Interview: PRAETOR

Interview PRAETOR. Entretien avec Noémie (gtr) le 16 juin 2025

The spiral of addiction, votre nouvel album est paru il y a quelques semaines. Que pourrais-tu m’en dire pour me convaincre de filer l’acheter dès la fin de cet entretien ?

Déjà, as-tu déjà écouté le premier album ?

Le premier qui était un album de hard FM ? Oui, je l’ai écouté…

(Rires) Tout à fait ! Donc, puisque tu l’as écouté… Ce nouvel album est différent du premier – on reste sur les mêmes bases, des influences thrash old school avec des influences plus modernes – mais autant sur le premier album j’avais composé la plupart des morceaux, ici c’est Hugo qui a composé la majorité des morceaux. On a tous les deux des styles, une manière d’aborder la musique, différents. Cet album est dans la continuité du premier avec une belle évolution. Hugo a une approche de la composition différente parce qu’il a déjà en tête toutes les harmonisations qu’il veut. J’ai un style qui reste simple et efficace, en 4/4, très rock dans la construction des morceaux. Hugo a une approche un peu plus…  « prog », on va dire, mais on reste dans du thrash. Je sais que les deux termes mis côte à côte peuvent surprendre…

Oui et non, certains ont démontré que c’est faisable, je pense, au hasard, à un certain … And justice for all…

Ben voilà, Hugo est un énorme fan de Metallica, et ça s’entend sur son chant et sur sa manière d’envisager les morceaux. Il y a, comme sur le premier album, 10 morceaux, une durée équivalente avec quelques changements. On a tenté de nouvelles choses sans changer du tout au tout.

Alex m’expliquait lorsque nous avions échangé pour le premier album que tu arrivais avec les riffs des morceaux, que vous en discutiez et que Hugo ajoutait ses idées et ses paroles. Donc là, si je comprends bien, le changement principal c’est que tu es arrivée avec moins de matière et c’est lui qui est à l’origine des titres ?

C’est principalement Hugo qui a composé, sachant que quand il compose, il envisage déjà les deux guitares, la batterie, il a déjà ses idées de chant… Le travail de composition se fait un peu différemment.

Puisqu’il a ces trames en têtes, arrive-t-il avec les textes des chansons ou écrit-il les paroles en fonction de la musique ?

C’est lui qui t’en parlerait le mieux, mais parfois il sait déjà de quoi il a envie de parler. D’autres fois, il compose le morceau et écrit après. Il a les mélodies mais les paroles viennent ensuite, parfois il change les paroles, ou les sujets qu’il souhaite aborder… Au niveau des paroles, cet album est un peu plus personnel au niveau des sujets abordés.

J’allais y venir, justement. Le titre de l’album, The spiral of addiction est très parlant… Est-ce lié à des expériences personnelles d’un ou plusieurs membres du groupe ou à des témoignages extérieurs ? Qu’y a-t-il derrière ce titre ?

Le morceau The spiral of addiction est le premier qui a été composé pour cet album. Il a même été en partie composé avant que le premier album ne sorte. Hugo voulait dès le début que ce soit le nom de l’album et avoir un artwork qui soit en rapport. Ce n’est pas non plus un fil rouge, ce n’est pas un concept album qui ne parlerait que d’addiction, loin de là ! Par contre, il y a cette idée qui revient régulièrement, sans parler d’une expérience en particulier. C’est lié à plein de choses…

Il y a certaines choses qui me marquent sur les deux albums, notamment au niveau des pochettes qui sont toutes deux en noir et blanc…

Oui. En fait, la première pochette devait être en couleurs mais on s’est rendu compte qu’elle était mieux en noir et blanc. Là, on a travaillé avec un autre artiste qui travaille au crayon. La pochette, il l’a dessinée sur papier avant de tout numériser. Il travaille avec du noir, du blanc, ce côté très crayonné… Du coup, nos deux albums sont e noir et blancs, pas les mêmes teintes… Ça ne veut pas dire qu’on imagine tous nos albums en noir et blanc, mais au final, on trouve que c’est assez chouette.

Il y a un côté un peu malsain à ce dessin, qui évoque aussi le titre… Comment est-ce que tu décrirais la musique du groupe à quelqu’un qui ne vous connait pas ? On a évoqué le thrash, mais ce n’est pas tout…

Si je devais nous décrire, ce serait « énervé », « énergique » et « hargneux ». C’est ce qui décrit le mieux notre musique. Notre point fort, c’est la scène, on fait de la musique pour ça. Enregistrer des albums, c’est bien, mais ce n’est pas ce qui nous fait le plus rêver. Notre vrai point fort, c’est notre énergie sur scène, énergie qui est liée à nos morceaux.

Est-ce que ça signifie que vous composez vos morceaux en pensant d’abord à ce qu’ils donneront sur scène, et si vous sentez que ça ne va pas passer, vous mettez le titre de côté ?

Pas vraiment… On ne s’est jamais vraiment posé la question parce que nos morceaux sont énergiques… La question, on se la pose plus par rapport au choix des morceaux qui vont le plus fonctionner en live, sur la façon dont on créé nos setlists pour garder tout le temps cette énergie. Mais au moment de la composition, on ne se pose pas cette question. On se demande surtout si c’est assez bien ou pas.

Si vous vous rendez compte qu’un titre ne fonctionne pas comme vous le souhaitiez, vous le retirez de la setlist, j’imagine ?

Oui, mais c’est assez difficile d’analyser l’impact des morceaux… Pour la sortie de cet album, on a fait une tournée en Europe et on a essayé de voir ce qui fonctionnait, ce qui fonctionnait moins bien, au niveau de l’agencement des morceaux, etc. Et c’est assez difficile parce que d’un soir à l’autre, en fonction des publics, on n’a pas forcément les mêmes retours. Ça se fera avec le temps… Pour le premier album, on arrive à voir un peu les morceaux qu’on peut mettre de côté et ceux qu’on doit absolument intégrer à la setlist. Pour ce second album, c’est encore un peu difficile mais, oui, on ajuste en fonction de la réaction du public.

Maintenant, si tu devais ne retenir qu’un seul titre de cet album pour expliquer ce qu’est Praetor aujourd’hui, ce serait lequel ?

Alors… J’ai envie de dire Carefully selected qui est assez brutal. Tout l’album n’a pas ce niveau de brutalité, mais ce titre représente assez bien l’esprit du groupe. Forcément, ce n’est qu’un morceau sur les dix mais c’est l’esprit du groupe et ce qu’on a envie de transmettre.

L’ensemble de l’album est assez rapide, ça ne doit pas être facile de trouver des moments de respiration en concert…

Non, en effet. On parlait des setlist. Forcément, c’est en fonction de ce qui marche bien ou moins bien, mais aussi de quel morceau peut être enchainé à tel autre. Il y a aussi les deux questions de Alex à la batterie et Hugo au chant, parce que, pour l’un comme pour l’autre, il y a une exigence physique… Alex, on le voit jouer, mais Hugo, il met une telle énergie dans son chant qu’il a besoin de moments pour récupérer. Ils n’hésitent pas à nous dire que, non, là ils ont besoin de récupérer et qu’on ne peut pas enchainer certains titres. Quand on a envie d’enchainer des moments d’énergie à chaque concert, d’éviter de trop prendre de moments de repos, on sait qu’à tel moment on peut faire une pause de 10 secondes pour se rafraichir, qu’avec tel autre on peut enchainer directement.

