THE WEALTHY HOBOS: Ticking twelve

France, rock (Autoproduction, 2023)

The Weealthy Hobos – en français, les clochards riches – est un groupe français qui a vu le jour au début des années 2010. Après un album, Everybody needs some change en 2014, et un Ep, Piece of chic en 2017, le groupe disparait, aidé récemment par une certaine crise sanitaire. Mais l’appel du blues et de la soul est plus fort et Sacha Burtin (chant, guitares, harmonica) et Antoine « Slim terrorizer » Gomila (batterie, percussions) décident de remettre le couvert sous la forme d’un duo qui s’adjoint les services de nombreux musiciens avec qui ils enregistrent un nouvel album, Ticking twelve. « Twelve » comme, entre autre, les douze titres de ce nouvel album qui transpire le blues, la soul, le funk et le hard rock vintage de tous ses pores. Dès l’introductif Trick me like a girl, nos clochards nous invitent à la table du fond d’un vieux bar enfumé, aux cendriers qui débordent de mégots (de clopes ou de joints, va savoir…) et qui puent la cendre froide, une table qui poissent sous les verres de whisky et les bocks de bière tiède. La voix rauque et grave de Sacha Burtin a été passée au papier de verre et apporte ces touces plus que chaleureuses à l’ensemble des titres – quand bien même je ne comprenne guère ses paroles en anglais, mais cette fois, qu’importe!. The Wealthy Hobos ne se posent pas la question d’une étiquette ou d’un genre musical, bien au contraire. Le duo puise son inspiration autant du côté de James Brown que de David Bowie ou Black Sabbath ou un jeune AC/DC. Les choeurs et les cuivres rappellent les plus grandes heures de la Motown, la gravité du chant et la saturation des guitares replongent l’auditeur au coeur des 70’s aussi flamboyante que psychédéliques. Ticking twelve est un album de pur revival avec une véritable identité sonore. Car si ces clodos aiment clairement ce rock old school, ils y apportent avec finesse et détermination leur personnalité propre et leur touche personnelle, fiasant de ce nouvel album un pur et simple moment de plaisir.

PLEDGE OF HEALING: One step closer

France, Rock progressif (Autoproduction, 2023)

Pledge Of Healing est né de la rencontre entre Claire Sergue (chant, claviers) et Cyril Devalez (guitare rythmique, claviers) en 2021. Chacun est rapidement séduit par les qualités de l’autre et tous deux décident de monter un groupe qui leur permette de répondre à leurs aspirations musicales. Ce premier album, One step closer, propose 9 titres à la fois tendres et rock, neuf chansons qui cherchent à peindre des ambiances feutrées, rassurantes et bienveillantes. Sans doute le résultat d’une naissance en pleine période de crise sanitaire, prenant le contre-pied de nombre de formations qui ont laissé leur frustration s’exprimer… Ici, tout est thérapeutique, aérien et relaxant. Le chant doux de Claire est superbement accompagné de mélodies tendres sans jamais être sirupeuses. L’ensemble est léger et aérien, Pledge Of Healing s’inspirant de formations comme Anathema ou Pink Floyd pour exprimer ses émotions. L’album a été enregistré avec Alex Soubry (guitare), David Hazak et Laurent Leyder (basse), Cyril s’étant chargé de la programmation batterie. One step closer est l’album réfléchi de musiciens matures et le résultat est une superbe carte de visite dont on attend maintenant de retrouver la retranscription sur scène. Pour les Orléanais, ils seront à l’Astrolabe le 1er juin. C’est gratuit, allez-y!

