DARKEN: Welcome to the light

France, Metal (Autoproduction, 2023)

Les plus anciens et fervents amateurs de metal made in France seront ravis du retour de Darken, groupe formé à la fin des années 80, qui a pu tourner intensivement en compagnie de nombreux compatriotes d’alors (Vulcain, Loudblast, No Return, Squealer, Jumper Lace…). Trois décennies après s’être séparé, Darken se reforme donc autour de trois de ses membres d’origine (le chanteur Stephan Monceau, les guitaristes Lorenzo Barbier et Philos Prud’homme) qui se sont adjoint les services d’une section rythmique jeune et moderne (Liam Barbier, le frère de Lorenzo, à la batterie) et Henri-Pierre Bohers à la basse. Le groupe enregistre Welcome to the light, un album puissant qui lorgne sans conteste vers l’avenir avec ses sonorités contemporaines, son dynamisme incontestable et ses mélodies à la fois entrainantes et entêtantes. L’ensemble a été mis en boite par David Potvin qui connait son affaire et pousse Darken à ne jamais regarder derrière. Le résultat, c’est cet album moderne, forgé dans le heavy metal pur jus, parfois teinté d’indus, qui s’écoute d’une traite et entraine l’auditeur dans un maelstrom parfaitement contenu et régulé. Un très beau retour à suivre de près et à soutenir sans hésiter.

UNSPKBLE: Reconstruction

France, Metal (Autoproduction, 2023)

Réunion improbable de musiciens d’horizons variés – ça va du punk au jazz – Unspkble débarque avec un premier album bourré d’énergie qui suit un Ep « carte de visite », Friction, paru en juin 2020 alors que le groupe n’avait que quelques mois d’existence. Reconstruction, titre qui naturellement fait penser à tout ce que la pandémie à pu détruire autour de nous en 2020/2021, c’est un premier album qui puise son inspiration dans la rage irrévérencieuse du punk tout en conservant un sens de la mélodie catchy propre au rock. 10 titres qui tabassent autant qu’ils fédèrent, tout ce qu’on attend d’un groupe de rock, justement; non? Struggle (catch the elite) est à ce titre un parfait exemple qui fait taper du pied et agiter la nuque. on n’attend maintenant que de voir ce que Unspkble donne sur scène pour y défendre et y faire vivre son album.

TEMPT FATE: Holy deformity

France, Death metal (Autoproduction, 2023)

Après un premier album, Human Trap, paru en 2018, les Toulousains de Tempt Fate reviennent avec Holy deformity. Dire que la rentrée sera calme serait jouer la politique de l’autruche. Car ce nouvel album n’est que brutalité. Composé de 8 titres aussi volontairement explosif que directement « dans ta face », Tempt Fate ne laisse aucune place à une quelconque possibilité de paix sonore ou de réconciliation de l’humain avec lui même. Du virulent titre d’ouverture, Deadlights, à l’explosive sortie de route Erlebnis, on a l’impression que le combo règle ses compte avec ses pairs (le morceau titre, Filth of life, purge), la religion (God ends here, Grind fate)… Mais Tempt Fate ne nous offre pas qu’un album brutal, il nous propose aussi un disque sombre et inquiétant. Pour public averti et/ou amateur de sensations fortes.

FOREST IN BLOOD: Abyss

Hardcore, France (Autoproduction, 2023)

Après une pause de 20 ans, Forest In Blood était revenu en 2018 avec Pirates. Depuis, le groupe semble décidé à ne pas voir son navire couler et propose aujourd’hui le troisième album depuis son retour (après Haut et court paru en 2020), Abyss. Démarrant avec le morceau titre, prologue marin sombre et inquiétant qui se termine sur des cornes de brumes – l’ensemble m’évoque le film d’épouvante Fog – Forest In Blood entre rapidement dans le vif du sujet avec le très brutal Children of the 666. La messe (noire) est dite ou on se met un double dose de ratafiat? FIB ne me jamais le pied sur le frein, la rage est omni présente, brutale, directe et éprouvante comme le supplice de la planche. Si le principal des titres est chanté en anglais, FIB propose cette fois non pas un mais deux morceaux en français (Crève et A la vie, à la mortTénèbres est un interlude instrumental) et pourrait bien gagner à explorer plus avant encore cette voie (pas d’eau – ok je sors) tout en maintenant son respect musical pour les grands du thrash et du hardcore. L’album se termine une nouvelle fois sur un titre fun et plus léger, In pirates we trust qui permet de souffler un peu en bout de course. Et là on a envie de hurler « pieds à terre, marins d’eau douce, vous avez bien mérité un peu de repos« . Ca déménage sec, et ça nettoie les esgourdes. A retrouver sur scène très vite!

