SWARM: Anathema

Metalcore, France (Autoproduction, 2019)

Après un premier album paru en 2017, Division & disharmony, les Français de Swarm reviennent avec Anathema, un second essai qui pourrait bien les faire passer dans la cour des grands. Même si metalcore n’est pas mon truc, force est de reconnaître que la rage et la puissance qui se dégagent de ce disque sont exemplaires. Après une introduction aux faux airs de Judas Priest, New sun rentre dans le vif du sujet. Les guitares grasses et speed accompagnent un chant enragé plus que simplement hurlé, même si ce dernier fait nombre d’apparitions en arrière plan. L’ensemble est, à la grâce d’une rythmique qui martèle et s’emballe, syncopé et explosif. Les références au metal et au thrash sont nombreuses. Et avec ses 7’49, ce premier titre semble résumer l’esprit de l’album. Frontiers pioche également du côté de Rage Against The Machine et du rap, avec quelques clins d’œil à Slayer. Intifada parle de lui même. Le titre est guerrier, hardcore et engagé. « J’ai vu le jour alors que nous étions frères »… Oui, le monde change, il ne semble plus n’y avoir qu’ennemis partout… D’où cette référence à l’anathème, à la sentence d’excommunication…  Swarm nous apporte ici 11 morceaux qui ne se ressemblent qu’en l’énergie qu’ils dégagent. Et même si le rythme est plus qu’enlevé, les mélodies, alternant speed et lourdeur, l’auditeur est emporté dans un univers entraînant et, somme toute, lumineux. Les jalons positifs se retrouvent un peu partout, ce qui apporte sans doute ce côté frais qui manque à tant d’autres (comme ce quatrain en français qui vient clore The deed is done. Une piste à suivre? ou, juste après cette intro de Spoutnik explorer à la guitare claire qui évoque indéniablement Metallica). Brutal, efficace et… enjoué. Une belle découverte de fin d’année, en tous les cas, une belle promesse..

THE DAMNED – Black is the night

Punk, Angleterre (BMG, 2019)

Formé en 1976, The Damned fut rapidement affilié à la scène punk anglaise. Le ton, l’arrogance, l’irrévérence des textes (Democracy? et Anti-pope parlent d’eux mêmes), tout y participait, en effet, à l’exception de la musique, plus orienté rock, selon moi, que punk. A quelques exceptions près (So messed up, Machine gun etiquette aussi courts qu’explosifs et bordéliques), on est loin des Sex Pistols, G.B.H ou The Exploited. Qu’importe, plus de 40 ans plus tard, le groupe de David Vanian et Captain Sensible est encore là, et en joyeuse forme comme le prouve son dernier album en date, Evil Spirits (2018). Alors tant que les Anglais ont le vent en poupe, pourquoi ne pas proposer un récapitulatif de leur riche carrière? C’est ce que nous apporte ce Black is the night, double compilation retraçant l’histoire musicale des Damned. Avec quelque 40 titres, on se replonge dans le rock teinté ici de ska, là de presque pop, là encore de boogie, et toujours le groupe semble faire la fête. Des morceaux courts, directs qui ne dépassent que très rarement les 4′, qui se révèlent simplement encore efficace. Comment ne pas (re)succomber à Love song, Bad time for Bonzo, Melody Lee ou autre Problem child (qui n’a rien à voir avec le morceau d’AC/DC)? The Damned auraient certainement mérité plus d’exposition, mais ainsi va la vie. Reste que l’on peut aujourd’hui se rattraper avec cette très belle compilation.

AMON AMARTH live à Paris (Le Zénith, 25 novembre 2019)

C’est un Zénith en petite configuration qui accueille le grand – et brutal – cirque viking ce soir. Une affiche 100% suédoise (OK, exception faite d’une chanteuse et d’un batteur…) débarque à Paris: Hypocrisy, Arch Enemy et Amon Amarth! Mais avant de pénétrer dans ce si fameux Zénith du parc de la Villette, quelques surprises nous attendent: Peet se voit interdire de fumer une cigarette sur le gigantesque parvis en plein air tandis que je me vois invité à quitter ce même endroit où l’on n’a plus le droit de traîner et de passer un simple appel… Il y aura mieux plus tard: alors que Hypocrisy en est au milieu de son set, Phiphi, mon ami créateur du logo de Metal Eyes, erre dans les coursives pour entrer dans la salle. Les rideaux des escaliers tirés, on lui interdit le passage. Comme on le fait au théâtre une fois la pièce commencée. Pour un concert de rock, où l’on est censés circuler librement, les restrictions deviennent lourdingues…

Passons sur ce coup de gueule pour entrer dans le vif du sujet: c’est donc un Zénith en configuration presque minimaliste qui accueille quelques 3.000 spectateurs. La scène a même été très avancée, les crash également, laissant un vaste espace entre la scène et le public. Mais quand on voit la gueule des bouches à feu, on se dit que c’est sans doute mieux ainsi! Si Amon Amarth n’a pas, en France et hors festival, la capacité à remplir un Zénith, la salle s’avérera bientôt une nécessité au regard de la gigantesque production de ce soir (ce qui pourrait bien être le cas aussi pour Sabaton, en février prochain pour une autre affiche en jaune et bleu).

