PROPHETS OF RAGE

Rock, USA (Caroline records, 2017)

Je ne sais trop par où commencer avec ce premier album plus qu’attendu de Prophets Of Rage… Avec deux passages très remarqués dans l’Hexagone en juin dernier (Download Paris et Hellfest), on était impatients de découvrir l’album. Et, c’est une évidence, la réunion de ces furieux de Tom Morello à la guitare toujours aussi rageuse et fine à la fois avec Chuck D et B-Real au flow vocal souvent imité offre un résultat intriguant. On ne va pas revenir sur cette union a priori contre-nature d’ex-membres de Rage Against The Machine avec ceux de Public Ennemy et Cypress Hill. Rage était un groupe ouvert à tout, et intégrer des influences rap, rock ou metal semble ici naturel. Je n’ai jamais été fan de rap, cependant, je dois reconnaître que le mariage de ces monstres est efficace. Les titres sont variés dans les rythmes et ambiances. Du rageur Unfuck the world au psychédélique Legalize me, il y en a pour tous les goûts. POR parvient au gré des morceaux à rassurer quant à sa capacité à séduire. Et même si j’ai du mal avec le flow rap, l’ensemble se laisse plus que facilement écouter. Pas prise de tête pour un rond, engagé et critique de notre monde (et de leurs USA d’origine) Prophets Of Rage s’avère aussi efficace, groovy et entraînant sur CD que sur scène, ce qui n’est pas une mince affaire. Le groupe sera au Zénith de Paris la Villette le 10 novembre 2017, et ça va déménager sévère!

BLACK STONE CHERRY: Black to blues

Hard rock, USA (Mascot records, 2017)

Après avoir mystérieusement disparu des écrans radar (souvenez-vous l’annulation soudaine d’une partie de la tournée Kentucky, dont la date parisienne…) on a enfin des nouvelles des amis de Black Stone Cherry qui reviennent avec Black to blues, un Ep. Un simple Ep, composé, qui plus est, de reprises. Moitié Willie Dixon (Built for comfort, Hoochie coochie man et I want to be loved). Pourquoi des reprises? Pourquoi un Ep? Est-ce représentatif d’un état d’esprit du quatuor? Qui sait, mais ce n’est pas le principal. Ces 6 classiques du blues sont ici revisités à la sauce BSC, qui, tout en conservant l’essence même de chacune des chansons, gagnent en puissance, voire, merci la technologie moderne, en clarté. L’empreinte du quatuor est instantanément identifiable, et les chansons s’intègrent de fait parfaitement au répertoire déjà riche des gars du Kentucky. Si ce Ep est une mise en bouche, on attend maintenant l’album avec impatience. Et les 4 dates françaises prévues en janvier prochain!

DIRKSCHNEIDER: Back to the roots – Accepted

Heavy metal, Allemagne (AFM, 2017)

Opportuniste, le père Udo? Le retour en force et en forme d’Accept depuis une bonne dizaine d’années est-il à l’origine de ce Back to the roots – Accepted, double live de l’ex-chanteur du groupe qui ne reprend ici, sous son nom, que des classiques d’Accept période Udo Dirckschneider? Le gaillard, légendaire voix d’un groupe non moins légendaire, surfe sur cette vague et l’on ne saurait l’en blâmer. C’est donc sous son propre nom, Dirkschneider, que le vocaliste entraine son groupe en Tchécoslovaquie où cet album a été enregistré le 9 décembre 2016. Et vous voulez savoir? Même si l’on peut s’offusquer d’une telle bassesse (exploiter uniquement le catalogue légendaire d’Accept et mettre de côté certains brûlots de son catalogue personnel), eh bien le vocaliste et son groupe sont tellement en forme que le plaisir est réel. Une belle série de classiques nous est ici proposée et l’on se délectera des Starlight, Flash rockin man, Wrong is right, Son of a bitch, Burning, autant que des indémodables Fast as a shark, Princess of the night ou Metal heart. Ce disque propose également la version DVD, mise en images de ce concert. Les titres sont certes imparables, et les plans mettent en avant un groupe soudé, et non uniquement son chanteur star. La salle, une sorte de Zénith pleine comme un œuf, abrite un public multigénérationnel tout acquis. Le traditionnel mur de Marshalls est remplacé par un mur de lights, ce qui rend parfois la mise au point difficile (allez regarder Breaker et ses lights blanches stroboscopiques). Si l’on peut regretter l’absence totale de bonus, ce double CD/DVD nous donne rapidement envie de retrouver Dirkschneider à Paris le 13 décembre prochain. Le concert annoncé comme Back to the roots part II semble dores et déjà prometteur. Alléchant, tout du moins!

