AQME

Metal, France (At(h)ome, 2017)

Pour son nouvel album, annoncé un peu partout dès l’été dernier via affiches et pubs diverses, Aqme a décidé de remettre les compteurs à zéro avec un album sans titre. Comme un retour à la case départ, ce qui est étrange dans la mesure où il s’agit du second disque avec ce line-up: l’indéboulonnable duo des origine composé de la bassiste Charlotte Poiget et du batteur Etienne Sarthou (également responsable du son de ce disque), pour la seconde fois accompagnés du chanteur Vincent Peignart-Mancini et du guitariste Julien Hekking. Nouveau départ donc, pour lequel Aqme se fend d’un album superbement produit et surtout composé de 12 titres explosifs. Vocalement, Vincent a parfaitement trouvé sa place, entre rage et mélancolie. On s’amuse du choc lorsqu’il partage le micro avec Reuno (Lofofora) sur Rien ne nous arrêtera. Aqme a toujours su allier colère et groove, rage et crasse dans sa musique et franchit ici encore un nouveau pas. La variété fait plaisir à entendre: Aqme navigue entre lourdeur pachydermique et sombre mélancolie, heavy riffu et couillu et moments plus popisants. Bref, Aqme, en se renouvelant tout en restant lui-même, nous offre sans aucun doute un de ses meilleurs albums à se jour.

Histoire d’une légende: HELLOWEEN

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Une nouvelle tournée ou un nouvel album de Helloween représente toujours pour l’amateur de mélodies puissantes, chantantes, aux rythmes rapides et enlevés un moment de plaisir. Car s’il y a fort à parier que si trois noms reviennent souvent, le metal allemand ne se résume pas à Scorpions, Accept ou Rammstein, loin s’en faut. Au fil des années, nos voisins germains ont su, bien mieux qu’en France, exploiter leurs différences culturelles pour en faire une force musicale et commerciale sérieuse et respectée. Si l’histoire retiendra, parmi d’autres, des formations comme Kreator, vétéran brutal de la scène Thrash, Running Wild, Rage ou Blind Guardian, elle se souviendra surtout de Helloween dont la montée en puissance fut aussi importante que sa chute fut brutale et sa reconquête courageuse et glorieuse. Depuis la sortie de son premier album, Walls Of Jericho en 1985, Helloween a en effet conquis le monde avant de sombrer dans une quasi banqueroute. Un changement de chanteur plus tard, la formation parvient, à la force du poignet, à redorer son blason et à stabiliser sa carrière, malgré quelques choix parfois surprenants. Malgré la sortie de succulents albums ces dernières années, il est un évenement que TOUS les fans attendaient avec impatience :  une réunion avec les anciens membres. Si les deux parties du Hellish tour ont permis un rapprochement avec Kai Hansen et son Gamma Ray, l’année 2017 sera marquée par la tournée Pumpkins united qui voit les membres actuels accueillir au sein de Helloween non seulement Kai Hansen mais également – surtout – Mickael Kiske, le premier chanteur. Retour sur l’histoire des citrouilles enragées.

