SHAÂRGHOT: Vol III: Let me out

France, Metal indus (Autoproduction, 2023)

Au sortir d’une usine de métallurgie, le chaos. C’est l’impression que nous laisse d’entrée de jeu ce Let me out, le troisième volume de la saga Shaârgot avec un album cinématique comme jamais. Cinématique car tout au long de l’écoute, je me retrouve avec des images dans la tête, pas toujours joyeuses, mais c’est l’univers des Parisiens qui, une nouvelle fois, quatre ans après The advent of shadows nous proposent une nouvelle collection de 13 titres forgés dans un metal électro et/ou indus. De cet univers aux rythmes hypnotiques, aux ambiances sombres et violentes – on navigue entre post apocalyptique et SM, voyageant de Mad Max à Orange mécanique avec une visite chez les Watchmen – on revient aussi enjoué que lessivé. Des martellement d’usine qui introduisent The one who brings me chaos ou l’impression d’une armée de Shadows qui envahit les rues sur Chaos area, tout est parfaitement mis en son et orchestré pour que l’auditeur soit submergé d’images. On ne regrette qu’une chose, c’est que les paroles ne figurent pas sur le livret, paroles qui permettraient de mieux comprendre l’histoire de Shaârghot, le personnage, et de ses Shadows qui s’extraient des sous-sols pour envahir les rues – mais Bruno nous explique tout dans la récente interview qu’il nous a accordée. La promesse d’une tournée à venir sera l’occasion de, enfin, découvrir en vrai ce monde étrange. En attendant, foncez sur Let me out. On n’a vraiment rien à envier aux formations étrangères du même genre. bravo et vivement la suite!

BLACK 7: The 2nd chapter

Allemagne, Heavy rock instrumental (Autoproduction, 2023)

Il y a deux ans, j’avais trouvé ce mystérieux album dans ma boite aux lettres. Quelle bonne surprise ce fut que la découverte de Black 7, le projet monté par le multi instrumentiste allemand Lars Totzke. Le genre de surprise qui te fait dire, en recevant le nouvel album « chouette! » et te donne très vite envie de pouvoir glisser le cd dans ton lecteur. The 2nd chapter démontre qu’en deux ans, le gaillard a su développer son style – ses styles, même – et se défaire de certaines influences aujourd’hui totalement assimilées et bien moins évidentes que sur son premier essai. Lars parvient à composer et proposer des titres suffisament varié pour ne jamais lasser l’auditeur. On est loin de la démonstration et bien plus dans le feeling et l’entrain. Avec The 2nd chapter, il parvient à alterner et varier les tempi, se faisant ici rentre dedans Driven, Push, Wide eruption) et là plus sentimental (For this moment, Tortured souls). Si Dark hope commence calmement, le morceau monte dans une puissance optimiste et certains passages, comme sur le quelque peu new wave électrisé Light flow, donnent tout simplement envie de chanter en chœur et de l’accompagner vocalement. Black 7 est un projet à découvrir d’urgence pour tous les amateurs de heavy rock instrumental festif, mélodique, parfois sombre ou frôlant le symphonique, mais jamais prise de tête. Pour soutenir Lars, il suffit de visiter son site avec ce lien: https://www.black-seven.net/

BRASCA: Bloodline

France, Rock (autoproduction, 2023)

Le nom de Cyril Delaunay-Artifoni évoquera peut-être quelques souvenirs à certains, d’autres le découvriront avec ce premier album de Brasca… Le multi instrumentiste (il tient ici le chant, la guitare, la basse et les claviers – et s’est chargé de la production) s’est d’abord fait connaitre avec ses précédents projets, le groupe Syd Kult et son envie instrumentale avec Outsider. Brasca le voit revenir avec des envies bien plus optimistes et joyeuses que la sombre mélancolie qui berçait ses précédentes œuvres. Et c’est tant mieux, car Bloodline est un album entrainant, joyeux, qui puise son inspiration dans le rock enjoué et parfois psychédélique des années 70 autant que dans le grunge naissant des 90’s. Sur les 8 titres que contient cet album – dont un seul, Les ombres, est chanté en français – aucun ne tape à côté. L’ensemble est doté d’un son vintage efficace et, malgré certaines références assez évidentes, est toujours très personnel. Un album dont on ne se lasse simplement pas. Pardon, dont je ne me lasse pas. A découvrir.

