David SLAME: Follow the butterfly

Metal, France (Autoproduction, 2017)

Il est étonnant, surprenant même, de recevoir, le jour du printemps 2019, un album « copyrighté » 2017 et paru en 2018. Non seulement au regard de l’écart de dates – mais après tout, pourquoi ne pas étaler la promo sur la durée et faire vivre ce disque autant que possible? – mais également par son titre justement printanier: Follow the butterfly. Il s’agit là du troisième album du compositeur français David Slame. Si les compositions font toujours la part belle à la puissance et la mélodie, David s’éloigne quelque peu du metal symphonique des débuts pour se rapprocher d’un heavy progressif. Les orchestrations, bien que marquées par la modernité de notre millénaire et aussi souvent marquées du sceau des années 80, sont efficaces, enrobées de claviers et de chœurs judicieusement utilisés. Démarrant avec le mélodique A life in vain, constat des difficultés du musicien?, l’album continue avec un Slaves qui semble plus engagé (« We are the slaves of their system », « I feel  like a prisonner »…), tout autant qu’un Circles of pain II. Comme en d’autres moments, le morceau titre permet à David de démontrer l’étendue de sa maîtrise instrumentale et vocale. Les guitares, électriques et acoustiques, sont mise en avant avec une impressionnante technique, parfois doublée de shred et autres effets (les influences celtiques sur Freedom, ballade à mi parcours). Si Follow the butterfly souffre, malgré une mise en son efficace, d’un certain manque de profondeur (principalement dans le chant, pourtant clair et maîtrisé), il s’avère également être l’album le plus aboutit de David Slame à ce jour. Reste à franchir le cap de la séduction du public.

WELCOME-X

France, Fusion (Autoproduction, 2019)

Quand on compte dans ses rangs Philippe Bussonnet, bassiste actuel de Magma, et le chanteur Sam Kun de Flesh and Dust – focièrement plus heavy – on ne peut que proposer un genre musical décalé. Welcome-X allie tout au long de son premier album éponyme, du jazz, du rock, du metal dans une savante fusion déjantée, allumée et… indéfinissable. Les 7 morceaux sont longs – pas un en dessous de 6′ – et nous entraînent dans un univers sonore étrange, parfois oppressant et mélancolique. Le chant de Sam Kun  est varié, ici profond et grave, là enragé, là encore presque crooner. Les guitares de joseph Champagnon et Thomas Coeuriot, rock, directes et totalement planantes (rahh, ces parties sur Finders keepers), ajoutent à la lourdeur recherchée tout au long des Meltdown et autres Behold your karma ou, au contraire, à la douceur mélancolique d’un Late great planet earth. Welcome-X semble ne s’imposer aucune limite, et si cet album est difficile à suivre d’une traite, son contenu intrigue et hypnotise. Un monde à s’approprier tranquillement, certes, mais une fois qu’on est dedans, difficile d’en sortir.

Interview: JOHN DIVA AND THE ROCKETS OF LOVE

Entretien avec John Diva (chant). Propos recueillis au Hard Rock Cafe de Paris, le 11 mars 2019

Metal-Eyes : John, comment se passe cette journée promo à Paris ?

John Diva : Superbement bien. Tu sais, je suis arrivé hier de Berlin, après 3 jours de fête non stop. Mon avion est arrivé hier avec 2 heures de retard à cause d’un orage, mais je me suis levé ce matin, pris mon café au lait (en français), ai été récupéré par une Mercedes noire, suis arrivé ici et ai eu de très intéressantes conversations avec des gens sympa. J’ai maintenant la certitude que le rock vit encore en France.

Metal-Eyes : Commençons avec cette première question : qui est John Diva ?

John Diva : John Diva est un gars qui a grandi au son du rock, avec un cœur qui bat au rythme du hard rock, grâce à une mère très branchée heavy. Elle a tout fait pour que je trouve mon chemin, que je devienne quelqu’un. Entre temps, je me suis égaré comme toute personne qui tente de grandir et veut devenir une rock star.

Metal-Eyes : OK. Et tu as grandi en Allemagne, c’est bien cela ?

John Diva : Non, aux USA. A San Diego.

Metal-Eyes : Donc John Diva and the Rockets of Love est un groupe américain.

John Diva : Oui.

Metal-Eyes : Mais il y a eu beaucoup d’activité en Allemagne. Explique-moi un peu…

John Diva : C’est parce que les gens du Wacken se sont très tôt épris de nous et ils nous ont accueillis pour la première fois à l’affiche du festival en 2013, puis à nouveau en 2015 et 2018. Entre temps, ils nous ont faits venir sur de plus petits événements, le Metal Cruise, le Metal Mountain, un festival où on skie quelque part dans les Alpes, Metal… Je ne sais plus, à Palma de Majorque. On a été assez en contact avec la scène metal allemande, qui est très active. On a été un peu comme des paons : cet univers est assez sombre, et nous, on est plutôt rose, vert, on apporte de la couleur au programme.

Metal-Eyes : Nous allons parler de la couleur, justement. Tu as dit que tu as été élevé par une mère amatrice de metal. Il semble que tu as été élevé au son du hair metal . Quelle a été ton éducation musicale ?

John Diva : Mon éducation musicale ? Principalement le son de Californie, fin des années 70 et années 80.

Metal-Eyes : Ce qui exclut donc Bon Jovi qui vient du New Jersey…

John Diva : En effet, mais incontestablement Diamond Dave et Van Halen, par exemple (Note de MP : il y a pourtant de fortes influences du Bon Jovi des débuts, tant musicalement que vocalement…) C’est un groupe auquel je me réfère facilement.

Metal-Eyes : Great White ? Ratt ?

John Diva : Oui, aussi, toute cette génération. Poison, Cinderella. Egalement des groupes anglais, comme Def Leppard, Whitesnake.

Metal-Eyes : Whitesnake… à partir de 1987 j’imagine ?

John Diva : Oui, oui. J’étais aussi fan de Deep Purple. Mon père m’a laissé plein de disques de Deep Purple dont j’ai été fan jusqu’en 1981 ou 1982. J’étais fan de Coverdale et je l’ai suivi jusqu’à ce qu’il explose, avec Steve Vai. Toute cette scène a été importante à mes yeux, et à ceux de mes amis, The Rockets of Love. C’est avec cette musique que nous avons grandis. C’est ce qui a créé nos goûts musicaux.

