MESSALINE: Braconniers du silence

France, Hard rock (Brennus, 2024)

A ma connaissance, Braconniers du silence est le premier témoignage live des Burgiens de Messaline (bon, oui, j’ai dû chercher comment s’appellent les habitants de Bourg en Bresse…) Et il ne s’agit que d’un Ep. Enregistré le 30 août 2023 au Parc des Oiseaux de Villards les Dombes lors du festival les Musicales, ce live propose 5 titres (dont deux inédits) revisités et retravaillés à la guitare acoustique (deux en fait), donnant un résultat plus folk que hard rock. Le public connait déjà, tout du moins les amateurs de Messaline, Les 3 stryges, L’aimante religieuse (qui parle d’une nonne nymphomane) et Le jardin des délices qui sont tous trois extraits du dernier album studio de la troupe, Vieux démons, paru en 2022. Les deux inédits traitent pour l’un de l’alchimiste français Nicolas Flamel (Maistre Flamel) et l’autre de Geisha avec toutes les références possibles à la culture japonaise, des katanas aux mangas. Malgré l’omni présence des guitares acoustiques, l’ensemble est enjoué, chaleureux, plein d’entrain et groovy. Eric Martelat, chanteur et maitre d’ouvrage, porte bien son surnom de Chatos tant il communique avec le public, mais il maque dans son ton un peu de cette énergie qui va chercher et transformer son auditoire. Reste que ce dernier est réceptif à cette musique joyeuse et le fait savoir avec force applaudissements. Messaline, s’il a toujours été un groupe de hard rock, a également plus que souvent développé une approche progressive dans sa musique, et cela se ressent ici par la structures des morceaux et l’esprit d’un Ange qui flotte un peu partout. Il ne s’agit certes pas d’un concert de rock, mais bien du témoignage d’un groupe qui sait se réinventer. Prochaine étape, espérons le, un live explosif et moins sage!

MESSALINE: Vieux démons

France, Heavy metal (Brennus music, 2022)

Chronique/Interview MESSALINE – Entretien avec Mathieu (guitare) réalisé le17 octobre 2022

Messaline n’a pas sorti d’album studio depuis Illusions barbares en 2015, et son line-up a depuis fortement évolué. Ne reste en place que son fondateur, le chanteur Eric Martelat qui s’est entouré, notamment, d’un vieux briscard de la guitare, Mathieu, qu’il connait depuis le lycée. Leurs chemins se recroisent en 2010 via un tribute à Black Sabbath, puis plus tard, en 2017, avec une formation hommage à HF Thiéfaine. Ce n’est qu’en 2018 qu’il intègre Messaline en tant que guitariste accompagné d’Alain Blanc, le nouveau batteur. Vieux démons déboule avec un line up nouveau qui intègre également 2 choristes et fleure bon le vintage. « Il y a beaucoup de chœurs féminins sur l’album et on veut que ce soit une dominante en live. Aujourd’hui, Messaline, c’est donc 6 personnes. Un groupe qui a fait peau neuve. Le groupe continue ce qu’il faisait avant, mais avec de nouvelles couleurs du fait qu’il y a de nouveaux musiciens.» Vieux démons est un album résolument orienté rock et hard rock 70’s. Ce que Mathieu confirme : « Eric considérait être arrivé au bout de certaines choses et a voulu revenir aux fondamentaux des années 70. On s’est dit qu’on allait rendre des hommages à tous ces groupes avec qui on a appris la musique, les Led Zep, Deep Purple, en allant chercher dans leurs répertoires des riffs emblématique qu’on a remanié à notre sauce. L’idée c’était que les gens se disent « Merde, ça me dit quelque chose mais j’arrive pas à savoir quoi ! » »  Des références totalement assumées, donc, pas du pompage pur et simple…  C’est souvent d’ailleurs tellement évident qu’on ne peut se tromper : on retrouve l’esprit de Black Sabbath sur Black shaman, les envolées de Robert Plant sur Immigrant song sur Je voulais te dire, Le jardin des délices a des touches de rock sudiste, un clin d’oeil tout aussi évident à AC/DC avec un « Highway pour l’enfer »… Les amateurs du groupe retrouveront même des références à… Messaline, puisque sur le morceau titre, Eric chante les mots « Eviscérer les dieux » qui est aussi le titre d’un ancien album du groupe. « Il y a des récurrences dans tous les albums de Messaline de tout ce qui a été fait avant, et on n’a pas voulu déroger à la règle, donc il y a aussi, des références à Messaline sur cet album ! »

