BROK N FACE: Leave to live

France, Rap Metal/Metalcore (Ep, M&O, 2024)

Cinq petits titres qui bastonnent, c’est ce que nous propose BrokNFace, nouveau venu sur la scène dite Rap Metal/Metalcore mais qui n’est pas que ça. Les amateurs de Hip Hop énervé et de mangas seront aux anges à la découverte de ce Leave to live – belle philosophie que de « partir pour vivre », doux pendant de « Rester, c’est mourir un peu ». Les fans de Rise Of The North Star et consorts seront ravis de pouvoir enfin trouver un peu de concurrence car BrokNFace inclus plus que les simples références précités dans sa musique. Le chant allumé évoque parfois un Mike Patton déjanté (comment ça, c’est un euphémisme?) sur fond de guitares syncopées et de rythmiques décalées. Ou l’inverse. Ca donne l’impression d’aller dans tous les sens mais l’ensemble reste sous contrôle. Leave to live a besoin de temps pour être digéré, le groupe proposant une musique complexe qui doit se révéler brutalement sur scène. A découvrir.

LOVELORN DOLLS: Deadtime stories

Belgique, Gothique (M&O, 2024)

Once upon a time… Une intro sombre qui évoque cette crainte d’éteindre la lumière avant de dormir, cette peur de voir sortir des monstres de sous notre lit d’enfant, le tout inspiré et allégé par des tonalités qui évoquent Evanscence. Si les Belges de Lovelorn Dolls n’en sont pas à leur coup d’essai, ce Deadtime stories arrive de longues années après Darker ages, paru en 2018. Ok, une crise sanitaire est passée par là, remettant beaucoup de certitudes en cause mais quand même, 6 ans, c’est long! Sans doute le duo composé de la chanteuse Krystell et du multi instrumentiste Bernard en a-t-il profité pour apporter un peu de lumière dans cet univers musical qui évoque les univers de Tim Burton ou de la famille Adams. Mais rapidement l’ensemble musical devient joyeux et presque lumineux. Les accents pop viennent contre balancer des guitares certes rugueuse mais le chant bienveillant, chant que se partagent les deux musiciens, apporte cet mise en lumière qui rend le propos plus rock entrainant que purement gothique. Il y a bien sûr quelques passages plus rentre dedans – le heavy moderne Death or glory, le plus heavy pop Beautiful chaos – mais l’ensemble reste toutefois plus joyeux qu’autre chose. Loin de la mélancolie, Deadtime stories, très agréablement mis en son, s’écoute avec plaisir de bout en bout.

RUSTHEAD: Gear up

France, Hard rock (M&O, 2024)

Rock and roll! Rusthead débarque avec Gear up, un album 100% pur hard rock n roll qui lorgne totalement et sans complexes du côté d’Angus and co. La guitare craque comme une certaine SG, le groove imparable des riffs évoquent toute la période Bon Scott mais pas que. Formé en 2018 à Cherbourg, Rusthead aime le pub rock australien d’AC/DC, The Angels ou Rose Tattoo autant que le rock énervé made in USA, avec, par instants, de belles intonations sudistes. Loin d’être rouillé, le quatuor développe une énergie communicative, et les 9 titres de ce nouvel album, même s’ils n’inventent rien, sont tellement enjoués qu’ils sont taillés pour la scène. Un groupe sérieux qui ne se prend pas au sérieux (cf. la vidéo de I’m not a slave). A quand une tournée, les gars (et la fille)?

SLAVE TO SIN: Control and beliefs

France, Electro metal (Ep, M&O, 2024)

Soyons clairs: Slave To Sin est au metal ce que Metallica est à la techno. Le point commun, cependant, reste la volonté d’énergie et de puissance. Avec Control and beliefs, la formation lyonnaise démarre en trompe-l’oreille. Car Fake, première version, est un titre baigné de guitares rageuses, avec ce riff et cette rythmique hypnotiques. On pousse un peu plus loin avec What do you believe in?, morceau beaucoup plus électro aux guitares reléguées au second plan. Pourtant, la pêche est bien présente, tout comme sur Control qui traite de notre éternelle fausse croyance, celle qui nous persuade de pouvoir, à tort, tout contrôler. Hoping someday, plus soft vient clore le propos avant le bonus, la version electro de Fake. A quelques riffs saturés près, on est loin du metal. Très loin. Pourtant, Slave To Sin développe une forme d’énergie contagieuse qui donne envie de taper du pied. Et ça, ça donne envie d’en savoir plus. Mais sur le site web du groupe, on parle de musique et de projets, d’autres choses que de l’histoire du groupe… Etonnant.

