LAST ADDICTION: Downfall

France, Metalcore (Autoproduction, 2024)

La bande de copains lyonnais de Last Addiction, que nous avions découvert avec Inner abyss, un premier album plein d’envie, revient avec Downfall, une suite logique au metalcore sans concession, terrain de jeu de prédilection du groupe. Avec cet album, Last Addiction fait un grand pas en avant tant dans son travail sur ses compositions qu’au niveau des textes ou de la production. Comme nous l’explique Gaël Augier, l’un des guitaristes, dans l’interview à venir, Downfall explore l’univers de la collapsologie, soit, en d’autres termes, la fin d’une civilisation. Optimisme quand tu nous tiens… Les 10 titres de l’album mêlent avec bonheur la rugosité et la brutalité du metalcore à des moments plus subtils et plus foncièrement heavy metal pur jus. Le chant de Dylan Fournet alterne entre rage et moments plus mélodiques, les riffs de Gaël et Vincent Delphin taillent dans le gras tout en explorant différentes couleurs de la palette metal tandis que la rythmique du bassiste William Guinet et du batteur Thomas Chaverondier pose les bases d’une structure solide. Bien que le metalcore ne soit plus totalement d’actualité, Last Addiction propose un album qui ravira les fans du genre et saura faire s’agiter les crinières grâce à des morceaux explosifs comme Burn the shell, Terror, Ghost, ou d’autres plus variés et « ouverts » comme Dead soul sisters ou Last sunset. Last Addiction est sur de bons rails, il lui faut maintenant confirmer et trouver son public, ce qui se fera à force de volonté et de concerts. A suivre.

SWARM: Omerta

France, Metalcore (Autoproduction, 2024)

Omerta… Un mot qui évoque la guérilla et le règlement de compte entre gangs mafieux… Pourtant, le nouvel album de coreux de Swarm semble bien loin de ces considérations, donnant plus l’impression, dans ses textes, de vouloir poser un regard sur l’humain, la société et le monde actuels. Un regard introspectif, aussi, sans pour autant porter d’étendard politique. Un constat violent qui démarre après Alsamt, une intro épurée aux sonorités orientales. Après… Mis à part Dead inside, temps calme de l’album, Swarm tabasse comme si sa vie en dépendait. Speed et rageur (Step by step, Clink and come end, Sorrow dies twice), le groupe explore avec bonheur diverses facettes d’un metal rugueux à la A7X ou autres Hatebreed avec quelques évocation d’un RATM, version guitares sans trop de rap. Toujours au taquet, le groupe se fait également particulièrement speed (My inner) ou syncopé (cette intro de Make your move!) sans oublier ses origine hexagonales avec ce premier paragraphe interrogateur de Soul square. Avec Omerta, Swarm continue de graver son sillon, de tracer sa route, brutalement et avec beaucoup de conviction.

SAINT AGNES: Bloodsuckers

Angleterre, Metalcore (Spinefarm, 2023)

Une brutalité exemplaire… Ils ne font pas les choses à moitié les Anglais de Saint Agnes et Bloodsuckers, leur nouvel et troisième album le démontre, dont une édition spéciale vient de sortir dotée de 4 titres bonus.. Tout au long des 11 titres, la bande menée par la hurleuse en chef Kitty A. Austen navigue entre metalcore et punk, flirte avec le grunge ou l’indus brutal. Saint Agnes ne passe pas par des détours improvisés, sa colère est exprimée dès les premières paroles du morceau titre et rien, ou presque, ne viendra calmer les ardeurs du gang. Les chevaux sont lâchés et ruent avec une envie frénétique de liberté. Mais Saint Agnes, ce n’est pas que de la rage et de la colère, loin s’en faut. Les variations vocales sont omni présentes, et, de la femme enfant à la femme enragée, tout y passe. Uppercut ici, tendresse là, Bloodsuckers propose une variété de tempi, d’ambiances inquiétantes et tendres à la fois. La ballade This is not the end – judicieuse respiration centrale – côtoie des Animals lourds ou des Bloodsuckers explosifs. Un cocktail aussi explosif que dangereusement attirant ou addictif. A voir en concert à Paris, aux Etoiles, le 6 février 2024 et au Hellfest le vendredi 28 juin pour réveiller Clisson depuis la MS2.