Metal-Eyes : Ta mère, fan de rock, a-t-elle vraiment dit que le rock est mort (Note : en référence au titre de l’album : Mama said rock is dead)

John Diva : Tu sais, c’est un de ces jours où quelque chose l’avait frustrée, je en sais pas quoi. Moi, je sortais, ma guitare sous le bras, et elle m’a dit « Johnny, ne perd pas ton temps avec le rock. Il est mort selon moi »

Metal-Eyes : C’était quand ? Dans les années 90, à l’explosion du grunge ?

John Diva : Oui, j’avais… 14 ans. J’ai oublié cet épisode pendant longtemps, mais en écrivant ce disque, ça m’est revenu. Ecrire, c’est un voyage en toi, c’est un peu comme une thérapie, spécialement avec le glam rock qui a été important et qui a disparu pendant longtemps. Alors les choses ont changé, on cherchait un titre pour l’album, et, je crois que c’était Lee et Snake (tous deux présents mais ne participants pas à cette interview) qui m’ont dit « tu dis ce truc, dans Rock n roll heaven : Mama said rock is dead ». Plus on a utilisé ce titre, plus c’est devenu un mantra : je voulais prouver à ma mère qu’elle avait tort, et me prouver aussi que j’avais tort : plus tu t’investis, plus tu perds la foi.

Metal-Eyes : Or il te faut trouver la force de continuer quelque part, positiver…

John Diva : Oui, tu as tout à fait raison. C’est, je crois, ce que nous avons fait avec ce groupe, en live, et nous avons développé une certaine réputation en tant que groupe de scène. Après quelques années, on s’est dit que nous pouvions réaliser un nouveau disque, écrire de nouvelles chansons. Tu ne peux pas réinventer le rock, mais tu peux contribuer, en faire partie en écrivant de nouvelles chansons, en créant de nouveaux spectacles, et c’est ce que nous avons fait ces deux dernières années.

Metal-Eyes : On ne peut pas éviter de faire une comparaison avec Steel Panther. Mais c’est principalement dan le look glam, plus que dans la musique. Comment décrirais-tu ce qui vous différencie ? Vous semblez un peu plus sérieux…

John Diva : Exact. Tu sais, Steel Panther est un bon groupe, ils ont réussi à créer une vitrine pour le glam, qui renoue avec le succès. En même temps, ils font partie de ces groupes qui parodie un genre, en rient, ce qui est complètement cool, mais ce n’est pas notre façon de voir les choses. Notre message est de n’exclure personne, d’accueillir toute personne qui veut s’habiller, devenir dingue, qui pourrait avoir honte de son look, mais si tu viens chez nous, tu te fringues comme tu veux, tu peux être un paon et tu seras bienvenu !

Metal-Eyes (lui montrant la photo du livret de l’album) : et tu peux te balader dans un pyjama blanc en compagnie de tes potes habillés normalement !

John Diva : (il rit) oui, tu peux ! C’est une communauté, ça n’a rien à voir avec le sexe mais avec l’amour, celui qu’on partage, donner les uns aux autres assez de force pour délirer, devenir celui que tu as toujours voulu être. Ce qui n’est pas facile, de nos jours…

Metal-Eyes : De quoi traitent vos textes ?

John Diva : Principalement, on parle d’amour, de romance, de te réinventer en amour. L’amour est sans doute le meilleur moyen de se réinventer : tu peux très bien te balader sur un boulevard parisien, croiser une superbe fille et une minute après, tu la perds de vue. Mais pendant une minute, tu as été amoureux. Je suis un grand romantique, et tant que tu es là dedans, c’est dans ton pouvoir masculin, mais ça peut te quitter. Le réalisme de l’amour est si puissant que, selon moi, il y a beaucoup de choses à écrire à son sujet. C’est mon message : soyons positifs les uns avec les autres.

Metal-Eyes : Ce positivisme est partout puisque tu chante qu’il n’y a pas de place pour le rock en enfer. D’habitude, on dit le contraire…

John Diva : Tu sais, il doit y avoir une de ces fêtes en enfer, mais j’imagine aussi que c’est blindé de monde, en ce moment… Moi, je préfère les bons hôtels, avec de grandes piscines dans lesquelles je peux me baigner seul… Alors j’imagine un grand endroit accueillant où on puisse aussi jouer du rock le paradis du rock. J’imagine que David Bowie s’y trouve, et d’autres aussi.

Metal-Eyes : Si tu devais choisir une seule chanson de ton album pour expliquer à quelqu’un qui ne connait pas John Diva And The Rockets Of Love ce que vous êtes, ce serait laquelle, et pourquoi ?

John Diva : Evidemment, si tu veux nous comprendre, il faut voir l’image dans son ensemble… Nous avons choisi Lolita comme premier single parce qu’elle décrit ce que nous visons : passer du bon temps, avec amour, la Californie ensoleillée, du rock. Vivre, et apprécier la vie. Une journée sur la plage, avec les copains, deux ou trois bières, commencer à te sentir bien alors que le soleil couchant apporte une superbe lumière…

Metal-Eyes : Devrions nous nous attendre à vous voir live, en France et en Europe ?

John Diva : Vous devriez, et c’est la raison de notre présence : nous avons eu de très bons retours de France, mais nous n’avons pu y jouer. Olivier (Garnier), qui nous a fait venir, est en contact depuis quelque temps avec notre management, et il y a une possibilité de faire venir le groupe en France, sur des festivals et autres, et, espérons-le, pouvoir organiser une tournée.

Metal-Eyes : A quoi doit-on s’attendre lors d’un concert du groupe ?

John Diva : Beaucoup d’énergie, et, si tu t’ennuies, si tu en as marre de ta garde robe, de ta vie, de Netflix, de tes addictions internet et que tu veux sortir le vendredi soir pour rencontrer des gens qui te ressemblent ou quoi sont ton opposé, alors, unissons-nous et créons un lien fort pendant deux heures.

Metal-Eyes : Tu as répondu à des questions toute la journée. Jusqu’à présent, quelle a été la meilleure question, la plus surprenante, qui t’a été posée ?

John Diva : J’ai une très mauvaise mémoire, tu sais… Il y a eu ces deux femmes, qui se nomme The 80’s babies. Elles sont venues avec des cartes, qu’elles ont retournées sur la table et il fallait que j’en choisisse. Au dos, il y avait une question. J’ai trouvé que c’est une bonne idée. Il y a une question « De quoi te souviens-tu des années 80 ? » J’ai répondu que je n’en sais rien, j’étais bourré !

Metal-Eyes : Tu étais trop jeune pour être bourré !

John Diva : Ouais, c’est ce que ma mère disait aussi (rires)

Metal-Eyes : Quelle pourrait être la devise de John Diva And The Rockets Of Love en 2019 ?