CHAKORA: Fractured fate

Allemagne, Stoner (M&O, 2024)

A l’image de la pochette, il n’est pas forcément nécessaire d’être totalement sobre pour plonger dans le propos de ce Fractured fate, album quelque peu allumé signé Chakora. Le quatuor allemand nous propose en effet un album totalement psyché, aux sonorités volontairement 70’s. On plonge dans un univers sonore qui évoque autant Hendrix que Hawnkwind ou encore un jeune Motörhead. Le chant, embrumé et rugueux se fait par instant plus « moderne » dans le sens hurlé et enragé du terme. Débuter avec une doublette composée de Jesus et de Muddy Waters n’a sans doute rien d’accidentel mais en tout cas, les jalons sont posés: du rock vintage, déjanté aux guitares aussi rugueuses que mélodieuses. Tout au long des 10 titres de cet album, Chakora nous entraine dans des univers datés -on a parfois l’impression que les musiciens se livrent à des joutes improvisées – tout en y incluant avec bonheur des touches exploratoires et contemporaines. La rage est telle qu’on peut aisément comprendre ce qui motive cette destinée fracturée… Une expérience hors du temps.

CHARCOAL: Rocks

France, Heavy rock (Ep, M&O, 2024)

Comment ça riffe! Charcoal, c’est la réunion de 4 passionnés de hard/heavy rock couillu qui n’a pour seul objectif que de faire s’agiter les tignasses et taper du pied. Alors – vous me connaissez – hormis l’anglais incompréhensible, les 6 titres de cet Ep, simplement et justement intitulé Rocks, embarquent l’auditeur sur les US highways autant que dans les banlieues crades d’un Londres qui n’est plus avec une bande son totalement et volontairement inspirée du heavy rock de la fin des années 70 ou du hard US de la première moitié des 80’s. C’est vif et vivant, et l’ensemble rend un bel hommage à tous les grands du genre, de Motörhead à Thin Lizzy ou AC/DC en passant du côté des Mötley Crüe, Ratt, Faster Pussycat… Les références aux grands anciens sont d’ailleurs évidentes rien qu’à la lecture des titres: Thin lady Lizzy, Fat bottom girl, Same old dance, même pas un jeu de pistes! Sans jamais se prendre trop au sérieux, Charcoal propose un rock des plus sérieux, et s’en amuse (preuve en est la vidéo pas du tout sérieuse de One night of rock n’roll). On met les potards à 10, on balance la sauce avec des guitares graveleuses, une double à la Animal Taylor, un chant rocailleux forgé à coup de clopes… On laisse le groove et l’énergie positive faire le reste.

SLEAZY TOWN: Unfinished business

France, Heavy rock (M&O, 2024)

Intrigante sortie que ce Unfinished business, double album de Sleazy Town. Le groupe s’est formé à Paris en 2011, a publié un premier Ep 5 titres en 2013 (Midnight fight) et puis… Plus rien, à part des concerts qui lui permettent de forger son identité sonore. Mais discographiquement? Jusqu’à cette fin de mois d’avril qui voit débouler chez les disquaires ce Unfinished business sorti de nulle part. Clairement, il y a des affaires qui sont restées en plan ces 10 dernières années, et les amateurs de gros hard rock US vont être aux anges. Car dès les premières mesures de Machine gun rodeo, le groupe nous ramène à cette époque – bénie diront certains – qui vit tout Los Angeles se transformer en repère de musiciens permanentés au savoir faire redoutable. Ici, on pioche autant du côté des géants du hair metal (Mötley Crüe, Poison, Ratt, Great White, GNR…) que des monstres du hard et du heavy rock. Parmi les influences de Sleazy Town, on citera au hasard AC/DC, Iron Maiden, Aerosmith, Thin Lizzy ou Motörhead. Le groupe fait partie de cette génération qui a parfaitement intégré les codes du genre en y apportant sa touche personnelle et passionnée. La voix rocailleuse et chaleureuse de Andy Dean accompagne les riffs furieux et enjoués de JJ Jaxx, tandis que la basse de Macabre (!) et la batterie de Julian viennent renforcer cette sensation de puissance et de bien-être sonore. Il aura fallu plus de 10 ans pour que Sleazy Town sorte son premier album. Les quatre osent même sortir un double, imparable de bout en bout. 24 titres avec tout ce qui fait un grand album, sleaze et power ballad inclus. Il fallait oser, ils l’ont fait et avec quel brio ! Espérons seulement que ce buisiness laissé en plan ne soit que le démarrage d’affaires plus sérieuses encore. Rock on !