 

Trois groupes sont ce soir à l’affiche. Tout d’abord Hypocrisy qui ouvre les hostilités avec son death rageur. Mais voilà: la scène est noyée sous la fumée, une fumée blanche épaisse comme un mur qui empêche le public de voir une quelconque forme de spectacle. Et lorsqu’enfin ce fog se dissipe, on peu distinguer les musiciens dans une belle lumière verte ou d’un blanc sec, avant que le technicien appuie de nouveau longuement sur le bouton… Alors que dire? Superbe prestation? Loin d’être un fan invétéré du combo de Peter Tägtgren, je préfère écouter de loin, monter dans les gradins, constater qu’il y a encore beaucoup de brouillard. Une bière s’impose.

Le changement de plateau se fait en moins d’une demi-heure. Arch Enemy est visiblement très attendu. La scène est très métallique, des spots enfermés dans des cages du plus bel effet projettent l’ombre des barreaux qu’ils balayent. Michael Amott et sa bande sont certes concentrés mais sont en forme. Il faut dire que Paris, ils connaissent bien, que le public a toujours été présent. Si les regards se tournent naturellement vers Alissa White-Gulz, la vocaliste sait comment séduire ce public: comme elle le fait toujours, avec douceur et en français. Mais quelle puissance quand elle se met à growler!

Pendant près de 45′, le quintette dispense une setlist des plus puissantes superbement mise en lumières. Evidemment, certains titres résonnent plus que d’autres en ces heures troubles (War eternal, No gods, no masters) mais on se délecte des Ravenous, Under the black flag we march et autres Dead bury their dead. Arch Enemy nous a offert une très belle prestation, belle mise en bouche avant le gros morceau qui arrive!

Une immense toile noire cache la scène qu’on imagine déjà énorme. Casque ou drakkar en guise d’estrade de batterie, peu importe, ce qui compte ce soir c’est le spectacle que nous promet Amon Amarth. Cela fait maintenant plus de 3 ans que les Suédois n’ont pas mis les pieds dans notre ville, leur dernière venue remontant au 7 novembre 2016, au Casino de Paris. Le public est chaud lorsque la salle est une nouvelle fois plongée dans le noir et que retentissent les premiers couplets d’un certain Run to the hills.

Puis, dès que tombe le rideau, dès qu’apparaissent Olavi et sa bande, c’est une débauche d’énergie. De la lumière, du bruit et de la fureur pendant une heure trente. Le casque de viking sur lequel trône la batterie est désormais agrémenté de deux écrans en lieu et place des yeux. Ecrans qui permettent quelques judicieuses animations venant compléter celles in vivo. Car dès Runes to my memory, Amon plonge son public dans un enfer de flammes et de fumées, à commencer par le logo du groupe qui, disposé de chaque côté de la batterie, s’embrase et brûle tout au long de cet imparable titre. Puis les bouches à feu entrent en action. Disposées un peu partout sur scène, des colonnes de feu égaillent Death in fire.

Si chaque membre est à fond et connait parfaitement sa partition – on notera particulièrement l’acharnement de bûcheron de Jocke Wallgren, le « petit » dernier à la batterie – Johann Hegg semble particulièrement heureux d’être de retour dans notre capitale. Plus que ses paroles qui caressent le public dans le sens du poil (les classiques « Que c’est bon d’être enfin de retour à Paris! » et autre compliments), c’est son large sourire qui en dit le plus sur son état. Le chanteur semble aujourd’hui complètement remis de accident de cascade dont il avait été victime en mars dernier.

Il joue avec le public, grimpe sur son « ego riser » se prenant un jet de fumée en pleine face, ne laissant apparaître que ses bras. Et, prenant le public à contre pied, c’est en plein milieu du concert que les canons à confettis entrent en oeuvre, émaillant la salle de scintillements du plus bel effet.

Si visuellement le show est énorme, musicalement, le public est aussi servi. Naturellement orienté sur les deux derniers albums, les grands classiques d’Amon Amarth sont aussi, heureusement, de la partie. Une set list irrésistible qui résume bien la carrière des vikings. First kill, Deceiver of the gods, The way of the vikings, Guardians of Asgaard, tout y passe. Et le désormais incontournable Raise your horns annoncé par un Johann qui s’empare de sa corne « judicieusement » placée à sa ceinture, au cas où. On se doutera que ce titre ne fera plus partie de la setlist le jour où le chanteur n’en sera plus équipé…

Le rappel constitue peut-être le seul point de frustration du concert: après tant d’énergie, les deux titres finaux (The way of the vikings et Twilight of the thunder god)  passent à une vitesse folle. Mais une chose est certaine, c’est que ce soir Amon Amarth a livré un concert exemplaire et dantesque de bout en bout. Superbe soirée!