On a repris la production du disque fin 2020, ça s’est poursuivi sur 2021 et on a terminé en 2022 pour arriver au mixage en 2023.

Vous l’avez donc enregistré sur la durée…

Oui, on a pris notre temps. On s’est dit que ça ne servait à rien de courir. Et le covid a aussi changé la façon de voir les choses. On a eu envie de prendre le temps de faire les choses bien.

Quelque part, ce n’est pas plus mal car tous ceux qui étaient déjà dans ce business de la musique ont eu le même coup de frein, et ont dû repousser leurs publications ; Donc repousser la sortie d’un album pour qu’il ne soit pas noyé dans la masse pouvait être stratégiquement intéressant…

C’était peut-être un mal pour un bien, effectivement. Maintenant, on était déjà prêts, on avait tout maquetté, on avait poussé la prod au maximum de ce qu’on voulait et on savait exactement ce qu’il fallait enregistrer. Les seules choses qui soient restées en suspens, c’est venu bien plus tard : tous les arrangements additionnels, les synthés, les FX qui sont venus se greffer. On l’a fait à la fin, c’était un peu la cerise sur le gâteau. On a aussi pris le temps de réfléchir à ses arrangements, ça a pris entre 6 et 8 mois.

Tu as dit que Aguelenna est un groupe de rock mélodique. C’est un terme assez vaste. Comment définirais-tu votre musique pour quelqu’un qui ne vous connait pas ?

C’est du power rock chanté en français. C’est important, les textes sont en français, même si on est plus sur une couleur musicale américaine qu’anglaise.

Quel type d’influence américaine ?

On se rapproche plus de groupes comme Foo Fighters, Paramore, Nirvana…

Un rock un peu plus grungy que power metal, donc.

On ne se définit pas comme un groupe de metal, en fait. Power oui, parce que c’est énergique, et ça se voit sur scène. On dégage une vraie énergie sur scène. On a beau faire du rock en français, on développe l’énergie du rock américain. Maintenant on aime aussi des groupes comme Aston Villa, Dolly… J’ai tendance à dire qu’on fait de la chanson. On travaille beaucoup nos textes, d’ailleurs…

Ils traitent de quoi vos textes, justement ?

On parle de sujets qui nous touchent, qui sont des sujets qui gravitent autour de nous : des sujets sociétaux, la maladie d’Alzheimer, on parle de racisme, de violences faites aux femmes. Des sujets variés. On traite aussi de la dyslexie… Des sujets qui touchent les gens.

Y a-t-il au contraire des sujets que vous n’abordez pas parce que vous pensez qu’ils n’ont pas leur place dans Aguelenna ?

Non, on ne se met pas de limite. C’est Marie qui pose ces thématiques, donc ça dépend d’elle. Pendant un temps, on s’est demandé si on parlait de politique, si on entrait dans une veine « engagée », même si là on touche du doigt 2 ou 3 sujets politiques.

Parle nous un peu de cet album qui sort aujourd’hui : vend le moi pour m’inciter à filer l’acheter…

L’atout majeur de ce disque c’est qu’il n’y a pas deux titres qui se ressemblent. Il y en a 10 en tout. Ce qu’on voulait, c’est avoir une sorte d’album photos, comme on a à la maison, un instantané de ce qu’on était. Chaque titre a sa couleur et son univers. Et je trouve que ça colle bien avec les différents thèmes abordés. Le fait de chanter en français permet aussi un accès plus facile à ce qu’on raconte. Le fait de travailler en français permet de pouvoir écrire des textes à tiroirs, ce qu’on adore, et permet un effet poétique. On a voulu faire en sorte que les gens qui écoutent puissent aussi avoir leur propre interprétation des textes. Certains sont plus abordables, d’autres ont des sens plus cachés…

Ce n’est pas frontal, donc, ce qui signifierait imposer votre vision aux gens. Là, chacun peut se faire sa propre interprétation…

Exactement, et c’est tout le contraire de ce qu’on est ! Notre fonctionnement en interne… personne n’impose rien, on est toujours dans le dialogue, dans la discussion. Il faut que ça ait du sens de porter des textes de cette façon, que chacun puisse penser ce qu’il veut.

Vous n’êtes que 3 dans le groupe, ce qui fait aussi penser à tous ces power trios…

Oui, en effet. On était 4 jusqu’à 2023, mais la vie de groupe fait que notre bassiste n’est plus là. D’ù l’énergie qu’on donne sur scène, il faut qu’on donne autant que à 4. On n’a pas l’intention pour le moment de reprendre un bassiste, on est bien à 3…Ça laisse plus de place sur scène. Ce qui laisse sous-entendre que la basse est samplée, ce qui est le cas. Mais il y a une vraie basse sur scène, mais pas avec un vrai bassiste…

Et ça coute moins cher en frais d’hôtel, aussi…

Il y a de ça, oui (rires). Le contexte économique fait que… Mais on est 4 sur la route, il y a aussi notre ingé son.

Tu me disais que ton métier c’est la musique. Quelles sont vos métiers à chacun en dehors du groupe ?

Je suis musicien de métier, je ne fais que ça. J’accompagne des projets et des artistes en studio et sur scène. Marie, elle, a longtemps travaillé dans un centre aéré et, pour avoir plus de temps pour le groupe, elle a pris un poste dans une entreprise qui fait des composants pour l’aérospatiale. Rico, lui, est technicien de maintenance à la Poste.

Si tu devais ne retenir qu’un seul titre de votre album pour expliquer à quelqu’un qui ne vous connait pas ce qu’est Aguelenna, ce serait lequel ?

J’ai envie de te dire Pink punk, le premier single qu’on a sorti en octobre. Je crois que c’est le morceau qui résume le mieux ce qu’on est. On est dans une forme de synthèse de l’ensemble des titres et c’est un titre fédérateur. Et le sujet évoqué peut parler à tout le monde puisqu’on parle des personnes qui nous influencent au quotidien. Musicalement, il dégage une énergie, avec des mélodies ultra efficaces…

Maintenant, pour terminer, si tu devais penser à une devise pour Aguelenna, ce serait quoi ?

Waow… Pas mal… J’ai envie de dire « l’humanisme au travail ». L’humanisme parce qu’on est foncièrement, je pense, très humain. Si ça fonctionne bien entre nous 3, c’est aussi parce qu’on a des rapports très bienveillants entre nous et envers les autres. Aussi, parce qu’on est de sacrés bosseurs, donc on veut rester humain au travail.

SORTILEGE tête d’affiche du Crick fest 3: interview avec l’orga

Interview Chris Dannacker (Association Crick for zik). Propos recueillis le 14 décembre 2023

Dans tout juste deux petits mois (au moment de la publication de cette interview), le 13 avril prochain, la petite commune de Cléry Saint André, dans le Loiret, recevra la visite en tête d’affiche la légende Sortilège. Metal Eyes s’est entretenu avec Chris, le président de l’association Crick for zik et instigateur de ce petit évènement qui nous explique tout, de la genèse à l’organisation de ce concert qui s’annonce dores et déjà exceptionnel. Amateurs, attention: il n’y aura pas de places pour tout le monde, et les préventes affichent déjà un joli 50% des quelques 350 billets disponibles.

Avant de parler de la prochaine édition du festival Crick for zik qui se tiendra le 13 avril à Cléry Saint André (45), commençons par un peu d’histoire. J’ai découvert ce festival par hasard, mais c’est votre troisième édition qui accueillera Sortilège. Quelle est la genèse de ce mini festival ?

J’ai créé cette association fin 2019 – j’ai eu une bonne idée, juste avant le covid (rires) ! Pour quelle raison ? Je suis musicien depuis pas mal de temps maintenant, et je n’imaginais pas à quel point c’était compliqué de pouvoir se produire avec le groupe que j’avais à l’époque. Les salles normalement accessibles aux groupes locaux, d’Orléans, malgré énormément d’échanges, de mails…, il n’y a jamais eu de retours. Pareil avec d’autres endroits où on pensait que ce serait plus facile de se produire… De mon côté, j’ai du matériel son, un domaine que j’adore et dans lequel j’ai beaucoup investit, alors je me suis simplement dit « pourquoi ne pas monter une asso et mettre ce matériel et des locaux à disposition des groupes du coin ? » Le matériel, mes compétences techniques, et j’ai eu la bonne idée de créer mon propre studio d’enregistrement. L’idée étant aussi de pouvoir monter des évènements dans le coin pour les groupes de hard et de metal. A l’époque, il n’y avait pas encore le Dropkick à Orléans…

Oui, mais il y avait ses prédécesseurs, le Blue Devil’s et, avant, l’Infrared.

Oui, mais l’Infra a fermé quand ? En 2015. Mais à cette époque, aucun n’était actif comme le Dropkick qui organise des concerts à taille humaine. 200, 300 personnes. Quand la musique est bonne, ça ramène du monde…

« Ça ramène du monde » : Cléry Saint André, pour ceux qui ne connaissent pas, c’est où ?

Cléry se trouve entre Orléans et Blois, c’est à 20 km d’Orléans, le long de la Loire. On a une belle basilique à Cléry… Voilà donc la genèse de l’association. Je me suis entouré de potes, qui sont également des musiciens, au sein de Prism A, et des bénévoles qui se chargent de l’organisation, de la logistique… La première chose qu’on a faite avec l’asso, c’est l’enregistrement du premier Ep de Prism A, mon groupe actuel, dans le studio, ce qui est gage d’un certain confort puisqu’on enregistre quand on veut, il n’y a pas de pression financière. Ensuite, on a imaginé ce festival dont la première édition a eu lieu le 1er février 2022. Prism A y a participé, évidemment, ainsi que deux autres groupes de potes : Broken Arms qui a disparu, et nos amis de Dark Revenges. C’est une édition qui a moyennement marché en termes d’affluence – on n’avait pas non plus beaucoup communiqué. Le son était cependant excellent, les gens ont bu de la bonne bière et ont mangé de bons sandwiches ! On est à peine rentrés dans nos frais, mais on savait qu’il y aurait une seconde édition. Un jour, j’ai découvert le groupe Heartline qui correspond à mes amours de jeunesse, du hard fm/AOR, et je les ai contactés. On les a reçus sur la seconde édition que nous avons décalée. Au départ, elle était prévue en février, mais il faisait un peu trop froid. On l’a donc décalée au mois d’avril, ce qui nous semblait être une bonne idée, les festivals n’ont pas encore démarrés. Hors de question de se faire de l’ombre les uns les autres. La première chose que je regarde, c’est si d’autres déjà présents, ont prévu une date à ce moment. On ne va pas se tirer la bourre entre potes de festivals…

Tu penserais par hasard au Rock In Rebrech ?

Par exemple, mais pas dans ce cas précis. A l’époque des Iron Troopers, il nous était arrivé un truc avec Arno (Arno T. Walden, chanteur et guitariste de divers projets) : le Troopers fest a généralement lieu au mois d’avril. A l’époque, on avait bloqué une date très en amont et on s’est aperçu qu’une autre association faisait venir, de mémoire, Vulcain, aussi dans une salle des fêtes. On s’est dit que ce n’était pas malin d’avoir un tribute Maiden face à Vulcain. Ce qui était bête, c’est qu’aucune des deux asso n’a voulu modifier la date, et on a chacun fait moitié de salle. Si on avait décalé d’une semaine, les deux structures auraient pu faire salle pleine… Je me mets aussi à la place du fan qui peut avoir envie de voir Vulcain et assister au Troopers Fest…

Revenons maintenant au Crick fest, puisque tu as fait venir l’an dernier Heartline…

Oui, en 2023, on a en effet fait venir Heartline, il y avait aussi Prism A, évidemment, et on a fait jouer des copains, Warm Up qui a des compos originales et fait des reprises. Là, on a fait un peu mieux. Ce n’était pas blindé, mais on a rempli aux deux tiers. Tout le monde était ravi, déjà par la découverte de Heartline qui a assuré un show de qualité. Je suis carrément fan de ce groupe, depuis le mois d’avril, je les ai vus 5 fois en concert !

Avant que nous ne parlions de la prochaine édition qui se tiendra le 13 avril, peux-tu nous présenter cette salle Espace Loire ? Quelle est sa capacité ?

C’est une salle polyvalente, une salle des fêtes, assez grande puisqu’elle peut accueillir jusqu’à 400 personnes. Elle dispose d’une scène, l’acoustique est plutôt bonne. Et on a l’avantage en tant que résidents de Cléry Saint André de bénéficier de tarifs de location plus intéressants. Il n’y a pas que la salle, il y a aussi l’équipe composée principalement des Cléricois. Il y a une sorte de deal avec la mairie et les habitants qui aident à distribuer des flyers dans les boites aux lettres. Même la Police municipale donne un coup de main…

Pourquoi ça s’appelle « Crick fest » ?

Ah, ah ! Très bonne question ! L’asso s’appelle Crick for zik. Le but de l’asso, c’est d’aider les groupes locaux à s’élever, avec tous les moyens possibles. Je me souviens très bien de ma jeunesse avec ma R5 et le cric dans le coffre… Et ce cric, tu vois sa forme, servait à lever la voiture. Je savais déjà que tous les ans j’allais refaire une édition, d’où le fait de l’appeler directement Crick fest.