Paris, le 8 avril 2016, Olympia

SPLENDEUR

Formé en 1978 par les guitaristes Michael Weitkath et Kai Hansen (également au chant) accompagnés de Markus Grosskopf (basse) et Ingo Schwichtenberg (batterie), Helloween s’impose en quelques années comme le challenger le plus important des leaders de la scène allemande du début des 80’s, Scorpions en tête. Le groupe prend le temps nécessaire pour peaufiner son style et travailler son répertoire. Ce n’est qu’en 1985 que sort son premier disque, un mini album sobrement connu sous le nom de Helloween. Si cette carte de visite de cinq morceaux ne montre naturellement pas encore toutes les facettes musicales du groupe, il en est une qui deviendra rapidement sa signature : le speed. Car Helloween joue vite. Le groupe semble non seulement déterminé à rivaliser avec des formations américaines au prestige grandissant, comme Metallica ou Slayer, mais cherche également à faire de l’ombre à ses compatriotes. Scorpions, avec Love at first sting (1984) dominent le monde du hard rock, Accept tente de leur voler la place avec son dernier né, Metal heart, Kreator vient de sortir Endless pain, les pirates de Running Wild confirment leur statut d’outsider aux dents longues avec leur second Lp, Branded and exiled… Bref, la concurrence est rude. Son mini Lp a permis à Helloween de se faire remarquer par le label Noise qui lui propose un contrat. Dans la foulée, le groupe publie son premier véritable album, le vigoureux Walls of Jericho dont les neuf titres confirment le statut tant local qu’européen du groupe mené par Kai Hansen. Les morceaux s’éloignent de l’esprit thrash direct pour inclure de nombreux aspects mélodiques qui évoquent souvent Judas Priest ou Iron Maiden. Evoquer la musique de Helloween se fait désormais en parlant de speed mélodique ou power metal. Le groupe s’impose alors un premier changement stratégique majeur : Kai Hansen ne pouvant assurer à la fois le chant et la guitare décide de céder le micro. Arrive le chanteur Michael Kiske dont les capacités sont bien supérieures à celles du Kai de 86. Helloween s’attaque à un gigantesque projet à traduire sur un double album. Las, Noise n’a pas assez confiance dans le potentiel commercial de son poulain et l’incite à publier la saga Keeper Of The Seven Keys en deux volumes. Une saga dont certains morceaux frôlent le quart d’heure, proche de l’esprit progressif. Keeper of the seven keys – part 1 parait en 1987 et montre un groupe heavy, speed, puissant, un groupe dont les mélodies efficaces, mémorisables aux intonations souvent aussi humoristiques que les illustrations de l’album font mouche immédiatement. Même le marché américain cède et tombe sous le charme des armées de citrouilles pas si maléfiques que ça. Keeper of the seven keys – part 2 suit un an plus tard (1988) et rencontre le même bonheur. Helloween s’offre la tournée des grands ducs, ouvrant sur les dates européennes du Monsters Of Rock dont la tête d’affiche n’est autre qu’Iron Maiden, alors au sommet de sa gloire. Les chemins des deux groupes se croiseront régulièrement à l’avenir, et ce n’est que pure logique. Car non seulement les deux chanteurs ont des voix similaires, mais le mimétisme se traduit même dans la musique, sans que Helloween ne tombe dans le vulgaire plagiat. Les Allemands développent leur propre univers tant musical que visuel. Bien que la citrouille alcoolique et amatrice de substances diverses devienne un élément indispensable de l’esprit Helloween, il est impossible de la confondre avec un certain Eddie dont l’aura n’est en rien comparable… Le succès du groupe est immortalisé en 1989 sur un premier album live, Live in the UK. Etrangement, ce disque sort sous trois versions différentes, avec le même track listing (la version européenne bénéficie toutefois au milieu d’un morceau supplémentaire, Rise and fall) mais trois appellations différentes : les Japonais ont ainsi droit à un Keepers Live tandis que le marché américain propose I want out live.

Paris, 28 avril 2016, le Trianon

DECADENCE

Les gros labels commencent à faire de l’œil aux Allemands qui se laissent finalement séduire par l’offre d’EMI (tiens donc…). Noise ne l’entend pas de cette oreille et intente un procès à Helloween qui a voulu casser son contrat. Le groupe perd le procès et subit les très lourdes conséquences du jugement : il doit payer une forte amende à Noise et, pire, se voit interdire de sortir le moindre disque en dehors des marchés européens et japonais. Condamné à perdre, ou plus exactement, forcé à renoncer à l’énorme potentiel commercial du territoire américain qui venait de lui faire un triomphe, Helloween va connaitre une chute aussi vertigineuse que sa conquête fut glorieuse. Kai Hansen quitte le cucurbitacée pour former Gamma Ray, et se voit remplacé par Roland Grapow. Les deux albums qui suivent sont osés, certes, mais humainement et commercialement catastrophiques. Le procès a laissé des traces, et la musique s’en ressent. L’accueil tant public que critique que reçoit Pink bubbles go ape à sa sortie en 1991 n’est pas froid, il est glacial. Personne ne comprend où le groupe veut en venir et Chameleon, paru en 1993, n’arrange pas les choses. Si Helloween n’a plus à démontrer son sens de la mélodie, le groupe semble avoir levé le pied, cela dès la couverture on ne peut plus simpliste. L’introduction du violon surprend, moins cependant que la disparition des guitares sur certaines chansons. Le public, désorienté, déserte et les tensions dans le groupe, plus importantes que jamais, résultent en l’éviction de Michael Kiske, suivi par le dépressif et schizophrène Ingo (le batteur se suicidera en mars 1995) et en la fin du contrat avec EMI. Peu de possibilités s’offrent au groupe : soit disparaitre, mais cela est inenvisageable tant la passion qui anime les membres fondateurs est intacte, soit relever la tête, et renaitre.

