Interview Darken. Entretien avec Lorenzo (guitare), propos recueillis le 14 septembre 2023
Darken a existé pendant quelques années avant de disparaitre pendant quelques décennies et vous revenez aujourd’hui. Première question qu’on n’a encore jamais dû vous poser : qu’est-ce qui a motivé ce retour ?
On ne m’a pas posé cette questions une seule fois aujourd’hui… C’est bizarre (rires) ! ce qui a motivé ce retour, c’est l’envie de refaire de la compo pour ma part – j’ai un autre groupe de reprises d’ACD/DC, c’est super bien mais c’est frustrant de ne pas écrire de musique. La difficulté de trouver d’autres musiciens pour former un groupe aussi et cette envie de finaliser un groupe qui avait fini en queue de poisson, l’envie de finaliser un travail inachevé.
Cette fois-ci le travail n’est pas forcément achevé, il est même plus proche de commencer avec la sortie de ce premier album…
Oui, mais on relance une machine qui aurait pu aller plus loin à l’époque s’il ne s’était pas passé ce qu’il s’est passé… Il y avait des ambitions, une envie et… Voilà, quoi… J’avais envie d’aller plus loin, et ce qu’il fallait absolument, c’est avoir le chanteur qui suive et au moins un autre membre du groupe pour pouvoir remonter Darken.
Une majorité des anciens membres, donc. Tu disais « s’il ne s’était pas passé ce qu’il s’est passé ». Souhaites-tu revenir dessus pour que nous puissions comprendre la fin prématurée de Darken il y a trente ans ?
Des relations humaines qui ne fonctionnaient plus. Le chanteur a décidé d’aller vivre sur Paris et voilà, c’était fini…
Vous revenez avec cet album Welcome to the light, qui est un titre assez explicite d’exposer le groupe. Un clin d’œil que j’imagine être volontaire…
Oui, mais c’est aussi un rappel du passé puisque la dernière démo s’appelait Welcome to the dark. Ça nous a semblé naturel d’appeler cet album Welcome to the light.
Il y a aussi une certaine forme de dualité : déjà entre ces deux titres que tu viens de citer, mais aussi avec la pochette de l’album qui est très sombre avec ce visage juvénile qui, sans irradier, me semble plein d’espoir. Qu’avez-vous voulu illustrer avec cette pochette ?
C’est le côté « dark » de l’époque qui est toujours présent dans notre identité mais avec l’espoir de lumière. C’est de ça dont parlent les textes de Stéphane : on part d’une base sombre et on essaie de rediriger les gens vers la lumière, vers quelque chose de plus positif.
En ce moment, c’est un peu d’actualité… Tu le disait, le groupe a pu se reformer car trois des anciens membres se sont retrouvés. Vous avez recruté deux nouveaux membres : peux-tu nous les présenter ?
Il y a mon fils, Liam, à la batterie. Ça s’est fait tout naturellement : je lui ai proposé sachant qu’il a aussi son projet. Quand je lui ai dit que je remontais Darken et lui ai proposé de jouer avec nous, il m’a regardé avec un grand sourire et m’a dit « ben, bien sûr ! C’est un rêve de gosse de pouvoir jouer avec son père ! » Donc, ça c’était fait. Le bassiste, HP, c’est un pote de Laval, un peu plus jeune que nous. A chaque fois qu’on se croise en concert ou ailleurs, il y a toujours eu un bon feeling. On se disait qu’il faudrait qu’on joue ensemble, et voilà !
Il y a là encore une forme de dualité avec ces générations différentes…
Oui, mais le mélange est juste magique. Ils ramènent de la jeunesse, de la fougue, de la puissance aussi dans notre musique. HP a des influences hardcore, Liam c’est plutôt metalcore, donc des styles très puissants et physiques. Ils ont aussi une autre écoute…
J’imagine que le mélange des influences de ces différentes générations est quelque chose qui peut qualifier l’identité de Darken aujourd’hui ?
Oui, c’est une très bonne alchimie, ça fonctionne très bien. Et comme on n’est pas les vieux briscards qui décident tout et disent « non, c’est comme ça qu’on fait », ben… ça se passe à merveille !
Quel a été le process de composition, l’apport de chacun ?
J’ai écrit toute la musique. Je pense que j’étais tellement frustré de ne pas composer depuis des années que ça sortait tout seul. Encore aujourd’hui, on a trois nouveaux morceaux pour la suite. En fait, je m’enferme dans mon studio le matin, et le soir, j’ai le morceau. Si je n’ai rien ou si ce n’est pas abouti, je le réécoute le lendemain et si je pense que ça ne marchera pas, je le mets de côté. Ensuite, j’envoie ça à Steph, le chanteur – j’enregistre tout, guitare, basse batterie, mais je ne mets que des samples pour boucher des trous, pour la basse, je prends une ligne toute simple histoire qu’il y en ai un peu – Stéphane pose ses lignes de chants. Une fois qu’on a validé ça tous les deux, il écrit un texte. On envoie ensuite tout ça à Liam en virant la batterie et il pose sa batterie comme il le sent.