Vous faites venir un groupe de Heavy mélodique qui se nomme Hell X Hear, un nom assez courant dans le metal. Prism A à nouveau, et, surtout, vous avez décroché Sortilège. Comment une petite structure – je vais être un peu provocateur – totalement insignifiante et peu connue comme la tienne peut décrocher un groupe aussi légendaire que Sortilège, Rappelons pour les lecteurs qui ne les connaissent pas que Sortilège a marqué les metal français dans les années 80 avec un mini album et 2 albums avant de disparaitre, que le groupe s’est reformé avec pas mal de mouvements de personnels avant de trouver sa forme « définitive » avec laquelle il a enregistré deux albums remarqués et un live qui vient de sortir.

En octobre, j’ai regardé Facebook, j’ai vu que Sortilège commençait à vraiment revenir en force. Je me suis simplement dit que j’allais tenter le coup. J’ai d’abord échangé avec Zouille qui a très bien compris la politique de l’asso, je lui ai expliqué qui on est, notre vision et il m’a dit qu’il nous suivait à 100%. Alors, oui : ce sont des professionnels, ça a un coût, mais il y a eu un accord avec des personnes qui comprennent la démarche. Et aussi, je lui ai avoué que j’étais amoureux de ce groupe que j’avais vu en 83 à Orléans. A l’époque, j’avais même prêté au groupe de première partie du matériel de guitare parce qu’ils étaient en rade… En fait, je me suis simplement dit que Sortilège avait peut-être envie de revenir jouer à Orléans. Et quelle joie de partager la même scène !

Quelles sont les conditions d’accueil des groupes ? Que leur proposez-vous et que mettez-vous à leur disposition ?

Comme pour tout artiste, un côté tranquille en arrière-scène qu’on appelle une loge. Au niveau technique, il y a des minimums, au niveau son, on a du lourd, et, enfin, tout le monde apprécie au niveau culinaire notre spécialité locale (il se marre) : j’adore le chili con carne, mais maison. Pourquoi ça me fait rire ? Heartline, à chaque fois que je les vois, il me demande pourquoi je ne leur ai pas rapporté un chili ! Maintenant, il y a du personnel de sécurité, des bénévoles qui sont aux petits soins pour tout le monde. Et on évolue d’année en année. La première année, je ne comptais pas le nombre de spectateurs, maintenant on a mis en place ce qu’il faut. Il y a des obligations vis-à-vis de la municipalité pour la sécurité. C’est pour ça que les préventes sont très importantes ; d’une part, ça nous permet de savoir à l’avance à quelle affluence s’attendre, ça nous permet aussi d’avoir un peu d’argent pour financer certains frais, et enfin, ça garantit d’avoir sa place. Si je vends en avance les 350 places, je ne pourrais pas faire entrer plus de monde.

Justement : où peut-on se procurer son billet et à quel tarif ?

En allant sur la page Facebook de Crick for zik, tout simplement. Ou en scannant le QR Code qu’il y a sur nos flyers et qui envoie directement vers le site de l’asso, ou en tapant directement crick-for-zik.s2.yapla.com. Pour les préventes, les tarifs sont de 15€ pour les adultes et 12€ pour les enfants de moins de 16 ans. Sur place, s’il reste des places, ce sera 18€ pour les adultes et 15€ pour les enfants.

Ce n’est pas une destination accessible en bus ou en tram, on est obligés de venir en voiture. Quelles sont les conditions de parking ?

Il y a un grand parking avec possibilité de se garer sur d’autre parkings juste à côté. Tous ces lieux seront surveillés notamment par des maitres-chiens. On est à côté de la salle, à peine à 5’ de marche. La nouveauté, c’est une de mes volontés mais pas encore certain : il devrait y avoir une petite exposition de véhicules d’exception. Également, je ne l’ai pas encore mis en place, mais je voudrais bien que ce soit fait pour la prochaine édition : s’il y a une preuve de covoiturage, il pourrait y avoir une boisson gratuite, par exemple. Mais il faut développer une application pour le prouver. En plus ça m’arrange : ça ferait moins de véhicules sur le parking, donc moins de surveillance, et c’est bon pour la planète. Mais ce sera pour la quatrième édition, je n’ai pour le moment absolument pas communiqué là-dessus. On a besoin de faire un partenariat avec des organismes et ce ne sera pas possible pour cette année…

Un concert, c’est aussi des consommations. Tu prévois aussi des contenants écolos ?

Bien sûr ! Tout est en mode écocup, avec consigne. Cette année, il y aura des formats en 30 cl et 50cl avec notre sponsor, le V and B. Je tiens absolument à faire bosser les entreprises locales : il y a donc le V and B de Baule qui nous aide beaucoup. Après si les gens viennent avec leur propre gobelet, on les servira aussi !

Un festival en général, c’est un peu plus que trois groupes. Là, on est plus sur le format concert… As-tu pour ambition de faire grandir sur la journée le Crick fest et mobiliser du public sur une journée complète ?

C’est une possibilité. Ça a déjà été évoqué, et dès la première, on aurait dû avoir un quatrième groupe sur une autre scène, un format « podium » avec un groupe acoustique reprenant des morceaux hard/metal en inter-plateaux. Malheureusement, au dernier moment, ça n’a pas pu se faire. Maintenant, en faisant venir des groupes pros, c’est un autre budget et donc, j’ai préféré rester sur le format 3 groupes. En revanche, il y a un autre projet, plus sur un format extérieur, à un endroit différent, avec plus de groupes sur une journée, voire deux journées. Mais ce n’est pour le moment qu’un projet…

Que souhaites-tu ajouter pour conclure, Chris ?

On est une association loi de 1901, on n’est pas une grosse structure qui vend toutes ses places sans annoncer personne… Même si certains ont démarré petits et ont grandi. Je pense à d’autres structures à100 km de chez nous… nous, on est entourés de bénévoles, on ne peut pas fonctionner sans eux. Franchement, ils me rendent très fier et heureux en tant que président de l’asso. Ils sont toujours la banane, la motivation, et très souvent, les gens sont surpris que les bénévoles ne soient pas adhérents de l’asso… Non seulement ils donnent de leur temps pour l’asso, mais il faudrait, en plus, que je leur demande de l’argent pour l’asso ? Ça va pas, non ? Nous, notre leitmotiv, c’est de se faire plaisir, et si le public peut avoir du plaisir, alors c’est une mission réussie.

Aujourd’hui, Crick Fest c’est environ 200 personnes, alors espérons que cette année, ce soit 400 et que le festival grandisse pour aller vers l’extérieur !

Je tiens aussi à rappeler que nous avons des partenaires. Il y a la boite dans laquelle je travaille, Equens Inéo, dans les énergies renouvelables, il y a aussi V and B qui nous file une tireuse de compétition à un super tarif, la Mareuse de Mareau, avec Pascal Aubry qui nous prépare toute la boulangerie, le pain pour les sandwiches… on a un fournisseur de matière électrique, HMV. Ils sont de lyon, mais ils sont tombés amoureux de la première édition avec Prism A et ils nous ont dit qu’à chaque fois que le groupe serait sur un festival, ils viendraient. Il y a aussi une boite de peinture tenue par un Monsieur Phil San Filippo, aussi chanteur de Prisma, et des magasins locaux, Intermarché, Bricomarché, des gens qui nous aident tous les ans. On les remercie parce que, au final, ce sont les petites sommes qui permettent d’éponger pas mal ! Par contre, je ne suis pas certain que les gens puissent imaginer le montant de la redevance que nous réclame, à nous et aux autres orga de concerts/festivals, la SACEM… Pour l’organisation, c’est un budget qui représente à peu près le cachet d’un groupe… Si encore ils rétribuaient à leur juste valeur les artistes présents… Mais non, la répartition se fait en fonction des diffusions radio. Et qui sont les 10 premiers artistes diffusés en radio ? C’est pas du metal… Maintenant, venir voir Sortilège pour le tarif que nous proposons, ce n’est vraiment pas cher ni donné à tout le monde ! (Note: à ce jour, près de 50% des places ont trouvé preneur, il en reste donc un peu moins de 200)

Et pour les avoir vus récemment, je peux dire qu’ils sont en forme, grande forme. Sans doute le public aura-t-il même droit à des surprises sur cette date, qui sait ?

Euh… oui. Il y a quelque chose qui se prépare, mais je ne peux rien dire à ce sujet. Il y a des choses en cours…

Interview: MASS HYSTERIA

MASS HYSTERIA @L’astrolabe, Orléans, 1er fév 2024

Interview MASS HYSTERIA. Entretien avec Mouss (chant) et Fred Duquesne (guitare). Propos recueillis le 1er février 2024 à l’Astrolabe d’Orléans

Après avoir reçu un appel de l’attachée de presse du groupe m’annonçant que Mouss et Yann sont tous deux HS et préfèrent se reposer et me proposant de faire l’interview avec un autre membre du groupe, c’est finalement le chanteur de Mass Hysteria qui insiste pour cet échange. Il est finalement en forme, même s’il veut préserver sa voix pour cette date de reprise. Il n’en est pas moins bavard qu’à son habitude, et c’est tant mieux ! Et quand tu discutes avec Mouss, tu es certain qu’on va aborder des sujets variés, de la musique, à la politique. Engagé ? Non, si peu… Le recadrer, parfois ? Pour quoi faire ?

Mouss, vous donnez ce soir le premier concert de la seconde partie de la tournée Tenace. Tout d’abord, comment s’est déroulée cette première partie ?

Wouah ! C’était intense… En fait, avec cette tournée, on vit quelque chose qu’on n’a jamais vécu avant : des salles complètes tous les soirs… Il n’y a peut-être que 3 ou 4 dates qui ne le sont pas encore. C’est honteux de dire ça, presque : avant c’était le contraire, il y avait 3 date complètes sur 30 et on disait « waow ! C’est cool ! » (rires).  En 2023, toutes les dates étaient complètes. Première partie, excellente, complètement folle. Au-delà de ça, il y a l’énergie qui s’en dégage. Quand une date affiche complet, il y a les gens, le public qui dégage cette énergie, il y a une dimension supplémentaire, tu ajoutes une étincelle et tout peut s’embraser…

Justement, y a-t-il ce soir, parce que c’est la première date de l’année, un peu de pression ?

Non, en tout cas, pas moi. Je n’angoisse jamais avant un concert, que ce soit l’Astrolabe ou le Hellfest, je n’ai jamais de crampe d’estomac avant de monter sur scène. Jacques Brel, il vomissait de trac avant chaque concert… dans Mass Hysteria, il y en a quelques un qui ont le trac, pas jusqu’à vomir…

Mais j’imagine que c’est un trac sain…

Exactement. Moi, j’arrive à ne pas y penser, je n’anticipe rien, je rentre dans l’arène. Une fois que je suis sur le plongeoir, ben… je vais plonger !

Avez-vous apporté quelques modifications par rapport à la première partie de la tournée, dans la setlist, le jeu de lumières, de scène… ?

Oui, notre lighteux a apporté quelques modifications, il a changé le… comme on dit maintenant, le light design. Un tableau, comme ils appellent-ça. Il y a des créations pures pour certains morceaux. Et on a intégré deux nouveaux morceaux, qu’on a encore répétés là, il n’y a pas un quart d’heure. Deux morceaux de Tenace 2 : Le triomphe du réel et L’émotif impérieux. On les a rajoutés à notre setlist, c’est la première fois qu’on va les jouer ce soir.

Parmi les nouveaux titres de Tenace 1, y en a-t-il que vous avez décidé d’écarter parce que vous vous êtes rendu compte qu’ils ne fonctionnent pas aussi bien que ce que vous souhaitiez ?

J’ai une très mauvaise mémoire… Si Rapha était là, il te le dirait immédiatement, c’est lui qui se charge de la setlist. Mais oui, c’est arrivé qu’on se rende compte que sur ce titre ça prend moins, alors on l’écarte. Souvent, c’est un vieux morceau qu’on n’a pas joué depuis longtemps.

Je pensais plus aux nouveaux titres…

Sur les nouveaux titres ? Non. On a eu une appréhension pour Le grand réveil, parce que c’est très chanson française, un peu guinguette, accordéon. On avait un peu peur de la réaction du public, et en fait, non, c’est passé. Mais ça n’a pas pris tout de suite, cet esprit guinguette/metal/guinguette…

Mais ça apporte une variété qui permet de casser le rythme, aussi.

Exactement, c’est le plaisir dans la diversité. Mais ce morceau ne s’est pas imposé tout de suite. Il a mis un peu de temps avant de vraiment prendre.

On ne va pas revenir sur le choix de faire Tenace en deux parties, n sait que la première est plus sombre, la seconde plus lumineuse. Mais il y a un fait : cinq ans séparent Tenace de Maniac. Cinq années pendant lesquelles on a aussi eu deux années de crise sanitaire. Cette crise sanitaire, cette pause forcée, a-t-elle influencée la composition et l’écriture de Tenace ? Est-ce que ce temps qui nous a été « accordé » vous a permis d’améliorer vos compos ?