Le nouveau line-up a-t-il apporté une nouvelle façon de composer ? « Une guitare sèche, le chant… On a vraiment composé à l’ancienne : j’enregistrais chez moi des parties de guitare, on est parti sur une base de, je crois, 24 à 27 riffs ou morceaux différents – on est assez boulimiques de travail avec Eric – on a pris les morceaux qui semblaient le plus inspirer Eric au niveau du chant mais aussi qui soient en lien avec ce que faisait Messaline avant. On a fait des prémaquettes, on a élaboré le squelette de l’album, enregistré basse et guitares, envoyé tout ça au studio avant de tout réenregister. » Ça reste donc assez organique comme façon de procéder, à l’ancienne, comme les références qu’on retrouve sur cet album. Dès Les 3 stryges, une ambiance est posée, un peu « fin de vie » avant un retour à la vie assez jazzy, prog à la Magma et Ange (référence ultime pour Eric Martelat) dont le fondateur, Christian Descamps intervient sur Black Shaman. Il y a d’autres invités, sur ce disque : « il y a des invités qui interviennent sur endroits : d’abord des invités qui n’ont pas forcément une grande reconnaissance, des gens avec qui on a joué dans des groupes, de très bons musiciens qui ont apporté des couleurs qu’on recherchait sur divers morceaux : de la guitare flamenco, de l’orgue Hamond, du slide, de l’harmonica… C’est vraiment des potes qui sont venus nous prêter main forte. Après il y a un instrumental qui fait une transition, et à la fin il y a la reprise de Ange qui est en fait un medley de 4 morceaux qu’on a réassemblés, réorganisés pour pouvoir faire cet hommage. Et puis il y a ces chanteurs : Jo Amore de King Crown, renaud Hantson, Christian Descamps… » Il y a également deux interludes, deux « marque page » qui permettent à l’auditeur de souffler un peu. Maintenant, quel est le morceau le plus représentatif du Messaline de 2022 selon Mathieu ? « Sans hésiter, Les 3 stryges. Parce qu’il y a un riff mémorable, résolument rock hard. Et puis un refrain très progressif qui devient de plus en plus grandiloquent avec l’avancée du morceau, et surtout, il y a cette espèce d’introduction qui dure 2’ et qui annonce les thèmes abordés dans le morceau. Ce titre a une vraie plus-value sur son ensemble ». On remarquera aussi la pochette – une nouvelle œuvre signée Stan W. Decker – où les membres de Messaline se mettent également en scène : « On a voulu aller jusqu’à la référence sur la pochette où il y a des clins d’œil à Rainbow, au Love gun de Kiss, et à la peinture de la fin du XIXème. Eric, qui est prof de dessin, avait fait le croquis de base de ce qu’allait devenir la pochette. Il était déjà en contact depuis un certain temps avec Stan qui a accepté de faire cette superbe pochette, à l’image de ce qu’on voulait véhiculer. » Un groupe c’est aussi la scène, et si quelques concerts sont prévus, Messaline devrait retrouver la route à partir du mois d’avril. Terminons avec le classique de Metal-Eyes : quelle pourrait être la devise de Messaline, selon Mathieu ? « Ouh, là…. Allez, Carpe diem » lâche-t-il en riant. Ce qui ne devrait pas s’avérer trop compliqué, Messaline s’étant toujours adressé aux amateurs de mélodies puissante et de riffs efficace. Le retour à un esprit « classic hard rock » développé sur Vieux démons saura trouver son public.

