Interview: MAGOYOND

Entretien avec Bruno (MAGOYOND) – entretien réalisé le 9 novembre 2022

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Metal-Eyes.com: Kryptshow est sorti en 2019, c’est un double album et celui avec lequel j’ai découvert votre univers. Justement, comment le décrire, cet univers de Magoyond ?

Bruno: C’est une bonne question parce qu’on n’arrive pas nous-mêmes à nous mettre dans une case… On est très fans de tout ce qui est « horreur » ou horrifique, que ce soient des choses qui font peur ou d’autres plus légères comme l’univers de Tim Burton…

Un peu « Contes de la crypte »…

Complètement, et le nom du précédent album vient entièrement de là, entièrement inspiré de cette série qu’on regardait à la télé étant gamin, avec sa mascotte en plastique qui veniat et présentait les épisodes. Magoyond, je le classerais dans le metal, le cinéma d’horreur et fantastique. C’est plusieurs choses qui font que ce groupe est aujourd’hui.

Si tu devais décrire la musique de Magoyond à quelqu’un qui ne vous connait pas du tout, tu en dirais quoi ? Il y a ce côté légèrement horrifique, mais la musique ?

On s’efforce maintenant d’envisager chaque chanson comme une histoire différente. Une histoire dans laquelle on cherche à faire rentrer l’auditeur ; On reste dans la thématique metal, avec des grosses guitares, un gros chant, mais avec un petit plus. Il va y avoir de l’orchestration, une petite chorale… On inclut plusieurs styles et quelqu’un qui, à la base, n’écoute pas de metal va pouvoir être transporté. On pense un peu notre musique comme une BO de film, on essaie de transporter l’auditeur vers ce que lui va pouvoir imaginer.

Il y a effectivement ce que lui peut imaginer, mais Necropolis est surtout une histoire qui lui est racontée, il y a de la narration. Julien met en place tout l’univers un peu inquiétant et accessible à tous les publics.

Exactement, et tu fais bien de le préciser parce qu’on s’en rend vraiment compte avec les concerts, on a aussi bien des enfants que des parents… Il y a toutes les tranches d’âge possible. On n’a pas encore eu de morts-vivants… l’album est sorti le 28 octobre, et il nous a semblé évident de faire une double date pour halloween pour la release party. Ça s’est fait au Zèbre de Belleville à Paris, les 31 octobre et 1er novembre dans une thématique qui correspond à 100% à ce qu’on veut faire.

Justement, un concert de Magoyond, il faut s’attendre à quoi ? C’est tellement imagé comme musique qu’on peut imaginer que vous développez un univers particulier sur scène…

Oui, on est un peu obligés… Il y a plus que de la batterie/basse/guitare et chant, et sur scène, malheureusement, on ne peut pas faire entrer tout le monde, sinon il faudrait le Stade De France, et on n’en est pas encore là. Magoyond sur scène ? En gros, on reproduit ce qu’on a sur album, avec un show lumières et des ambiances pour accompagner notre musique. Aussi, tout ce qu’on entend sur l’album, on va le retrouver sur scène : ce qu’on ne peut pas faire directement en live – les chœurs, l’orchestre – on le fait sur bandes, que tout soit vraiment callé à la perfection. On veut coller au maximum à ce qu’on a enregistré.

Puisque nous avons abordé le sujet, Necropolis est sorti il y a quelques jours. Trois mots : vends-le-moi.

Alors… Folie, émotion, allez un troisième…

Non, « en trois mots » : Vends. Le. Moi. Toi, tu peux utiliser des phrases si tu veux ! Je me suis mal exprimé !

Oui, c’est toi qui as dit 3 mots ! Alors, pour faire simple, avec Kryptshow, on avait placé la barre assez haute, on est aussi passé par le financement participatif pour l’album. On avait pensé avoir atteint un palier musicalement, et en fait, le guide de Necropolis c’était de faire mieux et plus aboutit, et faire ce dont on rêvait depuis des années : travailler avec l’orchestre. Là, c’est du Magoyond puissance 1000 parce qu’il y a eu un travail de fignolage tel… Quelqu’un qui découvrirait, je dirais « venez écouter et découvrir le travail de gens passionnés ». On s’efforce de faire mieux à chaque album.