Les deux à la fois ! Ça m’a influencé, même galvanisé. Ça m’a influencé comme jamais depuis… je vais te dire : depuis 2005. J’avais voté « non » pour l’Europe, pour le traité de Maastricht. 2005 : 58% des Français disent « non ». Sarkozy, lui, dit « ben oui, en fait ». Mais… Ça va pas ou quoi ? On fait un référendum, c’est un vote, souverain… Il a craché dessus. Là, je n’ai plus cru à la politique. On appelle ça une apostasie, tu ne crois plus en la religion ou autre… J’étais un apostat, je ne crois plus du tout à la politique. Même les journaux que je lisais étaient « oui, bon d’accord… » Mais vous rigolez ou quoi ? J’avais 30 ans… La crise sanitaire a révélé encore plus que je n’imaginais à quel point les politiciens de cette Europe là – je parle de l’Europe parce que je m’en fous de Donald Trump, Poutine, Ping et les autres dictateurs. On nous dit de faire gaffe à ces dictateurs mais, avant, on peut parler de ton bilan avant de faire celui des autres ? il faut avoir le cul propre avant de vouloir torcher celui des autres, tu vois ce que je veux dire ? J’ai l’impression que cette Europe… Le bloc de l’Est s’est effondré avec le mur de Berlin, maintenant, j’ai l’impression qu’on a créé le bloc de l’Ouest, avec une Kommandantur – Bruxelles, c’est le parti… On ne peut même plus décider qui rentre en France, ou pas…

Pas que, on le voit aujourd’hui avec les agriculteurs…

Exactement, ils sont en train de tuer les agriculteurs comme ils ont tué le système hospitalier. Macron, depuis 10 ans, avec Hollande… faut pas oublier que Macron il bossait pour Rothchild avant… Il a fait des allers retours entre le privé et le public. Quand il était à Bercy, il a vendu la France en pièces détachées, Thalès aux Américains, Alsthom…

Maintenant, en quoi tout cela t’a-t-il influencé pendant les années de crise sanitaire ?

Je fais un petit flash-back : 2005, on s’est assis sur notre droit souverain de vote et de référendum. 2010, je fais L’armée des ombres. C’est toute l’époque 11 septembre, guerre en Irak – une guerre illégitime, il n’y a jamais eu d’armes de destruction massive. Il y a plus d’un million d’Irakien qui ont été tués… Toute cette clique qui est allée en Irak méritait d’être jugés par la Cour pénale internationale. On tue des hommes, des femmes et des enfants… C’est pas un match de foot avec des hooligans débiles qui se tapent dessus, là on parle de guerre et de mort. Il n’y a pas de mort légitime, quoi…

Sauf la mort naturelle…

Sauf… oui, exactement, merci de me reprendre ! Donc 2010, je dresse un constat assez noir avec L’armée des ombres. Je demande ce qu’ils veulent, nous mettre des puces sous la peau, des QR Code ? Jusqu’où vont-ils aller ? Après le 11 septembre, il y avait le Patriot act, on pouvait venir chez toi si on te soupçonnait de terrorisme… Pas besoin de mandat, tu peux te faire balancer par un connard et être emmerdé… C’était mortifère et stressant. Moi qui ne croyais plus à la politique, j’y croyais encore moins, encore moins les Américains. Je me disais qu’il fallait être en mode résistance, dissidence. Je suis contre la violence, contre le vandalisme, contre cramer des magasins, des banques, des poubelles, des voitures… Ça, pour moi c’est des débiles qui font ça. Vraiment, ces gens-là, je les déteste, c’est de la racaille, des sans cerveau. J’ai eu des problèmes avec ça, il y a des mecs qui sont venus me voir à la sortie d’un concert. Des « antifas »… Je les avais insultés au Hellfest – je crois que c’est dans le DVD – et les mecs il viennent m’emmerder : « ouais, t’as quoi contre les antifas ? » Quoi, les antifas ? Déjà, montre moi où est le fascisme, il est où Mussolini ? « Oui, Le Pen… » Mais arrête, Le Pen, c’est pas un fachiste, c’est une tête de mort, si tu veux, une tête de con, c’est un mec que t’aimes pas, d’accord, mais il n’est pas pour les chemises brunes, il n’a jamais dit vouloir pendre les gens sur la voie publique, place de la Concorde… Il ne pourrait pas faire ça ! Et s’il était fasciste, il n’aurait pas de parti, il n’aurait jamais eu le droit de se présenter, tu vois ce que je veux dire ?

On pourrait en parler pendant des heures…

Des heures ! bon, depuis 2010, ça boue dans ma tête, et là… arrive le covid. Tout le monde flippe, moi le premier. Mais d’où ça vient ? On ne sait pas, d’un laboratoire… On n’en sait rien. D’ailleurs, ils ne cherchent même plus… Normalement, tu cherches la souche, mais là, non… Après il y a eu toute ces mesures. Alors est-ce que le covid a eu une influence ? Oui, il a même rajouté une dimension supplémentaire à ce que je pensais depuis 2010. Et tout s’est articulé. Même si je ne sais pas si tout ça était voulu ou pas, il y a un putain de virus qui nous a fait chier et il y a eu des conséquences. On était tous en danger. Il y a eu des lois liberticides, mais en même temps, on ne savait rien… Ça a été fait dans l’urgence, d’accord. On ne pouvait pas faire des études pendant 6 mois ? Il y a toujours des volontaires pour faire ce genre de choses. Il y a toujours des gens prêts à subir des tests pour la science. Pas moi ! Ah, non, à moins qu’il y ait un groupe placebo et qu’on me dise que j’en fais partie. Mais ça ne marche pas si tu le sais ! Aujourd’hui, il y a des études qui ont été faites qui ont prouvé que la distanciation sociale ne servait à rien. Les Japonais ont fait une étude sur le port du masque : au bout de 4 heures, je ne te dis pas ce qu’ils ont trouvé dedans. Le masque, c’est pour les malades. Celui qui est en bonne santé, il veut porter un masque ? Pas de soucis !

Comme les Japonais, ils portent un masque pour protéger les autres…

Exactement. Maintenant, je comprends qu’on l’ai demandé dans l’urgence, mais il y a des décisions aberrantes… rappelle-toi, à un moment, tu pouvais aller boire un verre au bar. Mais « si vous buvez debout, c’est bon, mais pas assis ». Donc, si tu es un nain, tu ne peux pas aller dans les bars… Je ne connais pas les solutions, mais je demande juste qu’on nous donne des faits.

En tous cas, cette période a impacté ton état d’esprit, ta façon d’écrire, et le résultat c’est en partie Tenace.

Ça m’a rendu fou, oui ! Tenace, ça signifie « toujours là, toujours debout », et encore plus résigné à résister. Le covid m’a amené à cette réflexion : on était à l’apogée de ce qu’on peut appeler « l’état profond », cette espèce de main invisible qui gouverne et qui place ses pions. C’est pas un mal d’avoir de l’argent et de vouloir placer les gens qu’on apprécie à certains postes. Macron, Schiappa et tous ceux-là font partie d’un club qui s’appelle Young Global Leaders, les jeunes leaders du monde. En Angleterre, partout dans le monde il y en a. C’est une élite choisie par qui ? Par le forum économique mondial.

Stop ! Pause, sinon on est là jusqu’à la fin du concert ! Et j’ai d’autres questions…

Oui, tu as raison ! Mais allez faire des recherches sur ce forum et ce « club ». Ils ont dit, écoute-moi bien « en 2030, vous ne posséderez plus rien et vous serez heureux ». En fait, ce qu’ils veulent, c’est que tu sois locataire à vie de tout ce que tu as. Voiture, maison…

Revenons à Mass Hysteria. Le groupe est assez stable depuis quelques années, depuis l’arrivée de Jamie. Comment analyserais-tu l’évolution du groupe entre vos deux derniers albums, Maniac et Tenace ?

Alors… Avec l’arrivée de Jamie à la basse il y a plus de 5 ans et celle de Fred il y a bientôt dix ans… Là, c’est notre dixième album. Au huitième, Matière noire, je pensais arrêter. Je venais de perdre mes parents, c’était le huitième album, pour moi le 8 c’est le signe de l’infini. Je me disais que, symboliquement, il pouvait se passer quelque chose, on a un disque d’or – on est les seuls à en avoir reçu un dans ce style de musique en France avec Trust et No One, je crois. Donc, Matière noire, c’était en… 2012 ? 2014 ?

Non, c’était en 2015… Il y a L’enfer des dieux, titre tristement prémonitoire…

Oui, merci… C’est vrai, il y a des repères mnémotechniques en plus ! Sur cet album, Jamie venait d’arriver, et je dis à Yann, avant le début de la tournée, que je pense que c’est ma dernière. Je sortais d’une période pas facile, j’avais plus mes parents, et je lui dis que c’était peut-être la fin de quelque chose, que je devais peut-être passer à autre chose… C’est une aventure de 20 ans, quand même, ça se réfléchit… Yann me dit « OK, je respecte, pas de soucis… » et tous les week ends, il me pose la question : « alors, tu es sûr, tu arrêtes ? » Oui, oui. Et puis, ça s’est emballé, il y a eu une espèce de truc avec cet album, les salles ont commencé à plus se remplir, c’était le début de ce qu’on connait aujourd’hui… Là, je me suis dit qu’il y avait peut-être un signe… Je suis dans un esprit un peu dissidence, tu sais.

Non, c’est vrai ?

(Rires) oui ! Et donc je me suis dit que ma place était peut-être toujours là. Yann vient me voir au bout de trois ou quatre mois et me demande « alors, tu en es où ? Tu arrêtes toujours ? » Ah, ta gueule, me fais pas chier ! (Rires) Ben non, j’arrête pas ! Là, je planais, j’étais sur un tapis volant, à 30 cm du sol ! J’avais besoin de ça, j’avais perdu mes parents – je n’en parle jamais, ça fait bizarre…

Tu en parles parce que ça explique un état d’esprit, tu vivais quelque chose de difficile, tu avais besoin de remettre les compteurs à zéro, ce qu’il s’est passé…

Grâce au public, et grâce à mon groupe, oui. J’étais porté par le public et mes gars. Dans ma tête, j’avais trouvé mon envie. Je ne veux pas faire de psychologie de bazar, mais quelque part j’avais perdu mes parents et je les ai retrouvés : le public, c’est mon père, le groupe ma mère. Je me suis demandé pourquoi j’avais pensé un jour arrêter. Qu’est-ce qui m’est passé par la tête ?

En fait, la plus grande évolution, c’est plus entre Matière noire et Maniac qu’entre Maniac et Tenace ?

Ouais, absolument !

Entre ces deux derniers, il y a plus une sorte de stabilité, de continuum qu’il n’avait pas sur les albums précédents.

Voilà, c’est ça !

Si tu devais aujourd’hui ne retenir qu’un seul titre des deux volets de Tenace pour expliquer à quelqu’un qui ne vous connais pas ce qu’est Mass Hysteria aujourd’hui, lequel serait-ce ?

De Tenace ? un seul titre ? C’est dur, parce qu’il y a un titre qui nous représente au niveau de l’état d’esprit mais pas forcément au niveau musical : L’art des tranchées. J’explique ce qu’on est, ce que le public metal est. « On ne connait pas l’art, l’art ne nous connait pas ». Le metal n’a pas besoin de télé, de radio, ça n’empêche qu’en France, il y a un des plus gros festivals de metal. Dans les années 90, il y avait encore du metal à la télé, plus maintenant. Pour moi, L’art des tranchées, c’est un des morceaux qui nous représente le plus. Et en plus le titre, c’est aussi l’histoire du metal, qui a avancé pas à pas et creusé son sillon… Metallica a fait beaucoup, c’est un peu les Beatles du metal…

Les Beatles avaient leur album blanc, Metallica (il termine avec moi)…

Leur album noir ! Absolument, merci !

Mass Hysteria est aujourd’hui l’un des plus importants groupes en France. L’industrie musicale est en crise depuis quelques années. Est-ce que ça a eu un impact sur le financement de Tenace ? Est-ce que, comme ce fut le cas il y a encore peu, vous avez un label, Verycords, qui a financé l’enregistrement ou avez-vous dû mettre vos deniers pour cet enregistrement ?

Non. On aurait aimé s’autoproduire, financièrement, on ne l’a jamais fait. Mais on a la chance d’avoir un label qui nous finance. Pas avec des budgets pharaoniques, mais assez confortables. On est entré chez Verycords en 2010 pour L’armée des ombres, album qui a rencontré un certain succès. Ils étaient contents, on a resigné pour un autre album, Matière noire qui a très bien marché, et on a continué. On a un rapport de confiance avec eux depuis cinq albums, même si on n’a pas un budget illimité non plus, il y a une vraie symbiose. Je reviens à ta question de savoir en quoi le covid a influencé Tenace: on a eu plus de temps pour réaliser cet album, d’où les 14 titres. Si on n’avait eu moins de temps, on n’aurait pu enregistrer que 10 morceaux. On a eu plus de temps, et grâce à notre label, on n’a pas eu à s’autofinancer. On gagnerait plus d’argent, en s’autofinançant. Soyons clairs : moins il y a d’intermédiaires, plus il y a de bénéfice. Mais on n’est pas assez bons pour épargner (je ris). C’est vrai, c’est un cauchemar ! Par exemple, le cachet du Hellfest, la dernière fois – en 2019 – on a tout mis dans le show du Hellfest : la vidéo, la pyrotechnie, on avait une équipe de 24 personnes alors qu’en tournée, on est 12. On jouait une heure, on avait 24 techniciens, ça nous a coûté un bras, des dizaines de milliers d’euros. Au lieu de faire un peu moins, de garder un peu de bénéfice, on a tout claqué !

Aujourd’hui, Mass Hysteria a une position enviable, voire enviée, alors est-ce que vous vivez de votre musique ou avez-vous des activités complémentaires annexes. Je sais que Yann a une activité sportive, mais les autres ?