SWARM: Mad in France

France, Metalcore (Autoproduction, 2023)

Mad in France est la nouvelle déflagration des Frenchies de Swarm. Un Ep de 6 titres qui foncent dans le tas, mélangeant metalcore et hardcore. Dès Another Choice, il est clair que ces gars sont dignes d’enflammer une Warzone de vouçavékelfestival tant la puissance du propos musical a tout pour faire craquer les nuques. Ca bastonne à tous les étages tout en lorgnant vers un thrash à la Slayer des débuts, du punk anglais ou un heavy d’antan. Malgré son titre qui sonne japonais, Sanbiki no saru est une explosion chantée en français. La rage vocale, d’ailleurs, ou plutôt la colère déterminée est en parfaite adéquation avec des compositions parfaitement maitrisées. Swarm nous avait épatés avec son précédent opus, les gars confirment ici leur potentiel. Si la puissance d’exécution est toujours là, le groupe sait varier ses interprétations en allant chercher des moments plus… heu… »calmes » pour mieux repartir. Et diantre que ça joue! Imparable de bout en bout, ce nouveau CD, bien que court, pourrait bien faire franchir à Swarm un pas décisif.

NORTHERN LIGHTS: Oracle

France, Metalcore (Autoproduction, 2023)

Oracle, c’est un Ep de 5 titres que Northern Lights a sorti en début d’année. Débutant avec une mélodie orientalisante, House of god vire rapidement vers un metal moderne hurlé, heureusement contrebalancé par un chant (féminin et/ou masculin) clair et plus doux. Musicalement, le combo troyen taille dans le gras, proposant des descentes de manche chirurgicales, des break downs bien sentis et des passages légèrement plus calmes tout au long des Judgement – ce pont presque salvateur – Temperance, son intro qui monte en puissance et sa variété de tempi, The moon, speedé et rageur, ou The game (rien à voir avec le film…) tout aussi empli de colère. En à peine trois années (le groupe fut formé en 2020 et a déjà eu l’opportunité de tourner avec rien moins que Killswitch Engaged, par exemple) Northern Lights semble avoir trouvé son identité musicale dans un style explosif.

AS THEY BURN: Ego death

France, Metal/deathcore (Ep, 2022, Autoproduction)

Il y a des trucs, tu sais pas trop comment les prendre… sur Wiki, je lis, au sujet de As They Burn: « Avant de mettre fin à ses activités en 2015″… Et pourtant, me voici avec un Ep 6 titres en mains, Ego death. Plus loin: « groupe qui s’est fait particulièrement remarquer en France au début des années 2010 ». Ben pourquoi mettre un terme à sa carrière au milieu de cette même décennie? Après une longue pause de 7 ans, les coreux parisiens nous proposent donc 6 titres rageurs et rugueux. Ce Ego death débute avec un Unable to connect très bien nommé tant ça dégueule de haine… Ceux qui me connaissent le savent, le « chant » grind, genre dégueuli verbal me rebute au plus haut point. Aors pour moi, ça débute mal malgré la recherche d’atmosphères et d’ambiances heavy burné. Heureusement (pour moi), la suite continue avec des voix plus humaines, alternant entre clarté et hurlements sur fond de rythmes saccadés. On trouve même, ça et là, des passages qui évoquent OMD et Tears For Fears sous acides, passagent qui viennent compenser ces gruiks de cochons qu’on égorge… Tout au long des 6 titres, As They Burn varie ambiances et plaisirs et s’adresse à un public amateur de sensations fortes. Loin d’être mon truc mais l’ensemble est bien foutu et bien produit.