John Diva (il réfléchit) : Prouvons à nos mères qu’elles ont tort. Faisons en sorte de devenir ce que nous avons toujours voulu être.

Metal-Eyes : Attends, il faut éclaircir un point : ce gars (je désigne le barbu stylé) est Lee. Celui-ci (le plus grand) est Snake, exact ? Alors comment se fait-il que ce soit Lee qui soit habillé avec ce qui ressemble à de la peau de serpent ? (John explose de rire) En tout cas, merci beaucoup, et j’espère que nous aurons bientôt l’occasion de vous voir sur scène. Profitez de votre séjour ici, à Paris.

John Diva : Merci beaucoup, et n’hésitez pas à venir nous rejoindre sur facebook – facebook.com/johndivarocks – on a plein de choses à partager

Snake : Aa fait (il me montre la pointe de ses bottes) : ça c’est de la vraie peau de serpent, pas comme ses fringues (il désigne Lee)…

 

CHARGE: Ain’t the one

Rock, France (Autoproduction, 2019)

Charge! un nom qui claque comme un ordre d’attaque et qui prend tout son sens à l’écoute de ces 9 cartouches enfoncées dans ce chargeur rouge sang. Et à l’écoute de la décharge d’énergie que nous offre le quatuor, ce nom sonne mieux que le Chargez! ordonné en français comme une obsession par un capitaine Stark immuablement assis sur son cheval, non? Ain’t the one est le second album que nous proposent les Parisien de Charge. Composé, donc, de 9 titres, le groupe puise son inspiration autant dans le rock cru que dans le métal avec une sérieuse dose d’irrévérence punk. Démarrant sur des rythmes groovy avec Out of my life et une basse bien mise en avant avant une que n’entrent en scène des guitares incisives, on sent Charge déterminé à exprimer sa rage, aidé en sa quête par Francis Caste. C’est, d’entrée, puissant et entraînant. A peine l’auditeur a-il le temps de recharger ses accus que Red journey l’emporte pour ne plus le lâcher. Car jamais Charge ne faiblit. Le chant impertinent et narquois se marie parfaitement aux riffs simples, du genre de ceux qui vont droit au but sans fioriture. Le chargement qui suit, du morceau titre (et ses guitares aériennes mêlées à quelques inspirations orientales) à Burning slowly around me, en passant par le faux calme The game that’s made for me ou l’explosif et chantant High life, est blindé de références, de ces moments qui éveillent la mémoire. En évoquant leurs mentors – un jeu de piste que je vous laisse découvrir – les 4 maintiennent l’attention et suscitent curiosité et intérêt. Incontestablement, nous n’avons pas affaire ici à une charge héroïque mais à une découverte bien plus que simplement prometteuse.

Interview: WELCOME X

Entretien avec Philippe (basse) et Sam Kün (chant). Propos recueillis à Paris, Hard Rock Cafe, le 22 janvier 2019

Metal-Eyes : Une question simple, directe : Welcome-X, c’est quoi ?

Philippe : C’est un groupe de rock’n’roll, à la base. C’est une idée qu’on a depuis longtemps, qui a pris forme il y a un peu plus d’un an.

Metal-Eyes : Le « on », c’est qui ?

Philippe : Sam et moi. On est les initiateurs de cette chose là.

Metal-Eyes : Qu’est-ce qui a déclenché, pour tous les deux, l’envie de monter ce groupe ?

Philippe : On a tous les deux une grosse sensibilité pour le rock au sens large, du metal au blues, en passant par le rock des années 60. On s’est retrouvés avec des goûts communs et une volonté commune de monter ce groupe. Quand on a commencé à travailler sur les compos, il s’est avéré qu’on avait une optique complémentaire qui fonctionnait très bien. Quelque part, ça a été très facile.

Metal-Eyes : Et vous vous êtes rencontrés comment ?

Sam : Je travaillais dans les bars jazz à Paris, le Caveau des Oubliettes, où on recevait pas mal d’artistes, jazz, blues. Philippe venait jammer, il y avait beaucoup de musiciens, moi, j’allais beaucoup chanter, aussi. On a fait des bœufs ensemble et on s’est dit qu’un jour, il faudrait qu’on fasse quelque chose.

Metal-Eyes : Donc vous vous êtes rencontrés via l’alcool…

Sam (il explose de rire) : C’est exactement ça ! Ouais !

Metal-Eyes : Welcome-X est composé de Welcome qui veut dire « bienvenue ». Mais le X… Quelle est la signification du nom du groupe ?

Philippe : Justement : le X représente une inconnue. Au sens mathématiques, ou au sens humain, X étant tout le monde et n’importe qui, sur la planète entière. Le Welcome-X a 2 signification, selon le point de vue : du notre, c’est ce que l’on découvre en faisant notre musique ensemble. Musique qui fini par exister d’elle-même et qui nous échappe. Donc on découvre ce qu’on est en train de faire avec un grand plaisir. Un peu comme un explorateur. « Bienvenue à ce que l’on est en train de découvrir », cette aventure qu’on est en train de vivre. D’un autre point de vue, ça signifie « bienvenue à tous ceux qui veulent participer à cette aventure », ceux qui ont la sensibilité pour écouter ça, qui ont certaines sensibilité pour y trouver du plaisir musical, à qui ça peut réchauffer le cœur, peut-être.

Sam : C’est vraiment bienvenue à tout le monde, c’est pour ça qu’on n’a pas envie d’avoir une étiquette de style : le spectre est très large.

Metal-Eyes : Moi, si j’ai une étiquette à mettre c’est « barré » (rire général). On va y revenir.

Philippe : C’est une grosse étiquette !

Sam : C’est vraiment ouvert à tout le monde…

Philippe : Et puis, il y a un petit jeu de mots : si on le découpe autrement, ça peut devenir Well, qui veut dire « bien » et Comics…

Metal-Eyes : Je découvre le groupe et ce qui est mis en avant, c’est bien évidemment ta présence, Philippe, bassiste de Magma. Vous venez de deux univers musicaux différents mais complètement barrés. Sur le papier, il y a un univers assez jazz fusion, un autre un peu plus metal. J’entends dans ton chant, Sam, quelques influences extrêmes (il approuve), d’autres à la Rage Against The Machine (il approuve aussi). Qu’avez-vous mis dans cet album ?