Alors « mieux » et « plus abouti », « du Magoyond puissance 1000 » ; vous voulez faire mieux à chaque album… C’est le troisième, vous avez de l’ambition et c’est très bien. Mais si on a là du Magoyond puissance 1000, le prochain, ça va donner quoi ?

Ben, Magoyond puissance 10.000 ! On fera tout pour, en tous cas. Là, on est déjà super contents du résultat et on réfléchit déjà à la suite, mais pour le moment, l’heure est à défendre Necropolis sur scène. Ce sera déjà une belle chose.

Tu viens de nous parler de l’esprit de Magoyond. Si tu devais ne retenir qu’un titre de Necropolis pour expliquer à quelqu’un qui ne vous connait pas ce qu’est Magoyond, lequel serait-ce ? Pas to préféré, le plus représentatif.

Avec un seul titre ? Je t’en aurais bien donné deux…

C’est pour ça que je ne t’en demande qu’un.

Oui, bien sûr. Je pense que ce serait la chanson éponyme, Necropolis, qui reprend des thèmes de nos anciens albums autant que de celui-ci, tant musicalement que dans la narration. Ce n’est pas le morceau le plus complexe mais je pense que c’est celui qui vient le plus s’inscrire dans la ligné de ce qu’on a fait depuis nos débuts et ce vers quoi on se dirige. Il y a le côté narration, le côté metal…. Necropolis serait le plus représentatif de ce qu’on fait aujourd’hui.

Une chose m’intrigue, vous l’avez depuis longtemps, c’est ce Z. Il représente quoi ?

Ça remonte à Pandemia, notre premier album et c’est lié à l’histoire avec notre mascotte Hector Zam. C’est en fait le virus Z, qu’on pourrait décrire comme un virus zombie, mais aussi, on retrouve le Z de Zam. C’est le fameux virus qui a commencé a décimé la population dans tout l’ordre Magoyond décrit dans nos trois albums.

Et il y a un autre « virus » qui veut décimer la population ukrainienne et qui s’identifie aussi avec un Z…

Ça, malheureusement… Nous, on était là avant… C’est le fruit malheureux du hasard, les Russes se sont approprié cette lettre, mais que les gens soient rassurés, nous n’avons aucune affiliation, nous ne faisons que de la musique, pas de la politique (rires) !

Vous avez travaillé avec un orchestre sur plusieurs morceaux. Comment avez-vous travaillé ensemble et comment les avez-vous convaincus de travailler avec vous ?

Dans le groupe, on a Aspic, le bassiste actuel, qui, en dehors de Magoyond, est un vrai musicien professionnel. Ce qui implique qu’il sait aussi bien diriger un ensemble, un orchestre que, et c’est lui qui s’en occupe, de se charger de la prod, des enregistrements aux arrangements. Aspic, c’est vraiment l’homme à tout faire. Pour cet album, on est passé d’un orchestre numérique à du « full » orchestration. Il a tout simplement écrit les partitions. On a démarché des centres où on peut enregistrer des orchestres. Là, c’était à la Seine Musicale qui a des orchestres à disposition avec qui on se met d’accord sur le nombre de musiciens nécessaires, la durée de jeu… Ça s’est fait comme ça. Le jour de l’enregistrement, Aspic arrive avec les partitions, les musiciens sont briefés, il enregistre le tout depuis sa cabine, il écoute, est-ce bien joué comme ce qu’il imaginait, il va voir les musiciens pour quelques directives… C’est vraiment lui qui a dirigé toute cette partie symphonique et sans lui, on n’aurait pas ce résultat.

Contrairement à ce que tu disais, là, c’est plus qu’une « petite chorale »…

Non, en effet, mais je ne sais pas exactement combien de musiciens il y avait. Tu peux les compter, si tu veux, ils sont sur le livret…

On peut imaginer que vous souhaitiez, à terme, pouvoir présenter un concert avec tout ce monde sur scène. Y a-t-il quelque chose de prévu en ce sens ?