GURL: Maybe we’re not kids anymore

France, Rock (Ep – Autoproduction, 2023)

C’est souvent le cas: on se rencontre au lycée, on partage les mêmes goûts musicaux, on a les mêmes aspirations, alors on monte un groupe. Un cheminement classique et sans surprises qui a permis à l’année 2020 d’assister à la naissance de Gurl, trio composé du guitariste chanteur Alexis Krasowski, du bassiste Gabriel Le Révérend et du batteur Alexis Riey. Dès 2021, le trio propose son premier Ep Garden party lui permettant de partir rencontrer le public. Avec Maybe we’re not kids anymore, son nouvel Ep 5 titres, Gurl confirme son orientation rock direct et sans fioriture. Un rock inspiré autant du punk que du grunge et qui n’a pour objectif que de secouer l’auditeur. Le chant d’Alexis est à la fois torturé et franc mais souffre d’un manque d’articulation. Résultat, si on n’est pas dans le chant bubble gum des démos, on n’est pas loin du baragouinage qui vient gâcher beaucoup de choses pour les anglophones. Encore une fois, si un groupe fait le choix de l’anglais, c’est peut-être pour s’exporter, alors pourquoi ne pas mettre tous les atouts de son côté et prouver qu’on a bien plus qu’envie de faire de la musique? Car des qualités, il y en a, et pas qu’une: Gurl propose des compositions solides et entrainantes, un esprit garage/punk franc du collier, s’amuse à explorer divers thèmes liés à sa génération, le tout plus que correctement mis en son pour ce type de musique. Alors, non, vous n’êtes peut-être plus des gamins, mais pas tout à fait des adultes non plus. Un bel âge dont il faut aussi savoir profiter pour mieux passer à l’étape suivante…

BLACK RIVER SONS: Skins

France, Heavy metal (Music records, 2023)

Formé en 2016 dans le nord de la France, Black River Sons a déjà à son actif un Ep suivi d’un album, Poison stuff, paru en 2019. Quatre ans plus tard, le combo revient avec Skins, un album heavy qui puise ses aspiration tant du côté du rock sudiste que du metal des origines. Les 9 titres de ce nouvel album démarrent avec le morceau éponyme qui, rapidement, évoque Black Sabbath, référence que l’on retrouve tout au long du disque. Mais il y a plus, BRS lorgnant aussi du côté de Black Stone Cherry ou de Lynyrd Skynyrd, deux références de deux époques du southern rock. Tout au long des No pain no gain, Birds and beasts, Don’t tell it twice… les guitares sont de sortie accompagnant un chant chaleureux bien que dans un anglais difficilement compréhensible… C’est sans doute la grande faiblesse de BRS qui pourtant alignent les bonnes idées. Ceci mis à part, les vieux briscards qui composent le groupe savent écrire des chansons qui donnent envie de bouger, et on a envie de les soutenir. Car, oui, tout au long de ce disque, c’est l’amour du rock hard, du heavy rock, du southern rock carré et bien fichu qui transpire. Black River Sons serait-il, comme le fut Stocks en son temps, le plus sudistes des groupes lillois? C’est bien probable. Il serait regrettable de passer à coté de ce petit bijou made in chez nous.

EIGHT SINS: Straight to Namek

France, Thrash (Autoproduction, 2023)

Comme si les péchés capitaux, au nombre de 7, ne suffisaient pas, voici que les 4 brutes de Eight Sins (ouais, suivez ce décompte, on en reparlera!) en rajoutent un supplémentaire. En tout cas, rien qu’en regardant la pochette, on sait qu’on va bien se marrer avec ce Straight to Namek. Et quand tu ouvres le CD, tu les vois dans un caddie dans les rayons d’un supermarché… Je vous invite à lire les titres des chansons? Ok, trop sérieux, s’abstenir, svp! Seulement, voilà… Un clown, c’est un bosseur né, et ici, les apparences sont trompeuses. car les 10 titres (9 + 1 intro instrumentale) sont taillés dans un thrash metal qui dépote et qui arrache les têtes. Acid hole, Last action zero, San gueko, Street trash, Slice of doom… Ces titres d’un second degré assumé sont joués avec une brutalité et un sérieux irréprochables. Ca thrash sec et sévère, c’est efficace de bout en bout et ça fait secouer la tignasse. A ce niveau de qualité, un huitième péché est totalement bienvenu! Rock on!

7 WEEKS: Fade into blurred lines

France, stoner (F2M planet, 2023)