Philippe : On a mis notre propre goût, nos goûts au sens large. On voulait que ça nous plaise, que ça nous excite à jouer cette musique. Après, je pense qu’on a chacun une culture musicale très large. En ce qui me concerne, j’écoute toutes sortes de musiques  des années 50 à aujourd’hui, et je ne me suis pas fixé de barrières dans le sens où je n’ai pas voulu, en tant que compositeur, faire une musique qui ressemble à untel ou untel. Il y a trop de choses qui me plaisent et tellement différentes que je ne voulais pas me rapprocher d’un pôle plutôt que d’un autre. Je me suis vraiment fié à mon instinct et mo goût pour élaborer la base des compositions, et ensuite, Sam a posé sa voix, ça a commencé à prendre forme. Il n’y avait pas de cahier des charges, pas d’objectif autre que ça nous plaise. Qu’on soit heureux de le faire, de le faire avec d’autres, que jour après jour on puisse se faire plaisir.

Metal-Eyes : Le premier album m’a emporté dans un univers étrange, parfois assez oppressant, parfois mélancolique… Vous ne vous fixez pas de limites, mais quelle est votre intention musicale ?

Sam : C’est ça, ce que tu viens de dire : procurer des émotions. Qu’elles soient comme ce que tu as ressenti là, mais ça peut être plein d’autres choses : le côté heureux, voyage. C’est ça, c’est ce qui nous nourris. On me dit parfois que « ça m’a fait penser à ça, j’ai telle image dans la tête »… Ca c’est cool, ça veut dire qu’on a fait notre taf, qu’on t’a emmené ailleurs

Metal-Eyes : Il y a un aspect assez osé aussi, quand on regarde la durée des titres de ce premier album… Il y a le côté fusion, progressif, un peu jazz de Magma qui explique ça, c’est beaucoup moins fréquent dans le rock. Là aussi on voit que les barrières tombent. Il n’y a aucune intention de passage sur des radios « traditionnelles »

Sam : On n’a pas pensé à ça, ni au style, ni à la durée, ni au fait qu’on puisse passer ou pas en radio. En fait, les morceaux se sont imposés d’eux-mêmes. Après, on se retrouve avec des pièces qui font telle ou telle durée, mais ce n’est pas quelque chose qu’on a cherché à contrôler.

Philippe : D’une façon assez curieuse, au départ, je n’avais pas dans l’idée de faire des morceaux longs, un peu progressifs. L’idée c’était plutôt de faire des morceaux simples, accessibles, de façon relativement instinctive, immédiate. A priori, ce serait plutôt un format assez court. En creusant, une dois que les idées apparaissent, quand on commence à manipuler ça dans tous les sens, quand les morceaux prennent forme – parce que ça ne commence pas toujours par le début, parfois, on commence par le milieu ou la fin, le début arrive après, il n’y a pas de règle en plus. Au final, on s’est retrouvés avec des morceaux longs, de 8, 9 minutes, mais c’était un peu une surprise pour moi.

Metal-Eyes : Il y a aussi ce Behold your karma qui atteint les 10’. En écoutant l’album, j’ai l’impression que vous vous faites plaisir, d’entendre un groupe « à l’ancienne » qui se retrouve en studio, qui jamme et…

Sam : C’est exactement ça, ce qu’il se passait dans les années 70. Les premiers Black Sabbath, Purple, comme quand tu es gamin et que tu te retrouves dans ton garage. C’est le même plaisir.

Philippe : C’est vraiment ce qui s’est produit parce que la musique on l’a écrite relativement vite,en 6 mois. Après, les répétitions, quand le groupe a été monté, ça s’est fait très vite, tout le monde a participé, s’est approprié la musique, a apporté sa touche – je parle des guitariste et du batteur qui sont arrivés après…

Metal-Eyes : Donc Joesph Champagnon et Thomas Coeuriot, et Yohan Serra.

Philippe : Exactement, et comem on répétait au Triton à ce moment-là, ils nous ont proposé de faire un album au mois de juillet. Moi, je n’y avait pas pensé, je me disais qu’un album, ce serait, peut-être, pour l’année prochaine. Et en fait, le studio est fermé au mois de juillet, il a été réouvert pour ça, et on s’est dit « pourquoi pas ? » On a pris le risque et en fait, c’était une très bonne idée parce qu’il y avait encore cette fraîcheur. ET on a enregistré, comme dit Sam, un peu à l’ancienne. On n’a pas fait d’abord tel instrument puis tel autre, non : on a tout fait, ensemble, pas au clic.

Sam : On était dans la même pièce, on se regardait dans les yeux. C’est très différent de ce qui se fait aujourd’hui où t’a un mec qui arrive en studio une semaine, puis c’est au tour d’un autre. On a vraiment fait les choses ensemble.

Metal-Eyes : Le bœuf, donc…

Philippe : Ca peut s’assimiler à ça, oui : on était tous les 4 dans la même pièce – on ne pouvait pas faire la voix en même temps parce qu’il aurait fallu une cabine pour isoler les voix, mais on a fait toutes les prises instrumentales d’abord et tout était plié en une semaine.

Metal-Eyes : Il y a autre chose qui m’intrigue dans votre album, ce sont les illustrations. Elles sont barrées, elles font très comics, mais le rapport avec les chansons…

Sam : SI elles sont en rapport, il y a des clés de compréhension. Il y a un rapport avec la musique et les textes.

Metal-Eyes : Il y avait un cahier des charges ?

Philippe : Non, pas du tout…

Sam : Il a écouté les chansons, il est venu nous voir en répète, c’est un ami. Je lui ai donné les clés des paroles et il a proposé des choses, des croquis…

Philippe : En fait, il a fait un peu ce que nous on fait quand on écrit, c’est-à-dire qu’il s’est imprégné de ce qu’on était en train de faire. Il est venu en studio, il est passé souvent à la maison quand on maquettait, il a passé des soirées avec nous. Quand on a commencé à répéter, il était avec nous en studio. En fait, il était là souvent et il connait les morceaux aussi bien que nous. Pour lui, ça a été assez naturel. Quand on lui a dit qu’on allait faire un album, il nous a dit qu’il voudrait bien faire les illustrations, une par chanson. J’avais envie qu’il nous le propose, et c’était génial qu’il le fasse. Chaque illustration reprend le thème de chaque chanson.

Sam : Après, c’est avec son univers graphique. On aurait demandé à quelqu’un d’autre, ç’aurait été complètement différent.

Philippe : Sur tout ce que tu peux voir, il y a eu deux trois retouches, on lui a proposé de faire ça ou ça à la place, mais c’était vraiment très peu de choses.

Metal-Eyes : Si l’un et l’autre vous ne deviez retenir qu’un seul morceau de cet album pour illustrer ce qu’est Welcome-X à quelqu’un qui ne vous connait pas, ce serait lequel et pourquoi ?