Oui, Yann est coach sportif. Il n’y a que Rapha, le batteur, et moi, qui n’avons pas d’activité annexe. Je suis avec ma femme depuis 30 ans et je pense que si j’étais seul, je serai obligé d’avoir un taf à côté. Grace à elle, je n’en ai pas besoin. On vit raisonnablement. On vit bien avec Mass Hysteria, mais pas assez bien pour vivre à Paris. Si on n’avait pas 2 salaires, on ne pourrait pas vivre à Paris. En plus, la qualité de vie… Je suis Breton, et j’ai envie de rentrer en Bretagne. On est en train de faire les démarches, ça va nous prendre deux, trois ans… Mais oui, on vit de notre musique mais certains ont des activités annexes parce qu’on ne gagne pas assez pour vivre à Paris.

Fred est aussi producteur, très actif dans son domaine. Que fait Jamie ?

Je ne sais pas si j’ai le droit de le dire mais il est technicien à la télé. Pour la Star Ac’, The Voice, par exemple. C’est lui qui se charge d’installer le matos, batterie, guitare…

Le chanteur de Disconnected a aussi d’autres activités de chant hors metal, il est prof et interviens, je crois, dans des comédies musicales plus pop…

Ah ouais ? C’est cool !

Est-ce qu’on parle du 29 juin ?

(longue pause)…Le 29 juin ?

Oui, le 29 juin 2024, Mass Hysteria sera de retour au Hellfest et va jouer avant Metallica. Je dis bien avant, vous serez sur la même scène, Main 1, et pas intermédiaire sur la Main 2… Comment se prépare-t-on à jouer en « ouverture » de Metallica ?

Alors, déjà qu’on s’était mis une pile sur le Hellfest 2019, là on a un cachet confortable donc on va faire pareil. On ne peut pas faire moins, en plus, on va jouer plus longtemps. On est en train de réfléchir à la scénographie.

A ce moment Fred arrive dans la pièce. Je l’invite à nous rejoindre

La question que je posais à Mouss est : comment on se prépare pour une date comme celle du 29 juin qui arrive ? J’imagine que ça met une certaine forme de pression…

Fred : On se prépare déjà un peu mentalement ! On le sait depuis un moment, mais, oui, il y a une pression. On n’a pas encore entamé la partie technique, mais c’est dans 6 mois…

Moins de 5…

Ah, oui, moins de 5 ! Le temps passe vite (rires). On l’a déjà fait, donc on n’est pas perdus, mais oui, tu as raison, il y a une certaine pression. Ça augmentera sur le mois précédent le concert. Mais on a une équipe technique qui est super, à fond sur les lights, la scénographie. La technologie fait qu’on peut préparer un show en avance. Thomas, notre lighteux, bosse beaucoup sur ce genre de choses. On peut voir la gueule du show avant de l’avoir fait. Et avant le concert, on va faire une résidence dans une sorte de hangar assez grand. Je ne sais pas s’il y aura des particularités, des featurings. On va faire le show de Mass Hysteria, point.

Il y a un autre concert qui est important, c’est celui que vous donnerez le 25 janvier 2025 au Zénith de Paris. C’est quand même assez exceptionnel pour un groupe français, dans ce style de musique, d’annoncer un tel concert plus d’un an à l’avance. Ce sera la fin de la tournée, est-ce que pour l’occasion, vous prévoyez quelque chose de particulier ?

On l’avait déjà fait sur la tournée d’avant, mais malheureusement, ce jour-là, il y a eu la grève des transports… On a fait un score malgré tout correct. Les gens sont venus à pieds, se sont débrouillés… On avait fait quelque chose de particulier. Tu sais, ce n’est pas des plateaux qu’on fait tous les jours, mais quand c’est notre show sur une grosse scène, pas un festival, il faut qu’on intègre des choses spéciales. Techniquement, ça nécessite un peu plus de mise en place, mais nous, on déroule le show comme d’habitude. On reste nous-mêmes ? Est-ce que c’est pour ça qu’on arrive à des plateaux aussi gros, je ne sais pas… Je me méfie clairement de la technologie.

C’est bien, c’est le producteur qui dit qu’il se méfie de la technologie !

Je vais voir des groupes modernes, Architects et d’autres il y a peu, et je me suis emmerdé… Le son est parfait, ça part dans tous les sens, il y a 50 voix en même temps, c’est du play-back, c’est froid, il n’y a pas de contact avec les gens. C’est notre maitre mot, le contact humain, ce que ces groupes-là ont un peu oublié. C’est bien beau la technique, d’avoir de belles lumières et tout, mais sans le côté humain, ben… Tu t’emmerdes… C’est quelque chose qui ne se travaille pas, tu l’as ou pas.

Mass Hysteria est suffisamment important aujourd’hui pour s’offrir une tournée des Zéniths. Pourquoi ce choix de tourner intensivement dans des petites salles ?

Mouss : Je ne crois pas qu’on puisse autant remplir les Zéniths que ça. On va faire celui de Paris, l’Arena de Brest, aussi, peut-être celui de Lille. Mais, pour nous, les petites salles ça reste notre format maximum. Tu es proche du public. Si on ne faisait que des Zéniths, ça m’embêterait. Ce n’est pas pareil de faire que des Zéniths ou que des SMAC. On a fait les deux… Par exemple, avec Le gros 4, on n’a fait que des Zéniths, c’était mortel parce qu’il y avait 4 groupes.

Et ce n’était pas tous les soirs la même tête d’affiche…

Voilà, et il y avait une ambiance, on s’est éclatés !

Fred : Et les gens venaient participer à une grosse fête.

Mouss : C’était après le covid, c’était un peu compliqué. On faisait 3.000 personnes par soir il y avait quatre groupes. Je ne sais pas si Mass Hysteria, tout seul, pourrait le faire.

Fred : C’est pas sûr, non… Là, on passe dans les salles locales, avec une moyenne de 1.000 places. Si c’est complet, on est déjà contents. Passer à 6.000, de temps en temps, OK…

Mouss : Comme on fait pour la date à Paris. C’est presque un Zénith pour nos 30 ans. Plus qu’un Zénith pour la tournée Tenace, celui-là va clore la tournée mais il célèbrera aussi nos 30 ans.

Je reviens à une question que j’ai déjà posée à Mouss : Fred, si tu devais ne retenir qu’un seul titre de Tenace 1 et 2 pour expliquer ce qu’est Mass Hysteria aujourd’hui, ce serait lequel ?

Fred : Un seul sur les 14 ? C’est compliqué… Il s’est passé tellement de choses dans le studio que c’est difficile… Tenace, quand on l’a fait (Mouss réagit avec un « aah ! Pas mal, pas mal » approbateur), on sentait qu’il se passait quelque chose de particulier il est accordé comme on ne l’a jamais, fait, il a une texture particulière… Il y a des morceaux, comme L’enfer des dieux, tu les fais et dans l’après-midi, tu sais que tu tiens quelque chose. Oui, Tenace

Mouss : Oui, Tenace, dans le fond et dans la forme, ça peut le faire. Moi, j’ai dit L’art des tranchées, mais je pensais plus au fond, au texte…

Si vous deviez maintenant penser à une devise pour Mass Hysteria, ce serait quoi ?

Mouss (sans hésiter) Positif à bloc…

Fred : Oui, très bien !

Sans surprise… une dernière chose : si aujourd’hui Mass Hysteria devait – pas pouvait, « devait » – réenregistrer avec le line-up actuel un des albums de Mass, ce serait lequel ?

Fred (il rit) : Alors, je sais ce que Yann voudrait…

Mouss : Oui, moi aussi !

Mais vous ? Yann n’est pas là…

Mouss : Ça tombe un peu sous le sens… l’album noir (2005), le quatrième album, celui qui a suivi De cercle en cercle (2001)

Fred : Effectivement, c’est la vision de Yann. Moi, je l’aime bien tel qu’il est. Il aurait voulu que ce soit un son plus moderne, machin truc…

Mouss : Moi aussi, je l’aime bien. Entre nous, je suis sûr que, si on le refaisait, il ne serait pas aussi bien que l’original… (Fred confirme) Rappelle-toi : Suicidal Tendencies, leur premier album avait un son naze. Ils l’ont refait quinze ans après, avec des zicos de ouf… mais… Il n’y a plus le même son, c’est moins bien. Il n’y a plus l’authenticité d’avant.

Mais si tu devais…

Ah, je ferai celui-là !

Fred : Moi, je referais Une somme de détails (2007), parce que c’était ma première fois avec eux en production et que j’entends ce que je pourrais faire sonner mieux. Mais je pense qu’il faut aussi laisser les choses là où elles sont. C’est un peu le syndrome de la démo : tu t’y habitues pendant un an, après tu l’enregistres avec un super son… Oui, mais c’était mieux à tel endroit… Tu l’as écouté plus que l’album, en fait. Il n’y a pas le même charme, tu t’es habitué aux défauts de l’album. L’album noir, pour moi, il n’a pas de défauts, il a une couleur. C’est aussi une partie de l’histoire du groupe, ça monte et ça descend. C’est bien, dans la vie d’un groupe qu’il y ait des hauts et des bas…

Mouss : Au moment d’enregistrer un morceau, tu es en pleine création, dans la psychologie de l’enregistrement de l’album. Si tu le refais 10 ans après, tu ne pourras pas être dans cet état d’esprit, l’intention ne sera pas pareille, ton humeur non plus, tu feras peut-être ça avec un peu de distance… Après, il faudrait qu’on essaye quelques titres pour voir. Après, se lancer sur un album entier ? Ou alors, faire un best-of, mais tu réenregistres tous les morceaux du best-of.

Fred : Ce que vient de faire Tagada Jones…

Mouss : Mais non ?

Fred : Si, je viens de faire 15 titres avec eux, il n’y en a qu’un de nouveau et ils ont réenregistré les 14 autres. Il y en a qui rendent super bien… Certains, ça marche mieux, même !

Avez-vous quelque chose à rajouter, tous les deux ?

Mouss : simplement merci Metal-Eyes, merci aux lecteurs du webzine. Merci de suivre la scène française et les actus musicales. Et, surtout : restez positifs à bloc !

Fred : Très bonne fin…

Interview: SHAÂRGHOT

Interview SHAÂRGHOT : Entretien le 13 décembre 2023 avec Brun’O Klose (guitares)

Quatre années séparent les deux derniers albums de Shaârghot, The advent of shadows étant sorti en 2019 et Let me out ce 1er décembre 2023. Est-ce que sans la crise sanitaire ce dernier serait sorti plus tôt ?

Euh… Oui, sans doute, mais il ne serait pas sorti de la même façon. Donc, quelque part, ce n’est pas un drame ni un coup dur pour nous. La cassure nous a aussi permis de nous recentrer sur certains axes du groupe et de savoir ce qu’on voulait et ce qu’on ne voulait plus. Avoir la tête dans le guidon tout le temps… C’est difficile de prendre du recul sur ce qu’on a fait, de faire un bilan. Donc, oui, ça nous a permis de savoir ce qu’on voulait faire.

Vous avez pu tirer profit de cette période…

Oui, tout à fait. On en a tiré profit, déjà, en réalisant un court métrage. « Puisqu’on ne peut pas faire de concerts, on va faire un clip ». Un clip qui, au départ devait durer 7 minutes et finalement ont fini à une vingtaine de minutes… C’est une belle aventure !

Un clip à la Michael Jackson…

Oui, on peut dire ça. Après, on a pu se poser et réfléchir à ce qu’on voulait pour le troisième album.

De quoi ne vouliez-vous plus ?

Il fallait qu’on se pose la question de savoir si on voulait refaire un album comme on avait fait avant ou est-ce qu’on voulait travailler de manière différente et tous ensemble. Paradoxalement, on s’est dit que pour cet album, ce serait bien de faire quelque chose qui soit plus à l’image d’un groupe. La fabrication des deux premiers albums, c’était, comme tout le monde a un home studio, « ah, tiens, je t’envoie ça, tu peux me faire telle partie de guitare ? » Comme beaucoup de groupe, en fait, mais là, on s’est dit qu’on n’allait pas faire comme ça. On a travaillé les nouveaux morceaux tous ensemble. Même si ce sont des ébauches et que ça prend plus de temps… Il y aura un groove, de la spontanéité et des idées de tout le monde. On a travaillé comme ça pendant 7 mois, deux week end par mois pendant lesquels on ‘enfermait. Chacun apportait ses idées sur les compos qu’apportaient Etienne. On a aussi choisi avec qui on voulait travailler : on avait une prod différente sur les deux premiers albums et il y a eu une cassure. On n’était plus vraiment en phase avec notre ancienne prod. On en a parlé comme des adultes et il s’est avéré qu’on devait arrêter de travailler ensemble. On a eu un choix à faire : soit on cherchait une autre prod – on a été sollicités, d’ailleurs – soit on prenait ce nouvel album à notre compte, on le produisait nous-mêmes, avec des gens avec qui on voulait travailler. On a choisi l’option de le produire nous-mêmes. On l’a donc travaillé ensemble, enregistré ensemble, on s’est focalisé sur tel instrument, et ensuite, on a pris quelqu’un pour mettre cet album en son et pour l’arranger… et on arrive à Let me out.

Il y a donc pas mal de changements dans votre façon de travailler… Quand on s’était rencontrés il y a 4 ans tu me disais « Etienne détient les clés de l’histoire ». J’imagine qu’il les détient toujours, mais c’est votre façon de composer qui est différente…

Absolument. L’histoire est toujours entre les mains d’Etienne, mais la façon de travailler les morceaux et de les amener au bout est complètement différente.

Et elle vous apporte satisfaction, j’imagine ?

