USA, Thrash (Blackened, 2023)
Ne confondons pas vitesse et précipitation, s’il vous plait! Alors que sort – enfin – le nouvel, onzième, album de Metallica, il serait dommage de foncer tête baissée pour être parmi les premiers à commenter et disséquer ce 72 seasons tant attendu. Car là où les « grands » médias n’ont pu se faire qu’une première idée sur une écoute unique, nous, « petits » médias – webzines, radios… – avons le privilège de pouvoir écouter ce disque à plusieurs reprises et à notre rythme. Alors profitons en. Car s’il est vrai que les Mets ont souvent déstabilisé leurs fans depuis …And justice for all – les errances du renouvellement de la période Load/Reload, la sombre souffrance de St Anger, un son de batterie perturbant sur Death Magnetic (sans parler de l’ovni Lulu) – Hardwired… to self destruct semblait vouloir remettre le pendules à l’heure. Metallica a toujours été un groupe de heavy thrash, certes, mais de ceux qui se lancent de nouveaux défis pour ne pas se répéter. La musique comme exutoire et terrain de jeu d’expression de ses sentiments. Venons en à ce nouvel album, voulez-vous? Une fois passé le cap de cette pochette d’un jaune canari – peut-on l’envisager comme futur décor de scène, ce lit de bébé qui, telle une Doris à l’époque de la tournée Justice, serait monté tout au long du concert avant d’être carbonisé en éparpillant les divers objets de ladite pochette? – un premier constat s’impose: l’album est long. Il dépasse les 75′ pour 12 titres dont deux seulement n’atteignent pas les 5′ : le premier single, Lux aeterna (3’21), un titre accrocheur et nerveux, et Too far gone ? (4’33) particulièrement thrash, direct et saccadé. Deux titres qui, à eux seuls, démontrent qu’il est inutile de vouloir trop en faire, ce qui se révèle rapidement le travers principal de ce nouvel album. C’est le morceau éponyme, 72 seasons, qui ouvre les hostilités. Son intro très Motörhead est claire: Metallica sait encore jouer heavy. Efficace même si l’ensemble se fait répétitif et aurait gagné à être raccourci pour se concentrer sur le chant de James ou ce solo de Kirk autant que sur le si souvent inutilement et à tort critiqué jeu de batterie de Lars. C’est cette répétitivité de certains plans qu’on peut sans doute le plus reprocher à ce disque par ailleurs riche de trouvailles, de brutalité contrôlée, de riffs et de soli qui tuent et entrent dans le crane, et qui est truffé de références un peu partout. Si on a déjà évoqué Motörhead, Metallica salue ici cette période bénie qui a réuni James et Lars il y a plus de 40 ans: partout on trouve des clins d’œil à cette NWOBHM, que ce soit directement (Lux aeterna fait explicitement référence au Ligntning to the nations de Diamond Head) ou des mélodies dignes des plus grands noms du genre, Saxon et Maiden en tête mais parmi d’autres, et fait même référence à sa propre histoire, de Kill ’em all à Hardwired – je vous laisse chercher! 72 seasons se révèle, comme sa pochette, à double face: d’un côté Metallica est toujours animé par ce heavy thrash des grands jours mais se perd parfois en propos par trop répétitifs, voire en plans dont on se serait passés, comme ce If darkness had a son, surprenant et déstabilisant troisième single. Le groupe, cependant, sait toujours prendre des risques et le démontre avec ce pavé qui vient clore l’album: Inamorata et ses 11’10 – sans doute le morceau e plus long jamais proposé par Metallica – s’il débute de manière presque oppressante et inquiétante se fait rapidement plus varié, parfois mélancolique ou plus simplement « passe partout » dans un esprit classic rock. Si 72 seasons aurait gagné à durer moins longtemps, Metallica nous offre un album très riche, une œuvre dense qui mérite plusieurs écoutes avant d’être totalement apprivoisée. Un album qui ne laissera personne indifférent. Rendez-vous les 17 et 19 mai prochain au Stade De France avec un lit à barreaux en guise de snakepit ?