RECONQUETE

 

Paris, le 8 avril 2016, Olympia

Le salut provient de l’intégration du chanteur d’une formation très en vue, Andi DERIS, dont le groupe Pink Cream 69 gravit fièrement les échelons de la gloire, et dont le dernier né, Games people play (1993), rencontre le succès un peu partout en Europe et au Japon. Helloween embauche également le batteur Uli Kusch et signe sur un label de taille raisonnable, Raw Power. La formation ainsi constituée ne changera pas jusqu’en 2002. Cette stabilité se traduira naturellement par une efficacité grandissante des compositions du nouveau Helloween. Andi Deris espère que ses fans, ceux de Pink Cream 69 le suivront dans cette nouvelle aventure. Mais il sait également qu’il faut proposer un bon album. Lorsque parait Master Of The Rings en 1994, les critiques s’avouent soulagés, accueillant positivement cet album qui renoue avec la puissance et les mélodies qui ont fait la gloire du groupe. Le public suit, le succès est de retour. La pêche nouvelle se traduit de nouveau deux ans plus tard avec The time of the oath dont la pochette rappelle l’époque glorieuse de Keeper of the seven keys. Helloween s’engage alors dans une vaste tournée mondiale et en tire le double live High live (1996), enregistré au bout de quatorze mois de tournée alors que le groupe était épuisé. Epuisé mais étant de nouveau dans le cœur des fans, Helloween reprend enfin confiance. La troupe de Michael Weikath doit toutefois confirmer auprès du public et des médias son retour en grâce. L’époque s’y prête d’autant plus que les avancées technologiques permettent à Helloween de tirer avantage du numérique.

Paris, le 8 avril 2016, Olympia

Better than raw complète la trilogie entamée avec les deux disques précédents et rassure tout le monde quant à la santé mentale et musicale du groupe et ce dès la pochette qui se rapproche toujours plus de l’esprit Helloween : une sorcière sexy préparant, le sourire aux lèvres, une potion quelconque dans une marmite digne de celle qu’utilise Panoramix. Quand un groupe décide d’inclure dans son nom le mot Enfer (Hell), il doit s’attendre à quelques surprises. Elles viennent cette fois-ci du Japon, qui publie deux CD de versions disons… particulières de certains des succès de Helloween depuis ses débuts. Fort heureusement, ces Karaoke Remixes 1 et 2 (1998) ne sont destinés qu’au marché nippon, le groupe n’ayant pu s’opposer à la diffusion de ces produits qui, au final, ne portent que le nom du groupe. En revanche, les Allemands étant contractuellement liés à Raw Power le temps d’un dernier album, c’est volontairement qu’ils enregistrent un CD décalé de reprises. Metal jukebox (1999) propose donc une collection de chansons populaires arrangées à la sauce metal. Abba y côtoient David Bowie ou, plus rock, Scorpions. Il est ensuite temps, avec l’arrivée du nouveau millénaire, de repasser à quelque chose de plus sérieux. Pour son nouveau label, Nuclear Blast, Helloween enregistre The dark ride au contenu aussi sombre que sa pochette, illustrée, une fois n’est pas coutume, d’une citrouille à l’aspect inquiétant, menaçant, voire horrifique. Si le groupe parvient à s’imposer de nouveau à travers la planète, tout ne se passe pas pour le mieux entre les musiciens. Alors que la formation était stable depuis une petite dizaine d’années, certains egos semblent prendre le dessus. Et lorsque « les gens ne jouent dans un groupe que pour l’argent, ou simplement pour leur égo et pas pour le bien du groupe, ça devient de moins en moins vivable » (NDMP : propos que m’a tenus Andi Deris au cours d’une interview en 2010). Helloween se sépare alors de Roland Grapow et invitent, quelques temps plus tard, Sascha Gerstner, guitariste officiant chez Freedom Call. Entre temps, Noise publie, après avoir obtenu le consentement du groupe, une nouvelle compilation, Buried treasure, un double album (triple en édition limitée). L’actualité, toutefois, c’est l’intégration de Sascha. Selon le guitariste, le premier album de Helloween auquel il participât fut enregistré simplement et naturellement, sans prise de tête.