Oui, tout à fait (rires) ! Ça apporte une dynamique, beaucoup de positivité et l’énergie est vraiment très bonne. On le sent vraiment sur l’album, dans le sens qu’il y a du groove et que tout est cohérent. A mes yeux, en tout cas, tout est cohérent.

A mes oreilles aussi, et c’est intéressant que tu dises « à mes yeux » parce que en écoutant l’album, j’ai plein d’images qui me viennent en tête. Pour moi, c’est un album qui est plus que cinématique. A chaque chanson, on est dans une musique qui transmet des images. Avant que je n’entre plus dans mes impressions, comment décrirais-tu la musique de Shaârghot à quelqu’un qui ne vous connait pas ?

Woaw… A quelqu’un qui ne nous connait pas ? Alors, je dirais que c’est une musique qui, parfois, peut être immersive parce que certaines intro font penser à des BO de films ou des passages de jeux vidéo, et en musique on peut très facilement faire passer de l’émotion. Après, évidemment, il y a le rythme, alors quelqu’un qui aime bien la musique énergique, avec des passages immersifs, sera comblé. Après, il y a des codes électro metal, mais on gravite dans plusieurs univers musicaux. On voulait vraiment aller sur ce terrain : autant certains titres peuvent être durs, d’autres plus légers ou immersifs, il y a des instrumentaux intéressant dans notre approche. On est vraiment allés là où on voulait aller avec Let me out. Ce n’est pas par hasard qu’on a cet album et qu’il sonne comme ça. On cherche à retranscrire ce qu’on ressent et ce qu’on voudrait entendre, c’est peut être un peu paradoxal…

Pas forcément, après tout, vous êtes votre premier public, si vous n’aimez pas ce que vous jouez…

Tout à fait.

Il y a une trame d’histoire dans Shaârghot puisque, au départ, le Shaârghot est le résultat d’une expérience qui a mal tourné, transformant les âmes et les peaux en noir. Il n’y a pas les paroles dans le livret, peux-tu me résumer l’histoire ?

Alors, l’histoire générale, c’est en effet celle du Shaârghot qui est un être issu d’une expérience qui a mal tourné et qui a eu des dégénérescences et a mis en avant le côté sombre de ce qu’il vit mentalement. La pigmentation de la peau change, devenant très sombre. C’est l’image de ce coté sombre qu’il y a en chacun de nous… Naturellement, le Shaârgot s’entoure de personnes de confiance qui sont elles-mêmes contaminées. Il y a également les Shadows qui sont également contaminés et vont former une armée. Cette armée qui, dans les deux premiers albums était dans les sous-sols, commence à sortir, même sort sur le troisième album. Aujourd’hui, on en est au stade de l’histoire où Shaârghot est sorti des bas-fonds pour être vu au grand jour.

D’où les images de la ville et le titre Let me out…

Oui, mais il y a deux significations à Let me out : c’est psychologique, à un moment il faut que les choses sortent comme une libération, et le côté physique, il sort avec son armée et commence même à prendre possession de certains districts.

Là on est donc sur l’invasion extérieure du Shaârghot et de son armée de zombies…

De Shadows, en fait…

Tu fais bien de le préciser car sur Chaos area, j’ai noté avoir l’impression d’une armée de zombies en marche, mais je vais changer le terme, c’est une armée de Shadows…

Tout à fait !

Il y a un esprit très post apocalyptique dans votre musique mais aussi sado-maso…

Post apocalyptique, oui… Sado maso je ne vois pas trop…

C’est dans les images que j’ai pu ressentir, ce besoin de faire et de se faire mal..

Alors tu serais un bon Shadow (rires) !

Il y a aussi beaucoup de Orange mécanique dans votre musique…

Oui, comme Mad Max, Blade Runner, tout ça, c’est des références à notre univers.

C’est peut-être un détail pour vous, mais j’ai l’impression que le virus n’a pas infecté que les êtres vivants mais aussi les objets…

… Les objets ?

Le CD, c’est une horloge de 13 heures, et le XIII apparait en vert… Au premier abord, cette horloge m’évoque les Watchmen, mais en regardant de près on voit bien ces 13 heures du cadran. Pourquoi ces 13 heures ?

Tout à fait, bien vu. Mais je ne peux pas le dire… C’est une autre facette de l’histoire. A découvrir. Après, peut être qu’au cours des interviews précédentes Etienne a distillé des petits indices…

Quel genre d’indices ?

Oh, il dit toujours des choses et après il s’arrête… « Non, je ne peux pas aller plus loin »… Je te rassure, il fait ça aussi avec nous !

C’est lui qui détient les clés… Il faut bien que, même pour vous, il garde une part de mystère. Le côté visuel, c’est la base du groupe. J’imagine que vous travaillez autant ce côté visuel pour la scène que l’impact sonore de la musique…

Ah, oui ! Le côté visuel fait aussi partie du travail qu’on doit faire pendant nos mois disons de repos puisque maintenant on s’entoure d’un ingénieur lights qui travaille activement sur notre visuel lumières, et on va apporter des modifications sur notre scénographie actuelle pour la faire encore évoluer. On a tout le temps des idées, alors il faut qu’on expérimente et qu’on valide entre nous des choix.

Vos costumes de scène évoluent aussi ?

Absolument. Il est en projet, effectivement, que certains personnages aient de nouveaux costumes. On a commencé avec Clem-X, à la basse, qui a une évolution sur sn costume, et je pense que le prochain c’est moi (rires) ! j’en suis à la V2 au niveau costume, donc là, je pense sérieusement à la V3 et à faire évoluer mon personnage sur scène.

« Je pense à le faire évoluer », dis-tu. C’est une décision personnelle ou de groupe ?

Là, c’est une décision personnelle. Je créer mes personnages, mes vêtements. Etienne et moi, nous sommes assez connectés coté vêtements, et quand je lui propose quelque chose, généralement c’est lui qui valide. Mais on a exactement les mêmes attentes, je ne suis pas inquiet là-dessus.

Quelle pourrait aujourd’hui être la devise de Shaârghot aujourd’hui ?

La devise c’est de continuer à faire la musique spontanément, sans calcul, et la faire avec le cœur. Je fais de la musique depuis longtemps et je n’ai jamais calculé les choses, j’ai toujours composé avec mon feeling…

C’est souvent ce qui donne les meilleurs résultats. Comme dans n’importe quel art, si on commence à trop réfléchir, intellectualiser, ça perd de son âme…

Tout à fait.

Pour terminer avec Shaârghot, as-tu une idée du nombre d’épisodes restant à l’histoire, en nombre d’albums ?

Aujourd’hui, si on écoute Etienne, il a bien l’équivalent de 4 à 5 albums en tête…

Donc c’est loin d’être terminé, cette aventure.

Ah, non (rires) ! Loin de là ! Après, est-ce que c’est utilisable ou pas, c’est à voir, mais il y a de quoi faire. Au niveau des compos, c’est ouvert à tous les membres du groupe maintenant, parce qu’on se connait très bien. Donc là aussi, ça peut évoluer, prendre des directions qu’on ne soupçonne pas encore.

Une belle aventure là encore… Je terminerai avec cette question vous concernant : quels sont vos métiers respectifs dans vos autres vies ?

Je travaille dans le domaine des réseaux de chaleur urbains. Je travaille pour une société qui chauffe des villes de manière centralisée. Je suis responsable travaux Ile de France pour cette société.

Ce sont des travaux qui se passent hors et sous-sol ?

C’est en sous-sol, oui.

C’est un univers que tu connais bien, finalement…

Finalement, oui, c’est un univers que je connais très, très bien ! Le côté industriel et tranchées, je connais (rires) !

Et les autres ?

Clem est ingénieur du son, Paul, « B-28 », est régisseur lumières, Olivier « O.Hurt—U », le batteur, ben… il est batteur ! et Etienne est monteur vidéo et… beaucoup de Shaârghot.              

Donc, il n’y a que toi qui ne travaille pas dans un métier artistique, tu es, là encore, l’anomalie du groupe !

Ouais, tout à fait (rires) !

Interview: ABDUCTION

Interview ABDUCTION. Entretien avec François Blanc (chant, le 1er décembre 2023)

L’arroseur arrosé… Ou plutôt, le questionneur questionné. S’il est avant tout (re)connu pour sa plume au sein du mensuel Rock Hard, François Blanc est, à ses heures perdues (genre « on n’a pas beaucoup de travail à la rédac’, alors je trouve de quoi occuper mon temps ») chanteur au sein du groupe de black metal progressif Abduction. S’il prend le temps d’appeler Metal Eyes aujourd’hui (vraiment très peu d’activité chez RH…) c’est pour nous présenter et parler du quatrième album de la formation, Toutes blessent, la dernière tue. On inverse donc les rôles aujourd’hui, c’est François qui répond aux questions.

François : Tu as pu écouter l’album ? Tu en penses quoi ?

Metal-Eyes : Comme il est impatient ! Aujourd’hui, c’est moi qui pose les questions, François !

Absolument, tu as raisons (rires) !

Votre dernier album, Jehanne, est sorti pas vraiment à la meilleure période, puisque juste après, il y a eu la crise sanitaire et le confinement… Comment avez-vous vécu cette période et comment la crise sanitaire a-t-elle affectée Jehanne ?

On a eu la chance de finir l’album à 100% avant que la crise sanitaire n’arrive – il était terminé fin 2019. Cet album m’a largement aidé à supporter le confinement : on était très désireux de le sortir, le confinement n’a, heureusement pas changé les dates de sortie. L’album nous tenait vraiment à cœur et a été très bien reçu. Voir qu’il y avait une attention autour de l’album est quelque chose qui, personnellement, m’a beaucoup aidé et distrait d’une période assez morose. Paradoxalement, les gens ont eu beaucoup de temps pour écouter des disques…

Toutes blessent, la dernière tue est votre quatrième album. Vends le moi…

Alors… Je pense que c’est notre album le plus direct, si tant est que ça signifie quelque chose pour la musique qu’on joue qui est assez progressive par essence. On avait pour habitude de composer des morceaux un peu à tiroirs et là, on a essayé de moins le faire, d’avoir moins de guitare superposées, Abduction a l’habitude de le faire. Là, on a voulu que ce soit un peu plus dépouillé, on a varié l’approche du chant également, il y a plus de voix claires que par le passé, donc on sort un peu du carcan black metal pour proposer quelque chose qui n’appartient qu’à nous. Dans la mesure où c’est Mathieu, le bassiste, qui, pour la première fois, s’est chargé de l’écriture d’une bonne partie des lignes de chant clair, on y retrouve sa sensibilité dans la pop ancienne populaire. « Populaire » dans le sens où il est très sensible à la vieille chanson française des années 20 à 40 et ça imprègne un peu ces lignes de chant qui ont ce côté « ritournelle » qui, superposé au black metal donne quelque chose qui est, pour nous en tous cas, assez personnel et unique, en tous cas, quelque chose qu’on n’entend pas partout. Ça donne un caractère vraiment particulier à l’album. Je dirai que c’est un album un peu plus accrocheur et varié, aussi. Il y a des gens qui ne s’attendent pas vraiment à ça quand ils pensent « black metal », donc il peu y avoir une surprise qu’on espère agréable. On a aussi voulu faire des morceaux plus courts et plus digestes. Un titre comme Carnets sur récifs a moins de variations, monte en intensité et, par conséquent, est plus digeste malgré une ambiance que, nous, on trouve très forte. Et aussi, c’est le meilleur son qu’on n’ait jamais eu, c’est important à signaler. Ça fait quatre albums qu’on travaille avec Déha, on se connait vraiment très bien, et on maitrise davantage le vocabulaire technique qui nous permet d’obtenir le résultat escompté. On a eu une meilleure maitrise du processus de mixage. Pour le son de batterie, on est allé plus loin pour avoir quelque chose de plus organique, moins mécanique. Donc, je dirai que cet album est le résultat du fruit de pas mal d’années d’expériences et de la démarche pour ce disque qui fait que, selon moi, c’est un bon album qui peut plaire à pas mal de gens qui ne sont pas forcément ouverts au black metal à la base.

Moi qui ne suis pas fondu de black et qui apprécie plus le chant que les cris – même si les hurlements peuvent avoir du sens, ça dépend de comment c’est utilisé – je trouve que dans votre album, la variété des styles et des chants me permet d’aller au bout de ce CD…

Mmh… Ça, c’est super !

Je voudrais revenir sur ce que tu disais il y a un instant : qu’entends-tu par « musique progressive par essence » ?

Les groupes qui nous ont influencés au départ ne sont pas forcément des groupes d’obédience progressive, à part Opeth qui est un fleuron du genre et une de nos références. Guillaume (Fleury, guitare) a toujours écrit des morceaux avec des signatures rythmiques relativement complexes et des changements d’ambiances et d’atmosphères. C’était déjà le cas sur le tout premier Ep, avant que je n’arrive dans le groupe, mais aussi sur le tout premier album. On aime les compositions à tiroirs, les compositions variées avec le chant qui alterne entre clair et extrême. Quand on écoute un morceau d’Abduction, on sait d’où on part mais pas du tout où on va arriver et ce qu’il va se passer pendant le voyage. Ça rejoint une démarche « progressive » à défaut d’un autre adjectif…

C’est ce que j’ai noté au sujet de Carnets sur Récifs : il y a une étonnante association entre les guitares qui sont très speedées et un chant profond, grave et lent. Tu as parlé du style qui, je trouve, reste assez sombre (il confirme), qui sort du black metal pur et dur, même si on en retrouve des codes. Tu parlais de « ritournelle », et c’est sans doute le mot qui me manquait, parce que dès le départ, il y a des airs qui donnent envie d’être chantonnés.