Philippe : C’est quasiment impossible… Parce que tout ça, c’est comme une pièce de théâtre avec différents actes : tu peux difficilement en isoler un. Après, si on voulait vraiment, je dirais peut-être Behold your karma, parce qu’il est plus long, qu’il est écrit en plusieurs parties et qu’il est peut être un peu plus riche que les autres. Et encore… Ou alors I am life qui est complètement barré, basé sur l’improvisation, avec un canevas très léger

Sam : Un côté un peu psyché, un peu barré avec, à la fin, une explosion très metal. Maintenant, je pourrais te répondre aujourd’hui telle chanson et demain telle autre…Maintenant, le Karma, c’est quelque chose qui synthétise un peu tout ce qu’on est… I am life, c’est pareil, une espèce de montée. Dans ces deux titres là, on retrouve ce qu’on est. Pareil en live, on joue des titres qui ne sont pas sur l’album, et qui sont tous très différents les uns des autres. Très difficile d’en isoler un.

Metal-Eyes : Vous nous promettez quoi, justement, sur scène ? Il faut s’attendre à quoi ?

Sam : Ben, moi, j’espère qu’à partir du moment où on commence, tu rentres dans notre univers, de la première à la dernière note, que tu ne penses plus à rien. Emporter dans notre milieu… Welcome-X c’est ça, t’emporter sur notre planète, puis une autre. J’espère vraiment que les gens qui viendront nous voir ne penserons qu’à ça, à rien d’autre que l’expérience qu’ils sont en train d’écouter et de voir. C’ets très théâtral rien n’est écrit. Moi, je monterais sur scène chaque fois comme si c’était le premier jour que je monte sur scène.

Metal-Eyes : Et si tu le faisais comme si c’était la dernière fois que tu montais sur scène ?

Sam :  Ca aussi, comme le disait le mec de Pearl Jam, c’est génial !

Metal-Eyes : Vous avez été en promo toute la journée, séparément principalement. Quelle est la question la plus surprenante, la meilleure qu’on vous ait posée aujourd’hui ? (Sam se marre…)

Philippe : La question la plus étonnante c’était : « quelle est la question que tu ne voudrais pas qu’on te pose ? » J’ai pas su répondre ?

Sam : La plus surprenante ? « Pourquoi tu ne chantes pas en français ? »… Parce que déjà, je suis bilingue. Ensuite, en français, il y a des mots pour tout dire, c’est très cru, une langue magnifique. L’anglais te permet beaucoup plus de liberté. Peut-être qu’un jour je chanterai en japonais si le langage s’y prête…

Metal-Eyes : Quelle pourrait être la devise de Welcome-X ?

Philippe : « Toujours nouveau, toujours inconnu »

Sam :  « Prendre son pied ». Ne pas se lasser, prendre des chemins qu’on ne connait pas…

Philippe : C’est vraiment ce que je ressens : j’ai l’impression que ça m’échappe, et c’est une bonne impression. Quand c’est pas le cas, que j’ai l’impression que ça m’appartient – « c’est ma musique, mon riff, je le fais comme ci ou comme ça » – je m’en lasse très vite. Quand ce n’est pas le cas, que je le redécouvre chaque jour, c’est vachement excitant, vivant, et on garde cette envie de faire les choses en commun.

 

Live report: FREAK KITCHEN à Paris (le 7 mars, La Maroquinerie)

 

Freak Kitchen, pour son dernier passage parisien, jouait dans un Divan du Monde plein comme un oeuf qui, depuis, a fermé ses porte à tout ce qui ressemble peu ou prou à du hard/metal. C’est donc à la Maroquinerie, une salle de capacité quasi identique que les Suédois trouvent ce soir refuge. Une Maroq’ pas pleine puisque un peu plus de 300 personnes se sont donné rendez-vous pour assister à cette date du Confusion on the road.

C’est sans doute le manque de monde qui explique que Freak Kitchen attaque ce concert sans s’encombrer d’une première partie. Mais peu importe, car c’est un concert jovial tout autant que chaleureux que nous offre le trio. Difficile pour Christer Örtefors, le bassiste toujours casqué – saviez-vous que ce gimmick est le résultat de son « traumatisme » subit après avoir vu la scène du film The Blues brothers où le groupe est obligé de jouer derrière un grillage pour éviter les jets de projectiles divers ? –  de se déplacer sur cetet scène exiguë, presqu’autant que pour son comparse guitariste chanteur Matthias Eklundh qui le rejoint de temps à autres.

Ce dernier peut tabler sur un vrai capital sympathie, échangeant souvent avec le public, et avec humour: « bon, il nous faut en général entre 65 et 70 chansons pour nous mettre en jambes. Alors oubliez ce que vous aviez de prévu ce vendredi! » Les échanges sont fréquents tant pour vanter son amour de Paris que pour présenter les nouveaux titres.

Malgré la bonne ambiance et la bonne humeur qui règne ce soir, Freak Kitchen ampute sa setlist: Alone with my phone et Vaseline Bizniz disparaissent. Le public ressort cependant séduit de ce concert simplement rock. Une belle soirée.

Ah, au fait: si vous avez cru mon histoire de casque mentionnée plus haut, oubliez… J’ai aussi un peu d’imagination.

Merci à Base production et Roger Wessier d’avoir rendu ce report possible.

Yngwie MALMSTEEN: Blue lightning

Hard rock, Suède (Mascot, 2019)

Comme beaucoup d’autres personnes de ma génération, j’ai admiré le prodige qu’était ce guitariste suédois au nom alors imprononçable. Yngwie Malmsteen se sait doué, et a su imposer un style. Ce qui ne l’a pas empêché de succomber à la pression des nouveaux venus, souvent plus modestes verbalement que lui. Mais Malmsteen, s’il a connu des périodes de vache maigres, n’a jamais lâché et même si ses deux dernières productions ne sont sorties qu’au Japon, il reste dans le paysage musical. La signature avec Mascot lui permettra-elle de revenir sur le devant de la scène? En partie peut-être, car ce Blue lightning surprend à plus d’un titre: tout d’abord, exception faite de 4 morceaux originaux, il s’agit d’un album de reprises. On peut se demander pour quelle raison Yngwie reprend des classiques intemporels tels que FoxEy lady, Smoke on the water, Demon’s eye ou pourquoi il décide de s’attaquer à While my guitar gently weeps en rajoutant sa touche perso: du shred et une avalanche de notes, son dada, qui n’apportent rien de plus qu’une déformation du propos originel… On le sait qu’il est rapide, on connait sa vélocité et sa précision… Pire encore: pourquoi faire de Paint it black, ce classique des Stones, un morceau presque insipide? Sur ce coup, le gaillard a mal joué. Les nouveau titres (le morceau titre, mid tempo loin du blues contrairement à 15, la ballade instrumentale Peace please, et le plus énergique 1911 strut). La bonne surprise, cependant, reste de découvrir que le guitar hero légendaire est aussi capable de plutôt bien chanter. Au final, Blue lightning est un album sympa qui se laisse écouter. Un de plus…