Quelles sont vos prévisions de concerts ?

On repart en juillet pour une dizaine de dates en Espagne et au Portugal, sur des festivals et des concerts, et après, on a pas mal de dates – 3 à 4 concerts par mois – en France, en Allemagne, en Belgique aussi. On a un peu plus de concerts en France, c’est vrai que jusque-là, on ne jouait pas trop en France, mais il y a quelques dates qui arrivent…

Vous êtes un groupe franco-luxembourgeois, ce serait bien aussi de jouer un peu en France (elle rit) ! Maintenant, certains ont visé l’étranger avec succès… C’est important aussi.

Oui, c’est important, et on le voit, qu’on a un public à l’étranger. Quand on regarde nos statistiques – où on est écoutés, où les clips sont visionnés – on a du public à l’étranger. On l’a constaté sur cette tournée, on a joué dans des pays où on n’avait jamais joué avant, en Italie, en Hongrie, et des gens nous attendaient. On sait qu’il faut qu’on joue plus en France, et on y remédie !

Est-ce que Metal East a un rôle à jouer sur l’impact du groupe à l’étranger ?

Grace à Metal East on est distribués à l’étranger. Pour le reste, c’est le fait de jouer, d’utiliser les réseaux sociaux, il y a un vrai travail de promotion qui est conséquent, et ça, c’est nous qui nous en chargeons. Il faut jouer, jouer, jouer, et trouver des moyens de se faire écouter, en jouant et en allant à la rencontre d’un public.

Quels sont justement les retours médiatiques que vous avez eu pour The spiral of addiction ?

Pour le moment, on a des retours qui sont bons, voire très bons. La plupart soulignent l’évolution entre les deux albums. Certains préfèrent le premier, d’autres le second album, mais c’est assez classique. Nous, on est très fiers de ce qu’on a produit et on va continuer sur cette lancée.

On parlait plus tôt de l’évolution musicale du groupe. Quelle a été l’évolution d’un point de vue humain ? Le premier album était sorti en 2023, le groupe s’est formé en 2019, et a donc subi la crise sanitaire, mais quid depuis ?

On n’a pas eu de crise sanitaire mais des crises quand même, notamment de mon côté puisque j’ai subi un accident de voiture il y a bientôt un an. J’ai été conduite aux urgences avec une fracture du poignet. Je suis restée 13 mois sans pouvoir jouer de guitare et ça a modifié la façon dont on a terminé de composer l’album, notamment là où je devais composer des solos, ce que je ne pouvais pas faire puisque je ne pouvais pas jouer. C’est Hugo qui a dû enregistrer toutes mes parties de guitare, j’ai dû être remplacée sur scène pendant un peu plus d’un an, et on continue de le faire parce que je ne suis toujours pas capable de faire un concert en entier. On repart en tournée et j’ai mon double qui vient avec nous et qui fera la moitié du concert. Il s’appelle Axel Limonier, et c’est un ami de très longue date, il est très proche du groupe. Il a appris tous les morceaux au pied levé et l’impact qu’il a eu sur Praetor cette dernière année est vraiment conséquent. Il a fait la sortie de l’album avec nous, les concerts aussi et jusqu’à la fin de l’année, lorsque je serai capable de jouer seule, il continue de nous suivre. Donc, forcément, ça a impacté le groupe parce qu’il y a eu plein de modification, ça a impacté au niveau de la logistique, au niveau de l’enregistrement aussi puisque Hugo a enregistré les deux guitares… Ça a été un peu compliqué, et plein d’autres petites choses aussi. Ça fait partie de la vie, de la vie d’un groupe. On compare souvent un groupe à une famille, ben… on est là dans les choses positives comme dans les moments moins positifs.

Ce qui signifie que l’album aurait pu sortir plus tôt sans cet accident ?

Non, non, pas du tout (rires) ! On a eu deux ans entre les deux albums, ce qui est très court maintenant, sachant qu’on continuait de défendre le premier album. La composition, l’enregistrement, la post production… c’est énormément de boulot. Déjà, là, c’était intense, et la date de sortie était déjà prévue à la sortie du premier album. On avait calé cette date avant, l’enregistrement aussi, et même si je n’avais pas eu cet accident, ça ne changeait pas grand-chose…

Alors ce que tu dis signifie-t-il que vous avez déjà calé la date de sortie du troisième album ?

Non ! Justement parce que là, on s’est rendu compte que c’était une source de stress colossale, pas seulement à cause de mon accident. L’année 2024, pour les Prateor, a été compliquée pour chacun, individuellement. Au niveau personnel, et on s’est rendu compte que, quand c’est compliqué d’un point de vue perso, faire avancer le groupe c’est extrêmement difficile… En plus, quand on a sorti le premier album, on avait déjà pas mal avancé sur la composition du second. Là, ce n’est pas le cas, et on ne veut pas se mettre ce stress. On va commencer par défendre ce second album et reprendre le processus de composition, et une fois qu’on aura suffisamment avancé, on pourra envisager une période de sortie pour le troisième album.  

Ce qui parait raisonnable, d’autant plus pour un jeune groupe. Et on sait que, souvent, le troisième album est celui de tous les défis, celui de la transition. On sait bien, d’ailleurs, qu’un groupe de rock, d’autant plus dans ce style de metal, ne vit pas de sa musique. Quels sont vos autres activités en dehors de Praetor ? Tu m’as dit au début que tu écris des romans, que font les autres ?

Alex est prof de batterie et coach sportif, Seb est ingénieur dans l’automobile et Hugo travaille grosso modo dans un poste de secrétariat pour une entreprise au Luxembourg.

Si tu devais penser à une devise pour Prateor, ce serait quoi ?

Euh… Ce genre d’exercice… je suis extrêmement nulle… Autant je peux trouver un mot qui nous définit, des choses qui sont importantes pour nous, autant une devise… Je n’en ai pas la moindre idée (rires) !

As-tu quelque chose à rajouter pour conclure cet entretien ?

Simplement ce que j’ai déjà dit, que nous sommes très fiers de ce second album, et c’est important d’être fier de ce qu’on produit. On voit le chemin parcouru depuis le début, on voit aussi celui qui nous reste à parcourir même s’il est forcément plus flou. Même si on sait dans quelle direction on veut aller, il n’y a pas de destination. On est contents des opportunités qu’on a, de pouvoir jouer comme on le fait, que cet album soit aussi bien reçu, par les chroniques ou le public en concerts. On va faire en sorte que ça ne s’arrête pas maintenant !