Paris, 28 avril 2016, le Trianon

Tout semblait couler de source à une exception : Mark Cross, le nouveau batteur, ne put enregistrer ce disque car il était malade. Helloween reçut alors l’aide de Mikkey Dee, batteur de Motörhead. Incontestablement, Rabbit don’t come easy (2003) bénéficia de cette publicité. Car si cet album est de prime abord surprenant, il franchi l’épreuve du temps. Daniel Loble intégra par la suite Helloween en tant que batteur. Le groupe de nouveau reconstitué pouvait alors s’attaquer à un projet depuis longtemps attendu par les fans. Bien que le temps ait passé, pour beaucoup, Helloween sera à jamais indissociable des deux volets de Keeper of the seven keys. Dix-huit ans après, la formation estime qu’il est temps de donner un successeur à la saga, et ainsi clore la légende. Lorsque sort, en 2005 et sur SPV, Keeper Of The Seven Keys – The Legacy, les Allemands retrouvent leur place dans le cœur de nombreux fans. Oh, bien sûr, certains se disent déçus ou estiment que jamais il n’aurait fallu s’attaquer de la sorte à un tel monument du Metal, mais le public répond présent dans sa très grande majorité. Helloween met alors sur pieds une grande tournée mondiale d’une année au cours de laquelle sera enregistré le troisième live de la carrière du groupe. Le double Live in Sao Paolo (2007) est plus centré sur la trilogie des Keepers, tout en incluant quelques témoignages d’autres albums. Helloween semble désormais intouchable. La tournée a soudé ses membres comme jamais auparavant. Tout semble continuer de se faire naturellement. Cette année 2007 voit sortir Gambling with the devil, nouvelle offrande réussie et acclamée par le public et les médias. Le groupe semble équilibré, et parait simplement bien, à l’aise, ne cherchant pas, ou plus, à démontrer quoique ce soit. Il prend les choses comme elles viennent. C’est ainsi que nait l’idée, pour fêter les 25 ans depuis la sortie de Walls Of Jericho, de réengistrer certains morceaux en version acoustique. Les grands classiques de Helloween sont ainsi joyeusement et sans complexe revisités et présentés au public sous l’appellation Unarmed – Best Of 25th Anniversary. Mais à peine le public a-t-il le temps de comprendre ce projet que débarque le sombre et violent nouvel album 100% metal, 7 Sinners , qui renoue avec un parcours passé dont jamais Helloween n’aurait dû s’éloigner.

11 janvier 2011, Elysée Montmartre

La tournée qui suit est un triomphe, Helloween semblant avoir retrouvé équilibre et créativité. Deris s’est, petit à petit, imposé comme le leader de la formation en en devenant le compositeur et auteur principal, suivi de près par Sascha Gerstner. L’histoire se répète au cours des années et productions qui suivent, Helloween renouant avec un rythme album tournée soutenu, soit par périodes de deux à trois ans. Ainsi parait en 2013 Straight out of hell, un nouveau succès qui donne une seconde fois l’opportunité à Helloween de tourner en compagnie du Gamma Ray de Kai Hansen.

Paris, le 8 avril 2016, Olympia – avec Kai Hansen

Le Hellish tour part II excite les appétits des fans les plus avides d’une reformation et le plaisir de se retrouver tous sur scène le temps de quelques chansons en rappel se lit sur les visages des musiciens. Une étape reste à franchir avant que le fantasme ne devienne réalité… En attendant, parait en 2015 un nouvel album, le très remarqué My god given right, suivi d’une nouvelle tournée mondiale à succès. Enfin, fin 2016 l’annonce tombe : Helloween remontera sur les planches mondiales en 2017 et 2018 pour une tournée exceptionnelle intitulée Pumpkins united. Une tournée intégrant Kai Hansen en troisième guitariste et Mickael Kiske qui partagera le chant avec Andi Deris. Les concerts verront ainsi un Helloween à 7 visages, 7 personnalité ayant, semble-t-il, enterré hache de guerre et griefs pour regarder ensemble vers l’avenir. Cette formation nous offrira à n’en pas douter un album live, mais qu’en est-il d’un nouvel album studio ? L’avenir nous le dira.