WAKING THE MISERY: Phoenix

France, Metal (Autoproduction, 2023)

Waking The Misery a vu le jour il y a presque 10 ans, en 2014. A l’origine groupe de metalcore, la formation s’oriente petit à petit vers une metal qu’il dit plus groovy. Phoenix marque un renouveau, WTM ayant renouvelé son line-up récemment pour proposer aujourd’hui un album composé de 10 morceaux puissant et directs se réclamant du neo metal version Linkin Park ou Slipknot. Déjà, j’aime bien l’ironie liant la pochette et le titre: le phénix renait de ses cendres? Waking The Misery allume la flamme. Du vivant de l’oiseau, pourrait-on croire…Mais… Si l’envie est là, le son lui, est absent. L’ensemble est étouffé, manque de rondeurs et de contraste comme si le groupe, avait enregistré une démo. De bonne qualité, certes, mais trop brouillonne. Il y a cependant de la matière dans ces titres qui aiment à varier les plaisirs, alliant riffs puissants et batterie entraînante sur fond de basse jazzy. Et même si le genre n’est pas réinventé, l’amateur saura y trouver son compte. Un album plein d’ambition mais qui souffre d’un son trop faible qui dessert le propos général. Dommage.

ORPHEUM BLACK: Outer space

France, Prog (Autoproduction, 2023)

Sequels, le premier album des Orléanais d’Orpheum Black vit le jour en 2021, deux petites années après la naissance du groupe. Formé par le trio d’amis Greg (guitare et chant) et Romain (guitares), tous deux ex-Wild Dawn, et Mélody (claviers et chant), ex-No Sign Nothing, le line up évolue jusqu’à inclure depuis peu le bassiste Nathan (ex-Hyaena) et le batteur Alexis. Chacun des musiciens a déjà derrière lui un vrai cursus musical et scénique, tous évoluant dans des univers variés et ont pour objectif commun de proposer, avec Orpheum Black, une musique moins brute, plus réfléchie et proche du prog ainsi qu’un univers visuel travaillé. L’esthétisme léché et la sensibilité exacerbée sont les moteurs d’un groupe qui propose aujourd’hui Outer space, son second album composé de 8 chansons dont chaque détail semble travaillé et pensé soigneusement. Aérien, parfois contemplatif, cet ensemble évoque immanquablement l’univers d’Anathema, rock et progressif tout à la fois. Le chant partagé entre Mélody et Greg – deux voix claires et complémentaires – autorise une mise en son presque théâtrale, une complicité qui se traduit sur disque comme sur scène. Orpheum Black se distingue nettement de la scène actuelle en proposant un rock soigné, accessible, à mille lieux de la brutalité extrême quasi omni présente et ça fait du bien tant le combo apporte fraicheur et douceur.  L’univers d’Oprheum Black c’est aussi la scène et, devinez quoi: une belle tournée française est prévue avec Release party à domicile (ou presque) le 4 mai à Saint Jean le Blanc (45). Printemps de Bourges, Motocultor sont aussi au programme… Toutes les dates à consulter ici: https://www.facebook.com/OrpheumBlack

STORM ORCHESTRA: What a time to be alive

France, rock (Autoproduction, 2023)

Quelle époque pour être en vie, quelle belle ou drôle d’idée, en effet! Sans cela, il eût été plus que difficile de découvrir ce premier album de Storm Orchestra, groupe bien de chez né de la rencontre du chanteur guitariste Maxime Goudard et du bassiste Adrien Richard dont les chemins se croisent au coeur d’une école de son. 2020 voit paraitre un premier Ep avant que le trio (rejoint quelques temps plus tôt par le batteur Loïc Fouquet)ne retourne en studio fin 2021 pour nous proposer aujourd’hui cette pépite nommé What a time to be alive, composé de 11 titres qui parlent autant de l’amour et de la fin du monde. Le groupe propose une variété musicale rafraichissante qui puise autant chez Muse que Royal Blood, pour les influences les plus évidentes. L’ensemble est chantant, simplement entrainant, les guitares se faisant aussi douces que parfois brutales, tout comme le chant, aussi tendre qu’il peut être déterminé. Storm Orchestra parvient à proposer des titres entrainants et fédérateurs sans jamais tomber dans le travers de la recherche de mélodie facile. C’est là la grande force du trio qui, tout au long de ces onze morceaux, nous démontre la variété de ses influences, pop, rock, alternatives tout à la fois, le tout chanté dans un anglais parfaitement maitrisé. La production donne sa juste place à chaque instrument. Il en résulte un album de rock qui s’écoute sans temps mort. On ne le répètera jamais assez: la France regorge de talents et Storm Orchestra est de ceux là. Alors, amateurs de rock, foncez les découvrir!