Oui, tout à fait, et c’est une des choses particulières chez Abduction. En fait, Guillaume compose très peu de rythmique. Sur cet album, à part les secondes parties de Carnets sur Récifs et de Dans la galerie des glaces, il y a très peu de rythmique. Il y a beaucoup de guitares chantantes qui s’entremêlent. Il ya beaucoup de lead et la superposition des guitares donne ce côté très « plein » et riche au son. Dès qu’il y a un passage de guitare clean, ou même dans les moments le plus intenses, on sent qu’il y a une guitare au premier plan et on sent que ce sont des mélodies qu’on peut retenir.

Il y a en effet plein de petits passages qui donnent envie d’être chantonnés…

Eh, eh ! C’est plutôt bon signe !

Tu viens de décrire votre musique. Maintenant, si tu devais ne retenir qu’un seul titre de cet album pour expliquer à quelqu’un qui ne vous connait ce qu’est l’esprit d’Abduction aujourd’hui, ce serait lequel ?

Ah, c’est une bonne question et ce n’est pas quelque chose de facile…

Venant de toi, je le prends comme un compliment !

Bien sûr ! Je pense que j’opterai pour Disparus de leur vivant. Déjà parce que c’est l’un des deux qui me tient le plus à cœur sur cet album…

Pour quelle raison ?

La seconde partie me bouleverse… A partir du moment où le chant clair revient, la lumière se fait vespérale, à peu près vers 4’, je trouve les mélodies de guitares poignantes, le jeu de batterie de Morgan (Delly) complétement dingue, les breaks là où il faut et comme il faut, cette espèce d’intensité dans le blast beat avec du chant clair ce qui n’est pas forcément habituel… Et le thème des paroles me touche énormément. J’ai le sentiment d’avoir réussi à mettre l’émotion qu’il faut sur ce passage-là. Et je trouve la deuxième partie de ce morceau vraiment poignante. Je l’écoute comme j’écouterai l’œuvre d’un artiste qui n’est pas nous sur le bord de mon siège avec des frissons sur les bras… Ca me parait être le bon morceau pour dire ce qu’est Abduction 2023, avec des voix claires, des moments assez énervés et cette espèce de mélancolie qui imprègne un peu tout ce qu’on fait.

Tu évoquais les paroles, il y a beaucoup de références historiques, et cela dès la pochette de l’album, une peinture du 18ème siècle. Pourquoi avoir choisi cette illustration, d’ailleurs ?

Il faut savoir que chez Abduction, la pochette est quelque chose d’extrêmement important, dans la mesure où Guillaume ne peut pas écrire sa musique s’il n’a pas un visuel sous les yeux. Il avait commencé à écrire cet album et, à un moment donné, il s’est retrouvé coincé. Il a fallu qu’il attende de trouver l’image qui l’inspire pour pouvoir se remettre à travailler. Quand on est en studio, on a en permanence la pochette de l’album sous les yeux parce que Guillaume veut s’assurer, de manière presque mystique, que la musique qu’on fait colle bien à la pochette qu’on a choisie. Dans la mesure où on voulait quelque chose de plus forestier dans l’esprit et de plus organique dans le son, avoir quelque chose avec de la nature dedans paraissait un choix assez évident. Guillaume a cherché longtemps pour trouver le tableau qui l’inspirerait – on savait qu’on prendrait un tableau classique parce que c’est ce qu’on a toujours fait et qu’on adore ça – et celui là va bien avec la thématique du temps qui passe qui est le fil rouge de la thématique d’Abduction. Quand on est tombé sur ce tableau, on a trouvé que ça collait parfaitement. Il avait déjà le titre de l’album, Toutes blessent, la dernière tue, qui fait référence au temps qui passe, aux minutes, aux heures. Là, on voit cette femme qui arrive devant ce mausolée qui est si vieux qu’on ne sait plus de quand il date, et elle à l’air de s’interroger peut-être sur la signification de cette pierre, sur ce que ça signifie pour elle, sur sa propre vie, sur ce qu’elle laissera derrière elle… Bref, c’est un condensé parfait de ce qu’on voulait mettre dans l’album. L’image est très belle et ce n’est pas un des tableaux les plus connus du peintre, Hubert Robert. Tout était réuni pour en faire notre pochette !

On parle de références, vous évoquez la Madelon dans Disparus de leur vivant, et dans Dans la galerie des glaces, tu dis « Le droit c’est moi ». C’est une référence monarchique ou républicaine contemporaine ?

(Rires) Les deux mon général ! En fait, c’est un morceau qui parle du développement personnel et des dérives de cette société parfois bienveillante à l’excès, qui conseille aux gens en permanence de n’écouter qu’eux-mêmes, de ne pas tenir compte des gens qui leur font des critiques… Il y a cette tendance qu’on aperçoit aujourd’hui qui fait qu’on te dit « tu es parfait, c’est toi qui as raison, si on te dit le contraire, n’écoute pas ». Certes, il faut se débarrasser des personnes toxiques, ou en tout cas les tenir à distance. Toute critique n’est pas forcément mauvaise à prendre, au contraire. Ça peut être source d’épanouissement, c’est comme ça qu’on grandit aussi. Ce morceau parle d’un personnage imbu de lui-même, qui sait très bien que ce n’est pas bon pour lui mais qui ne peut s’empêcher d’être amoureux de son propre reflet… C’est un texte plus direct que ce qu’on fait d’habitude, moins métaphorique mais qui est ponctué, en effet de références historiques. « Le droit, c’est moi » en est une. Rien que le titre fonctionne à deux niveaux puisqu’il fait référence aux halls des miroirs qui ne lui font voir que lui et, bien sûr, à la galerie des glaces de Versailles.

L’autre référence est plus contemporaine et j’imagine que tu vois à quoi, ou plutôt à qui je fais allusion…

Oui, oui, bien sûr (rires) ! Même si ce n’est pas à lui qu’on pensait en écrivant ça, mais du coup, c’est assez amusant !

Une chose que tout le monde ne sait pas forcément, c’est que Abduction est composé à moitié de journalistes de Rock Hard, Guillaume et toi. Vous entendez utiliser Rock hard comme plateforme de communication, d’envol pour le groupe ? Si oui, on pourrait penser qu’il y a conflit d’intérêts…

C’est une question à laquelle on a souvent pensé… On a conscience d’avoir une chance que beaucoup de musiciens n’ont pas, à commencer par avoir accès, pour un groupe comme le nôtre, à un média comme celui-ci. Nous devons faire très attention à ce qu’on fait parce qu’il pourrait en effet y avoir conflit d’intérêts. L’idée n’est pas de dire que parce que Abduction est composé de membres de la rédaction c’est le meilleur groupe de metal français. En fait, jusqu’ici, on a obtenu ce que beaucoup de petits groupes méritants ont réussi à avoir : un morceau sur un sampler, une interview de deux pages, une chronique. Mais pour le reste, par pure déontologie, on n’ira pas plus loin. Dans la mesure où ce magazine est le nôtre, ce serait bizarre de ne pas parler de ce que nous faisons – encore une fois, c’est une chance d’avoir accès à cette plateforme pour présenter notre travail – mais il est hors de question que ça prenne plus de place pour une groupe de notre stature. Ca n’aurait pas de sens et ce serait injustifié. On tient même à dire lors des interviews que nous faisons partie de Rock Hard pour ne pas prendre les lecteurs pour des idiots ou les flouer.

Donc si Rock Hard apprécie votre album, c’est normal d’en parler…

Oui, et de toute façon, on n’a pas de prétention particulière. C’est la première fois qu’on fait une journée promo comme celle-ci parce que l’album Jehanne a été très bien reçu et on s’est dit qu’on allait peut-être essayer de passer un cap supplémentaire avec celui-là, mais on n’a jamais aspiré à vivre de la musique ou ne faire que ça. La musique nous tient énormément à cœur, mais en dehors de nos vies professionnelles.

De toutes façons, en France, à part certains, on ne vit pas de sa musique…

Et vu la musique qu’on fait, en plus… Il faut rester réalistes !

Revenons à l’album. Vous parlez beaucoup de thèmes historiques. Je connais ta passion pour un groupe qui se nomme Sabaton (il rit et confirme) qui traite aussi beaucoup d’histoire. Toi qui connais très bien le groupe et Joakim Broden, son chanteur, est-ce que vous échangez au sujet des évènements historiques dont vous traitez ?

Il m’est arrivé d’en parler avec lui dans la sphère privée, de discuter pas tant d’événements que de notre perception de certaines choses… Une fois, on avait discuté du sens quelque peu galvaudé du mot « patriotisme » que certains associent immédiatement à « nationalisme », alors que ça n’a rien à voir… On a le droit d’aimer son pays, sa culture et son patrimoine sans pour autant dire que son pays est meilleur que tous les autres et qu’il faut « bouter les étrangers hors de France » !

Patriote mais pas nationaliste, en somme…

Je trouve ça sain… On n’a pas de raison d’avoir honte de notre culture et je trouve ça très beau que certains se battent pour la préserver. A notre niveau, on exalte des figures de l’histoire de France comme Jeanne et de nos jours, ça peut très vite être mal perçu ou mal connoté, et je trouve ça triste. C’est au contraire la diversité du monde qui fait sa beauté et on devrait s’en enorgueillir, de cette diversité.

C’était la minute philosophique de François…

(Rires) Je pense que l’approche historique de Sabaton est différente de la notre à bien des égards, mais on se retrouve très bien avec Joakim. Je pense qu’il y a une dimension un peu plus sociale dans ce qu’on fait. Joakim qit toujours que ce qui compte pour lui c’est d’exalter le courage et les émotions qu’on mis les gens qui se sont lancés dans ces batailles. Nous, nous parlons très souvent de l’après. Typiquement, Disparus de leur vivant – je trouve le titre très évocateur et fort – parle des soldats qui sont revenus du front après la première guerre mondiale, ets que trouvent-ils ? Là où on pense qu’ils vont être accueillis en héros, il y a tout un pays à reconstruire. A peine rentrés, ils sont renvoyés à l’usine parce qu’il faut bien œuvrer à la reconstruction d’un pays en ruines. Et là, ils découvrent ce qui a été mis derrière « l’idéale patrie » : ils ont mis toute leur âme en espérant sauver leur pays pendant que d’autres se sont enrichi et se moquent bien des pauvres poilus qui reviennent du front. Il y a cette dimension sociale empreinte de mélancolie. Le social est au cœur de nos préoccupations, notamment cet album-ci, tandis que Sabaton, c’est souvent plus le cœur du conflit et l’aspect factuels qui sont mis en avant.

Parlons aussi du dernier titre, Allan, qui est une reprise de l’icône française Mylène Farmer. Ce titre apparait en 1989 sur son album …Ainsi soit je, à une époque où le travail musical et visuel réalisé avec Laurent Boutonnat était – et est toujours – impressionnant. Pourquoi avez-vous décidé de cette reprise en particulier et pourquoi avez-vous également décidé d’utiliser ce titre qui n’est pas d’Abduction comme premier clip ?

Déjà, on a choisi ce morceau parce que Guillaume adore Mylène Farmer – c’est certainement son artiste francophone préférée, toutes catégories confondues. L’idée lui est venue au cours d’une balade en forêt avec sa famille. Il s’est dit que si un jour il devait faire une reprise avec Abduction, Mylène Farmer s’imposerait. Guillaume n’aime pas trop l’exercice de la reprise dans des styles similaires. On comprend bien qu’on veuille rendre hommage à des groupes qu’on admire, mais reprendre un groupe de metal pour en faire du metal, c’est plus difficile d’être créatif. Tandis que prendre une chanson pop et la métalliser, la « Abductionaliser », c’est plus intéressant. Allan est non seulement une de ses deux ou trois chansons préférées de Mylène Farmer, mais en plus un morceau dont la thématique colle très bien à notre univers. Il parle d’Edgar Allan Poe, qu’on apprécie aussi beaucoup. Le morceau est né très vite, c’est surprenant même à quel point il est né rapidement… Deux semaines plus tard, il était enregistré, c’était un vrai plaisir à faire. Et on s’est dit que ce morceau avait un potentiel que les autres n’avaient pas. On l’a revisité en gardant des structures un peu pop et dansantes, te il y a un vrai potentiel. Pour Guillaume, en faire un clip, c’était aussi réaliser un rêve. Il a toujours voulu réaliser un clip, sa passion c’est le cinéma. Avant ce clip, il n’avait jamais tenu une caméra !

Il s’est non seulement occupé de la réalisation, mais aussi du montage et d’autres choses…

Le montage s’est fait aussi avec Pauline Royo, qui est aussi notre photographe depuis le deuxième album. Elle est monteuse professionnelle, c’est son métier. Autant faire un clip, le réaliser, capturer les images, elle ne l’a jamais fait, autant elle maitrise le montage dont elle s’est occupée sous la supervision de Guillaume. Les paroles et la structure de ce morceau ont en plus un aspect très narratif, et ça nous paraissait un bon choix. Et l’idée est aussi de séduire un public un peu plus large qui ne connait pas forcément Abduction. Rien qu’un titre de Mylène Farmer adapté version black metal, normalement, ça titille la curiosité et ça devrait donner envie d’aller voir.