Paris, 28 avril 2016, le Trianon

JOE BONAMASSA: Live at Carnegie Hall – An acoustic evening

Blues, USA (Provogue, 2017)

Après un superbe Blues of desperation, Joe Bonamassa nous offre un album live acoustique enregistré au cours de la tournée qui a suivi. Et c’est un double album, paru fin juin, qui nous apporte le plein de blues et de feeling. A ce niveau, c’est un minimum. Démarrant avec le dynamique This train, suivi d’un Drive tout en émotion, Bonamassa se livre très vite à l’exercice du blues acoustique avec une aisance et un bonheur sans pareil. Sa voix chaleureuse sublime le travail de son doigté unique, magique. Les cordes sont léchées, aimées, les choeurs profonds et envoûtants, la sélection des chansons impeccable. Du blues des champs de coton (partout) aux sonorités irlandaises (Black lung heartache), du rock retravaillé à la chanson populaire (Blue and evil), tout y passe avec un extraordinaire feeling. Ce gars est un magicien de la six cordes. Et un double album n’est guère suffisant pour assouvir le fan. Ce Live at Carnegie hall, produit de main, pardon, d’oreille de maitre, par Kevin Shirley, est présenté sous divers formats, du CD au DVD ou Blu Ray, sans compter le triple vinyle. Il y a de quoi faire pour satisfaire tout le monde. Musicalement, s’entend!

Interview: STOLEN MEMORIES

Interview STOLEN MEMORIES : rencontre avec Baptiste Brun (guitares) et Antoine Brun (batterie). Entretien mené le 02 octobre 2017 au Hard Rock Cafe Paris

 

Stolen Memories

A l’occasion de la sortie de son nouvel album, (Paradox, sorti le 27 octobre et chroniqué ici-même), Metal Eyes est allé rencontrer les frères Brun, moelle épinière du groupe lyonnais qui nous dévoilent presque tout sur la conception de ce troisième album.

metal-eyes: Stolen Memories a été formé à Lyon en 2007, vous publiez aujourd’hui Paradox, votre troisième album, ce qui fait un album trous les 3-4 ans… Ce n’est pas très rapide comme rythme si vous voulez sortir du lot. Comment vous expliquez ça ?

Baptiste: C’est vrai… On est un peu fainéants (rires) ! Non, en fait, au départ on voulait enchainer les disques mais on a eu pas mal de soucis de label entre le premier et le deuxième album, ensuite, on a eu des soucis de line-up, ce qui nous a pas mal retardés. Et au bout d’un moment, à la suite de tout ça, on a décidé de faire un petit break. On a mis le projet en stand-by, on ne savait pas si on allait réattaquer, dans 6 mois, un an, 5 ans… Ce n’était plus du tout notre priorité, et finalement, ça nous a vite manqué, et c’est reparti de plus belle. Depuis, on ne s’arrête plus !

metal-eyes: Vous êtes justement passés de 5 musiciens dans le groupe à 3. Que s’est-il passé ?

Baptiste: Dès le départ, on n’a toujours été que 3 véritablement impliqués dans le groupe : nous deux, les frangins, et Najib, le chanteur. On avait déjà joué ensemble quelques années auparavant. Entre les 2 premiers albums, on s’est séparés de notre claviériste qui avait intégré le groupe juste avant l’enregistrement. Il n’avait de toute façon pas composé, il a seulement réarrangé ces parties. Sur scène, bien qu’on ai un clavier, on utilisait déjà des samples. On s’est dit que de toute façon, on pouvait simplement jouer avec des samples. Ça ne changeait pas grand-chose pour nous, vu que c’est moi qui composais cette partie, qui les enregistrait sur album… On a décidé d’adapter ça pour la scène. Sur le dernier, on n’est que 3 parque, avant l’enregistrement, on n’avait pas trouvé de bassiste qui nous correspondait. Je me suis occupé de la basse, ensuite, on a cherché quelqu’un pour les concerts.

metal-eyes: C’était donc le côté pratique ?

Antoine: Oui, parce qu’on avait envie de l’enregistrer cet album. On ne va pas se mettre des freins sous prétexte qu’on n’est 3 au lieu de 4, au contraire !