DRAKKAR: Diabolical empathy

Heavy metal, Belgique (Autoproduction, 2017)

On les a (re)découverts en début d’année, lors de leur explosive prestation au PMFF. Les Belges de Drakkar reviennent aujourd’hui avec Diabolical empathy, un album forgé dans le plus traditionnel metal, celui qui les a vus grandir au cours des années 80 (Drakkar s’est formé en 1983 et a depuis publié, en dépit d’une longue pause, 5 albums avant celui-ci). Puissant, racé, efficace, cet album, introduit par une belle minute tribale, déboule comme une claque. Si l’on peut évoquer l’influence d’Accept, les Belges cherchent cependant ailleurs leur identité. Ainsi, les breaks et rythmes de The wiches dance s’apparentent plus au folk celtique énervé, Plague or cholera flirtant avec le thrash, avant que le groupe ne file vers la heavy ballad Stay with me, en duo avec Julie Colin d’Ethernity. On remarquera également la présence sur plusieurs morceaux de Filip Lemmens, chanteur de FireForce (qu’on a également retrouvé au PMFF…) Et tout est à l’avenant, n’offrant ni répit ni ennui. Je n’ai qu’un regret, c’est l’absence des paroles, car au regard des sources d’inspiration, il y a de la matière (Dante, Michel Ange, Gustave Doré – pas Julien, hein…) L’ensemble est compact, doté d’une production efficace qui fait honneur au chant rageur et puissant, aux guitares acérées et à une rythmique en béton armé. Trois ans après un remarqué Once upon a time… in hell, ce Diabolical empathy a tout pour asseoir Drakkar et confirmer un retour gagnant. Headbang!

MOTÖRHEAD: Under cöver

Hard Rock, Royaume-Uni (Motörhead music, 2017)

Bien, sûr, naturellement… Après la disparition de Lemmy, on pouvait s’attendre à ce que le nom de Motörhead ne soit pas oublié. Après un bien bel album live paru l’an dernier, le trio est de retour avec Under cöver, déjà en bacs. Mais, plutôt que de ressortir de vieilles bandes, démos, lives et raretés (auxquelles nous auront droit, évidemment), les survivants Mikkey Dee et Phil Campbell ont choisi l’option « on publie nos covers ». Celles que cette formation a enregistrées au cours des ans. Si l’on avait déjà pu écouter la reprise de Sympathy for the devil (The Rolling Stones) sur Bad magic, on a ici droit à 11 classiques, du rock au metal. Twisted sister, Stones, Judas Priest, Sex Pistols, Metallica, le panel est vaste, allant du rock au thrash. Et quelle plaisir – surprise, aussi – d’entendre Lemmy en lieu et place de Rob Halford, chanter Breaking the law… Ca apporte une autre rugosité à ce titre. Que penser de Whiplash, ultra speedé? Deux grosses surprises sont également à noter: la première, dont on parle beaucoup dans les milieux pas seulement autorisés, c’est cette version enlevée du Heroes de David Bowie. La seconde, c’est le chant sur Starstruck (Rainbow): un duo? Non… Malade, Lemmy n’a pu enregistrer le chant et c’est le fidèle ami Biff Byford (Saxon) qui s’en charge. Vous l’aurez compris, ce Under cöver est une belle et agréable surprise, un objet qu’on attendait pas forcément mais qui fait vraiment du bien. Motörhead not dead!

CYRHA: Letters to myself

Hard rock, Suède (Spinefarm, 2017)

Quand on prend un ex-Amaranthe (le chanteur Joacim Lundberg), qu’on ajoute 2 ex In Flames (le guitariste jester Strömblad qui a aussi sévi chez Hammerfall ou Dimension Zero parmi d’autres, et le bassiste Peter Iwers), pas étonnant que l’on écoute un album à la fois puissant et mélodique. Et « mélodie » semble êtyre le maitre mot de Letters to myself, le premier album de Cyrha, groupe formé il y a moins d’un an! Tout est ici attirant et suave sans tomber dans la guimauve… Les chansons sont entraînantes, parfaitement produites, et ne visent qu’à faire se trémousser et chanter le public. Karma, Heartrage, Muted life, Holding your breath… Tout est séduisant et carré (sauf la ballade trop prévisible Closure trop sirupeuse, mielleuse à mon goût…) La puissance que l’on retrouve généralement en ouverture cède la place à un chant très AOR, doublé d’une batterie effrénée sur fond de guitares rageuses, grasses et lorgnant parfois du côté du sleaze. Une recette qui a fait ses preuves et qui a encore de beaux jours devant elle. Car même une si cet album est une mer de bons sentiments, quand c’est bien fait, ben… ça le fait!