BLACK RABBIT: Chronolysis

Pays-bas, Thrash (Ep Autoproduit, 2025)

Située dans la province de Gueldre, Apeldoorn est une commune néerlandaise qu’on ira volontiers visiter pour ses… Ouais, on s’en fout, en fait. En tout cas, c’est là que Black Rabbit, groupe de thrash/death a vu le jour à la veille des années 2020. Les cinq musiciens – Nino Thomas au chant, Jelle Brekelmans et Hidde Hofland aux guitares, Thijs Mulder à la basse et Koen van der Voet à la batterie – crée le concept du lapin noir qui donne son nom au groupe, sorte de bestiole maléfique qui vient hanter nos nuits. Un premier Ep en 2020 est suivi d’un album, Hypnosomnia en 2023 avant l’arrivée de ce Chronolysis explosif. En cinq titres, les Néerlandais nous démontre leur savoir faire et leur détermination. Ca thrashe dans tous les sens et ce disque m’évoque la folie contagieuse de Crisix. Oui, Black Rabbit emporte tout sur son passage, surtout son auditeur pris au piège dans un déluge de riffs et de rythmes assassins et « cauchemardesques ». On se déboite la nuque avec bonheur. Live, ça doit démonter sévère! Fun, rentre dedans et explosif, bravo!

DEATHTURA: Faith?

Belgique, Thrash (Autoproduction, 2025)

Même les amateurs les plus patients seront surpris du retour des Belges de Deathtura. Le groupe formé en 2013 a livré en 2015 son premier album (Psychotic disaster) avant un second essai en 2018 (Division). Depuis… Silence radio. Pendant 7 années. Jusqu’à l’arrivée de Faith?, le nouvel album paru fin février. Le groupe dit avoir voulu prendre « le temps d’explorer et questionner (son) univers musical pour en extraire le réel sens de (ses) idées« . Le résultat est là, brutal et direct. Teinté de touches industrielles, les 10 titres taillent dans le gras sur fond de chant enragé (Bastian Flames) soutenu par la rugosité des guitares tenues par Arnaud Bomans et Jeffrey Limage. Malin, Deathtura ne se contente pas que de foncer dans le tas, proposant des rythmes toujours puissants et variés (Guillaume Jacques à la basse et Niko Mike D. à la batterie) et des choeurs à faire chanter les foules. Si les Belges ne cherchent pas la finesse, leur propos s’avère rapidement bigrement efficace et explosif. Un retour qu’il faut désormais confirmer sur scène sans doute.

BOMBER: Cages and windows

France, Thrash (Autoproduction, 2025)

Quand on choisi pour patronyme Bomber, impossible pour l’amateur de ne pas penser à Motörhead. La promesse est belle tant le groupe de Lemmy a eu – et a encore – une influence déterminante dans l’univers du metal. Le groupe fut formé à Lille en 2013 et a déjà proposé un premier album, Sommation, en 2018. En 2023, alors en plein enregistrement de son nouvel album, Bomber voit Hugo Belval, son bassiste d’alors, quitter le projet. Il est rapidement remplacé par Léo Vuylsteker qui rejoint ainsi le guitariste/chanteur (« hurleur enragé » même) Jürgen Wattiez, le guitariste Vianney d’Alessandro et le batteur Romain Iricio. C’est ce line-up qui finalise l’enregistrement et nous propose aujourd’hui l’explosif Cages and windows. Alors, on passera sur l’anglais à ch..r pour mieux se concentrer sur le propos musical qui lui cartonne sévèrement! Autant influencé par le thrash de la Bay Area des incontournables Slayer/Metallica/Exodus que celui plus moderne et destructeur de Nuclear Assault ou Sepultura ou que par le hardcore new-yokais de Cro-Mags ou Agnostic Front, le quatuor nous propose 11 titres aussi directs qu’efficace. Oh, cette batterie à la « Dave Lombardo meets Phil Taylor« , oh, ces riffs tranchants à la « Kirk Hammett visits Kerry King« ! Et que dire de cette saine et libératrice brutalité qui sait également puiser un peu de calme reposant auprès des géants du heavy metal 80’s, Motörhead ou Priest en tête. Bomber parvient à mixer l’ensemble de ses influences pour offrir un résultat d’une redoutable et explosive efficacité. « Somme heads are gonna roll », chantait Halford? Des nuques vont aussi se briser ! Cages and windows est sans conteste la première grosse claque de cette année 2025.

OBJECTOR: Slave new world

Belgique, Thrash (Ep, Autoproduction, 2024)

Formé en 2007 du côté d’Antwerp, nos voisin belges d’Objector ont déjà un album à leur actif, Social intolerance paru en 2018. Six ans après (encore des pas pressés de proposer des nouveautés…) et sans doute après quelques modifications du line-up d’origine, les thrashers se rappellent à notre bon souvenir avec un Ep aussi court que brutal. Une fois l’intro passée (qui nous apprend, attention, exclusivité!, que Bock, guitariste et chanteur veut mâcher du bubble gum), Slave new world est une explosion de colère non contenue qui évoque tout au long des 4 titres le thrash le plus vindicatif de la Bay Area. On pense naturellement à Exodus, Death Angel ou encore Slayer – cette batterie explosive à la Dave Lombardo! – mais également à Tankard, compatriotes d’Objector aussi férus de thrash que d’humour potache (et de bière, « occasionnellement ») – on appréciera les chaussettes claquettes au verso du cd… Que du bon goût! Musicalement, cependant, rien à redire: les guitares charcutent à tous les étages autant que la voix hurle sa colère sur fond de rythmiques qui pilonne un champ de bataille. C’est direct, franc du collier, dans ta face et ça décrasse quelque peu les oreilles. Une bonne claque pour se réveiller en douceur…

Interview DEATH DECLINE

Interview Death Decline. Entretien avec Fab (guitare) le 25 octobre 2024

Nous allons parler de votre nouvel album, Patterns of an imminent collapse. Mais d’abord, commençons avec ceci pour les observateurs : il s’agit de votre quatrième album – sortis en 2015, 2018, 2021 et cette année. Un album tous les 3 ans donc. C’est un rythme que vous vous êtes donné ?

Ouais, exactement (rires) ! Non, pas du tout, c’est surtout lié au rythme auquel on parvient à produire les albums, le temps qu’il nous faut pour composer assez de titres. C’est le rythme qu’on arrive à assurer plutôt qu’un « plan ». Toujours est-il qu’on essaye d’être régulièrement présent et d’avoir toujours quelque chose à proposer, de ne pas se faire oublier trop longtemps de manière à rester dans la tête des gens…

Trois ans, même si c’est un peu long, ça reste un rythme qui permet aux gens de savoir quand attendre de la nouveauté…

Après, comme tu le dis, nos quatre albums sont sortis avec ce délai, mais ce n’est pas quelque chose à quoi on tient particulièrement. Peut-être que vous aurez des surprises à l’avenir…

Que peux-tu nous dire au sujet de ce nouvel album pour nous convaincre d’aller l’acheter ?