Baptiste: On avait vraiment besoin d’un bassiste pour les concerts, pas pour l’album. Là on a retrouvé quelqu’un qui, en plus, est très bien, qu’on a intégré au groupe rapidement et qui, je l’espère va rester. On verra bien !

metal-eyes: Si vous deviez décrire votre musique pour quelqu’un qui ne vous connait pas, qu’en direz-vous ?

Antoine: Il y a quand même une base metal non négligeable. C’est, à la base, le style qui nous a réunis, en plus du prog. On a des influences assez thrash par moment – on est des gros fans de Megadeth depuis qu’n est gamins, Testament, ce genre de thrash « sophistiqué » dirons-nous – et il y a des éléments progressifs qui se sont ajoutés. Baptiste avait fait un album solo, qui était une sorte de démo pour le groupe, la base de ce qu’on allait faire. Dans l’esprit d’un groupe. Et on a appelé Najib pour ça. C’est un metal prog assez accessible. On a voulu en faire quelque chose d’efficace.

metal-eyes: Accessible, oui, tout en ayant beaucoup de couleurs musicales. Un morceaux n’est pas linéaire. Si on parle de jazz, vous êtes d’accord pour dire que ça rentre un peu dans votre musique ?

Antoine: On peut dire, oui, du free jazz…

Baptiste: Moi, je parlerai plus de fusion que de jazz. Mais oui, il y a des passages sans doute orienté un peu jazz. Ça vient de ce qu’on écoute, on a beaucoup d’influences, on écoute beaucoup de musiques différentes, d’artistes différents, et forcément ça se ressent dans les compos e t l’interprétation.

Antoine: Influences diverses et variées, il n’y a pas que du prog…

metal-eyes: Si vous deviez maintenant décrire l’évolution de Stolen Memories entre les deux derniers albums – en dehors du changement de line-up, du passage de 5 à 3 – qu’en diriez-vous ?

Antoine: Il y avait vraiment une volonté de rendre notre son plus actuel : l’ajout de cordes à la guitare pour la rendre un peu plus lourde, dans les graves, avec quelques rythmiques un peu typées djent, un courant actuellement populaire dans le metal, tout en restant sur nos bases progressives. L’album est accessible à un plus large public. Même s’il est plus prog que celui d’avant, on a essayé de faire en sorte d’avoir une partie « chanson » importante : que le chant soit l’l’élément clé du disque. Il y a de bons refrains qui restent en tête, la mélodie qui prime sur la technique, ce qui n’était pas forcément le cas avant.

metal-eyes: Je ne suis pas forcément d’accord avec le fait que les refrains restent facilement en tête : il faut écouter plusieurs fois l’album pour vraiment s’en imprégner…

Antoine: Oui, ça reste du prog, donc, forcément… Quand je dis « restent en tête », c’est pas des refrains de pop, 3 mots qui sont tournés en boucle. Je ne veux pas négliger la pop, c’est ce qui fait la force de ce style-là : le côté très facile et entêtant.

Baptiste: Malgré tout, pour du metal progressif, ça reste accessible

metal-eyes: Visuellement aussi, je note que vous avez évolué : Blind conséquences a une pochette très sombre, et celle-ci propose plus de couleur. Il y a une volonté de repartir vers la lumière ?

Baptiste: oui, et il y a une volonté d’avoir une pochette, comme l’album, plus ambitieuse, avec plus de classe… C’est pour ça qu’on a fait appel à un pro du genre.

Antoine: On a fait appel à Stan W. Decker pour le graphisme et c’est pas du tout le même style que Blind consequences

metal-eyes: ce n’est d’ailleurs pas non plus son style de dessin habituel…

Baptiste: C’est vrai, c’est d’ailleurs ce que les gens ont dit quand il a posté la pochette sur son site. Tant mieux !

Antoine: Parce qu’au final, ça veut dire que ça marche bien, il a vraiment des possibilités.

metal-eyes: Que me diriez-vous pour me convaincre d’acheter Paradox?

Baptiste: Déjà, si tu veux écouter un album avec une bonne production, actuelle, un son moderne où persiste une certaine recherché dans les arrangements, que tu aimes le metal un poil sophistiqué mais avant tout mélodique… tu peux aller l’acheter sans soucis.

Antoine:

metal-eyes: Il y a une force supplémentaire, c’est la maitrise plus que correcte de l’anglais.