« La route a été longue et semée de doutes, de ceux qui font même penser à jeter l’éponge » ou encore « Cette montagne d’épreuves, les Limougeauds l’ont vraisemblablement surmontée ». C’est ce que j’écrivais dans ma chronique de Sisyphus, le précédent album de 7 Weeks paru début 2020. Qui alors pouvait se douter de l’épreuve que le monde entier allait subir, la pandémie Covid enfermant la planète presque tout entière… Impossible alors de promouvoir et de soutenir ce disque, obligation de reprendre sa tâche depuis rien du tout, à limage justement de ce Sisyphe condamné à pousser une pierre jusqu’au sommet de la montagne pour la voir retomber et reprendre son ouvrage, inlassablement, éternellement… Que penser alors de la pochette de ce nouvel album, Fade into blurred lines (littéralement traduit par « se fondre dans des lignes floues »), illustrée par une statue de Don Quichotte à cheval? Le héros se battant contre des moulins à vent, doit-on comprendre ici un message de perte d’espoir des Limougeauds? Et pourtant, ils en mettent du cœur à l’ouvrage, et ce nouvel album nous en apporte une nouvelle fois la preuve. 7Weeks sait aller à l’essentiel en proposant 9 titres pour seulement 35 minutes d’écoute. Le temps d’un album de l’ancien temps, diront certains. Ce faisant, 7Weeks se recentre sur le principal, propose une musique plus directe bien que variée, toujours chantée dans un anglais impeccable. L’inamovible duo fondateur – Julien Bernard (chant et basse) et Jérémy Cantin-Gaucher (batterie) a cette fois réduit la voilure en faisant uniquement appel aux services guitaristiques de Gérald Gimenez. Les trois brillent tout au long des Gorgo, Blackhole your heart, Castaway ou autres Travellers avec des riffs directs et une rythmique terre à terre. Pas de fioritures qui puisse venir troubler la voix chaleureuse et profonde de Julien Bernard. Fade into blurred lines est une réussite de bout en bout qu’on a envie – c’est aussi le principe des albums courts – de réécouter rapidement. Et ça, c’est un gage de qualité.

LISATYD: Life is shit and then you die

France, Stoner (Autoproduction, 2023)

Déjà le titre de cet Ep d’un humour noir d’un cruel réalisme plante le décor. Clairement, puisqu’on y passera tous, autant faire les choses à fond, non? C’est ce que semble penser le quatuor Lisatyd qui nous présente ce Life is shit and then you die, un ep enregistrer dans on peu se demander quelles conditions… Qu’avaient-ils bien pu consommer ces quatre là pour nous proposer 7 morceaux aussi alambiqués que planants, aussi rentre dedans que déroutants, aussi entrainants que dérangeants? La force de ce premier Ep réside dans cette contradiction qui semble laisser penser qu’il n’y a pas de direction musicale à proprement parler, que l’ensemble est un joyeux foutoir ou fourre-tout bordélique, mais non… plus on avance dans l’écoute de ce disque et plus on est convaincu que Lisatyd sait exactement où il veut mener son auditeur. Les chemins de l’étrange s’ouvrent devant nous avec une jovialité mêlée de sérieux. Life is shit and then you die est le type même de disque qui s’apprivoise ou plutôt qui apprivoise son auditeur. Stoner, certes, rock, également, vintage sans doute, Lisatyd n’hésite pas à explorer et prendre des risques pour ne ressembler à personne.

DARKEN: Welcome to the light

France, Metal (Autoproduction, 2023)

Les plus anciens et fervents amateurs de metal made in France seront ravis du retour de Darken, groupe formé à la fin des années 80, qui a pu tourner intensivement en compagnie de nombreux compatriotes d’alors (Vulcain, Loudblast, No Return, Squealer, Jumper Lace…). Trois décennies après s’être séparé, Darken se reforme donc autour de trois de ses membres d’origine (le chanteur Stephan Monceau, les guitaristes Lorenzo Barbier et Philos Prud’homme) qui se sont adjoint les services d’une section rythmique jeune et moderne (Liam Barbier, le frère de Lorenzo, à la batterie) et Henri-Pierre Bohers à la basse. Le groupe enregistre Welcome to the light, un album puissant qui lorgne sans conteste vers l’avenir avec ses sonorités contemporaines, son dynamisme incontestable et ses mélodies à la fois entrainantes et entêtantes. L’ensemble a été mis en boite par David Potvin qui connait son affaire et pousse Darken à ne jamais regarder derrière. Le résultat, c’est cet album moderne, forgé dans le heavy metal pur jus, parfois teinté d’indus, qui s’écoute d’une traite et entraine l’auditeur dans un maelstrom parfaitement contenu et régulé. Un très beau retour à suivre de près et à soutenir sans hésiter.

UNSPKBLE: Reconstruction

France, Metal (Autoproduction, 2023)

Réunion improbable de musiciens d’horizons variés – ça va du punk au jazz – Unspkble débarque avec un premier album bourré d’énergie qui suit un Ep « carte de visite », Friction, paru en juin 2020 alors que le groupe n’avait que quelques mois d’existence. Reconstruction, titre qui naturellement fait penser à tout ce que la pandémie à pu détruire autour de nous en 2020/2021, c’est un premier album qui puise son inspiration dans la rage irrévérencieuse du punk tout en conservant un sens de la mélodie catchy propre au rock. 10 titres qui tabassent autant qu’ils fédèrent, tout ce qu’on attend d’un groupe de rock, justement; non? Struggle (catch the elite) est à ce titre un parfait exemple qui fait taper du pied et agiter la nuque. on n’attend maintenant que de voir ce que Unspkble donne sur scène pour y défendre et y faire vivre son album.