Le clip est réalisé en noir et blanc, dans un château. C’est un lieu que vous avez fait privatiser pour l’occasion ?

Oui… enfin… C’est un château qui est privé et qui est ouvert au public sauf le lundi. On a pu réserver deux lundis consécutifs, donc on a pu profiter de ce château pour y faire le tournage. On connaissait déjà les lieux, Guillaume avait déjà visité ce château il y a des années et on l’avait déjà utilisé pour les photos promo de A l’heure du crépuscule, notre deuxième album. On avait eu un bon contact avec les personnes qui travaillaient sur place et, même si l’équipe a changé entre temps, on a gardé contact. On les a contactés et on a pu louer. On nous a pu y accéder assez facilement et librement, on a eu accès à l’essentiel des salles du château et pu faire ce qu’on voulait. Rien que le fait qu’on puisse allumer un feu de cheminée, c’était inespéré. Et entrer à cheval dans la cour du château… Ils ont été très cools, et c’était très bien parce qu’on voulait faire le moins de compromis possible avec la vision artistique de Guillaume. Il avait un scénario très écrit, et c’est une chance d’avoir pu le mettre en œuvre.

A quand remontent tes derniers cours d’escrime ?

Ah, ah ! ben, il n’y a pas très longtemps, je n’en avais jamais fait avant ! Le combat est volontairement lent, il y a un coté métaphorique puisque le personnage féminin représente la mort qu’on ne peut pas battre. D’ailleurs, quand le protagoniste arrive à la blesser au visage, elle, la mort, efface la cicatrice d’un simple coup de main. L’ami qui nous a prêtés une partie des costumes et les épées est un escrimeur confirmé, il nous a donnés quelques petits cours à ma femme – qui joue donc la mort dans le clip – et moi pour que nos passes, même si elles ne sont pas forcément bien exécutées, soient des passes qui existent vraiment. Le désarmement, notamment, que fait le personnage féminin, c’est une botte d’escrime. C’était complètement nouveau pour nous deux, on a eu assez peu de temps pour s’entrainer, mais au moins, on a pu atteindre un niveau pour chorégraphier un combat.

Quelle pourrait être la devise d’Abduction ?

Devise, je ne sais pas… Un chroniqueur à une époque avait parlé de « black metal automnal » et ça nous avait plu. Ce qui est sûr pour Abduction, c’est que la réflexion sur le temps qui passe est au cœur de notre réflexion. Formuler ça en devise, là, tout de suite, ça va être compliqué, mais il y a un côté « Souviens-toi que tu es mortel ». De l’importance d’utiliser son temps de la meilleure façon possible…

Et bien, ça peut être ça votre devise! Une dernière chose : si je me souviens bien, vous portiez, fut une époque, des masques anti-peste. Vous avez décidé de les laisser tomber ? C’était une époque, un effet Ghost et Tobias Forge qui se montre à découvert ?

Ah, ah ! Ce n’est pas forcément lié à Ghost mais tu marques un point. Il y a eu une sorte de lassitude de voir tant de groupes masqués, ça devient un gimmick, beaucoup de groupes le font. Pas que dans le black, mais principalement dans le metal extrême. Le but n’a jamais vraiment été de nous cacher mais plutôt d’emmener les auditeurs dans un monde un peu étrange, sombre, mystérieux, empreint d’histoires… Et si tu regardes bien les photos promo, les masque sont à notre ceinture. Ils n’ont pas disparu, simplement nous ne les arborons plus sur nos visages. Ça nous paraissait le bon moment pour nous démasquer…

Sur la photo intérieure du CD, il y a une ombre qui ressemble à ce masque aussi…

Oui, c’est vrai, bien vu !

As-tu quelque chose à rajouter pour terminer, François ?

Merci de ton intérêt pour Abduction, j’espère que cet album touchera la curiosité des gens même au-delà du cercle du black metal.

Interview: TEMPT FATE

Interview TEMPT FATE. Entretien avec Pierre-Louis le 29 novembre 2023.

Le dernier album de Tempt Fate est sorti il y a déjà quelques temps… Pourquoi n’en assurer la promo que maintenant ?

Oui, il est sorti en septembre sur le label Almost Famous. La promo a un peu commencé avant, mais surtout, on a un peu trainé et pris du retard sur l’enregistrement, et le mix et la suite ont été décalé, comme le reste du planning qu’on avait prévu. On a reçu les CD tardivement, fin aout. On avait prévu la release lors du festival Metal on the beach qu’on organise. Ensuite, il a fallu qu’on s’organise avec Roger (Wessier, WTPI) qui a pu distribuer les CD et organiser les interviews. On a quand même eu pas mal de chroniques entre septembre et octobre, et ça continue. Là je suis à Paris pour la promo, où on joue demain, donc on a profité de faire d’une pierre deux coups.

De mon côté, je découvre Tempt Fate avec ce nouvel album, Holy deformity. Je crois savoir qu’un premier album était sorti en 2018, Human trap. Cependant, peux-tu nous raconter l’histoire du groupe ?

Ça va faire 10 ans en 2024 que le groupe existe. On a sorti un Ep en 2014/2015, quelques morceaux, mais entre temps, on a pris d’autres chemins. Ce n’était pas tout à fait la même musique qu’on proposait, c’était du blast mais pas vraiment ce qu’on voulait faire. Il y a eu l’album, puis un autre Ep, Hold on, en 2021. On a sorti quelques singles aussi et Holy deformity en 2023. Le line up a aussi un peu bougé entre 2018 et 2023. Il reste trois membres d’origine : j’ai monté le groupe avec le batteur, Quentin, et Simon, le chanteur.  Le line up actuel existe depuis environ 4 ou 5 ans. Avant le Covid.

Comment décrirais-tu la musique de Tempt Fate pour inciter quelqu’un qui ne vous connait pas à vous écouter ?

Alors… ça dépend : si cette personne est déjà branchée un peu metal, il y a quelques codes qui vont lui parler. Si c’est quelqu’un qui ne connait rien au metal, il y aura un peu plus de travail (rires). Pour quelqu’un d’un peu initié, c’est du death metal avec différentes teintes par morceaux. Ça navigue entre le brutal – dans le sens où il y a des tempos très élevés, ça blaste beaucoup – et les côtés plus mélodiques. On essaie de proposer une recette qui est la nôtre, piochée dans nos influences…

Comment tu la décrirais cette recette, justement ? Mets moi en appétit !

Ah, ah ! Comment je la décrirais ? Que je te mette en appétit ? Alors, je vais venir sur les basiques primordiaux de la vie : tu vois un beau feu de cheminée, un bon verre de rouge – mais, tu n’en bois pas trop quand même parce qu’après tu vas devoir boire de l’eau ! – et à la fin tu ajoutes un peu de sucré pour faire glisser le tout…

Alors, le sucré, je ne l’entends pas trop dans votre musique… Je ne suis pas le plus grand amateur de metal extrême et de death, et c’est vrai que quand j’ai écouté l’album, c’est… « c’est du brutal », comme diraient les Tontons flingueurs…

Ah oui ? Pour moi, le sucré, c’est peut-être mon côté nostalgique, un peu ténébreux qui me fait dire ça… On n’est pas des méchants. Et comme je sais ce qu’on a écrit, je me dis « oui, bon quand même, c’est pas si violent ! » Pour me rassurer, quoi (rires) !

Quelles sont selon toi, en dehors des changements de line-up, les évolutions principales de Tempt Fate entre vos deux albums ?

Tout (rires) ! Tout dans le sens où le premier album, je l’ai majoritairement écrit seul. Il y a des parties qui ont été réarrangées et réécrites, mais à 80/90%, je l’ai écrit seul. Ça entraine pas mal de faiblesses dans la composition, et j’ai appris plein de choses depuis. Cet album, au-delà de la qualité du son, était assez à mon goût. Il y avait un manque de cohérence entre les morceaux, des breaks pas forcément bien amenés…. Ce sont des éléments dont on a tenu compte, même si on aime les choses déstructurées, mais il faut savoir les amener musicalement. On a voulu mettre plus de liant dans le nouvel album qui, selon moi, est beaucoup plus mélodieux, avec plus de riffing et un travail beaucoup plus aboutit en termes d’harmonies. Ça, on le doit clairement à Jean-Philippe qui est arrivé dans le groupe avec un niveau de guitare qui dépasse très largement le mien. Il est arrivé avec beaucoup d’idées, on a appris à travailler ensemble et le résultat est là. Comment structurer tout ça pour aller à l’essentiel. Après, il y a eu tout le travail sur le son pour avoir un album qui se tienne. Qu’on aime ou pas, le son est bon, le produit est fini, on ne se pose pas de questions : ça sonne ! on a enregistré les cordes à la maison – c’est moi qui m’en suis occupé – la batterie a été enregistrée chez Nicolas Constant qui a un studio ici dans le Tarn, et le tout a été mixé et masterisé chez Thibault Bernard qui a fait un super boulot. Il connait bien ce genre de musique et je savais qu’il serait en mesure de nous proposer quelque chose qui marche bien. C’est assez conventionnel, peut-être, il n’y a pas beaucoup de prises de risques sur le son, mais on ne voulait pas se rater sur certains niveaux pour proposer un produit fini, carré et qui soit cohérent, avec un côté un peu plus sérieux.

Il y a donc 2 évolutions principales, l’une dans le travail plus collaboratif, l’autre dans une professionnalisation notamment au niveau du son…

Absolument !

Maintenant, si tu devais ne retenir qu’un seul titre de Holy deformity pour expliquer ce qu’est Tempt Fate aujourd’hui, lequel serait-ce ? Celui qui est le plus représentatif de ce que vous êtes aujourd’hui.

Oh là, c’est chaud ! Pas forcément celui que j’aime le plus, donc… Déjà ça c’est difficile… Le plus représentatif ?

Un titre que tu ferais écouter à quelqu’un pour l’inciter à écouter le reste de l’album, en lui disant : « voilà, ça, c’est notre identité musicale ».

OK… Donne-moi deux secondes… Alors, celui-là est un peu différend des autres mais il nous représente bien : je dirais Filth of life. Il y a une espèce de mosh part, il casse des dents, il est bien structuré et il est assez brutal. Pour autant, je ne pense pas que tout l’album soit à cette image, alors je dirais peut-être plus le morceau du clip, God ends here. Il y a peut-être un peu plus de mélodie, c’est entre le death et ça tire un peu vers le black. Oui, c’est celui-là qui représente plus l’album, c’est pour ça que c’est celui qu’on a choisi pour le clip…

Il y a une forme de logique, en effet… Si tu devais penser à une devise pour Tempt Fate, ce serait quoi ?

Une devise ? « Il faut toujours suivre le plan » ! S’il y a un plan, ce n’est pas pour rien, ça évite de s’embrouiller. Que ce soit pour le rangement du camion ou pour le reste… C’est devenu une devise entre nous, si on a un plan, c’est pas pour faire n’importe quoi ! Je peux être obsessionnel, mais j’ai mes limites ! Quand on est 5, avec 5 caractères très différents, au bout d’un moment, il faut qu’on soit raccord sur des trucs, sinon on ne s’en sort pas (rires) !

Vous êtes 5 personnalités complètement différentes… C’est une question que je pose systématiquement maintenant : quels sont vos métiers dans vos autres vies ?

Alors, le batteur est prof de batterie, donc lui vit de la musique. Le bassiste est forgeron, ferronnier d’art. Le chanteur est – il ne faut pas que je me trompe sur son métier… – il est designer d’intérieur d’avions pour des sous-traitants d’Airbus. Jean-Philippe est en train de changer d’orientation, il va voir ce qu’il veut faire, et moi, je suis psychologue.

Quand le psychologue écoute votre musique, il ne se dit pas « il y a de la brutalité dans l’air » ?

Ben, c’est moi qui l’écris la brutalité, c’est moi qui compose et écrit les textes !

Je ne me suis pas plongé dans les textes, quels sont les sujets que vous abordez ?

Human trap parlait déjà de l’humain, on a continué sur Holy deformity mais en abordant plus les thèmes des angoisses. Ça parle de ce qui peut être en lien avec le corps quand ça ne tient plus, qu’est-ce qu’il se passe avec le corps quand ça s’effondre à l’intérieur. On essaie de mettre en lumière ces douleurs, une tranche de vie, pour expliquer ces traversées émotionnelles qui explique ce qu’il se passe, pourquoi ça se barre et comment vivre avec ça et s’en sortir.

C’est directement et intimement lié à ton travail. J’imagine que les patients que tu reçois ont été directement source d’inspiration, de réflexion autour de ces sujets ?

Complètement, oui. Et pour moi, c’était hyper important parce que c’est quelque chose qui me passionne et c’est un moyen d’y loger ma sensibilité, mes émotions, mon empathie. Après, pour l’album, on a pris un personnage en trame de fond, quelqu’un qui serait un peu féminin, qui traverse des choses… Des tranches de vies de personnes que je rencontre au quotidien, qui viennent me parler, et j’essaie de mettre tout ça un peu en forme. Donc, oui, ça peut être brutal.

Y a-t-il des thèmes que tu ne souhaites pas aborder avec Tempt Fate parce que tu penses que ça n’a pas sa place ?

Tu as une idée en tête ?

