BLACK MAMBA: Heritage

Rock, Italie (Autoproduction, 2017)

Paru fin 2017, Heritage, premier album de Black Mamba aurait pu passer inaperçu ne serait-ce cette pochette qui, forcément, retient l’attention, et les origines du combo. La pochette, tout d’abord… On pourrait croire avoir à faire à un groupe de midinettes japonaises accros à l’univers manga. Ben, non, même si tout l’artwork évoque cet univers… On est au contraire confronté à un trio italien, originaire de Viterbo pour ceux qui connaissent (pour les autres, c’est au centre de l’Italie). Forcément, on pense à Klogr, mais la réalité est ailleurs: composé de Irma Mirtilla à la guitare et au chant, Cecilia Nappo à la basse et Frederico Maragoni à la batterie, Black Mamba a du mordant, si ce n’est celui, mortel, du serpent à qui le groupe s’identifie. L’univers du trio s’inspire autant de la pop et du funk – les rythmes dansants, la basse groovy et slappée y sont pour beaucoup – que du rock progressif et/ou enervé. Les guitares évoquent souvent celles d’Alex Lifeson (Rush), et lorgnent aussi du côté des Foo Fighters et, mix de cet ensemble, des Red Hot Chilli Peppers. Le chant d’Irma est puissant, varié, son timbre au trémolo unique emporte l’auditeur dans ses errances et douceurs, et les guitares de Cecilia sont tranchantes, à la fois aériennes et déterminées. Impossible de rester de marbre, chacun, amateur de prog, de groove ou de metal, y trouvera son compte. Une jolie découverte à suivre.

ELVENKING: Secrets of the magick grimoire

Folk metal, Italie (AFM, 2017)

Malgré d’incessants, ou presque incessants, changements de line-up, les Italiens d’Elvenking continuent de suivre leur chemin sur les voies d’un folk metal enjoué. Paru fin 2017, ce Secrets of the magick grimoire nous offre 12 nouvelles compositions qui fleurent bon la joie de vivre. Un peu pagan, très happy metal, cette nouvelle collection est sans aucun doute l’une des plus belles réussites artistiques du combo, toujours mené par un Aydan (guitares) inspiré. Alors, bien sûr, cette instabilité chronique pourra faire penser à un Ayreon ou un Royal Hunt, mais les inspirations diffèrent. Ici, Elvenking puise dans un folk metal traditionnel, chantant, proche du metal joyeux d’un Helloween ou d’un Freedom Call, et s’offre une variété, une exploration de paysages et d’horizons musicaux très variée. Mieux, c’est une invitation conquéranteet optimiste qui nous est ici proposée. Pourquoi, alors, devrions-nous, amateurs de métal  épique et mélodique, refuser d’emboiter le pas d’un Elvenking inspiré?

Interview: KLOGR

Interview KLOGR : rencontre avec Rusty. Entretien effectué le 20 septembre 2017 au Hard Rock Cafe de Paris

 

Klogr

metal-eyes: A l’origine, Klogr était présenté comme un groupe de neo metal. Cependant, l’écoute de Keystone me fait plus penser à du prog. Quel est ton point de vue?

Rusty: C’est très difficile de définir la musique que tu joues… C’est comme si quelqu’un devait dire si tu es un bel homme ou pas. J’aime la musique du grunge au prog, du metal au classic rock. Je pense que toutes ces influences se retrouvent dans notre musique. Peut-être y a-t-il des aspects plus progressifs, d’autre plus alternatifs. Le terme de neo metal n’est sans doute pas assez… large. Si, par “neo metal” tu entends Korn, Limp Bizkit et ce genre de groupes, alors, oui, mais je n’entends pas plus de neo metal que ça dans notre musique.

metal-eyes: Alors comment décrirais-tu l’évolution de votre musique entre les deux derniers albums?

Rusty: Nous avons grandi! Parce que nous avons changé de line-up il y a trois ans. Pietro, notre guitariste, nous a rejoints et tout notre équilibre s’en est trouvé modifié. J’ai, enfin, trouvé un vrai partenaire, nous partageons beaucoup. Avant, je voulais partager certaines choses avec les autres, mais, parfois, il n’y avait pas de réelle connexion. Il y avait un guide, moi, et les autres membres suivaient mes idées. Dans le cas présent, Pietro et moi nous battons pour une idée. Nous avons deux caractères forts et nous voulons créer une troisième idée qui est un mélange de nos idées.

metal-eyes: Une combinaison de visions, donc.

Rusty: Oui, et c’est ce que j’aime. La musique est un partage, de la création à la scène. Aujourd’hui, j’ai un vrai partenaire.

metal-eyes: Que me dirais-tu afin de me convaincre de filer acheter Keystone en sortant d’ici?

Rusty (avec un sourire): C’est le meilleur album de 2017… (rires) Non, je pense que c’est un disque que tu dois écouter de bout en bout. Ce n’est pas juste un disque avec 5 singles et 5 morceaux de remplissage. Nous avons cherché à mettre toute notre vision dans ce disque. A chaque fois que je réécoute un titre, je peux ressentir de nouveau ce qu’il se passait en studio… Pendant l’enregistrement et l’écriture du disque. Et quand je les interprète sur scène, je ressens également tout. Je crois que c’est un disque dans lequel il faut se plonger pour ressentir cela.

metal-eyes: Vous n’avez pas beaucoup tourné en France. Quels sont vos plans de tournée pour soutenir ce CD?