GOROD: The orb

France, Death technique (Autoproduction, 2023)

L’amateur de death brutal passera son chemin, celui de technique jettera volontiers une oreille sur The orb, la nouvelle déflagration des frenchies de Gorod. Loin d’en être à leur premier essai, les Bordelais nous proposent un nouvel album pas seulement brutal ou technique. Oui, Gorod on les connait pour leur virulence et leurs prestations explosives – une valeur sure de la scène hexagonale. Gorod nous propose ici des moments plus introspectifs (le morceau éponyme) qui se lient à d’autres, plus fréquents, aussi brutaux que techniques. Loin des standards du genre, Gorod se distingue par des structures qu’on pourrait parfois rapprocher d’une certaine complexité du jazz (Megadeth a prouvé que les genres sont loin d’être incompatibles), d’un prog brutal en y mêlant quelques touches qui se rapprochent d’une forme de psychédélisme (pas forcément) hypnotique. The orb, après deux titres directs et simplement « dans ta face » varie son propos et, au bout du compte, intrigue, attire et interpelle. Un album puissant et riche même si pas toujours facile d’accès. Qu’on aime ou pas, c’est bien là ce qu’on demande à un groupe, non?

WAKAN TANKA: Heat

France, Rock psyché/allumé (stoner, quoi!) (Autoproduction, 2023)

Après un premier EP paru en 2019 (River) et une tournée dont une première partie de Shaka Ponk (un hasard si chaque groupe s’écrit avec des K?) Wakan Tanka revient avec ce Heat chaleureux, allumé, emprunt de psychédélisme et d’esprit 70’s. Quelque peu remanié entre ces deux productions avec l’arrivée de Nicolas Caumont aux claviers et Alexis Godefroy à la basse, le groupe mené par le chanteur guitariste Erwan Ducornoy et le batteur Christophe Vidal Caro nous propose 5 morceaux aussi variés qu’hypnotiques qui nous replongent au cœur de la fin des 60’s/début des 70’s, époque qui vit outre-Atlantique la naissance du mouvement hippie et des musique électrifiées contestataires. Il y a, tout au long des The sun, Dance of death, Windwalkers et Circles de la souffrance et de la mélancolie, des volutes de fumée d’herbe bleue, des fonds de bière tiède, de l’amour aussi, tout cela mélangé et donnant un résultat qui sonne comme si Janis Joplin avait rencontré Black Sabbath. Une jolie réussite, en somme, qui se conclue avec All the shades, tout aussi stoner mais un stoner acoustique. Il y a un goût de « reviens-y » qui semble évident. A quand l’album?

APEX ORIGIN: Beyond a lifetime

France, Prog (Autoproduction, 2023)

Quel dommage… ce chant mélodique gâché par un mix le mettant au second plan et dans un anglais quasi incompréhensible… Dommage car la voix est puissante et atteint des notes haut perchées. Et puis, la lecture du track listing au dos de la pochette est très prometteuse d’un esprit romanesque et inventif, la pochette dépliée mélangeant fantastique et navigation maritime période « gallions majestueux ». Clairement, ce Beyond a lifetime donne envie de se plonger dans l’univers d’Apex Origin. Un album écrit comme une pièce de théâtre ou un opéra en 5 actes précédés d’une Ouverture et conclus par un Final. Les influences du groupes sont à chercher aussi bien du côté des géniteurs du hard rock – Led Zeppelin – dans les fulgurances guitaristiques et bluesy, et des géants du metal progressif – Dream Theater – dans la puissance recherchée et la technique musicale. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si on trouve deux morceaux intitulés Blue Dream (et ses clins d’œil à Satriani) et Blue Zep… Si l’on met ce chant de côté, on ne peut qu’admirer le sens de la composition à la fois complexe et passe partout, dans un esprit démonstratif de technique sans être pour autant donneur de leçons. Apex Origin propose également un titre chanté en français – La haine reine II – qui sonne plus pop rock que profondément progressif. L’album qui dure pas loin d’une heure s’écoute d’une traite. On tient sans doute ici – à un détail près – un futur grand du genre.