EKO: Déficit d’humanité

France, Metal (M&O, 2024)

La rage en français, ça a du bon… EKO, qui existe depuis 2015 et a connu moult changements avant de nous proposer ce Déficit d’humanité, un album révolté qui dit ce qu’il a à dire. Musicalement, les 11 titres évoquent – naturellement pourrait-on penser – Rage Against The Machine, mais le groupe puise également du côté de Living Colour, Fishbone, Bad Brains et autre groupes de ce que l’on désignait comme fusion, ce metal qui inclut hip hop, phrasé rap et irrévérence punk. Textuellement, on pense à nos groupes revendicatifs, Trust ou No One Is Innocent ou Mass Hysteria en tête. Des comparaisons certes faciles mais Eko apporte sa propre personnalité. Le groove omni présent ne laisse jamais indifférent et qu’on soit d’accord ou non avec les paroles, on ne peut qu’admirer la détermination directe d’Eko à faire passer son message. Un constat de la situation actuelle d’un monde en perdition et empli d’inhumanité. Sur scène, ça doit dépoter sévère!

BLESS HER EVIL: We are mystery…

Canada, Metal (M&O, 2024)

Parfois il faut simplement oser. Oser mélanger des styles musicaux a priori sans rapport ou point commun, oser explorer ses envies et y intégrer ses influences, aussi variées soient elles. C’est ce que nous proposent les Canadiens de Bless Her Evil, groupe québécois formé en 2019. Lorsqu’ils se lancent dans l’aventure, Frank, Matt et Bert (respectivement à la guitare, à la basse et à la batterie) sont aussi fans du rock sudiste de Blackberry Smoke que du metal barré de Mudvayne ou celui plus mélodique d’Evanescence, mais sont également inspirés par le rock des 70’s ou le Neo du début de notre siècle. Pour mélanger tout ça, ils sont rejoints par la chanteuse D’Emman et nous proposent ensemble aujourd’hui un recueil de leurs délires exploratoires. Composé de 11 titres, We are mystery… porte bien son nom tant la variété des influences est présente. Passant d’une intro tribale à un riff digne de Metallica, cet album lorgne partout: on y trouve des traces aussi bien d’AC/DC que, plus discrètement, d’un jeune Motörhead, du punk (Dark cluster) ou un esprit électro (Robot bug). Bless Her Evil passe avec une remarquable facilité de morceaux énergiques et énervés (Brother the crow, The Moon upside down) à des moments plus calmes et tendres (Life, Ectoplasm, le 60’s/70’s Father reading) ou d’autres simplement groovy (Missy oide). Pour ratisser large, le groupe propose également un titre en français, La discorde, sombre et martial à souhaits. Avec We are mystery… Bless Her Evil s’adresse à un très large public grâce à une palette musicale riche et variée. Reste à aller le conquérir, ce public, sur scène.

NEAR DEATH EXPERIENCE: Brief is the light

France, Doom/gothic (M&O, 2024)

Ne pas se fier aux apparences… Eviter les préjugés, aussi. On aurait pu croire, avec un tel patronyme, que Near Death Experience, groupe formé à Nantes en 2022, officie dans le metal extrême et brutal. Que nenni, bien au contraire, le groupe explorant l’univers de son nom. Son premier album, Brief is the light, Propose 10 titres qui, chacun à sa manière, évoque le thème et aborde les témoignages de ces mystérieuses expérience de mort imminentes. Le doom sied à merveille à l’esprit de cet album intriguant, évolue entre l’univers de Paradise Lost et de Metallica, en passant du côté de Katatonia. Si l’album est dans son ensemble sombre, il y a de la lumière au bout de ce tunnel. Le seul défaut réside dans le chant féminin (malheureusement, la bio reçue de quelques lignes ne donne aucune information concernant le line-up…) qui manque parfois de rondeur et dont les paroles sont difficilement compréhensibles. L’ensemble, cependant, reste à la fois lourd et puissant et NDE nous propose au final un album interpelant.