Rusty: Laisse-moi de raconter une histoire : un de nos premiers managers était Français. Il s’appelle Marc Fazio…

metal-eyes: Je crois que tu vas le voir dans quelques instants… Il gère United Rock Nations aujourd’hui.

Rusty: Oui, c’est Marc ! Nous avons fait deux petites tournées dans des clubs en France. Le plus gros show que nous ayons donné en France a eu lieu il y a 3 ans à Paris, avec Prong. Nous avons donné 23 concerts en Europe avec eux. Maintenant, nous serons en tournée en novembre avec The Rasmus, avec qui il y aura 10 concerts en Europe, dont 1 à Paris, le 18 novembre.

metal-eyes: Klogr est un groupe italien. Comment vous situez-vous sur la scène italienne et quels autres groupes me conseillerais-tu d’écouter ?

Rusty: Sans aucun doute, le groupe italien le plus connu : Lacuna Coil, dont la réputation est internationale. Je connais beaucoup d’autres groupes en Italie, mais c’est difficile de parler de la « scène italienne ». Nous sommes assez individualistes, chacun fait son boulot… Guizmet est un de ceux que je préfère, un petit groupe avec deux albums – je ne sais pas s’ils les ont sortis en Europe – mais je les aime, musicalement et humainement. Extrema, un groupe extrême qui joue un peu partout en Europe… Il y en a beaucoup, et c’est difficile de choisir. Je ne connais pas beaucoup de groupes italiens qui cherchent à sortir d’Italie.

metal-eyes: Comment occupes-tu ton temps entre deux albums ou tournées ?

Rusty: J’ai de la chance, parce que j’ai mon propre studio, Zeta Factory. Il y a un studio, une salle de répétition, une école de musique, et je vis juste au dessus. C’est très facile pour moi.

metal-eyes: Donc, la musique est ta vie. Quel a été ton premier choc musical ?

Rusty: 1991, les Monsters of Rock avec Metallica et AC/DC. J’y étais, j’avais 14 ans et à ce moment je me suis dit « voilà ce que je veux faire de ma vie ! » C’est Metallica surtout, car je n’ai pas vu tout le show d’AC/DC. J’étais avec mon frère qui avait un rendez-vous avec une nana, donc il m’a dit « on y va… Tu auras tout le temps d’écouter AC/DC plus tard ! »

metal-eyes: Si tu devais ne retenir qu’un titre de Keystone pour définir ce qu’est Klogr aujourd’hui, lequel serait-ce ?

Rusty:  Ce n’est sans doute pas la chanson la plus facile d’accès, mais je pense à Pride before the fall, qui est la connexion entre l’ancienne vision de notre musique et l’actuelle. Ce n’est pas une chanson catchy, il y a plusieurs ambiances, et les paroles sont, pour moi, la description parfaite de ce que nous voulons offrir au public avec ce disque. Nous ne vivons pas une période facile, la planète est en danger, et ça n’a rien d’une blague. Ça se passe maintenant, alors levez-vous et agissez, maintenant. J’ai vraiment peur de ce que nous réserve l’avenir…

metal-eyes: Quel serait la devise du groupe, selon toi ?

Rusty: (il réfléchit longuement) Euh… question suivante ? C’est difficile… Je ne sais pas…

metal-eyes: On y reviendra alors. Je pense que tu vas apprécier la suivante qui sera la dernière : quelle est la meilleure question qu’on t’a posée aujourd’hui ? Ou la plus surprenante.

Rusty: (il réfléchit encore) Je ne sais pas ! La plus étrange ? « Pourquoi as-tu choisi Keystone comme titre de l’album ? » Hey ! C’est clairement décrit dans le livret ! Parfois tu rencontres des gens qui ont simplement jeté un œil à l’album, et qui doivent faire cette interview parce qu’elle a été planifiée… Mais ils ne cherchent pas à comprendre pourquoi nous sommes là, ce que nous voulons partager avec autrui. C’est comme si j’allais au ciné sans savoir quel type de film je vais voir !

metal-eyes: Justement, quel genre de cinéma aimes-tu ?

Rusty: Je suis un peu divisé… J’aime beaucoup l’heroic fantasy et j’aime aussi beaucoup, vraiment, les documentaires, quand la réalité rejoint la scène et l’écran. J’aime aussi les films d’action, mais c’est souvent un cirque identique. J’aime sortir de la vraie vie.

metal-eyes: Tu lis, aussi ? Et si oui, que lis-tu en ce moment ?

Rusty: Oui, je lis. Je viens de terminer. C’est une sorte de biographie de Paul Watson qui est le capitaine de Sea Shepard. C’est très réaliste : il explique nombre d’actions menées par son organisation. Tu as l’impression de voir un film d’espionnage, mais c’est la réalité. Ce n’est pas 007, c’est la réalité. Je le sais parce que je connais beaucoup de membres de son équipage et j’ai vu des photos de ces actions. C’est simplement extraordinaire !

metal-eyes: Ce qui signifie que tu te préoccupes vraiment de l’avenir de notre planète et que tu en es très proche.