AFFECT: L’odyssée de l’espoir

France, Metalcore (Autoproduction, 2022)

Les apparences peuvent être trompeuses… Affect fut formé à Nantes en 2012 et propose aujourd’hui, après deux Ep, leur premier véritable album, L’odysée de l’espoir. Le Prologue rappé, à la basse tranquille, à la guitare aérienne, cède rapidement le pas à un metalcore direct et sans concession, et le chant devient hurlé et rageur. Ceux qui me connaissent le savent, c’est pas ma came… Même si c’est principalement en français, les paroles ne sont pas compréhensible. On peut nous écrire que Affect est engagé mais sans textes, difficile de le savoir… reste que le groupe bastonne, sa musique est brutale, alternant entre riffs hypnotiques, breakdowns, temps plus calmes et rapés – jolie maitrise du phrasé sur Naissance – une variété qui peut entrainer l’auditeur dans son sillage. Si je n’y suis pas sensible, force est de reconnaitre que Affect vise haut et se donne les moyens de ses ambitions: une production efficace enrobe ces 12 titres, brutaux, francs et directs. Amateurs du genre, vous savez ce qu’il vous reste à faire.

INSOLVENCY: Illusional gates

France, Metalcore (Autoproduction, 2022)

Nous avions déjà rencontré Insolvency en 2018 à la sortie de son premier album, Antagonism of the soul. Alors qu’est apparu en début d’année Illusional gates, le nouveau méfait des Troyens, Metal Eyes a pu s’entretenir avec Prosper, leur nouveau batteur qui a « trouvé le groupe complètement par hasard, sur annonce. Je suis allé voir ce qu’il font, et ça m’a beaucoup intéressé parce que je faisais déjà du metal ado. Je suis ensuite parti faire des études de musique pour voir d’autres styles, me diversifier et c’était un peu naturel pour moi de revenir au metal. J’ai intégré le groupe en 2020, en plein Covid. Le deuxième album était déjà écrit, également la batterie. je n’ai eu qu’à apprendre les parties en apportant quelques modifications, mettre ma patte. » Justement, comment lui, le dernier arrivé, analyses-t-il l’évolution de Insolvency entre ces deux albums?   » Du fait que je me suis formé à d’autres choses que du metal, je crois avoir apporté une sorte de diversification dans mon jeu. Je peux sans doute apporter quelque chose de plus moderne, dans d’autres styles. J’ai fait du jazz pendant pas mal de temps ce qui m’apporte un regard différent sur le style metalcore qui est déjà, à la base, assez codé. On est tous des individualités qui écoutons des choses très différentes, et on apporte des choses différentes dans la musique du groupe. »

La musique de Insolvency, il est vrai, reste très brute, même si le double chant hurlé et clair apporte une sorte d’équilibre. Seul quelques touches de piano en intro tentent de cacher le mur de brutalité sans merci qui suit. « Je pense que cet album a vraiment évolué. Ce n’est pas du compliqué pour faire compliqué. Il a une variété de styles, de la brutalité comme tu le disais mais aussi un équilibre avec de la mélodie. C’est un disque à écouter dans sa totalité« .

De quoi traitent les paroles? Le titre fait-il référence à la crise sanitaire? « Non, même si on peut le penser, mais l’album était déjà écrit avant et les thèmes abordés l’auraient été, Covid ou pas. On a dû dealer avec cette période, pour aller en studio, nus retrouver. Les thèmes sont plus personnels que sur le premier album, plus liés aux expériences de chacun, à des déceptions professionnelles ou dans la vie personnelle. Illusional gates, ça représente un peu une utopie qu’on se ferait de certaines situations. » Plongeons nous donc directement dans les textes de Mirage et Afterlight, ça nous donnera une idée du contenu! (devinez: ce sont les deux instrumentaux)

Si musicalement le groupe a évolué, visuellement, on reste dans le même esprit bleuté et brumeux avec des ombres fantomatique. « C’est un artwork assez sobre, pour illustrer ce qu’on fait en musique. Le choix des couleurs dit qu’on n’est pas ultra sombres ! On parle de choses qui nous sont arrivées et que d’autres ont sans doute vécues. Et on leur dit que malgré tout, on continue, on est là et on avance. »