OGIVES: La mémoire des orages

Belgique, Rock/prog (Autoproduction, 2023)

Projet aussi surprenant qu’intrigant, Ogives est une formation composée de 9 musiciens formés à l’école du classique et qui proposent, avec La mémoire des orages, une approche musicale surprenante. Si on est aujourd’hui habitués au mélange de metal et de musique classique, qu’elle soit opératique ou symphonique, Ogives évolue sur le terrain de la musique de chambre, douce, contemplative parfois, mélancolique aussi, et ajoute des touches électro et plus rock. L’esthétisme musical est de mise, le groupe cherchant à créer des ambiances variées dans des univers sonores aussi légers qu’attirants. Parfois cérémonieux – cette résonnance de cloches au démarrage de l’album invite à entrer dans un lieu saint – souvent poétique dans le texte et son expression, La mémoire des orages interpelle et ne laisse pas indifférent.

CORVIUS: Signals

France, Metal (Autoproduction, 2023)

Il y a des mystères comme ça, genre la découverte récente de cet album de Corvius pourtant sorti au mois de janvier… Le groupe fut formé en 2018 avec dans l’idée d’allier metal et cinéma. Un esprit prog qui se traduit sur Signals par le biais d’instrumentations variées puissantes et parfois symphoniques. Si l’album démarre avec une mise en place d’ambiances feutrées, le groupe entre dans le vif du sujet avec un metal à la fois rugueux et aérien aux tableaux sonores qui évoluent au fil du morceau. Le chant alterne ici entre voix féminine lyrique – qui parfois m’agresse les tympans – et masculine avec des hurlements black ou death. La suite introduit d’autres tonalités vocales sur fond musical à la fois symphonique et metal, heroic fantasy et SF. C’est bien là l’objectif de Corvius que de créer non pas un mais des univers sonores aux travers de ces tableaux qui, s’ils ne sont pas toujours faciles à suivre, présentent une palette suffisamment vaste pour que l’auditeur ne s’ennuie pas. Et si l’on peut espérer à l’avenir une meilleure maitrise de l’accent anglais, Corvius a le profil d’une formation à la musique digne d’illustrer une épopée sur grand écran. A noter que si Signals est naturellement disponible en version CD, il en existe également un pendant visuel DVD avec making of i tutti quanti. A chacun de choisir, donc!

PHIL MANCA: Layers of pain

France, Heavy metal (Autoproduction, 2023)

Si son nom reste confidentiel, Phil Manca a un CV long comme le bras… De Renaud Hantson à ERA en passant par des BO de films (dont un certain Les visiteurs), le guitariste compositeur est un musicien accompli qui publie aujourd’hui un troisième album sous son nom. Composé de 9 titres, Layers of pain permet à Phil Manca d’offrir à son auditoire un condensé de ses influences. Celles-ci vont du heavy pur jus – heavy, pas thrash ou extrême, hein! – au blues, le tout doté d’un son contemporain. En 4 titres, le gaillard explore une grande partie de son savoir faire et de ses amours musicales. The race is on (titre oh combien approprié) est une entrée en matière véloce et entraînante. Le gaillard manie le manche avec brio et est accompagné par une équipe redoutable dont un chanteur, Josselin Jobard, qui maitrise parfaitement la langue de Shakespeare. La suite se fait plus douce, le metal cédant le pas au hard rock puis à la heavy ballad et au blues que n’aurait pas renié Gary Moore. Tout au long de Layers of pain, Phil Manca varie les plaisirs heavy rock, interpelle et secoue les tignasse. C’est carré, fichtrement bien fait et produit pour un résultat enjoué et plein d’entrain. Tellement bien fait, d’ailleurs, qu’il es difficile, à l’écoute de cet album, de croire qu’on a à faire à un artiste autre qu’Américain…

ICELAND

France, Thrash (Autoproduction, 2023)