STÖMB: Duality

Metal (semi) instrumental, France (Autoproduction, 2017)

Difficile travail que celui de l’instrumental. Il faut réussir à capter l’auditeur en ne répétant pas ce que d’autres font déjà très bien. Depuis sa création en 2012, c’est le travail auquel s’est attelé le quatuor parisien de Stömb, déjà auteur d’un Ep (Fragments en 2014) et d’un album (The grey en 2016). Duality, dès son ouverture The dark admirer, cherche à nous entraîner dans un univers aérien et planant qui se fait, au fil des morceaux, plus lourd et oppressant, tout du moins sur la première moitié, triptyque qui monte en puissance. Étiqueté instrumental, Stömb inclut pourtant des textes, dont l’incompréhensible et cependant bien nommé A voice in my head, ainsi que The other me adapté d’un poème de Khalid El Morabethi. Stömb parvient, grâce au format Ep, à séduire en ne lassant pas. Un voyage envoûtant.

ULSTER PAGE: Memory

Rock, France (South Line records, 2017)

Ulster Page… Un nom qui sonne comme un appel à la mémoire de l’IRA, à une période pas si lointaine qu’on espère pourtant révolue de guerres fratricides. Un nom qui sonne comme celui d’un groupe irlandais. Et pourtant… Ils sont Français. Après un premier Ep paru en 2015, Ulster Page s’attelle à la conception de cet album mémoire, et nous offre aujourd’hui un recueil de 10 chansons brutes et taillées à même le rock. La production sèche et claquante, fait bien ressortir les influences 90’s, à une croisée rock, noisy et grunge. Memory se veut un album direct, sans concession, et le travail de mémoire est volontaire et réfléchi. Peut-on parler de concept? Sans doute à la lecture des textes qui raconte un épisode de l’histoire qui sonne d’une cruelle actualité.

DEMENTIA: Persona

Metal, France (Autoproduction, 2017)

Introduit par Blur – rien à voir avec le groupe – une sorte de complainte mélancolique, Persona prend tout son envol dès le bien nommé Speedball. Francis Caste, magicien des manettes, gourou de la prod hexagonale, est, encore une fouis parvenu à obtenir le meilleur des musiciens de Dementia, qui restent cependant producteurs de leur projet. Enregistrés aux studios sainte Marthe entre mars et avril de cette année, les 14 titres chantés dans un anglais très honorable et avec une rage salutaire, font la part belle à l’énergie, la puissance d’exécution et la mélodie. Persona est un album qui sonne résolument moderne, qui puise cependant dans l’histoire du metal, du hard rock et du prog; c’est ce qui fait la force de ce disque, une belle introduction à l’univers sonore de Dementia, pas si dément que ça! Une alliance savamment orchestrée, une exploration de sons et d’horizons variés qui se laisse écouter sans sourciller.

HOWLIN’ MACHINES: Fever

Hard rock, France (Autoproduction, 2017)

Qui peut nier que la scène hexagonale est active? De plus en plus de (bons) musiciens s’adonnant au plaisir de former un groupe, il n’est guère étonnant de trouver au milieu de cette foultitude innombrable de petites pépites prenant la forme de jolies promesses. Originaire du sud de Paris, de Villeneuve Saint George dont on évitera la confusion avec le fameux nuit du même saint, Howlin’ Machines est le fruit de la réunion en 2015 de copains de lycées; deux années de travail plus tard, le groupe nous offre ce premier Ep. Des jeunots, donc, et ça donne quoi? Bien que jeune, ça sent l’amour des anciens, AC/DC première période et le hard rock naissant en tête, un soupçon de blues, du Stooges d’Iggy Pop ou  du Motörhead aussi. Le son  de Fever, leur premier Ep (avec 7 titres, on pourrait parler d’album, non?) est oldie, volontairement, les guitares saturées et le riff simple et direct – certains appelleraient ça du stoner…. Howlin’ Machines ne s’encombre pas de fioriture et reste terre à terre. Dans le bon sens du terme, car le trio n’en fait jamais trop, tout au long des 7 titres qu’il nous propose (un petit travail sur l’anglais, correct mais pas au top, sera cependant à envisager.) C’est simplement chantant et entraînant. En concert, ça doit être  genre brut de décoffrage, super efficace!