DRAGON’S DAUGHTER: Tits on fire

France, rock (Ep, Autoproduction, 2019)

La fille du dragon, forcément, pour les amateurs, ça évoque la série Game of thones. Sauf que dans sa version française, on dit « mère des dragons ». Mais, non, il s’agit d’un trio féminin dont Tits on fire, le premier Ep, a été produit par un certain Yarol Poupaud, découvert au cours des 90’s grâce à sa particpation au sein de FFF. Dragon’s Daughter nous propose ici Tits on fire, un ep 6 titres d’un rock simple et direct, quelque peu impertinent, flirtant souvent avec le punk, tant dans le ton généralement narquois que dans la franchise directe des paroles « dans ta gueule » (Rocket pussy – clin d’œil aux Pussy Riot? – Who the fuck). Dénuées d’effets, les guitares sont efficaces et sensibles ( la ballade Learn it). On notera que le chant anglais est parfaitement compréhensible, même si, dans sa globalité, il manque de hargne et d’irrévérence. Pour finir,Dragon’s Daughter s’offre même une reprise de Gainsbourg avec La chanson de Prévert. Un ensemble plus que sympa, joyeux, sensible et prometteur d’un avenir certain. A suivre.

Interview: Mark MORTON

Entretien avec Mark Morton (guitares). Propos recueillis à Paris, Hôtel Alba Opéra le 27 février 2019

 

Metal-Eyes : Mark, tu es le guitariste de Lamb Of God, mais tu n’es pas ici pour parler de ton groupe mais de ton album « solo ». Comment se déroule cette tournée promo jusqu’à présent ?

Mark Morton : Bien ! On a réussi à caser de nombreuses interviews en peu de temps. J’ai commencé avant-hier en Suède, où j’ai passé une journée complète, je suis arrivé à Paris hier et repars demain. Je me sens honoré et très privilégié de voir qu’autant de personnes souhaitent me parler au sujet de ce projet. Jolie montre que tu as là…

Metal-Eyes : Merci ! C’est un cadeau de mon épouse.

Mark Morton : Elle a bon goût. En matière de montres en tout cas !

Metal-Eyes : Je n’ai malheureusement pas eu le temps d’écouter ton album, mais il semble que tu aies commencé à travaillé sur Anesthetics il y a un bon moment. Quand l’idée de ce premier album solo a-t-elle émergé ?

Mark Morton : Je crois que les chansons ont émergé avant l’idée d’un album solo. Ce qu’il s’est passé c’est que je me suis retrouvé avec toutes ces chansons qui ne vont pas avec mon groupe habituel, Lamb Of God, et je me suis demandé ce que j’allais en faire. J’ai commencé à les travailler avec Josh Weaver, mon producteur de longue date et très bon ami, et Jake se lançait aussi dans son label, WPP Records. On a commencé à discuter de tout ce qu’il se passait et les choses se sont mises en place. C’est ce qui a lancé le process du projet Anesthetic.

Metal-Eyes : Ca remonte à quoi ? 3 ans ?

Mark Morton : En fait, les premières préproductions en studio ont eut lieu en septembre 2016.

Metal-Eyes : C’est un album qui est bourré d’invité. La première chose que l’n peut remarquer, c’est qu’il débute avec Cross off qui est chanté par Chester Benington, qui est mort en juillet 2017. Cette première place sur l’album, le fait d’ouvrir Anesthetic est-il à comprendre comme un hommage que tu lui rends.

Mark Morton : Non, j’étais presque certain que cette chanson ouvrirait l’album, de toutes les manières. Cross off, avant même l’implication de Chester, on savait que c’était une chanson particulière. Tu écris un certain nombre de chansons – et elles sont toutes sur l’album, parce qu’elles ont chacune une personnalité différente – et Cross off a cette énergie, même en instrumental, qui nous faisait dire que c’est une chanson particulière. Nous avions commencé à écrire le refrain, et quand Chester est arrivé, il a beaucoup apporté dans les textes et dans le chant, les lignes vocales. Il a vraiment apporté sa touche, et en ce sens, c’est une vraie participation. C’est un honneur d’avoir pu travailler avec lui. Je suis cependant à peu près certain qu’elle aurait été la première chanson de l’album, même si Chester était encore parmi nous.

Metal-Eyes : Tu as travaillé avec des musiciens d’horizons variés pour cet album. Comment as-tu réussi à les convaincre tous de participer ?

Mark Morton : Beaucoup d’appels téléphoniques, d’emails… Simplement en les contactant.

Metal-Eyes : Certains sont des amis…

Mark Morton : Oui, certains sont des amis, et ce fut assez facile. Quelqu’un m’a demandé plus tôt qui a été le plus facile à convaincre. C’était Randy Blythe, un de mes meilleurs amis au monde. Il se trouve qu’il est le meilleur hurleur metal au monde aussi, alors il me suffisait de lui envoyer le texte. Il y en a d’autres que je ne connaissais pas, dont j’étais simplement fan. Je voulais simplement pouvoir leur présenter ma musique, voir s’ils pouvaient être intéressés. Mark Lanigan, par exemple : c’est un de mes chanteurs préférés, je n’avais aucune idée s’il avait entendu parlé de moi, et je ne sais toujours pas s’il connait mon travail (rires)… mais il m’a fait savoir qu’il était très content du résultat, et moi aussi ! Dans certains cas, tu connais les gens et ça aide, dans d’autre, c’est juste une tentative pour voir si ça peut les intéresser, s’ils peuvent envisager une collaboration avec moi, dans d’autres cas, il s’agit d’amis, comme Jacoby Shaddix, Chuck Billy que je connais depuis un certain temps.

Metal-Eyes : Il faut, j’imagine, les approcher avec une certaine humilité pour convaincre certains musiciens de participer…

Mark Morton : Il n’a pas vraiment fallu les « convaincre », tout s’est passé dans je les appels. En matière d’humilité… Le projet en lui-même force cette humilité, le fait d’avoir l’opportunité de collaborer avec autant de musiciens de ce niveau, de me rendre compte, de prendre conscience que ces gens étaient intéressés à l’idée de travailler avec moi, c’est un véritable honneur.

Metal-Eyes : Comme je n’ai pas eu la possibilité d’écouter cet album, qu’est-ce qui le rend si différent d’un disque de Lamb Of God ?