Si tu aimes le thrash moderne avec une pointe de death metal, avec un son bien catchy et puissant… Eh bien, écoutes : cet album peut te plaire… Ça décrit un peu cet album.

C’est vrai que vous êtes dans une veine thrash très costaud, plus proche même du death. Tu aurais d’autres termes à utiliser pour décrire votre musique à quelqu’un qui ne vous connait pas ? Quand j’écoute cet album, ce n’est pas que du « bourrinage », il y a des aspects un peu plus… « mélodiques » …

Tu peux le dire, on a toujours incorporé dans nos albums des éléments qui peuvent être taxés de « mélodiques ». En soit, ce n’est pas une insulte. On tient toujours à amener ce côté, ça fait partie du son de Death Decline d’apporter des riffs mélodiques et des passages plus cools. Le but, ça n’a jamais été de proposer des albums qui bourrinent du début à la fin… Ce ne sera jamais dans l’optique du groupe, et comme tu le dis, il y a encore sur cet album pas mal de passages mélodiques qui alimentent des moments plus durs, pour les mettre aux standards de Death Decline.

Comment analyses-tu l’évolution de Death Decline entre A silent path, votre album précédent, et Patterns of an imminent collapse ?

Entre les deux, je pense que nous avons une évolution assez constante et logique. On ne force pas les choses, ça se passe assez inconsciemment. On a du mal à analyser les choses de manière plus techniques, on compose comme on le sent, pas en pensant à un moule ou un style musical en particulier. A partir du moment où on aime bien un riff, on compose un morceau à partir de ce riff. Ça amène des palettes vocales différentes, en fonction des morceaux et des sujets qu’on traite. C’est quelque chose d’assez naturel… Au niveau sonore, aussi, on a encore évolué un peu. C’est vrai que l’album peut paraitre plus direct et en même temps plus mélodique… En tout cas, on est totalement satisfait de l’évolution du groupe et de ce nouvel album.

Il y a un certain équilibre puisque le groupe n’a pas changé de line up ces trois dernières années. En revanche, The silent path est sorti en pleine crise sanitaire qui peut avoir eu un impact. Cette dernière a-t-elle eu un impact sur votre façon de faire ?

Je ne pense pas, pas dans les titres qu’on compose… Je pense plus dans notre méthode de travail et de composition : on avait dû s’adapter à l’époque et on a conserver certaines façons de faire. On s’est rendu compte qu’il y avait des choses qu’on avait mises en place pour The silent path qui fonctionnait plutôt pas mal – entre autres le fait de travailler les préproductions chez nous, bien avant l’album, chose qu’on ne faisait pas sur les deux premiers albums. On s’est un peu formés sur le sujet, on a investi dans du matériel pour faire des préprods chez nous et ça nous apporte quelque chose qu’on n’avait pas avant : une idée plus précise de comment el morceau va sonner avant d’entrer en studio.

Quels sont les sujets dont vous traitez ? Un titre comme celui de cet album (Les signes d’une chute imminente) c’est très positif, très enthousiasmant comme notion…

(Rires) Ben, écoute, j’ai envie de te dire qu’on ne fait pas du funk non plus (rires) ! Les sujets qu’on abordent ? Globalement les comportements humains, dans leurs mauvais côtés… Ça peut être au niveau social, écologique, des sentiments… On brosse un portrait qui peut paraitre pessimiste, nous, on a plutôt l’impression qu’il est réaliste. Comme je sais qu’Alexis, au chant, a tendance à écrire des paroles pour quelles soient libres d’interprétation pour l’auditeur. Il va composer se paroles d’une manière ouverte à l’interprétation.

Y a-t-il des thèmes qui selon toi, selon le groupe, n’ont absolument pas leur place dans Death Decline ?

Je pense que pour traiter d’un sujet il faut déjà qu’on soit tous à peu près raccord pour le traiter. On est plutôt ouverts à parler de tout, il n’y a pas de tabou. Je n’ai pas un sujet en tête qu’on n’évoquerait pas… On n’évoquera pas frontalement la politique. On n’est pas apolitique mais on ne donnera pas notre avis, ce n’est pas la vocation du groupe. Ce n’est pas le propos du groupe de partager des opinions politiques.

On parle de la pochette un peu ?

Oui…

Je pense que personne n’a dû vous le dire, mais elle m’évoque un peu celle de Quadra de Sepultura, surtout le verso qui représente un crane. Il y avait une volonté de faire un clin d’œil à Sepultura ?

Alors, vu que Sepultura a annoncé sa fin de carrière après ce dernier album, c’était purement volontaire pour prendre leur place sur la scène internationale (rires) !

L’ambition est là, claire et précise !

Tu parles au futur Andreas Kisser (rires !) Non, non, pas du tout ! On a déjà dit à Alexis, notre chanteur, qu’il ressemble à Max Cavalera, ça reste raccord ! Plus sérieusement, on reste clients et fans de Sepultura mais on n’a pas pensé à cet album au moment de faire faire l’artwork par Stan W. Decker, qui s’occupe de nos pochettes depuis le premier album. L’idée, c’était d’avoir quelque chose de thématique, une sorte d’écusson, une plaque de marbre… Quelque chose de frontal, un emblème… On n’avait pas, au départ, évoqué la pièce de monnaie mais ça rentrait dans les codes. Quand Stan nous a proposé cet artwork, on l’a trouvé tellement efficace qu’on est resté dessus, on n’a pas changé. On se doutait bien que le rapport avec Sepultura se ferait mais il n’y avait pas une volonté de s’influencer d’eux…

Surtout que le personnage que l’on voit de profil est identique à celui de The silent path – j en’ai pas les autres pochettes sous les yeux. C’est une sorte de mascotte ce personnage cornu ?

Oui, si tu regardes les deux premiers albums, tu verras qu’il est également présent, de façon plus humaine, plus… distinct. Sur The silent path, il est plus comme une statue, une divinité qui s’élèverait au-dessus des hommes. C’est un peu une mascotte et c’est une volonté de notre part de conserver ce personnage avec des cornes qui peut apparaitre sous plusieurs formes. C’est quelque chose d’assez classique sur la scène metal que d’avoir un personnage récurent qui apporte une identité visuelle.

Au verso, à la place du cou, il y a une sorte de mappe monde qui est, j’imagine, en lien avec le titre de l’album…

Euh, ouais… alors là, si tu veux… On a donné toute notre confiance à Stan qui a travaillé de concert avec Alexis pour créer toute une identité visuelle qui comme vraiment aux sujets abordés.

Si tu devais ne retenir qu’un titre de ce nouvel album pour expliquer aux gens ce qu’est aujourd’hui Death Decline, ce serait lequel ?