EMBERS

France, Rock (Autoproduction, 2023)

Formé en 2022, Embers est un duo qui nous propose déjà un premier Ep de 6 titres. Six titres d’un rock simple, torturé et mélancolique. Dès Babayaga – cette figure slave, sombre et maléfique, qui envahit les cauchemars des enfants sages – le duo nous replonge dans une forme de new wave à la guitare claire et au chant plaintif. On est également par instants entrainés dans une forme de rock alternatif, celui qui se base sur des riffs incisifs et directs, sans chercher à faire de l’esbroufe. Il y a cependant comme un manque à cet ensemble, une sorte de liant, une certaine puissance qui transformerait cet essai en vraie promesse. Oh, certes, il y a de la variété dans le propos musical, de l’envie, des compos dans l’ensemble bien ficelées, mais, bien qu’il ne s’agisse « que » d’un Ep, je décroche. Peut-être est-ce le fait du duo, il manque la chaleur et l’apport de deux ou trois instrumentistes supplémentaire, d’un esprit de groupe. Le son ne peut cependant être pris en défaut, l’Ep ayant été enregistré chez et par Francis Caste au studio Sainte Marthe. Et en règle générale, le gaillard sait ce qu’il fait, alors… on retente le coup?

ASYLUM PYRE: Call me inhuman – The sun – The fight – part 5

France, Heavy/power metal (Autoproduction, 2023)

La princesse couronnée a tombé le masque à gaz pour devenir une carnassière ensanglantée. Call me inhuman est le nouvel album d’un Asylum Pyre dont le précédent opus, N°4,  avait tout pour faire exploser le groupe mené par le guitariste Johann Cadot et la chanteuse Ombeline « Oxy heart » Duprat. Seulement… l’album sort en 2019 et la formation ne dispose que de quelques mois pour le défendre. Moins d’un an après sa sortie, la France et le monde sont mis sous cloche, arrêtant net des efforts pourtant prometteurs. Mais cette période ne semble pas avoir pour autant freiné les envies et les ardeurs de nos Frenchies qui, avec cette 5ème partie, continuent et renforcent leur œuvre au discours écologique très actuel, encore plus, d’ailleurs, quand on voit l’état de notre monde et la nature qui, jour après jour, reprend naturellement le dessus sur notre inhumanité. Asylum Pyre nous revient dans une forme éblouissante et nous propose 12 nouveaux morceaux forgés dans un metal qui puise autant au cœur (pas celui de la pochette!) du heavy traditionnel que dans le power classieux. Dès Virtual guns, le groupe nous prend à la gorge avec son intro tribale hypnotique qui précède l’arrivée d’une guitare tout en puissance. Tout ici nous entraine dans une nature cinématographique meurtrie, celle de La forêt d’émeraude (John Boorman, 1985) ou d’Avatar (James Cameron, 2009), une nature meurtrie qui appelle au secours sans être écoutée. Les mélodies font mouche et rentrent dans la tête comme de trop rares morceaux savent le faire. Asylum Pyre travaille chaque détail de cet album avec une précision exemplaire, sans s’imposer de limites. Il y a ici de la cornemuse, là, de l’électro, par ici des influences pop, d’autres instants, nombreux, sont foncièrement metal, parfois growlées… Chaque morceau est prétexte à trouvaille et étonnement, l’ensemble se dégustant avec bonheur et, malgré le sérieux du propos, délicatesse. la nouvelle vie d’Ombeline, son séjour en, si je me souviens bien, Bosnie, a-t-elle eu une influence sur la composition et l’écriture (There I could die peut être interprété de différentes manières…)? On pourrait le penser à l’écoute de ces instants joviaux et heureux qui apportent une lumière salvatrice à cet ensemble pourtant grave et parfaitement produit. Car là aussi, le son est généreux. Un son qui illumine, ou serait-ce l’inverse, le chant d’une Ombeline qu’on dirait touchée par la grâce, un chant puissant, mélodique, rageur, déterminé et envoûtant. Avec Call me inhuman, Asylum Pyre signe la suite d’un doublé magnifique digne des plus grands. Foncez et… Tree your life !