Mark Morton : Stylistiquement, d’abord, artistiquement, les chansons dévient de ce que les gens ont l’habitude d’écouter. Je suis un des guitaristes et compositeurs de Lamb Of God qui est typiquement un groupe de thrash. Nous sommes au meilleur de notre forme créative, notre nouveau matériel est ce que nous avons fait de mieux. Il nous reste beaucoup à dire, et je suis fier de ce que nous avons fait. Mais en tant que compositeur, guitariste et musicien, je fais les choses différemment, depuis longtemps. Je me suis toujours considéré comme un guitariste de blues qui se trouve à la mauvaise période… Les guitaristes que je préfère sont des gens comme Billy Gibbons, Jimi Hendrix, Jimi Page. Je viens d’un univers très rock, blues, classic rock. Tu entendras ces fondations sur l’album, ainsi que du rock 90’s, comme le grunge. Une période assez spéciale pour le rock. Au-delà, il y a du metal ainsi que du hard rock bien fichu, un style dont je suis fan : une bonne chanson, de jolies mélodies. J’ai eu la chance de pouvoir explorer ça avec ce disque, plus qu’avec Lamb Of God, simplement parce que le genre ne s’y prête pas. Je dirais qu’au moins 80% du matériel de cet album ne pourrais jamais se trouver sur un album de Lamb Of God. J’ai pu élargir un peu mon horizon.

Metal-Eyes : Ce qui signifie que certains titre auraient pu se trouver sur un album de Lamb Of God.

Mark Morton : Sans pour autant dire que c’était du matériel potentiel pour Lamb Of God, ou des résidus de travail de Lamb Of God, mais il y a certains titres de cet album que j’aurais pu, j’imagine, présenter au groupe. Mais je les ai gardés. Initialement, je n’avais pas prévu d’inclure du thrash sur cet album. Mais mon producteur m’a suggéré de le faire, parce que certains fans de Lamb Of God vont écouter Anesthetic, et voudront écouter un peu de ce qu’ils connaissent. C’est ce que nous avons fait !

Metal-Eyes : Donc, c’est une variété de genres, toujours basés sur le blues, le rock et le hard rock ?

Mark Morton : Oui, on peut le résumer ainsi.

Metal-Eyes : Justement, avec un album aussi varié, si tu devais ne retenir qu’une chanson pour expliquer ce qu’est to projet solo, laquelle serait-ce ?

Mark Morton : C’est impossible… Quand tu écouteras l’album tu comprendras : il est si diversifié qu’il est impossible de n’en extraire qu’une chanson… Il y a 3 chansons que nous avons déjà sorties, et elles représentent déjà 3 facettes de la variété : Cross off, avec Chester Benington, Truth is dead avec Randy Blythe et Alyssa White-Gulz, et Self defiance avec Myles Kennedy. Truth is dead est une chanson assez thrash, avec un refrain mélodique mais une base distinctement thrash, et je dirais que Self defiance est plus dans la lignée traditionnelle du hard rock. Ces 3 extraits sont déjà variés, mais l’album est encore plus diversifié.

Metal-Eyes : Parlons un peu de Lamb Of God : si mes compte sont corrects, vous allez vous produire pour la troisième fois au Hellfest, après 2012 et 2015 et vous serez à l’affiche, sur la main 2, le dimanche , sur une scène 100% thrash. Comment vous préparez-vous pour ce type d’évenement ?

Mark Morton : On répète… Le truc avec les festivals c’est qu’on y va et on balance la sauce. Nous n’avons pas une grosse production, pas comme dans des grandes salles où nous pouvons avoir des effets spéciaux, de la fumée, du feu, des lights, ce genre de choses. En festival, tu as les conditions du festival : tu as droit à une show très brut et direct de Lamb Of God. En général, on ne joue pas aussi longtemps qu’en tête d’affiche, on est poussé sur scène… On va frapper fort et vite, et… Voilà !

Metal-Eyes : Vous allez jouer à d’autres festivals cet été avec Slayer, qui donnera ses derniers concerts en France, en Belgique… Ce qui sera de toute façon une tournée spéciale pour eux, et nous.

Mark Morton : Je ne sais vraiment pas. J’imagine que oui. On a  tourné avec eux ces derniers 12-18 mois, on a fait une tournée en Europe avec eux en novembre et décembre– je ne crois pas que nous soyons passés en France. On s’apprête à repartir avec eux en mai en Amérique diu Nord. Je ne peux pas imaginer que nous ne soyons pas à l’affiche de festivals avec eux. Voilà le truc : je en sais même pas dans quelle ville je me trouve ce jour en particulier…

Metal-Eyes : Surtout quand la ville est un village de province…

Mark Morton : En plus, oui ! On va se recroiser, j’en suis sûr. Slayer nous a invités sur plusieurs parties de cette tournée d’adieux, et c’est un honneur pour nous d’en faire partie.

Metal-Eyes : Revenons à ton projet solo : il y a tant d’invités qu’il semble difficile de présenter ce projet sur scène. As-tu quelque chose de prévu en ce sens ?

Mark Morton : Oui, nous commençons une tournée américaine en mars

Metal-Eyes : Et combien serez-vous sur scène ?

Mark Morton : Juste un groupe, un groupe live avec Mark Morales qui sera mon chanteur live, ainsi que d’autres musiciens pour cette tournée.

Metal-Eyes : L’Europe sera au programme ?

Mark Morton : Pas encore, mais j’adorerais pouvoir venir. L’année prochaine  sans doute. Ça dépend aussi de comment l’album sera reçu.

Metal-Eyes : Tu as été en promotion ici, à Paris, tout cela journée. Jusqu’à maintenant, quelle a été la meilleure question qu’on t’a posée, la plus étonnante ?

Mark Morton : C’était hier, en fait, puisque j’étais ici aussi. Une jeune femme m’a interrogé  sur la mode, ce qui m’a semblé à propos puisque nous sommes ici à Paris, en France, pays de la mode. N’importe quelle personne qui passe 5 minutes avec moi sait que la mode n’est pas mon truc (rires). Ça m’a un peu surpris qu’elle me pose cette question. J’apprécie de regarder la mode, mais je ne m’y plie pas. Je porte les mêmes vêtements tous les jours (rires).

Metal-Eyes : Ben… Ne parlons pas de ça !

Mark Morton (il explose de rire) : je les lave quand même tous les quelque jours !