Elle n’est pas facile, ta question, parce que l’album a été composé pour que chaque morceau soit complémentaire, du coup, chaque morceau apporte quelque chose au spectre sonore de Death Decline et de cet album… C’est vrai que ce n’est pas une question facile…

Tu as 5’ pour me convaincre d’écouter le reste de l’album…

(Rires) Alors, sur Towards void and oblivion tu trouves beaucoup d’éléments qu’on aime développer : de la mélodie, des changements de rythmes, d’ambiances, des riffs thrashy bien rentre dedans… C’est un morceau qui est catchy, brutal, en même temps mélodique et incisif. Je pense qu’il représente plutôt bien ce qu’on est capables de faire… Sinon, tu as aussi un morceau comme…

Non, non ! Je n’en ai demandé qu’un ! Ne cherchez pas à négocier, Monsieur, ça ne marche pas ici !

(Rires) Alors Towards fera l’affaire !

Quels sont les 5 albums que tu as le plus « bouffés », usés jusqu’à la corde dans ta vie ?

Il y aura, concrètement, en premier lieu Ride the lightning de Metallica – ça reste mon album fétiche tous groupes confondus – Il y a aussi Bonded by blood d’Exodus…

On est dans les origines du thrash…

Ouais, exactement. Je suis plutôt fan de thrash, on va dire que c’est moi, le « parrain thrash » du groupe… Ensuite, il y a Defenders of the faith de Judas Priest. Après, qu’est-ce qu’il pourrait y avoir ? Le premier Led Zeppelin ? Oui, carrément… Il y a aussi… Leprosy de Death, et sans doute Killers d’Iron Maiden que j’ai énormément écouté étant jeune…

Ça en fait six…

Ouais, ben… tu choisiras (rires) !

Monsieur est dans la négociation aujourd’hui ! On le sait, un groupe de rock en France, d’autant moins de metal et encore moins dans votre style, ne vit pas de sa musique, ou très rarement. Quelles sont vos autres activités dans vos autres vies ?

Moi, je suis électricien du bâtiment, Alexis est chef cuistot, il tient une cave à bières et une taverne rock/metal sur Châlons sur Saône. Alex, à la basse, est mécanicien de formation, Jordan, à la guitare, est informaticien, et Arnaud, notre batteur, est pour l’instant ouvrier viticole.

Vous avez des concerts prévus pour les mois à venir ?

Là, on a pas mal enchainé… On était le week end dernier à Martigues pour une super date, on a fait la Vapeur à Dijon, le Ferrailleur à Nantes pour la release party… On bosse d’arrache-pied pour composer une tournée digne de ce nom pour 2025… Vous allez pouvoir nous voir aux quatre coins de la France en 2025 !

Il n’y a pas que les coins, en France, il y a tout l’intérieur ! Moi, je suis carrément dans le Centre…

Tu veux qu’on joue où, du coup ?

Je suis à Orléans.

Ça fait partie des villes qu’on essaye de faire depuis un moment. Ça devrait se faire…

Pour terminer, si tu devais penser à une devise pour Death Decline, ce serait quoi ?

Je ne sais pas… C’est peut-être classique mais je dirai « Strike hard, strike fast »

Interview BONE RIPPER

Interview Bone Ripper. Entretien avec WD Glashouwer (chant). Propos recueillis par Zoom le 10 octobre 2024.

Comme c’est la première fois que nous échangeons, peux-tu me raconter l’histoire de Bone Ripper ? D’où venez-vous, quand vous êtes-vous formés, pour quelle raison ?

WD : Beaucoup de questions ! Nous venons du nord des Pays-Bas, nous sommes originaires de Harlingen. Bone Ripper est né il y a maintenant deux ans, mais le groupe n’est pas si jeune que ça. Nous faisions partie d’un groupe avant, Manu Armata, un groupe hardcore qui a démarré en 2007. Le groupe était composé de 4 personnes – un batteur, un bassiste, un guitariste et moi au chant. Le guitariste a décidé d’arrêter et on s’est demandé si on cherchait un autre guitariste pour continuer avec Manu Armata ou si on décidait de laisser tomber le groupe pour faire autre chose…  Ce que nous avons décidé, c’est d’intégrer deux nouveaux guitaristes, il y a toujours le batteur, le bassiste et le chanteur d’origine. Pour nous, il s’agissait d’une nouvelle opportunité puisque nous avions passés 15 ans avec seulement un guitariste, nous avions développé une certaine forme de hardcore et là, nous avons eu l’occasion de faire les choses… pas différemment, mais avec plus de possibilités puisque nous avons choisi de travailler avec deux guitaristes. On peut explorer d’autres horizons. Aussi, le guitariste de Manu Armata était un membre fondateur, alors on a décidé de ne pas continuer sous ce nom. On ne veut pas finir comme ces groupes qui n’ont plus qu’un membre original et continuent d’utiliser le même nom. Donc, on a choisi de devenir Bone Ripper. Le groupe n’a certes que 2 ans d’existence mais dans la réalité, nous avons près de 17 ans d’expérience !

Comment décrirais-tu la musique de Bone Ripper ?

Nous, on appelle ça du hardcore metallique ! C’est toujours du hardcore mais il y a plus d’éléments, d’influences metal, comme les riffs de guitares, la double grosse caisse… Avant, on était plus dans l’esprit direct des groupes de hardcore new-yorkais.

Quand j’ai écouté votre album, j’ai perçu beaucoup d’influences thrash, Exodus, Metallica, Slayer, tout ce metal de la Bay Area mélangé au hardcore…

Oui, je vois ce que tu veux dire. Je pense que pour beaucoup de ces groupes, le chanteur a une influence sur le genre. Je suis un chanteur hardcore, et j’ai le sentiment d’avoir un certain flow, je cherche des airs sur lesquels le public peut chanter avec nous, on fait souvent ça dans le hardcore. Si tu écoutes le metal plus classique, il y a plus de cris, moins « d’hymnes ». C’est une chose fondamentale dans le hardcore. Notre guitariste vient du metal, et je pense qu’il est très inspiré par ces groupes de thrash old school, comme il est attiré par des groupes plus modernes, bien sûr. Il y a une vraie combinaison de tout ça chez nous, et j’entends souvent les gens me le dire. Je ne peux le nier, il y a des influences thrash. Mais, tu sais, pour moi, il est toujours difficile de placer une étiquette sur ta musique.

C’est en tout cas de l’énergie pure. Cet album est rapide, puissant, énergique et direct. Il dure à peine 25’.

Je sais ! Il y a beaucoup d’albums metal avec de chansons qui durent 5 ou 6’. Dans le hardcore, on peut même avoir des titres qui ne durent qu’un ou deux minutes (rires) ! L’album n’est pas long mais il dure selon moi juste ce qu’il faut.

La première fois que je l’ai écouté, j’en attendais plus. Je me suis dit : « quoi ? Déjà fini ? » J’en voulais plus !

C’est plutôt un bon signe, non ? Je veux quitter les gens quand ils en veulent un peu plus. Je l’ai vécu aussi, il y a des disques dont tu voudrais entendre plus de choses. Mais il y a aussi ceux où, après six ou sept chansons, tu décroches. Il y a tant d’album avec, quoi ? Huit chansons, plus une intro, un interlude, donc il y a dix titres mais seulement huit chansons. Les gens, quand ils aiment, ils en veulent toujours plus, et c’est toujours bon à entendre.