De prévu, malheureusement, avec les moyens que sont les nôtres aujourd’hui, on est un peu limités. Et d’un point de vue logistique, c’est une organisation qui est très gourmande, autant financièrement que pour réunir tout le monde. Mais, oui, c’est un rêve qu’on a de pouvoir réunir tout ce monde, tout comme c’était un rêve d’enregistrer avec un vrai orchestre, qui date de notre premier album… Il a fallu 10 ans pour le faire. Monter sur scène avec un vrai orchestre, c’est un rêve, mais pas possible aujourd’hui. Magoyond, c’est nous 4, on fait tout nous-mêmes, de A à Z…

Le voilà ce fameux Z !

Oui, bien vu, très bon rebond ! Si un jour on devait faire un concert comme ça, il faudrait la garantie d’une structure et des moyens pour gérer ça. Peut-être une date unique pour un énorme concert…

Comment décrirais-tu l’évolution de Magoyond entre Kryptshow en 2019 et Necropolis en 2022 ?

Eh bien, c’est une suite logique. On a tous un peu grandi avec ce qu’on a vécu et le temps passé chez soi avec cette pandémie… On n’était pas précurseurs, mais le thème s’y prêtait bien ! Petit à petit, autant dans nos attentes musicales que visuelles, on s’est vraiment posés pour faire évoluer le projet dans le bon sens et surtout offrir une œuvre à la hauteur de la contribution des gens qui nous ont fait confiance et de ce que nous nous avions en tête depuis un bon moment, l’orchestre, la chorale, toutes ces choses qui ont permis à notre son d’évoluer et proposer des choses de meilleure qualité que ce qu’on a fait jusque-là.

Kryptshow était déjà de grande qualité…

Oui, oui, on ne le renie pas du tout mais on a voulu faire mieux. Et on en est satisfaits, on espère que le public le sera aussi…

Si tu devais penser à une devise pour Magoyond, ce serait quoi ?

Ouh là là ! C’est les petites questions piège…

Non, non, il n’y a pas de piège…

Non, c’est vrai, c’est bien ces questions un peu inopinées… Une devise pour Magoyond ? « Mangez sain, mangez des humains » ? En rapport avec les zombies, on va rester sur une petite note d’humour…

 

MAGOYOND: Kryptshow

France, Metal (Autoproduction, 2019)

Kryptshow, le nouvel album (le 5ème, je crois, si l’on compte les sorties uniquement digitales) de Magoyond, est ma grosse claque de cette rentrée. Jamais je n’avais entendu parler de cette formation hexagonale née de l’union musicale de Le Mago (chant et guitare) et Yond (basse). Ce dernier semble cependant avoir quitté la formation avant l’enregistrement de ce double album. Le groupe a développé un concept très personnel en puisant son inspiration dans les séries télé fantastiques et horrifiques des années 70/80 dont, oh surprise!, les mythiques Contes de la crypte. Dès Le chapiteau des supplices (dont l’introduction m’évoque L’envers de Wormfood) le décor sonore est planté: le chant très narratif déclame des paroles et textes sur fond de rock hard rythmé, cinématographique, enjoué avec un fort esprit de cirque. Monsieur Loyal est ici inquiétant et positivement malveillant. Magoyond se plait à raconter des histoires de zombies, de suicides, de cimetière avec humour. Noir, forcément. J’ai parfois l’impression d’écouter la BO d’un Disney pour adultes (Aladin et son génie me viennent à l’esprit) ou de retrouver la Petite boutique des horreurs. La mise en son ressemble à une mise en scène sans images et lorsque les guitares se mettent à hurler, la rythmique décroche quelques cervicales. Si l’ensemble semble fun, tout est fait avec le plus grand sérieux. Magoyond s’attache au moindre détail dans le verbe et dans le son – véritable jeu de pistes de fines subtilités. C’est un univers à part dans lequel Magoyond nous invite à plonger, et dans lequel je me noie avec plaisir. Vous l’aurez compris, si vous voulez vous changer les idées et aller de surprise en étonnement, foncez découvrir Kryptshow et soutenir Magoyond. Une folie française que ne renierait pas Alice Cooper.