Metal-Eyes : Quelle pourrait être ta devise en 2019 ? En tant que Mark Morton, pas Lamb Of God…

Mark Morton (il réfléchit) : « Rester serin ». Il se passe  beaucoup de choses pour moi, beaucoup de voyages, de musique, ce chemin, cette carrière musicale qui est la mienne bouge très rapidement. J’en suis au stade de ma vie où je profite du moment présent, et j’apprécie la vie pour ce qu’elle est. Il va se passer beaucoup de choses cette année, on va beaucoup jouer, rencontrer plein de gens dans des endroits différents et je ferais de mon mieux pour rester serin.

Metal-Eyes : Ceci m’évoque quelque chose qui s’est passé avec un autre groupe américain pour lequel nous avions reçu des consignes : y a-t-il des sujets que tu préfères ne pas aborder en interview ?

Mark Morton : Ben… S’ils font surface, je te le ferais savoir. Je n’empêche personne de m’interroger, même s’il y a des sujets plus délicats à traiter…

Metal-Eyes : Comme la situation politique actuelle aux USA ?

Mark Morton : Oh, on peut en parler si tu veux. Bien sûr, on peut en parler ! Que veux-tu savoir ?

Metal-Eyes : Quelle est ton opinion au sujet de la politique américaine actuelle ?

Mark Morton : C’est une question complexe. Je pense que le système politique américain se trouve à la croisée des chemins, il est en train de se réinitialiser, d’une certaine manière. Ce process va être douloureux, et pas forcément joli à voir. J’aimerai croire que, plus tard, lorsqu’on pensera à ce que nous traversons actuellement en tant que nation, on verra une douleur grandissante, forçant les gens à devoir choisir, repenser la manière dont nous élisons nos candidats. C’est comme un serpent qui mue : un procédé sans doute douloureux pour l’animal, mais cela lui permet de grandir, de devenir meilleur qu’il n’est.

Metal-Eyes : On vit un peu la même chose en France…

Mark Morton : Oui, c’est assez moche partout, n’est-ce pas ?

 

MASS HYSTERIA live à Blois (le 28 février au Chato d’O)

Mass Hysteria, live, c’est toujours explosif. Pas étonnant que les fans soient surnommés « les Furieuses et les Furieux ». Et cela semble une telle évidence pour qui a déjà assisté à un show des parisiens… Même si on se frotte les mains à l’idée de retrouver Mouss et sa bande en juin au Hellfest, comment rater le passage des 5 à Blois, à côté de chez moi, hein? Petite mise en jambes pré-estivale qui permet de prendre la température.

Prévu à 20h30, le groupe de première partie m’est, comme à beaucoup d’autres semble-t-il, inconnu. Sbrbs – pour « suburbs », les voyelles en moins comme vous l’aurez compris – est un trio breton basé à Rennes. Musicalement, le groupe surprend dès le départ car il est à l’opposé de ce que propose la tête d’affiche: un rock doux et léger. Le public reste quelque peu à l’écart de la scène, en observation, et approuve poliment ce qu’il entend.

Si Sbrbs est « tout petit », la chanteuse est à l’aise malgré un trac palpable. Ce qui ne l’empêche nullement d’aller chercher le public, de le remercier ou de lui raconter son histoire. Celle quand, habitant chez ses grands parents, elle trouve des CD dans une boite, parmi lesquels Master of puppets, Gojira, Lofofora et… Contradiction de Mass Hysteria. « Et maintenant on est là! » Le trio, après ce petit speach, propose un final de deux titres plus brutaux, plus foncièrement rock et rentre-dedans avant de quitter la scène, tout sourires. Une mise en bouche étonnante et néanmoins sympathique.

 

Le staff s’active pour le changement de plateau cependant que le public comble le vide et s’amasse devant la scène. Les « ego risers », ces estrades sur lesquelles les Mass Hysteria aiment se positionner tout au long de leurs prestations, sont placés derrière les retours. C’est une scène sobre qu’investissent les 5 musiciens à 22h – eh, oui, nous sommes en province, à l’écart des habitations. On joue un peu plus tard, ici! Et les gaillards attaquent fort, avec un Reprendre mes esprits qui dynamite le public. Mouss, qui a naturellement salué « les Furieux et les Furieuses », arpente la scène de long en large, Yann est toujours aussi concentré et agresse son instrument pour le moment encore caché sous la capuche de son sweat (il ne tardera pas, tout comme Mouss, à s’en défaire, tant la chaleur monte).

Les (2) photographes sont mis à l’épreuve, la scène baignée de lumières bleues et rouges – tout ce qu’on n’aime pas – et les musiciens étant haut perchés obligeant les dos, nuques et épaules à forcer dans des positions contraintes inhabituelles. Mais on fait avec et on s’adapte. Fin de parenthèse.

Après Vae soli!, le chanteur offre une bière à un spectateur puis va en chercher plusieurs qu’il distribue tout en remerciant le public d’être aussi nombreux. « Vous êtes vraiment des Furieux pour venir ici un jeudi soir! » Une somme de détails suit, et Mass Hysteria nous offre un défilé de classiques mêlés à ses plus récents morceaux extraits de Maniac, dernier album en date (Reprendre mes esprits, Chaman acide, Se brûler sûrement, Arômes complexes).

Mouss est en forme, comme toujours, et offre quelques saillies à la politique actuelle (Chaman acide est « une spéciale dédicace à Trump, Macron et tous les cons qui nous gouvernent », tandis que Positif à bloc est sujet à faire un mini Hellfest avec un mini circle pit (dans une salle de 600 personnes, c’est un peu le rayon d’un compas de collégien!). Après Se brûler sûrement, Mouss interpelle avec le sourire le chef plateau, lui réclamant des bières: « Faut dire, j’ai tout distribué sur les premiers titres. Le con, il donne tout dès le premier morceau! Maintenant j’en ai plus! » L’enfer des dieux est quant à lui dédié « à tous ceux qui sont partis trop tôt parce qu’ils étaient libres ».

Ne faisant pas comme tout le monde, Mass place un de ses nouveaux titres au cours du rappel (Arômes complexes) suivi de l’incontournable Plus que du metal. Le public qui a encore de l’énergie à revendre continue de sauter sur Donnez vous la peine et Furia qui vient conclure un concert, le quatrième passage de Mass Hysteria dans cette salle depuis les débuts du groupe, qui n’est qu’une mise en bouche: vivement que l’on retrouve Mass Hysteria au Hellfest,  pour une journée du vendredi 100% metal français, avant de retourner le Zénith de Paris le 6 décembre prochain. En attendant, Mass continue de sillonner la France, il y en aura donc pour tout le monde, dont une « Nuit de l’enfer » qui viendra cloturer le Warm-up Hellfest le 30 avril prochain au Zénith de Nantes.

 

Merci à Verycords d’avoir rendu ce report possible.