Rusty: Absolument !

metal-eyes: Revenons à ma question de tout à l’heure, tu as dû avoir le temps d’y réfléchir : quelle pourrait être la devise de Klogr ?

Rusty: La devise… la raison pour laquelle on fait ça… Bon : ce n’est pas une « mission », ce serait trop. Il me faut plus de mots pour l’expliquer : pour moi, peut-être pas pour les autres membres du groupe, la musique est une promesse. J’ai fait cette promesse il y a 20 quand j’ai perdu mon frère, je lui ai promis que je serais un bon musicien, pas célèbre, simplement bon. Je veux faire mon boulot aussi bien que possible et je veux partager un message avec les gens : faire quelque chose aussi bien que l’on peut.

metal-eyes: La devise serait donc « la musique est une promesse »

Rusty:  Oui, ou si tu préfères : « la musique est MA promesse »

metal-eyes: Merci beaucoup, profite de ton séjour à Paris même si je sais que tu ne pourras pas voir grand-chose…

Rusty: Tu sais, j’ai passé du temps à Paris il y a quelques années… J’adore conduire la nuit, sans trafic. Je loue une voiture et je peux aller de la Tour Eiffel au Louvres en 10’ à peine. J’adore cette ville. Bon, les embouteillages des grandes villes ce n’est pas mon truc, mais la nuit, c’est sympa. Merci à toi, et viens nous voir le 18 novembre !

 

KLOGR: Keystone

Metal, Italie (Zeta factory, 2017)

Dites, Klogr… C’est toujours du neo metal qu’ils pratiquent? Parce qu’à l’écoute de Sleeping through the seasons et Prison of light, les deux premier morceaux de ce nouvel album, Keystone, on a l’impression d’avoir à faire à un trio prog metal. Ambiances recherchées et lourdeur du tempo, les Italiens ont certes mûri; cependant, que les anciens fans se rassurent, le neo est toujours d’actualité dès le brutal Technocracy. Faut dire qu’un titre pareil, ça a de quoi énerver! Ce qui conditionne la suite, naturellement. Rock et rageur, doux et dur, les Drag you back, Pride before the fall, très groovy, ou plus martial et inquiétant (Something’s in the air), démontrent que Klogr explore divers horizons tout en gardant son cap. Pas forcément mon truc, mais reconnaissons que l’ensemble se veut novateur et différent. Une curiosité, donc.

VIRIDANSE: Hansel, Gretel e la strega cannibale

Hard rock psyché, Italie (Fonoarte, 2017)

ViridAnse, c’est qui? Venu tout droit d’Italie, ViridAnse s’est formé en 1983. Actif au cours des années qui suivent le groupe a disparu pour revenir en 2014 avec un album éponyme.

Hansel, Gretel e la strega cannibale, ça donne quoi? Euh, franchement, je n’ai pas tout compris… Et cela n’est pas du fait du chant en italien. Ce disque m’a vraiment pris par surprise tant par sa puissance que par l’exploration sonore de contrées étonnantes. C’est à la fois puissant, irritant, intriguant. Quelques aspects prog accompagnent des sonorités légèrement psychédéliques et un chant torturé. On est replongé dans un esprit très imprégné des années 80, version new wave énervée, rock direct, avec, en prime quelques explorations et tentatives rythmiques intéressantes.  Les 7 titres totalisant une heure de sons variés, d’ambiances diverses et, si le thème des contes de fée est clair, son traitement horrifique ajoute au mystère. Ames sensibles, attention, mais si vous êtes curieux, foncez! Même si je ne comprends pas tout, il y a dans ce disque une volonté de ne ressembler à personne tout en semant le parcours de références communes.

Note 7/10

 

SHORES OF NULL: Black drapes of tomorrow

Metal, Italie (Spinefarm, 2017)

Bien que très active, la scène metal italienne reste assez méconnue en France. D’où un intérêt plus poussé lorsqu’arrive le second album des Romains de Shores Of Null; Black drapes of tomorrow offre une suite au « remarqué » Quiescence dont je n’ai pas connaissance. Mais on ne peux tout savoir… Ce nouvel album propose un mélange d’ambiances doom, heavy et extrême sur fond de double voix – une claire, une gutturale – qui évoque autant Black Sabbath que Amon Amarth. Ces derniers sont d’ailleurs très (trop?) présents tout au long de ces 11 titres qui débutent par une longue intro instrumentale (Tributary waters) avant que le groupe n’explorent divers horizons, s’en allant même visiter l’ouest américain (We ain’t ashes). Si l’ensemble est plaisant, séduisant, il manque toutefois ce quelque chose qui donnerait à Shores Of Null une véritable identité. Ici, l’empreinte d’Amon Amarth est presque omniprésente, influence flagrante sur The Kolyma route ou Tide against us par exemple. Ce Black drapes se laisse toutefois écouter, avec plaisir mais sans véritablement se démarquer.

Note: 6,5/10