D’après ce que je sais, il y a 3 frères dans le groupe.

C’est exact, oui.

Comment travaillez-vous ensemble ?

Ça va tout seul. Visiblement, je suis un de ces frères (rires) ! L’un des guitaristes est mon frère, et le batteur est mon plus jeune frère. Il était également l’un des fondateurs de Manu Armata, donc je jouais déjà avec lui depuis 15 ans. Avec mon autre frère, je jouais dans un autre groupe en tant que bassiste quelques années. Tu sais, quand il y a ce genre de fratrie, on écoute souvent le même genre de musique, on fait partie de groupes. On n’a jamais vraiment eu l’occasion de faire quelque chose ensemble alors on s’est dit que ça pouvait être l’occasion de pouvoir, enfin, jouer ensemble entre frères ; Le truc marrant, c’est que le guitariste qui a quitté Manu Armata est revenu un an plus tard, a réintégré le groupe parce que le guitariste qui jouait dans Bone Ripper avec mon frère a fait un burn-out et il ne pouvait plus continuer. Donc j’ai demandé à notre ancien guitariste… Tu sais, j’ai bossé avec lui dans deux ou trois groupes, on a commencé ensemble quand j’avais 13 ans, j’en ai aujourd’hui 44… On fait de la musique ensemble depuis près de 30 ans et, en fait, c’est un peu comme si lui aussi était un autre de mes frères.

C’est donc plus une fratrie qu’une dictature, Bone Ripper…

Exactement. Il n’y a pas le big boss du groupe. Quelqu’un doit s’occuper du business et tout le monde suit. Mais si quelqu’un n’est pas d’accord, nous en discutons. Il n’y a jamais de clash, ça marche très bien comme ça.

Un groupe de rock, est aussi destiné à jouer sur scène. Quelle est la situation de Bone Ripper de ce point de vue ? Est-ce que le nom de Bone Ripper a fait son trou et avez-vous la possibilité de donner des concerts et quels types de shows donnez-vous ?

Manu Armata était un nom assez connu sur la scène métal des Pays Bas, on a aussi beaucoup joué en Europe. Maintenant, ce n’est pas comme si on l’avait simplement remplacé, mais c’est plus facile pour nous, en tant que groupe, de ne pas avoir à tout recommencer et jouer dans des pubs ou au bar du coin de la rue devant trois personnes. Non, ça a plus été : « oh, ils ont un nouveau groupe ? Qu’ils viennent jouer ici ! » Ça a donc été relativement plus facile, et on a déjà donné beaucoup de concerts par ici, dont des festivals, mais aussi en Allemagne… Les gens commencent à citer le nom de Bone Ripper grâce à ces concerts.

Avec un album qui ne dure que 25’, j’imagine que vous intégrez aussi quelques titres de Manu Armata dans vos sets ?

Non, non ! En fait, si, on en joue un (rires) ! Mais c’est juste parce que l’ancien guitariste est revenu. En gros, ce que nous sommes aujourd’hui, c’est Manu Armata avec un guitariste de plus ! Lorsqu’il est revenu, nous avons décidé d’intégrer une chanson de notre ancien groupe. Mais nous avons aussi sorti l’an dernier, en janvier, un Ep de 6 titres, donc on a celles-ci et le 8 titres de l’album. Quand on s’est lancé dans l’aventure Bone Ripper, nous devions nous assurer d’avoir suffisamment de nouveau matériel pour pouvoir donner des concerts. Nous ne voulions pas nous retrouver en studio de répètes pendant deux ans avant de pouvoir jouer. Quand on a commencé, on avait déjà des chansons composées et on a décidé de faire un Ep qui permettait aux gens de découvrir le groupe avant de venir en concert. On a immédiatement commencé à travailler sur notre album, World ablaze, immédiatement après.

De quoi traitent les paroles de l’album ? Son titre est déjà très explicite…

Je parle de beaucoup de choses… Le titre de l’album est, comme tu le dis, un message en soi. Les guerres qu’il y a dans le monde, les politiques de droites qui montent partout, le réchauffement climatique, la discrimination… Je travaille ces thèmes individuellement et il y a une autre partie de mes paroles qui sont assez négatives mais je ne veux pas que les gens ne voient que le côté négatif. Alors j’écris aussi des textes au sujet de victoires dans nos vies, de victoires dans nos combats, face à l’adversité. Ce ne sont que des choses que je vis et rencontre, des évènements qui se produisent autour de moi, dans le monde…

Y a-t-il des paroles ou des thèmes qui n’ont pas leur place chez Bone Ripper ?

Non, je ne crois pas. J’écris sur des thèmes qui me concernent. Je n’évite rien, je ne me dis pas que je ne peux aborder tel sujet… J’écris avec mon cœur.

Et les autres membres du groupe, de cette fratrie, ont-ils un mot à dire s’ils ne sont pas d’accord avec les paroles ?

Oui, bien sûr, s’ils ne sont pas d’accord, on peut en parler. Mais jusqu’à présent, ils sont d’accord avec ce que j’écris. Aussi, lorsque j’écris, on se retrouve et je leur explique le thème, ce que les paroles signifient pour moi, le pourquoi et le comment de ce texte. Tu sais, on est 5 dans ce groupe et chacun, naturellement, a son opinion. Nous allons cependant dans le même sens, ce n’est pas comme si dans le groupe il y avait quelqu’un d’extrême droite et quelqu’un d’extrême gauche. Il y a des perceptions différentes, mais on a des idées communes à la base. Depuis tout ce temps, ils me connaissent et savent ce que je pense. Bien sûr, si je commençais à écrire des texte sur la suprématie blanche, ils me demanderaient tous « mais c’est quoi cette merde ? »  (rires) !

Pour quelqu’un qui ne vous connait pas, si tu devais ne retenir qu’un seul titre de World ablaze pour expliquer ce qu’est Bone Ripper aujourd’hui, ce serait lequel ? Celui qui vous représente le plus.

Je pense que ce serait Fear of death. Il y a tous les éléments musicaux qu’on trouve chez nous, et, en ce qui concerne les paroles, elles semblent sombres mais dans l’ensemble c’est une chanson assez positive. L’un dans l’autre, c’est un choix qui montre ce qu’on cherche à faire la plupart du temps.

Je ne connais pas la situation musicale aux Pays-Bas excepté pour certains groupes. Vous vivez de votre musique ou avez-vous d’autres métiers à côté ?

Bien sûr, on travaille à côté. Personnellement, j’ai un studio d’enregistrement à côté, c’est ma principale source de revenus, mon occupation principale. Les autres ont aussi un travail régulier. Notre batteur est graphic designer, il travaille pour une agence marketing, il réalise des logos et des sites web. Eric, notre guitariste, travaille pour une entreprise qui fabrique des gros appareils frigorifiques. Mon frère, l’autre guitariste est un manager pour une industrie agro-alimentaire, des produits laitiers…Le bassiste fait différentes choses : on partage le studio d’enregistrement, il fait aussi du commerce en ligne dans la fabrication de mobilier en bois, et il travaille en free-lance pour une entreprise qui fabrique des gobelets en plastique, ceux que tu trouves en festivals. C’est une entreprise qui collabore avec la plupart des grandes équipes de foot aux Pays-Bas et de grands festivals.