Il y a des gens qui ne vont pas parler de dragons, d’autres qui ne veulent pas aborder la politique parce qu’ils ne veulent pas s’engager dans cette voie, d’autres qui ne traitent pas de religion…

Ok, je comprends ta question. Je pense que tout peut avoir sa place, tout dépend de comment on aborde les choses. Le projet est avant tout musical. On veut se faire du bien, faire des rencontres, partager et découvrir des techniques musicales… Si les sujets nous parlent, on peut tout faire. Mais nous ne sommes pas un groupe qui a une visée d’engagement politique. Même la religion : le titre y fait référence, mais pour autant, on ne parle pas de religion. Ça convoque simplement la question du « sacré ». La question de l’homme, est-ce une unité ? on essaie d’aborder les sujets différemment même si ça échoue un peu à chaque fois. C’est comme quand tu veux expliquer un rêve, c’est un peu le bordel parce que la personne en face de toi, elle ne l’a pas rêvé…

As-tu quelque chose que tu souhaites ajouter pour terminer ?

Non, on a abordé pas mal de choses, et comme on a dit qu’on suivait le plan, on suit le plan (rires !)

Et le plan c’est de ne pas prendre de retard sur les autres interviews !

Exactement ! en tout cas, merci beaucoup !

Interview: EIGHT SINS

Interview EIGHT SINS. Entretien avec Loïc (chant), propos recueillis le 14 novembre 2023 – A voir au Hellfest 2024, le vendredi matin pour réveiller la Warzone.

C’est la première fois que nous discutons, Loïc, alors, pour commencer, peux-tu me dire comment se passe cette journée ?

C’est formidable !  Un peu fatigué… Je vais t’expliquer notre road trip : on est partis à 4 heures du mat’ de Grenoble. On a fait quelques heures de TGV pour arriver à Paris ce matin, on est au Hard Rock Café et ça se passe super bien ! Les gens qu’on rencontre sont intéressés, intéressants, ont écouté ce qu’on a fait, donc ça fait très plaisir.

Parlons un peu de Eight Sins, que je découvre avec Straight to Namek… Quelle est l’histoire du groupe ?

Eight Sins est un groupe qui a été fondé en 2006/2007, par Arnaud, le guitariste et moi-même. La formation définitive date de 2010, je crois… Non, 2008… Non, 2010… 2012 peut-être… Ah, j’ai du mal avec les dates (rires), mais on a consolidé la formation à ce moment-là avec Julien à la batterie et Mike à la basse. C’est nous quatre qui sommes représentés sur la pochette…

Et toi, tu es qui ?

Moi, je suis Boubou, le bubble gum rose (rires).

Ok, tu appelles ça un bubble gum, moi, je pensais à un génie…

En fait, c’est un personnage de Dragonball Z, un méchant et gentil, ce qui me représente bien. Et comme il est enrobé comme je peux l’être un peu, ça me colle à la peau, je trouve.

Pour les gens comme moi qui ne vous connaissent pas forcément, comment décrirais-tu la musique de Eight Sins ? Vous êtes clairement très influencés par le hard FM, l’AOR…

Ouais ! (Rires) Alors, je te dirais que si tu aimes le thrash quand ça va vite, si tu aimes la bagarre dans le moshpit dans un concert de hardcore, alors… bienvenu à un concert de Eight Sins où tu passeras un moment incroyable ! Tu pourras courir en rond avec tes copains, te taper dessus et boire plein de délicates bières bien fraiches. Voilà !

L’album sort aujourd’hui, quels sont les premiers retours que vous avez eus de la part des médias ?

Eh bien avec les rencontres d’aujourd’hui, j’ai l’impression que les gens l’ont apprécié, en tout cas, les chroniqueurs. Tout le monde a noté que le son est costaud, que les compos sont efficaces. Certes, 23’ pour un album, c’est rapide, mais c’est un classique du hardcore/thrash, mais ça va vite et ça tape fort. Il n’y a pas forcément besoin de plus pour être conquis. Je crois que les gens ont envie de le réécouter une fois qu’il est terminé, donc je trouve ça plutôt cool.

Le fait que ce soit un album court, « à l’ancienne », fait qu’il n’y a pas de sentiment de lassitude (il approuve).

C’est ça, c’est tout à fait le format qui nous correspond et qui correspond au genre. Un live de Eight Sins, c’est un peu plus long, mais c’est un peu « patate dans la courge », et il faut tenir la distance. Autant pour nous que pour le public, qui se fait un petit marathon pendant le concert !

Un groupe de rock, c’est aussi la scène. Quels sont vos projets de concerts, s’il y a des choses que tu peux nous dire ?

On a quelques dates calées jusqu’à la fin de l’année, à Paris, Dijon, Romans sur Isère…

La capitale de la chaussure…

Oh, waow, Exactement ! La capitale du godiot, oui, môssieur ! Et on a des choses qui se dessinent pour 2024. Comme d’autres, je ne peux pas encore en parler tant que ça n’a pas été officialisé, mais je peux déjà te dire qu’on a été approchés par certains festivals dès le printemps. On va beaucoup bouger en 2024. Toutes les dates sont sur notre site, de toutes façons.

Peux-tu me dire ce que c’est, Namek ?

Namek ? Est-ce que tu connais Dragonball ?

Pas du tout…

Alors, normal… C’est une référence, comme il y en a d’autres sur la pochette, les titres de films qu’on cite… Namek, c’est une planète sur laquelle les habitants, les Nameks, sont des petits bonshommes verts à cornes, super puissants. C’est un délire qu’on a, quand on s’est un peu éclatés en soirée, on dit qu’on est sur Namek. En apesanteur, u peu stratosphérisés, quoi… Ce qui peut arriver…

C’est quoi le huitième pêché ?

Je pourrais te dire que c’est nous, mais ce serait un peu prétentieux… D’aucuns disent que c’est la porte arrière… C’est à chacun de se faire son opinion. En tout cas, il est certain qu’un huitième pêché existait à la base, qui s’appelait la Vaine gloire et qui a été supprimé au profit des sept autres parce qu’il est connexe aux autres. Mais pour nous, on trouvait que le nom sonnait bien et ça nous faisait rire d’être le huitième.

Surtout que vous êtes 4.

Ce qui nous en fait deux chacun, exactement !

Si tu devais ne retenir qu’un seul titre de Straight to Namek pour expliquer ce qu’est l’esprit de Eight Sins aujourd’hui, ce serait lequel ?

Alors… Très bonne question.

Merci !

Je trouve que celui qui représente le mieux l’esprit du groupe en ce moment c’est Street trash. Pour moi, c’est une chanson classique dans sa construction, avec un gros break final, et c’est ce qu’on aime faire en live. Maintenant, ma préférée c’est Straight to Namek, elle est un peu différente, un peu groovy, elle va chercher d’autres influences, du côté d’Anthrax…

Il y a un flagrant « manque de sérieux » dans votre approche musicale, aussi bien dans les illustrations que dans les titres des chansons, on sent bien que vous êtes là pour le fun.

On est là pour le plaisir, c’est clair. Comme dirait Herbert Léonard !

Oui, une référence thrash aussi (rires) ! Maintenant, y at-til des thèmes que vous abordez avec plus de facilité que d’autres, qui rentre pile dans l’esprit de Eight Sins ?

Fut un temps, on était un peu plus véhéments, un peu plus hardcore. On voulait appartenir à une scène et, du coup, on avait des textes plus fédérateurs, engagés. Et avec le temps, en s’assumant – et je crois que ce qui a changé dans le groupe c’est qu’on a tous connu les joies de la parentalité, ce qui nous a fait réaliser à quel point avoir un groupe, pouvoir tourner, ben, on avait une chance folle. Du coup, on a réalisé qu’on s’amusait vraiment à le faire. Que la musique tabasse, c’est une chose, mais pour autant, on peut ne pas se prendre au sérieux. Tu nous vois sur scène, tu comprends que ça ne tricote pas ! Maintenant, j’aime bien parler des films que j’aimais bien. On est des enfants des années 80/90, Club Dorothée, les gros block busters, les films d’action avec Schwarzy, Jurassic Parc…

Schwarzy… Il n’y aurait pas un clin d’œil avec Last action zero, par hasard ?

Si… On a même un sample de lui. Des films qui nous ont marqués, et je trouve que si tu les montres à quelqu’un aujourd’hui, tu passes un bon moment. C’est du divertissement, j’ai grandi avec, les autres aussi et on est fans de tout ça ! Les héros un peu pourris, les loosers magnifiques, les mutants, le vomi, l’abus d’alcool… Tous ces trucs là, j’adore. Je suis un enfant des jouets « mutants », tortues ninja… Tout ça, c’est des trucs qui me vont bien.

J’imagine que si on parle de vomi, on peut évoquer une certaine scène de Stand by me…

Ah, ah ! Oui, en effet ! Très bonne réf !

Y a-t-il, au contraire, des thèmes que vous refusez d’aborder aujourd’hui ?

Non, on ne se refuse pas grand-chose. Tu vois, dans notre album, il y a Cops panic qui est un peu plus engagée – en tout cas, c’est mon avis sur la répression policière. Je me permets d’en parler en le tournant d’une certaine manière. Je ne me refuse pas grand-chose, en fait… Comme j’écris les textes, je me permets ce que je veux, tant que c’est bien écrit. Après, dans les textes, on est plus dans le fun, les pizza mutantes…

Comment décrirais-tu l’évolution de Eight Sins entre Straight to Namek et It’s a trap ?

Alors… It’s a trap est l’album qui nous a permis de plus assumer notre côté cross-over/thrash. Ce disque nous a permis d’entamer un virage et là, on a tourné à 180°, on est allés à fond dans ce style avec Straight to Namek, même au niveau des chants, je me permets des envolées plus Heavy metal. En fait, on s’est beaucoup plus amusés à faire ce disque, on en est ultra fiers et je trouve qu’il sent le fun et la bagarre. Et ça, c’est chouette !

Donc il y a un virage qui a été amorcé…

Amorcé en 2019, confirmé en 2023. Entre temps, il y a eu un petit Covid qui nous a mis un coup de frein, mais ça nous a permis de bien cibler ce qu’on avait envie de faire.

Justement, le Covid a remis beaucoup de choses en question, à permis à tout le monde de réfléchir à sa manière de travailler. Pour l’enregistrement de cet album, comment avez-vous procédé ? Vous vous êtes retrouvés en studio, vous avez enregistré à distance avec les moyens modernes ou ça a été un mix des deux ?

On s’est retrouvé en studio, le Homeless studio, le studio de Florent Salfati, le chanteur de Landmvrks. C’est un choix délibéré de notre part : on avait écouté certaines de ses prods qui nous ont plus, et on voulait quelqu’un qui s’y connaissent en metal. Et surtout, on le connait bien, c’est un pote, et nous, on fonctionne beaucoup avec les gens qu’on connait. Même pour les clips, on est entourés de gens qui veulent nous aider. Flo, on appréciait déjà son travail et encore plus depuis qu’on a enregistré avec lui. Ça a été un enregistrement un peu différent des autres parce qu’il nous a permis de travailler différemment. Son studio, il y a plusieurs locaux et on peut tous travailler en même temps, plutôt que d’attendre chacun son tour, c’est la plaie… Là, on a pu tous travailler en même temps, j’ai pu travailler avec Flo pour le chant. Il est chanteur, donc on se comprenait, les batteurs ont travaillé ensemble, ils se comprenaient aussi – quand l’un disait « poum-poum », l’autre répondait « tchak tchak », ils étaient complètement en connexion… Bref, à chaque fois, on avait un interlocuteur qui sait de quoi il parle avec qui on se comprend. On a été en totale confiance. Flo s’est ensuite occupé du mix et du master et ça sonne ! C’est assez organique, et c’est un gros son, et c’est cool.

Et le tout concentré en moins d’une demi-heure, ça permet de ne pas s’essouffler…

Non, d’ailleurs, on vous le conseille pour un footing : tu cours, tu fais une petite pause à l’interlude et tu reprends ta course. Normalement, tu as fait 20 circle-pits et tu es bien !

Que souhaites-tu ajouter avant que nous ne terminions ?

J’ai envie de dire que nous sommes tous très fiers de cet album, que si vous ne nous connaissez pas, préparez vous à nous connaitre, on n’est pas près de ne pas nous voir ! On est là depuis un moment, on est un vieux groupe et les bonnes choses, comme le vin, prennent du temps. Si vous aimez le fun, la bière et le mosh pit, alors… bienvenus dans le monde de Eight Sins !

Quelle pourrait être la devise de Eight Sins aujourd’hui ?

Oh, c’est simple, c’est toujours la même : Biers and mosh pit ! ce qui signifie la fête et le fun, en gros. La fosse animée et festive, donc venez aux concerts et amusez vous !

Une toute dernière question que je pose traditionnellement maintenant : on sait qu’on ne vit que difficilement de sa musique en France, alors, vos métiers, dans vos autres vies, c’est quoi ?

Dans notre autre vie ? Jambon, notre batteur, donc Julien, est agent EDF, donc il travaille très peu (rires). Il est à côté de moi, c’est pour ça que je le dis… Notre bassiste, Nighht, est charpentier, couvreur. Du coup, lui, il a un vrai travail, c’est le seul qui bosse. Notre guitariste est programmeur, et moi, je suis tatoueur à Grenoble.

Et qu’est-ce qui vous a pris de faire une photo comme ça, dans un supermarché, coincés dans un caddie ?

Je sais pas, on en avait envie, et j’ai trouvé ça drôle. On a eu l’occasion de faire privatiser un supermarché, une superette, on s’est baladés seuls dans les rayons pendant deux heures, on pouvait toucher à tout… C’était un délire, de toutes façons, on est tous des produits de consommation…