Antoine: ça, tout le mérite revient Najib, du coup il n’est pas là pour en parler… (rires) Faut dire qu’il chante depuis un paquet d’années, il maitrise bien cette langue, déjà, même si écrire des textes et parler c’est différent. Je lui ai donné quelques coups de main sur un ou deux textes, mais c’est lui qui a le plus gros du mérite. Et il a un bon accent, mais après tout, on reste Français… C’est dur d’avoir du recul.

metal-eyes: Je pars du principe que si un groupe chante en anglais, c’est pour viser le marché étranger, et ce n’est pas faisable avec un accent franchouillard trop prononcé.

Antoine: Totalement, il faut faire des efforts, et il en a fait, toujours. Et il s’améliore avec le temps.

metal-eyes: Quel a été votre premier choc musical?

Baptiste: Oh, ça remonte… Je dirais Queen…

Antoine: Oui, Queen. En fait, notre père écoutait ça à donf’ et il nous l’a inculqué… Moi, qui suis plus jeune, ça m’a bien marqué quand j’étais petit. Peut-être plus l’album Innuendo, c’était plus la fin… Mais, oui, tout Queen.

Baptiste: Tout Queen, mais c’est vrai, peut-être un peu plus les derniers albums, qui restent plus modernes.

metal-eyes: Et quel musicien ou groupe vous a fait dire « c’est ce que je veux faire plus tard » ?

Antoine: pour la batterie, c’est Nick Menza, de Megadeth. Il m’a vraiment donné ce déclic pour la batterie. Il a apporté ce groove que Megadeth n’avait pas avant… À partir de Rust in peace, il y a eu ce truc en plus…

Baptiste: Moi, il y a plein de guitaristes, mais je dirais peut-être Eddie Van Halen. Je me suis mis à la guitare petit à petit, et c’est devenu une passion. Il y a toujours le musiciens qui te fait dire « oui, j’ai envie de m’y mettre mais j’ai envie de savoir maitriser mon instrument ». Quand j’ai entendu ses solos, j’ai pris une claque. Je ne savais même pas qu’on pouvait jouer de la guitare comme ça ! ça a bouleversé mes codes, je me suis dit tout est à refaire…

metal-eyes: Si vous deviez ne retenir qu’un seul titre de Paradox pour expliquer ce qu’est Stolen Memories aujourd’hui, ce serait lequel?

Baptiste: Celui qu’on a choisi pour le clip…

Antoine: le morceau Exile, c’était une évidence pour nous! On voulait faire un clip, la phase suivante de l’album. On y pensait déjà en faisant l’album, et ensuite, c’est celel qui s’est vraiment démarquée. Elle résume bien ce que l’on fait aujourd’hui, elle a aussi un bon format single.

Baptiste: Puissante, mélodique, ambiance… et efficace

metal-eyes: Quelle pourrait être la devise de Stolen memories ?

Baptiste: Euh… « Patience et persévérance »

Antoine: Oui, restons passionnés, et patients.

Baptiste: On a les pieds sur terre, et on sait très bien qu’on ne s’en sort pas comme ça dans la musique. C’est un vieux rêve, on y croit quand même, donc on continue, à faire de la musique, essayer de proposer des albums de mieux en mieux, en étant patients parce qu’on sait qu’à chaque fois on doit évoluer, tout comme on peut exploser. Mais ça, c’est l’avenir qui le dira, le public qui choisit. Mais avant tout, on fait ça pour nous.

metal-eyes: Quelle est la meilleure question qui vous ai été posée aujourd’hui? Celle que vous avez préférée, qui vous a surpris ?

Antoine: C’est chaud…

Baptiste: Je m’en rappelle plus…

metal-eyes: C’est sympa pour ceux qui sont passés avant moi !

Baptiste: Il y en a eu un paquet..

Antoine: Il y a eu, forcément, un paquet de questions similaires, des bizarres aussi…

metal-eyes: Une bizarre, oui!