Quels sont maintenant les 5 albums que tu as le plus écoutés dans ta vie ?

Waow ! Pour moi, tout a commencé avec Madball, Demonstrating my style. Un autre album qui m’a beaucoup influencé, c’est In this defiance de Strife. Ensuite… j’écoute beaucoup de hardcore des 90’s, mais ces 2 dernières années j’ai vraiment craqué pour Straight From The Path, Lionheart est aussi un des groupes que j’apprécie. Comme je fais beaucoup de production, j’écoute beaucoup d’albums dont j’aime le son. Oh, c’est une question difficile (rires) !

Je l’aime bien ! Retourne dans ton passé, c’est là qu’on les trouve généralement…

Oui… Il y a bien les premiers albums de Terror… Hatebreed, aussi, j’écoute beaucoup Hatebreed. Mais j’écoute aussi beaucoup de punk et de skate punk… Maintenant, le plus important pour moi reste Madball, c’est le groupe qui m’a donné envie de me lancer.

Quels sont les projets de Bone Ripper pour 2025 ?

Le principal, comme toujours, c’est de pouvoir donner de bons concerts et rencontrer des gens. Nous sommes 5 avec chacun des obligations, ce qui nous empêche d’organiser une grande tournée. Mais pour 2025, on voudrait faire quelques festivals, ce qui est en cours, et on voudrait aussi pouvoir tourner en Allemagne, au Danemark, un peu plus à l’étranger, un ou deux week-ends.

Vous avez signé avec une agence de booking ?

Non… Manu Armata avait signé avec un label français je crois, mais avec Bone Ripper, nous avons décidé de tout faire nous-mêmes. Nous avons simplement recruté Mike (Mike de Coene, Hard Life Promotion) pour s’occuper des relation médias pour nous. Pour le reste, c’est nous qui faisons tout.

As-tu quelque chose à rajouter ?

Non, merci pour cette interview, c’était une conversation sympa. J’invite simplement les gens à écouter notre album – on peut le trouver sur Spotify…

Et achetez l’album !

Oui, achetez-le, mais si vous ne le pouvez pas, écoutez-le sur Spotify, ça nous rapportera 0,0001 euro. Si les gens apprécient l’album, c’est le principal. Si vous pouvez venir nous voir en concert, si vous pouvez nous booker pour un concert aussi, nous serons là !

Séance de rattrapage: EXA: Left in shards

Allemagne, Thrash (Autoproduction, 2024)

Ils ne sont pas là pour rigoler, nos amis allemands de Exa! Dès les premières mesures de Return to madness, les Berlinois nous font entrer dans leur boucherie sanglante. Le riff est tranchant autant que rapide et précis, le chant rugueux et la rythmique martèle sans relâche. On pense immédiatement à une rencontre entre Slayer, Exodus et Testament pour les (une partie des) influences d’outre-Atlantique, et à Sodom ou Kreator, grands pourvoyeurs et défenseurs du thrash teuton. Exa sait cependant varier ses plaisirs – et le notre – en proposant des titres aux tempi variés, et cette alternance permet de ne pas fatiguer l’auditeur trop rapidement. Formé au lycée en 2016, le groupe sort Ignite en 2018, Ep leur valant d’être élu meilleur espoir par les lecteurs de Metal Hammer et lui donnant par la suite l’opportunité d’enregistrer un premier album, Cut the past. Aujourd’hui composé du guitariste chanteur Tom Tschering du guitariste rythmique Johannes Lortz, du bassiste Tamino Bosse et du batteur Leon Pester (aucun lien familial connu avec notre Lorie nationale !) Exa démontre, et avec quel brio, sa maitrise et son amour du thrash old school. La production sans faille est moderne tout en rendant hommage à l’esprit conquérant 80’s, Exa apportant sa personnalité (une basse slappée dans le thrash, pas si fréquent, hein?) Le sérieux du groupe lui a permis de signer avec un tourneur en 2023. Espérons que ce dernier permette au quatuor de franchir les frontières afin de nous rendre visite. Un espoir à prendre très au sérieux. EN tous cas, la relève est assurée!

Séance de rattrapage: BONE RIPPER: World ablaze

Pays-Bas, Thrash/Hardcore (Autoproduction, 2024)

Amis mélomanes amateurs de douces harmonies, laissez moi, je vous prie, cordialement vous inviter à passer votre chemin. Car en à peine 25′, les Néerlandais de Bone Ripper – un nom parfaitement adapté – parviennent à transformer votre salon en antre des enfers. Comment ça tabasse sévère! Composé de 10 titres ravageurs, World ablaze a tous les ingrédients pour briser des nuques: des titres expéditifs – pas un n’atteint les 3′ – savamment brutaux et entrainants à la fois, un chant rugueux et rageur, des riffs qui cisaillent et taillent dans le gras… Si le groupe des frères Glashouwer (WD au chant, Jeljer à la guitare et Kees-Jan à la batterie) se définit comme hardcore, les références au thrash des vieux jours sont omniprésentes et parfaitement intégrées. On pense en effet à plus d’une reprise à Slayer (cette batterie à la Dave Lombardo!), Testament , Death Angel ou encore Exodus. L’album laisse l’auditeur exsangue… et on en redemande, un peu frustrés par cette fin qui arrive aussi brutalement que les morceaux nous démontent la tête. Il va sans aucun doute falloir suivre de près ce groupe à qui on ne peut que souhaiter un avenir musical sanglant.

Hellterview: EIGHT SINS

EIGHT SINS @Hellfest 2024

Interview Eight Sins. Entretien avec Arnaud (guitare), Loic (chant) et Mike (basse) le 28 juin 2024 au Hellfest (Clisson)

Pour commencer, une question toute simple : quel est votre retour de votre prestation de ce matin ?

Arnaud : C’était… mortel…

Mike : C’était incroyable…

Loïc : On a ouvert la Warzone à 11 heures, et c’était… incroyable !

Vous avez réveillé la Warzone.

L : Exactement, on leur a mis un bon coup de trique ! Le public était mortel. Magnifique ! Une warzone pleine, donc…

A : Et un public fou, aussi ! Ils ont fait des doubles circle-pits… Merci le Hellfest, c’était incroyable !

Pour vous, c’est une expérience unique, alors ?

Tous : Ah, ouais, c’est sûr !

L : C’était les montagnes russes de l’émotion. Surtout à peine réveillés !

A : On s’est levés à 6 heures…

Vous n’êtes pas arrivés directement de Grenoble ?

A : Non, on est arrivés mercredi.

(A Loïc) : Comment tu as appelé Grenoble ?

L : « La cuvette de chiottes de la France ». Géographiquement, c’est une cuvette, on est entre les montagnes, donc, c’est notre petite blague, on l’appelle la « cuvette de chiottes » entre nous. Mais c’est des toilettes sèches parce qu’on a un maire écolo (rire général) !