Deux invités sont au casting de cet album: Ryan, de Fit For A King, et CJ, de Thy Art Is Murder. Autant dire deux grosses voix qui viennent se mêler à celle du bassiste chanteur Pierre Challouet et de son compère guitariste et chanteur Valentin Gondouin. « Tout s’est fait à distance, on était vraiment dans la période Covid, CJ est Australien, Ryan Américain, donc c’était compliqué d’organiser une vrai rencontre. On a envoyé des pistes, des morceaux, on a même testé plusieurs morceaux avec chacun d’eux, mais on n’a pas eu de vrai échanges humains. On a eu quelques exigences, mais le plus important, c’est que le morceaux leur ont vraiment plu. Ils ont pu apporter leur patte, on a, même à distance, fait un travail commun. Et pour nous, c’est top d’avoir la participation de gens comme ça. Ca nous donne une légitimité, le reconnaissance de nos pairs, si je puis dire. »

Pour me convaincre d’écouter cet album, lequel Prosper considère-t-il comme le plus représentatif de l’identité d’Insolvency qui me convaincrait d’en écouter plus? « Alors, c’est pas mon préféré, mais je pense que c’est le morceau éponyme, Illusional gates qui représente bien toutes les palettes de l’album, musicalement et dans les paroles. »

Avant de nous quitter, quelle pourrait être la devise d’Insolvency? « Attends… Je dirai « Stay strong ». Parce que, comme je le disais, malgré tout ce qu’on peut vivre, on est toujours là, on maintient notre projet, de faire la meilleure musique possible; Et c’est un message qui peut s’adresser à tout le monde« .

Entretien avec Prosper (batteur), propos recueillis le 22 avril au téléphone

 

BREATH FROM THE VOID

France, Metalcore (M&O, 2022)

Formé en 2020, Breath From The Void déboule aujourd’hui avec un premier Ep – presque un album en réalité – éponyme. Proposant 7 chansons, le groupe navigue entre groove metal et metalcore. Après une intro soft (Immersion), le groupe crache sa rage avec un Discomfort bien nommé. Une rage et une énergie qui se révèlent tout au long de ce premier essai. Dès lors, le ton est donné. Les cinq ont grandi et ont été éduqué au son des Gojira, Lamb of God ou, dans un autre registre, Hypno5e. BFTV cherche à varier les ambiances et les plaisirs (cette intro sabbathienne et doom et cette ambiance presque mélancolique de Ocean eyes valent le détour), alternant entre chant clair puissant et colère peu contenue. Loin de bourriner à tout va, Breath Frolm The Void sait faire respirer son propos. Les guitares qui charcutent et cisaillent cherchent également une forme de mélodie en se faisant par instant plus aériennes tandis que des rythmes répétitifs et quelque peu hypnotiques parsèment ce premier essai qui s’adresse clairement aux amateurs de puissance, vélocité et breakdowns mêlées à une certaine recherche de mélodies.

TETRARCH: Unstable

Neo metal/Metalcore, USA (Napalm, 2021)

Nous avions discuté de cet album avec Josh, un des fondateurs et surtout chanteur et guitariste de Tetrarch, groupe fondé à Atlanta (cf. interview), en Georgie, depuis installé à LA. Freak, le premier album, fut une carte de visite pour Tetrarch, principalement aux USA. Aujourd’hui, avec Unstable – et un espoir de retour à une vie plus normale – la réputation des Américains devrait franchir les frontières et traverser les océans. Dès I’m not right, le ton est donné: il y a de la rage et de la gnaque. L’ensemble propose un mélange de neo metal avec des touches électro – évoquant aussi bien Korn que Ministry ou Limp Bizkit. Une forte influence du metalcore plus récent flotte également partout. On se prend rapidement au jeu tant les titres sont efficaces de bout en bout. Slipknot n’est jamais très loin comme le démontre le premier single au clip très réussi Negative noises. Même si la puissance est toujours présente, Tetrarch propose aussi des moments plus « calmes » offrant ainsi un disque varié et aéré. Autre force de l’album, sa production riche et grasse, signée Dave Otero. Unstable, c’est 10 titres qui font mouche et prennent l’auditeur pour ne plus le lâcher. Une superbe découverte que d’aucun présentent déjà comme la future grosse sensation, « the next big thing ». Si Tetrarch trouve son public, nul doute qu’il va grossir rapidement!