SATAN JOKERS: Symphönïk kömmandöh

Heavy metal, France (Brennus, 2018)

Je ne suis pas étonné… Que Renaud Hantson veuille revisiter les grands morceaux de son Satan Jokers pour en proposer des versions symphoniques semble d’ailleurs naturel. Pourquoi les grands de ce monde l’auraient-ils fait et pas les légendes hexagonales? Ce Symphönïk kömmandöh (faudra m’expliquer les trémas, un hommage à Motörhead, peut-être?) revisite ainsi 16 morceaux de la carrière de SJ, toutes époques confondues. Accompagné de son groupe actuel (Michael Zurita à la guitare, Pascal Mulot à la basse et Aurélien Ouzoulas à la batterie), Hantson fait appel à l’orchestre symphonique Phocéen (Marseille, donc) pour réinterpréter sa vie d’avant (les glorieuses années 80 avec 4 chansons) et son monde actuel, celui du dévoilement de ses addictions et de son travail psychiatrique avec le Dr Metal, Laurent Karila. Je me jette sur les deux derniers titres, les classiques parmi les classiques que sont Pas fréquentables et Les fils du metal. Verdict: la voix de Hantson est toujours puissante, et le résultat est globalement intéressant. Mais il n’est pas évident, même pour un guitariste aussi talentueux que Zurita de reproduire le travail de Stéphane Bonneau, guitariste originel du combo. Si l’apport d’arrangements classiques offre une autre couleur à l’ensemble de ces morceaux, il n’en révolutionne pas totalement l’esprit originel. La sélection des chansons de sa période « je me confie en musique » (Ma vie sans, Substance récompense, Appétit pour l’autodestruction, Club 6 sex 6, Milfs, Phobies) résume bien cette psychothérapie musicale. Même si on aurait préféré être plus surpris, cet album est un plaisir que s’est fait Satan Jokers et qui séduira sans aucun doutes les fans.

BORN FROM LIE: The promised land

born-from-lie-2017Heavy metal, France (Brennus, 2016)

Formé en 2014, le trio francilien Born From Lie est déjà responsable d’un album éponyme paru l’an dernier avant de présenter ce nouvel essai, The promised land en fin d’année 2016. Autant dire que les gaillards savent qu’il n’y a pas de temps à perdre pour prendre une des rares places qui pourrait se libérer dans notre petit monde du metal. Officiant dans un heavy mélodique, les guitares souvent originales côtoient des rythmiques déterminées sur fond de voix claires auxquelles, par instants, se mêlent quelques growls. Si l’album souffre des écueil malheureusement trop fréquents au sein des groupes français (chant anglais trop rarement compréhensible et souvent limite – et trop mis en avant – des influences par trop évidentes dont les incontournables Iron Maiden ou Metallica et, surtout, un style pratiqué par des dizaines de formations tout aussi prometteuses), on remarquera les efforts dans le travail des mélodies, variées, et du travail guitaristiques qui réservent quelques agréables surprises de tricotage original. Les mélodies sont parfois empreintes d’un esprit celtique  (In my head, Far away from here) ou oriental (The promised land, intro instrumentale à No escape)  assez agréable. Egalement, en nos périodes d’inhumanité où les peuples fuient et migrent vers de nouvelles terres d’espérances, on ne saurait qu’être curieux des textes qui content une « simple » histoire et se révèlent d’une triste réalité historique tout autant d’une actualité affligeante. Cependant, au delà de ces trouvailles qui éveillent mon intérêt, on pourra aussi déplorer quelques effets guitaristiques dont on se serait passé, comme ces crissements intempestifs ou cette rage inutile sur les parties finales de This is my home ou Far away from here, et certains passages quelque peu trop démonstratif du savoir jouer de Jérôme Thellier. Agréable dans l’ensemble, et doté d’un livret enfin digne de ce nom, The promised land pourrait, à terme, permettre à Bon From Lie de se faire un nom dans notre Landerneau du metal. Si le groupe parvient à se distinguer de la multitude.