Les plus fervents amateurs de metal français vont pouvoir crier de joie! Iceland avait vu le jour au début des années 1990 et publié sin premier album éponyme en 1995 avant de sombrer corps et bien en 1998. Trois de ses membres se retrouvent pour jammer et la mayonnaise reprend. Phil (chant et guitare), Ziac (guitare) et Bernard (basse) décident de remettre le couvert. Et plutôt que d’enregistrer un nouvel album, le trio propose de réenregistrer son unique disque et de le moderniser. Une campagne de financement participatif plus tard, les trois se font aider de divers batteurs de belle renommée pour apporter un souffle nouveau aux compos. On retrouve ainsi Aurélien Ouzoulias (ex-Zoë, Lofofora), Franky Constanza (Ex-Dagoba, Blazing War Machine, Les Tambours du Bronx et actuel BlackRain) et Dirk Verbeuren (Ex-Scarve, actuel Megadeth), excusez du peu! Quand on obtient ces gages de qualité, il ne fait guère de doute que le produit soit à la hauteur des attentes du public. Et clairement, Iceland nous propose un album trhash moderne aux guitares mordantes, à la rythmique martelante, oppressante et lourde et au chant puissant, rauque et étouffé. Les huit titres charcutent avec une détermination sans faille, et il n’est guère possible de rester impassible. Ca thrashe et ça moshe de bout en bout avec une remarquable efficacité. A aucun moment, de Merry sinner à The eyes of the blind man, Iceland ne peut être pris en défaut. Tout juste pourrait-on s’étonner de la disparition de Traces of dreams et Slammin boys qui figuraient sur la version originale (et une maitrise anglaise limite…) mais on n’en tiendra pas rigueur au groupe tant la puissance et la qualité sont au rendez-vous. Même l’illustration de la pochette a été revue et améliorée. Voici un retour en force d’un groupe qu’on espère retrouver rapidement en live. Superbe retour gagnant!

NUMA [7534]: Nénuphar

France, rock (Autoproduction, 2023)

Fondé à la veille des années 2020, Numa [7534] a publié un premier album Mothership down qui parait fin 2020 et  présente un groupe de rock progressif, inspiré par Porcupine Tree qui lorgne du côté de Soundgarden, mais pas que… Nous y reviendrons. Nénuphar, le nouvel Ep, comporte 6 titres qui débutent avec Esodo, un instrumental qui plante le décor. Du rock, oui, du prog aussi avec une production soignée comme l’exige toute composition complexe. Puis, Raising me up débute sur des guitares aériennes bientôt rejointes par un chant doux et presque mélancolique. Le titre monte en puissance, le chant (à l’anglais peu compréhensible, seule faiblesse de cet Ep…) se faisant de plus en plus torturé. Sentieri est un rapide interlude musical qui précède Cold played hope, morceau quelque peu jazzy qui part en vrille assez rapidement avec sa basse slappée et ses changements de rythmes et d’ambiances. Un nouvel instrumental suit, Ira, tout aussi aérien et varié avant que I can’t hold on any longer voit le groupe quelque peu craquer et partir dans une gentille folie bruitiste que ne renierait sans doute pas Faith No More ou Living Colour. Un détail qui mérite explication, cependant: il semble que Numa [7534] voit les choses par groupe de 3. explication: 3 instrumentaux, 3 chansons, certes, mais aussi les 3 premiers titres ne comportent qu’un mot (italien, qui plus est), les 3 derniers, plusieurs… Un nouveau mystère à résoudre, si quelqu’un veut s’y coller… Une jolie découverte rock un peu plus que prog, d’ailleurs (pour ceux qui se demandent quelle est la signification de ce mystérieux [7534]… Basculez la pochette à 90°, vous aurez un premier indice ). A suivre

LOUD.ANONYMITY: N.U.A.N.C.E.s

France, Metal (Ep, autoproduction, 2023)

Il y a des jours comme ça, tu chopes un CD, tu as un a priori en regardant la pochette (genre: « …mouais, encore un boys band qui veut se la jouer metal »), tu le glisses dans le lecteur sans en attendre grand chose (qu’attendre en effet d’un « boys band »?) et à peine le premier morceau débute-t-il que tu te dis: « woah! c’est quoi ce truc? » Loud.Anonymity m’a, une fois n’est pas coutume, permis de – obligé à – remiser mes a priori au placard. Le trio toulousain a vu le jour en 2016 et compte en son sein le chanteur guitariste Arnaud Freageac, le hurleur bassiste Matthias Zanin et le batteur Gauthier Trumel (oui, j’ai compté, ça fait bien un trio de 3). Loud.Anonymity publie un premier album – Eponym – en 2016 suivi d’un Ep – Al[ego]ry – fin 2020, deux disques que je vais sous peu rechercher… Car leur nouvel Ep, N.U.A.N.C.E.s, est une merveille de heavy rock enragé teinté de punk et bourré de bout en bout cette énergie brute et lumineuse qui donne simplement envie de taper du pied et de se casser la nuque. Les 6 morceaux de ce disque sont d’une remarquable efficacité, mêlant une certaine forme d’irrévérence punk à l’entrain d’un pop rock énervé, le tout parfaitement mis en son (mais moins en couleurs… impossible de lire ce qui est écrit en tout petit au dos de la pochette en mauve sur mauve foncé…) On ne peut – je ne peux – que visualiser le trio se défonçant sur scène et épuisant son public. Loud.Anonymity nous propose un condensé rock énergisant et brutal à la fois, et franchement, ça fait un bien fou! Rock on!