Antoine: la plus bizarre? (Au journaliste en question) : J’ai toujours pas compris donc, si tu lis ça, écris moi : on m’a dit « Si tu dois partir en mission avec 5 personnages fictifs, lequel tu choisis ? » j’ai choisi Jar-Jar Binks. Ne me demande pas pourquoi c’est sorti… Improbable. Il y avait Gollum et je sais plus qui, j’ai choisi Jar-Jar : il a l’air marrant, c’était mon critère ! (rires)

Baptiste: Et moi… Je pense que c’est « vous avez appelé l’album Paradox parce que c’est le fait qu’un groupe comme vous, passionné, qui persévère, soit encore obligé de travailler aujourd’hui ? » Et le mec a vraiment mis le doigt dessus. Ce n’est pas que pour ça, mais c’est un peu l’histoire du groupe : le paradoxe c’est qu’on adore ce qu’on fait mais on galère quand même.

metal-eyes: Qu’avez-vous prévu comme concerts pour défenre cet album ?

Baptiste: On commence avec une première date, le 24 novembre, à Décines-Charpieux, du côté de Lyon, ensuite, c’est en cours de bouclage. On attend des réponses…

Antoine: C’est la suite, on n’est pas que musiciens de studio, on veut aussi se frotter à la scène.

metal-eyes: Un dernière chose : vous avez choisi votre nom comment ? Pour que les initiales fassent « SM » ?

Antoine: Non, c’est une pure coïncidence !

Baptiste: En fait (il se racle la gorge)… C’est juste un loupé, ça. Ça n’a pas été calculé du tout et c’est pour ça qu’on ne fera jamais un logo avec le S et le M qui ressortent. C’est pas possible ! (rires)

 

 

 

VANDENBERG’S MOONKINGS: MK II

Hard rock, pays bas (Mascot, 2017)

Démarrant sur des intonations AC/DCesques, Thightrope, qui ouvre ce MKII, second disque du Moonkings d’Adrian Vandenberg, donne le ton. Pas de surprises ici, on est en plein hard rock puissant, bluesy et empli de feeling. On n’en attend pas moins de celui qui, après quelques fulgurances sous son nom propre au début des années 80, s’est distingué au sein du Whitesnake de David Coverdale. On a d’ailleurs parfois l’impression de l’entendre chanter, mais, non, c’est bien Jan Hoving qui officie tout au long de ce disque. 12 chansons taillées dans le rock, efficaces en diable. Les références culturelles sont nombreuses. Si AC/DC est évoqué à plusieurs reprises, on trouve également des traces du susmentionné serpent blanc, ainsi que quelques clins d’œil à Jimi Hendrix (All or nothing) parmi d’autres incontournables. Mais point trop, Vandenberg ayant depuis longtemps trouvé sa voie propre. Le groupe qui l’entoure (outre le chanteur Jan, Sem Christoffel s’occupe de la basse et Martin Jenes de la batterie) est resté stable depuis la création de Moonkings en 2013. Cette stabilité se ressent dans les compositions, hautes en couleurs, même si la ballade What doesn’t kill you est quelque peu prévisible. Ce titre mis à part (et encore…), on a de quoi s’émerveiller tout au long de ces 12 morceaux traditionnels et entraînants. J’adore! On pourra dire que 4 ans, c’est long, cependant, vous aurez bientôt en quasi exclu webzinesque (la plupart étaient consacrée aux magazines de guitare…) l’interview de Monsieur Adrian Vandenberg qui revient sur cette si longue absence due à la contraction de la maladie de Lyme. Il va bien, et est prêt à reprendre la route. On l’attend impatiemment !

DAISY DRIVER: Nulle part

Rock, France (Autoproduction, 2017)

Forcément, les plus cinéphiles d’entre vous ont fait le lien avec le film Miss Daisy et son chauffeur. Et le titre de ce t album arrive comme un clin d’oeil: « On va où Miss Daisy? » « Nulle part« … Daisy Driver s’est formé en 2015 et les quatre ont mélangé leurs influences, variées, pour concocter cet album enlevé, diversifié, enragé et tendre à la fois… Le quatuor français nous offre une jolie plongée dans des univers torturés à la Noir Désir et enjoués et directs à la Rolling Stones, première période. C’est un ensemble prenant, principalement chanté (avec quelques intonations torturées à la Bruel!) en français auxquelles viennent, de temps à autres, se greffer quelques paroles en anglais. Un voyage sonore qui fait mouche, une invitation à parcourir un bout de chemin avec ces gars. Du beau travail qu’on espère voir sublimé par les gros médias… A noter, deux reprises figurent sur ce disque: Morgane de toi de Renaud et Elle a les yeux revolver de Marc Lavoine. Quand on vous disait que les influences de Daisy Driver sont variées…