Note: 7/10

SILVERTRAIN – Walls of insanity

silvertrain 2016Heavy metal, France (Brennus, 2016)

C’est à grands renforts de pub que Silvertrain, une des formations prometteuses de la scène française des années 80 – mais qui n’a jamais pu dépasser le statut d’espoir ou d’outsider – tente de revenir. Ce Walls of insanity, déterminé et bien fait dans l’ensemble, frais et vif, offre de belles promesses. Si on ne peut que penser à AC/DC avec le titre d’ouverture (Rock or burn, dan sle genre clin d’oeil évident…), je suis rapidement séduit par cette voix haut perchée et rugueuse qui rappelle celle d’Udo Dirckschneider, et par des guitares précises délivrant des riffs chirurgicaux. Lorelei se fait plus rapide et heavy offrant un solo trépidant, avant qu’une batterie locomotrice entraîne un Raptor’s mind qui ne peut qu’évoquer Accept (tient donc..) avant de proposer un Walls of insanity plus lent et ambiancé, sur lequel des claviers inquiétants font leur apparition auprès de guitares qui cisaillent. Si Burning land est plus traditionnel et me convainc moins, le presque doom Mentempsychosis (c’est quoi ce mot???) précède un Fly towards the stars qui renoue avec la rapidité, influencé par Judas Priest et le power metal allemand. Pacte de sang se distingue par son chant français – tout aussi intéressant, d’alleurs. Pourquoi ne se limiter qu’à un titre? – et Redemption vient conclure cet album avec de jolies descentes de manche et une belle montée en puissance et en densité.  Si l’album est clairement divisé en trois partie (heavy, plus légère puis de nouveau plus rapide), il manque un je ne sais quoi pour en faire un album, au sens propre du terme, remarquable. Walls of insanity fait cependant plaisir à écouter, certes, et reste un album efficace et plaisant.

Note: 8/10

Titre que je retiens: Lorelei

SYR DARIA – Voices

syrdaria_voicesOk, le dessin façon Rorschach qui illustre la couverture de cet album est une intrigante invitation à découvrir le contenu musical qu’on imagine volontiers quelque peu… décallé. Ok, ce même contenu musical explique dès les premiers sons cette illustration: en regardant bien, on distingue un clown. Effrayant, de la famille de ceux qui ne vont pas permettre une réconciliation avec les clownophobes. Et il y en a quelques uns… Passons! Car Syr Daria nous propose, avec Voices, un album solide, bien produit qui donne envie de taper du pied. On sent l’influence des Metallica, Slayer, Maiden, Queensrÿche même et autre géants du genre. Mais ce n’est pas pompé, Syr Daria crée son propre univers sonore qui, s’il nous est familier comme l’Auguste ou le clown triste, nous entraîne dans son sillage. Le chant est déterminé, les rythmiques variées, les guitares tranchantes, élaborées aussi, rappellent parfois, et sans nostalgie, ce qui se faisait dans les 80’s. Les 10 morceaux ici proposés nous transportent du cirque à l’antiquité égyptienne ou grecque, ou dans des temps plus lubriquement modernes. Voices est un album efficace et plus que plaisant, bien que dans une veine des plus traditionnelles. Mais il est rassurant aussi dans le paysage métallique français.

Note: 7,5/10

Titre que je retiens: Hannibal

Interview découverte : HOPES OF FREEDOM

Entretien réalisé au Dr Feelgood à Paris le 15 avril 2016.

Quelque semaines après la sortie de son second album (au mois de janvier 2016), Metal Eyes a profité de la venue à Paris de la plupart des membres du groupe pour faire le point avec Lucas Lambert, fondateur en 2007, chanteur et guitariste du groupe rouennais. Interview découverte d’une formation à suivre dont vous avez découvert la chronique de Burning skyfalls la semaine dernière.

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