Au-delà du fait que tu composes tout, il y a quand même un travail de finalisation en commun.
En commun mais à distance. Quand on a commencé, on était en plein Covid, donc il était hors de questions de se retrouver dans la même pièce. On a commencé à travailler comme ça, et ça a bien fonctionné. Encore aujourd’hui, les nouvelles compos sont faites comme ça.
L’enregistrement s’est aussi fait à distance ?
Non, non, on est allés au Dôme studio au mois de janvier. On a enregistré nos parties séparément mais ça a été un travail de groupe en studio. On était parfois trois ou quatre au studio, chacun donnait son avis, et ça s’est hyper bien passé avec beaucoup d’échanges. David du studio nous a aussi beaucoup aidés sur le travail, il a ramené des idées et nous a fait un son… ben qui sonne !
David Potvin est connu pour son travail en tant que membre de Lyzanxia et One Way Mirror, mais aussi comme artisan du son. Comment en êtes-vous arrivés à travailler avec lui ?
J’aime beaucoup One Way Mirror, et comme j’ai pas mal trainé dans le milieu metal de la région, j’ai pas mal d’amis notamment sur Angers, des amis musiciens qui m’ont dit que pour ce qu’on faisait, on devait aller chez david. On l’a appelé, on a eu une première rencontre avec lui, on lui a fait écouter nos démos et il y a eu bon feeling. Aussi bien musical qu’humain. On a vraiment adoré travailler avec lui, que du positif. Ce mois en studio, ça a été vraiment génial !
Comment décrirais-tu la musique de Darken à quelqu’un qui ne vous connais pas et qui va découvrir l’album ?
Ecoutes… Je lui dirais que c’est du metal, certes, maintenant la couleur… Tu te débrouilles ! Rien qu’avec les interviews d’aujourd’hui, on a eu des ressentis différents, des adjectifs différents autour du mot « metal ». Je trouve ça génial, il y a même quelqu’un qui nous a dit « on ne sait pas ce que vous faites comme metal » ! Tu as ta réponse… C’est du metal, maintenant libre à chacun de se faire son idée.
Si tu devais maintenant ne retenir qu’un seul titre de Welcome to the light pour expliquer ce qu’est Darken aujourd’hui, lequel choisirais-tu ?
Je dirais The end of time. C’est un morceau qui est très accrocheur, et, surtout, il parle de l’avenir qu’on laisse à nos enfants. Il faudrait peut-être nous réveiller pour ne pas leur laisser que de la merde… On a des enfants dans le groupe et c’est quelque chose qui nous touche beaucoup. On a d’ailleurs fait intervenir une chorale de gosses sur le clip et sur l’album parce que c’est quelque chose qui nous touche beaucoup. Faut arrêter de ne penser qu’au fric, il faut penser à la planète.
Un groupe de rock, c’est aussi un groupe de scène. Avez-vous des choses prévues pour défendre cet album ?
Alors là… On a juste, pour l’instant, la date du 29 septembre à Laval pour la release party. C’est une salle de 300 places. En plus, étant un groupe de Laval, on fait partie du livre qui a été écrit il y a une dizaine d’années sur l’histoire du rock lavallois, donc pour nous c’était normal de faire cette release party à Laval, dans cette salle. Maintenant, il y a deux personnes qui vont commencer à démarcher pour pouvoir nous trouver des concerts. On espère que ça va aboutir…
Pourrais-tu penser à une devise pour Darken aujourd’hui ?
Une devise… J’en ai une pour moi, c’est que je vis avec l’argent, je ne vis pas pour l’argent. Pour Darken… Je dirais, le partage, le fun et le partage. On n’est pas des stars, on profite au jour le jour de ce qu’on a avec plaisir, on prend ce qui arrive. On se laisse porter par ce qu’il se passe.
Depuis la crise sanitaire, la question revient de façon récurrente et, en plus, on sait qu’on ne vit pas de sa musique en France. Dans vos autres vies, quel sont vos vrais métiers ?
Moi, je suis graphiste, HP, le bassiste, est en même temps frigoriste et graphiste, le chanteur est dans l’administration, l’autre guitariste est musicien – il a joué dans Starmania – et mon fils, Liam, est en voie de devenir intermittent du spectacle.
As-tu quelque chose à rajouter pour clore cette interview ?
Simplement merci à toi d’avoir prêté une oreille à notre album et d’avoir fait cette interview. C’est génial de voir qu’il y a des gens qui s’intéressent à ce qu’on fait et c’est déjà beaucoup pour nous !
Déjà, il faut qu’il y ait des gens comme vous qui fassiez ce que vous faites pour qu’il y en ai comme moi qui s’y intéressent. Là aussi, c’est un échange, du partage…
Ouais, mais c’est super bien de voir comment ça se passe en ce moment !
Après, tu m’as remercié, mais attends de voir la chronique de l’album, tu changeras peut-être d’avis !
(Il rit) On verra, mais, tu sais, je ne cours pas derrière les compliments. Toute la journée s’est passée comme ça, on a rencontré des gens adorables, je ne pense pas qu’il y ait un crabe dans ce panier !