Ceci étant, après cette belle presta, quels sont les retours que vous avez eu depuis la sortie, il y a quelques mois, de votre album, Straight to Namek ?

L : On s’était parlé au téléphone à ce moment, et on a eu de bons retours depuis. Le fait qu’on soit là aujourd’hui te prouve qu’il a plutôt tapé là où il fallait. On a plein de festivals prévus, ça bouge beaucoup… De beaux retours !

La suite de cet album est déjà en préparation ?

L : Bien sûr ! On a déjà des compositions prêtes, ça va arriver tranquillement. On y va tranquillement, à notre rythme, parce que ça ne sert à rien de se presser. Chi va piano va sano !

Quand on manie à ce point l’humour sur scène, comme vous l’avez fait ce matin, ça demande beaucoup de travail, de réflexion en amont ?

Mike : Là, tu sais à qui t’adresser (il désigne Loïc)…

Vous avez bien joué le jeu, aussi…

L : C’est mes potes ! On est vraiment un groupe d’amis !

M : On est bon public aussi !

L : C’est mon caractère, je suis quelqu’un de rebondissant, dans tous les sens du terme : rebondi et rebondissant ! Ils me laissent faire, je ne sais pas comment te dire : c’est pas un truc qu’on travaille plus que ça, c’est juste nous… Si on se recroise tout à l’heure, je te raconterai aussi plein de conneries, j’arrive pas à m’en empêcher. C’est peut-être une maladie (rires).

Et au boulot, ça donne quoi ?

L : Ben, heureusement que je fais du tatouage, parce que je peux rigoler avec mes clients. Mais si je devais travailler pour une banque… Je suis un calvaire pour ma collègue de travail – que je fais beaucoup rire et que j’embrasse. C’est compliqué de travailler dans la même salle que moi, mais on se débrouille.

Allez, quelques questions Hellfestives : si vous étiez chacun un animal, vous seriez quoi ?

L : J’aime bien ces questions chelou… Un pangolin. Un genre de pomme de pin mais qui bouge !

A : Et qui refourgue des virus !

L : C’est pas pour les virus, c’est parce que c’est le chainon manquant de la vie, le truc il est chelou. Moi aussi !

M : Comment tu m’appelles, Loïc ? Le suricate ? Parce que j’observe tout… Ça me faisait chier au début mais je crois que ça me va bien, en fait !

L : Il est là, sur son petit terrier… Il scrute…

A : Je sais pas, la bête du Gévaudan…

Un diable de Tasmanie…

L : Ouais, c’est plus un diable de Tasmanie, Arnaud ! En tout cas, c’est un animal !

Si vous étiez un roman ? On passe aux choses sérieuses…

L : Je vais pas te dire Roman Polanski, ça va m’attirer des ennuis…

M : Un Romans sur Isère !

L : Putain, il me l’a piquée ! On a un consortium d’humoristes ! Je crois que je serai un truc que j’ai lu quand j’étais gamin, sur les momies, qui m’avait passionné, je l’avais lu en une heure de temps. Sans doute Victor Hugo, je ne sais plus…

M : Je le dis sinon je vais oublier : je pense que je serai Bilbon le Hobbit.

L : Ouais, c’est un gars de la nature…

A : Tu vois sa barbe ? Il a la même aux pieds…

M : Je suis un peu Gandalf en version comique…

L (à Arnaud) : Et toi, quel roman ?

A : Moi ? Je sais pas lire, alors je ne peux pas répondre à cette question (rires)…

Là, c’est un peu plus dans l’esprit du groupe : si vous étiez un héros non pas de BD mais de manga ?

L : Ah, ça restreint mon choix, du coup !

M : Moi, je serai Vegeta, un personnage de Dragon Ball Z. L’anti héros, en fait…

L : Je serai aussi dans Dragon Ball, je serai Boo, parce que c’est le gars sympa, il mange tout, il est drôle… Et toi ?

A : One Piece, obligé : je serai  Sanji.

Et si vous étiez un film ?

L (sans réfléchir) : je serai Priscilla, folle du désert. Mon film préféré pour les meilleures punchlines du monde ! C’est une histoire de transformistes sur les routes en Australie, et à chaque fois qu’ils ouvrent la bouche, c’est pour recaler quelqu’un. C’est phénoménal ! Du talent à l’état pur.

A : Jurassic parc. Ca m’a tellement marqué quand j’étais gosse…

L : Depuis, il a un kif sur les reptiles…

M : Moi, je serai l’alarme fatale, la parodie de L’arme fatale. Incompréhensible et drôle à la fois.

Si vous étiez un plat alimentaire ?

L : Oh, putain…

A : Un tajine ?

L : Non, pas un tajine, c’est pas mon truc… Ce que je préfère, c’est les ribs. Je dis ça, parce qu’on les voit pas mes ribs, mes côtes, je suis jaloux !

M : Je serai un rougail saucisse, parce que c’est ma spécialité. Ma femme confirme. Pimenté à souhait !

A : Mais faut nous inviter ! Moi, je dirai un Bo Bun, parce que j’adore ça, j’adore la bouffe asiatique !

Une boisson ?

A : Un Jack Daniel’s

L : Un Bloody Mary, bu à la paille. A siroter en soirée, au calme, avec une paille et une ombrelle !

On m’en a filé un, un matin, croyant que j’avais une gueule de bois en me disant « ça va te soigner ».

L : Ça t’a soigné ?

Non… J’avais pas de gueule de bois !

M : Je serai une limonade, référence à Afro Samourai, pour ceux qui connaissent. J’adore la limonade…

Un objet ?

L : Une cuvette de chiotte… Pour voir des visages toute la journée…

A : Une table… Parce que je suis con comme une table, il parait !

M : Un (Note : un truc pas compréhensible à l’enregistrement)

L : Parce qu’il travaille le bois comme personne… Il a touché ma poutre…

Un pays ?

A : La France… J’aime bien la bouffe française aussi.

L : Moi je serai neutre, je serai la Suisse. Parce que c’est joli et ils ont plein de thunes !

M : Je crois que je serai le Guatemala, par ce que… c’est le premier pays qui me vient à l’esprit…

Un monument ?

L : La tour Perret à Grenoble. C’est un peu comme la tour de Sauron, il ne manque que l’œil qui flambe. C’est une belle tour de notre ville.

A : Un monument… Le pont de la Bourg à Bourgoin Jallieu (Note : aucune trace de ce pont trouvée, sans doute une appellation locale ?)

M : je ne sais pas… Un truc transparent…

L : Une vitre ! Il a pas d’idée…

Une devise ?

L : On peut la faire à trois, celle-là : Beers and moshpit  (ils approuvent)

Mais pourquoi la bière ?

M : Parce que tu ne vas jamais dans un moshpit sans ta bière.

L : Tu pogotes et tu la renverses. Après, tu vas en acheter une autre. C’est ça, l’économie de festivals, ils le font exprès !